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La Covid-19 pèse sur le moral des préparateurs
L’association Soins aux professionnels de la santé (SPS) a évalué l’état physique et psychique des préparateurs dans le contexte de post-crise sanitaire de mars. Les préparateurs sont à plat, et plus que jamais en demande de reconnaissance.
Mesurer l’impact de la crise sanitaire de mars 2020 sur l’état physique et psychique des préparateurs. Tel était l’objet de l’enquête menée du 10 septembre au 10 octobre par l’association Soins aux professionnels de la santé (SPS), en collaboration avec Porphyre et l’Association nationale des préparateurs en pharmacie d’officine (ANPPO) (voir les différents encadrés).
Les résultats ont de quoi affoler. À l’issue du confinement, la quasi-totalité des préparateurs officinaux s’est sentie émotionnellement vidée par son travail et près d’un tiers souhaite changer de métier. Ces résultats reflètent les témoignages reçus en mars par Patrick Béguin, administrateur de la page Facebook « Le préparateur en pharmacie » et président de l’ANPPO (lire Porphyre N° 567, octobre 2020).
Vidés par la crise
La crise a exacerbé les tensions du métier. À plat, les préparateurs crient au manque de reconnaissance, menacent de quitter la profession et ont besoin de gérer leur stress.
Pendant l’épisode printanier de la Covid-19, 92,6 % des préparateurs se sont sentis émotionnellement vidés par leur travail au moins deux à trois fois par semaine. Près de la moitié d’entre eux avait ce sentiment chaque jour. « Les gens sont nerveux et agressifs. Des personnes toussent en mettant leur ordonnance devant leur bouche pour la tendre ensuite à mes collègues… La journée se passe comme ça, la pharmacie ne désemplit pas », se livrait Adeline, préparatrice, dans un mail adressé à Patrick Béguin à la veille du confinement. Une semaine plus tard, elle confiait rentrer chez elle « vidée, après onze heures à la pharmacie », et s’être mise à pleurer. Inquiétude des patients, peur de développer puis de véhiculer la maladie, surcharge de travail… Durant cette période, de nombreux préparateurs ont œuvré sans répit, tout en gérant l’angoisse, mais pour un tiers d’entre eux, la tâche la plus difficile a été de travailler sans bénéficier des protections adéquates, masque et autres.
Manque crucial de reconnaissance
La crise sanitaire a exacerbé les tensions qui secouent déjà le métier. Oubliés des discours des ministres, exclus des politiques de dotation en masques, les préparateurs se sont vus refuser l’accès aux services de garde d’enfants ouverts aux autres professionnels de santé. À l’issue de la crise, 62,2 % des préparateurs souffrent avant tout d’un manque de reconnaissance de la part des pouvoirs publics. Celui-ci ne date pas d’hier. Il dépasse le contexte de crise, prenant sa source à la formation. « À ce jour, il faut un bac pour accéder à la formation de préparateur en pharmacie, mais notre diplôme est du même niveau que le bac !, déplorait Stéphanie, préparatrice, dans un mail envoyé en mars à Patrick Béguin. Le BP n’est plus adapté à notre pratique aujourd’hui, tout comme le titre de “préparateur en pharmacie”. »
21,3 % des préparateurs se disent surtout touchés par le manque de visibilité de la profession dans les médias. Un fait qui sème l’ignorance et la confusion dans l’esprit du grand public : « Les patients ne font pas la différence entre un préparateur et un pharmacien au comptoir. Pour eux, ils exercent le même métier », soulignait Stéphanie.
Pour 60 % des préparateurs, l’acte de reconnaissance qui aurait le plus fort impact psychologique sur leur état émotionnel serait une revalorisation salariale. Viennent ensuite la reconnaissance du statut par les pouvoirs publics, citée par un tiers des répondants (36,3 %), la proposition par l’employeur d’une formation ou d’ateliers de méditation ou de gestion du stress (2,9 %). L’adhésion à un syndicat ou à une association arrive loin derrière (1,4 %).
Partir ou gérer l’angoisse
Après cette période intense, de quoi avezvous le plus besoin aujourd’hui ? Si 43,8 % des préparateurs souhaitent des congés, 30,5 % envisagent une reconversion. « Chez les infirmières, ce taux atteint les 40 % », souligne Catherine Cornibert, directrice des actions de communication de la SPS. Patrick Béguin s’étonne : « C’est quelque chose que l’on entend de plus en plus, mais je pensais qu’il s’agissait de jeunes sortant de la formation qui s’apercevaient que le métier n’était pas pour eux… Nous vivons une vraie crise ! » Oui, les professions de santé sont en crise. Au point de vouloir jeter l’éponge. Seule une minorité de préparateurs exprime plutôt le besoin d’échanger en équipe sur les situations vécues (16,2 %), d’être pris en charge (5,8 %) ou mis en arrêt de travail (3,6 %).
Questionnés sur la prise en charge la mieux adaptée à leur situation, les préparateurs plébiscitent l’option non médicamenteuse. 79,3 % choisiraient la méditation, la relaxation, l’hypnose, au détriment d’un soutien psychologique (16,2 %) ou médicamenteux (2,3 %).
Actions en vue
« Les résultats des enquêtes de la SPS offrent des premières pistes pour orienter nos futures actions de prévention et de soutien aux professionnels », pointe Catherine Cornibert. L’association dispense déjà des ateliers de découverte en thérapeutiques non médicamenteuses (mindfulness, hypnose, méditation…) auprès des salariés de structures de soins. Elle projette de les proposer de manière suivie, à ses adhérents, au sein de sa « maison des professionnels de la santé » en Île-de-France. « L’objectif est la gratuité. Nous lançons des demandes de subvention auprès de la région Île-de-France, de l’Assurance maladie et de l’Agence régionale de santé », rapporte Catherine Cornibert. Seule l’adhésion à la SPS resterait à la charge du professionnel, 30 € pour un préparateur.
La SPS souhaite aller plus loin. Elle a lancé, mardi 13 octobre, un appel aux représentants de certains professionnels, dont les préparateurs (syndicats, ordres, groupements, associations…), les invitant à la contacter. Le but est de « donner de la visibilité à ces professionnels, de faire connaître les dispositifs de la SPS pour les soutenir : assistance téléphonique, consultations, actions de prévention, hospitalisation…, et de monter, avec leurs représentants, d’autres dispositifs sur mesure. » La balle est dans le camp des professions de santé, déjà sur le qui-vive avec la seconde vague de la Covid-19 et la ruée sur les vaccins antigrippe. Protection adéquate, stratégies d’entreprise et soutien adapté devront primer pour ne pas revivre un printemps 2020.
Une vraie souffrance
L’ex-préparateur et enseignant Patrick Béguin est administrateur de la page Facebook « Le préparateur en pharmacie », qui compte 10 500 membres. En mars 2020, il invite les préparateurs à partager leurs difficultés. Devant l’ampleur des posts, il crée un courriel dédié à ces témoignages S.O.S. Pas moins de 180 messages de préparateurs en souffrance lui parviennent… Ils furent l’un des déclencheurs de la création de l’Association nationale des préparateurs en pharmacie d’officine (ANPPO), qui se fixe comme objectif principal de faire évoluer le métier, sa reconnaissance et sa formation.
L’enquête SPS-ANPPO-Porphyre
L’enquête sur l’état de santé physique et psychologique des préparatrices et préparateurs en pharmacie s’est déroulée en ligne du 10 septembre au 