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La VAE
Les employés d’officine non diplômés peuvent accéder à la formation de préparateur d’officine grâce à la valorisation des acquis de l’expérience (VAE). Mais celle-ci est un passeport pour le bac, pas pour le brevet professionnel qui nécessite ensuite deux années de formation.
Arlette retourne à l’école ce mois-ci. À cinquante-deux ans, elle entre en deuxième année de BP de préparatrice en pharmacie après avoir validé un bac pro commerce par la VAE. « J’ai demandé une VAE parce que ça ennuyait mes nouveaux employeurs de vérifier systématiquement ce que je faisais au comptoir. C’est d’ailleurs eux qui m’ont proposé de m’y présenter. Ils m’ont embauchée comme vendeuse en me rémunérant comme une préparatrice, parce que c’est la fonction que j’assume dans la réalité. »
Arlette obtiendra l’an prochain le diplôme qui lui permettra d’exercer légalement la fonction qu’elle assume depuis près de trente-cinq ans. « J’ai démarré dans le nord de la France, en 1971, et déjà au bout de trois ans je commençais à servir au comptoir. J’ai appris sur le tas. Dans un an, je pourrai faire les choses officiellement. » Cette employée d’une officine du Vaucluse bénéficie de la loi de modernisation sociale votée en janvier 2002, grâce à laquelle il est désormais possible d’obtenir un diplôme à partir de son expérience professionnelle. Enfin presque, car, comme le rappelle Michel Le Diréach, préparateur et secrétaire fédéral de la CFDT, « il n’y a pas de validation des acquis pour les préparateurs en pharmacie puisque ceux qui exercent en tant que tels sont théoriquement tous diplômés ».
Des milliers de « sans-diplôme ». Le Code de la santé publique réglemente en effet strictement la fonction, interdisant à tout préparateur d’exercer sans titre, et, pour le moins, à tout employé de pharmacie non diplômé de vendre des médicaments au comptoir. S’il en est ainsi dans le texte, il en est autrement sur le terrain, car, selon plusieurs sources, on estime entre 10 000 et 20 000 le nombre de personnes amenées à délivrer des médicaments au comptoir alors qu’elles ne sont pas diplômées. « En moyenne, cela représenterait environ une personne par officine », avance le directeur d’un CFA sous couvert d’anonymat.
Les salariés d’officine comme Arlette ont, le plus souvent, quitté l’école avec un niveau BEPC et ont commencé à travailler très tôt. Ils ont généralement entre trente et cinquante ans. Lorsqu’ils demandent une VAE, ils ne peuvent pas se prévaloir de leur expérience de préparateur mais valident une expérience du commerce au sens large, qu’ils ont acquise au sein d’une officine, pour obtenir un bac pro commerce. « Quand j’ai présenté mon dossier de VAE, c’était un peu tiré par les cheveux car je ne pouvais pas parler du travail que je faisais réellement en officine puisqu’on ne voulait pas entendre parler de médicaments. C’est sûr, je n’avais pas le droit d’en vendre. » La candidate a donc appuyé ses démonstrations sur son expérience de la parapharmacie : vente de produits hors médicaments, mise en rayon, bons de commandes, factures, gestion de stocks… C’est le bac pro commerce – qu’elle obtient en 2006 à l’âge de 51 ans – qui lui permet de se former, en deux ans, au brevet professionnel de préparateur d’officine.
L’engagement des CFA. Depuis deux ans, le CFA de Mont-Saint-Aignan, à Rouen, a mis en place un accompagnement au processus de la validation des acquis de l’expérience bac pro commerce pour des employés de pharmacie non diplômés ou ne possédant ni un CAP d’aide-préparateur d’avant 1977, ni la mention complémentaire. Cette année, sur un groupe de 25 élèves en première année de BP, 12 y ont accédé par la VAE. « L’année précédente nous en avions sept. Il y a une montée en puissance
et cela va continuer. Quand un pharmacien rachète une pharmacie par exemple, il se retrouve souvent avec des personnes non diplômées. Qu’en fait-il ?, s’interroge Denise Heudron, directrice du CFA de Mont-Saint-Aignan. Il est essentiel que toutes parviennent à se former. C’est important pour l’image de la profession, ça l’est aussi pour le développement de la pharmacie. » À Orléans, où un accompagnement à la VAE se met également en place cette année pour le bac pro com-merce,douze dossiers ont été déposés. Les candidats, des femmes pour la plupart, passeront devant le jury de VAE du rectorat au printemps prochain et entreront en formation BP de préparateur en septembre 2008.
Des officinaux à sensibiliser. C’est en effet au rectorat, auprès du dispositif académique de validation des acquis (DAVA), que les employés d’officine sans diplôme doivent entreprendre leurs démarches. Mais, là encore, l’organisation des sessions dépend des académies. Il y a par exemple une session permanente à Caen, mais deux par an à Rouen. Une directrice de CFA rassure : « Les centres de formation commencent à être sensibilisés. La fermeté de l’inspection y joue. Même si cela leur paraissait insurmontable au départ, les pharmaciens se montrent de plus en plus ouverts. C’est d’ailleurs souvent la nécessité qui fait loi. » Des titulaires s’activent, en effet, pour mobiliser leurs confrères. Si le faible nombre de candidats à la validation ou le manque d’information des salariés sont des obstacles à la popularité de la VAE, d’autres freins sont évoqués. Enseignante au CFA de Rouen, Christine Lemarignier constate : « Il y a des pharmaciens qui freinent des quatre fers et je ne comprends pas vraiment pourquoi. Ils ne sont pas perdants car, pendant la formation, ils bénéficient d’aides de différents organismes. En outre, permettre à un employé d’élargir ses connaissances et d’améliorer ses méthodes de travail c’est quand même un plus pour l’officine. » Cette pharmacienne, qui enseigne l’anatomie, la physiologie, la pa-thologie et la pharmacologie, reconnaît toutefois : « La formation s’adresse à des personnes qui n’ont pas le niveau au départ et qui ont arrêté tout travail scolaire, il y a très longtemps. C’est un engagement imposant, qui demande un gros effort sur un laps de temps trop court. Trois ans ce serait mieux. »
Certains acteurs de la formation estiment en outre le référentiel de 1997 dépassé. Pour les uns, l’enseignement pratique de la préparation n’a plus lieu d’être puisque rares sont les officines à préparer elles-mêmes des suppositoires, des gélules ou des crèmes. Pour d’autres, les efforts doivent se concentrer sur des questions pointues : « Il vaudrait mieux avoir des connaissances de base pour le BP et mettre par exemple l’accent sur des questions telles que la sortie de la réserve hospitalière qui implique une législation plus pointue et des compétences accrues », estime Vincent Duvallet, préparateur et formateur au CFA de Mont-Saint-Aignan.
Éviter des situations ubuesques. La plupart des salariés d’officine qui n’étaient pas retournés sur les bancs de l’école depuis quinze voire vingt ou trente ans ne regrettent pas les efforts que nécessite la formation du BP. « Pas pour une question de salaire, personne ne vous proposera de le réévaluer en fonction de votre ancienneté effective en tant que préparateur, confie un salarié sous couvert d’anonymat, mais parce que cela évite ces situations ubuesques où je suis censé passer la main à un diplômé même pour vendre une boîte d’aspirine au détail à un client à qui je viens de servir d’autres produits. » Ubuesque, peut-être, mais légal.
Obtenir le diplôme de BP a pour premier avantage de légaliser certaines pratiques en officine. Malgré tout, on peut se demander ce que vont devenir tous ces salariés qui n’auront ni le courage ni l’accompagnement nécessaire pour valider un bac afin d’entrer en formation pour deux années loin d’être faciles quand on a quitté l’école. Alors, pourquoi ne pas imaginer d’autres solutions ? « Il est possible d’accéder à certaines professions de santé par la VAE, par exemple pour les préparateurs hospitaliers, les aides-soignants, bientôt les infirmiers, mais pas pour les préparateurs en pharmacie », constate Michel Le Diréach.
Selon la CFDT, il faudra bien, un jour ou l’autre, inscrire la VAE pour ces derniers dans un dispositif officiel.;
Delphine Godefroy
Âge : 36 ans.
Entrée en officine : 1990.
VAE : 2005.
BP : 2007. Exerce à : la pharmacie du Bel Air, Neuville-lès-Dieppe (Seine-Maritime).
« Depuis 1990, je m’occupais de la vente, de l’agencement des rayons et des commandes. En 2004, mon nouvel employeur m’a proposé de faire une formation de préparatrice. Mais comme j’avais arrêté l’école en 3e, j’ai été obligée de passer par une VAE pour obtenir un bac et accéder au brevet de préparateur. J’ai du constituer deux dossiers dans lesquels je devais expliquer ma démarche, établir des liens entre les matières à présenter (mathématiques, histoire-géo, anglais…) et mon travail en pharmacie, passer devant un jury… Cela a représenté un an de travail. La chimie était ma bête noire, mais la pharmacologie, la microbiologie ou les préparations m’ont beaucoup intéressée. Côté organisation, c’est plutôt dur quand on a une vie de famille. J’ai eu la chance d’avoir un mari qui venait de passer lui aussi une VAE… »
Isabelle Bouelle
Âge : 45 ans
Entrée en officine : 1980.
VAE : 2006.
BP : débute sa deuxième année.
Exerce à : la pharmacie Lemarignier, Auffay (Seine-Maritime).
« Je suis dans la même pharmacie depuis 1980 où j’ai débuté comme vendeuse conditionneuse. Je prépare les commandes et je suis parfois au comptoir pour la vente au détail. J’assume depuis 10 ans les tâches administratives. J’ai présenté une VAE pour montrer que j’étais capable d’obtenir un diplôme. Je n’avais pas 16 ans quand j’ai commencé à travailler et me dire que je pouvais obtenir un diplôme sans être allée à l’école aussi longtemps que les plus jeunes a été difficile. Je ne m’étais même pas rendu compte que j’avais acquis de l’expérience au fil des années ! Quand j’ai obtenu mon bac pro, j’étais plutôt gênée. Mais si je l’ai eu c’est que des gens ont estimé que mon travail pouvait être reconnu. Je vois ce diplôme comme une récompense, pas comme une acquisition personnelle. Depuis son obtention, je comprends que je n’ai pas accumulé en vain ces longues années d’expérience. Dans un an, si je réussis mon BP, je pourrai délivrer les ordonnances. C’est une plus grande responsabilité car il ne faut pas faire d’erreur, mais je pourrai l’assumer en étant en règle. Cette VAE a été très dure mentalement. Je l’ai préparée en peu de temps, je me suis débrouillée toute seule avant de faire appel au GRETA. J’ai dû me remettre en question, récapituler tout ce que j’avais appris en 27 ans, détailler des tâches quotidiennes qui étaient devenues machinales. Cela n’a pas été évident. »
Christine Martello
Âge : 46 ans
Entrée en officine : 1977.
VAE : 2005.
BP : 2007.
Exerce à : la pharmacie Plusquellec, Le Petit-Quevilly (Seine-Maritime).
« J’ai toujours travaillé dans la même officine depuis trente ans où j’ai débuté comme vendeuse, conditionneuse à l’âge de 16 ans avant de venir au comptoir. J’avais entendu dire que l’on pouvait obtenir une VAE à partir d’un certain nombre d’années d’expérience, mais qu’il fallait se former ensuite pour devenir préparateur. J’ai entrepris les démarches en coordination avec mon employeur qui a recruté un préparateur pour me remplacer le temps de la formation, c’est-à-dire deux fois dix mois. Ma titulaire m’a toujours soutenue, elle ne m’a jamais demandé d’heures supplémentaires pendant la préparation de la VAE et pendant le BP. Elle m’autorisait même à réviser mes cours à la pharmacie, entre deux clients. Il y a eu beaucoup de matières à apprendre. L’anatomie, la botanique, la physiopathologie, la législation, la galénique m’étaient inconnues. Concilier les cours et la vie familiale n’a pas toujours été facile. Je culpabilisais vis-à-vis de mes deux plus jeunes enfants car j’étais peu disponible. J’ai été frustrée aussi car la fille de mon fils aîné, ma première petite-fille, est née le 27 juin dernier en plein examen ! Quant à mon mari, il s’occupait du ménage, du repassage. J’encourage tous les salariés à faire la même démarche, pour la satisfaction d’être diplômée et aussi pour la possibilité de négocier son salaire à la hausse. Maintenant que j’ai mon BP, j’aimerais me spécialiser en orthopédie ou en cosmétique. »
Reynald Haussoulier
Âge : 36 ans
Entrée en officine : 1986.
VAE : 2005.
BP : 2007.
Exerce à : la Pharmacie Petit, Aumale (Seine-Maritime).
« Je suis préparateur depuis juin 2007. Reçu en 1988 au CAP d’employé en pharmacie, j’ai raté la mention complémentaire au début des années 90 alors que c’était à l’époque la seule possibilité d’accéder au BP. Je n’ai plus pu la faire valider quand je l’ai souhaité quelques années après. On n’a pas toujours le courage nécessaire pour se remettre à étudier. Comme j’étais considéré et rémunéré comme un préparateur, j’ai longtemps pensé que ce n’était pas utile d’avoir le diplôme. En fait, ça l’est et c’est notamment indispensable pour des questions réglementaires. Je n’étais pas retourné à l’école depuis 17 ans. J’ai démarré ma VAE en 2004 et obtenu le bac pro commerce en mars 2005, puis intégré en septembre de la même année l’école de préparateur en pharmacie. 800 heures sur deux ans, c’est assez intensif ! Il a fallu se remettre à niveau dans des domaines que l’on n’étudie pas en CAP, notamment les matières scientifiques. J’avais la chance d’avoir un employeur qui m’a fait évoluer au cours de ma carrière et m’a soutenu dans toutes les démarches que j’ai entreprises pour obtenir mon BP. Il m’avait déjà confié pas mal de responsabilités au sein de l’officine, notamment la gestion du rayon orthopédie et maintien à domicile. »
En pratiqueQui est concerné par la VAE ?
Tout salarié d’officine :
– Non diplômé.
– N’ayant pas le CAP d’aide-préparateur d’avant 1977.
– N’ayant pas la mention complémentaire ou un bac.
Quel bac valider ?
– Un bac pro commerce.
– Un bac SMS, secrétariat …
À noter que le bac pro commerce est le plus souvent validé en raison des compétences commerciales acquises à l’officine.
Conditions à remplir ?
– Au minimum trois ans d’expérience professionnelle dans un domaine d’activité en rapport avec le diplôme visé.
– Être salarié d’une officine, ou l’avoir été dans les deux ans précédant la démarche de validation.
Où se renseigner ?
La VAE dépend de l’Éducation nationale. C’est une démarche individuelle à entreprendre auprès du rectorat, en s’adressant à la direction académique de validation des acquis (DAVA). Toutes les informations sont fournies par ce service ou par des dispositifs similaires lorsqu’il n’existe pas de DAVA au sein de l’académie concernée. Comment s’informer :
– au rectorat de son académie (auprès de la DAVA),
– au GRETA, numéro Indigo : 0 820 810 110.
Sites internet : (référentiels des diplômes), (liste des diplômes accessibles par la VAE)…
Les démarches à effectuer
– Faire une lettre de motivation.
– Constituer un dossier et remplir deux livrets :
Le livret 1, « administratif », permet de vérifier que le parcours du candidat (professionnel, associatif…) est bien en phase avec le référentiel du diplôme demandé.
Le livret 2 regroupe la description des activités en rapport avec les compétences requises par le diplôme. Le candidat doit pouvoir démontrer le lien qui existe entre les missions assumées au sein de l’officine et des matières comme le droit du commerce, l’économie, les mathématiques, l’histoire-géographie, les langues vivantes, les arts appliqués…
– Défendre son projet de VAE devant un jury ou sur dossier (selon les régions), après acceptation du dossier par la direction des examens et concours du rectorat.
Financement
VAE : variable (personnel, employeur, Fongecif).
BP après VAE : Fongecif ou OPCA-PL, dans le cadre d’un plan de formation de l’entreprise ou en congé individuel de formation. Pendant le temps de formation, le salarié perçoit une rémunération (versée par son employeur) égale à celle qu’il percevait à son poste de travail.
Accès via un DAEU
Le diplôme d’accès aux études universitaires (DAEU) est un autre moyen de s’inscrire au BP. Il se prépare en une année à l’université ou à distance. Avoir un niveau bac est recommandé mais d’autres profils sont possibles (se renseigner sur ou dans un CIO).
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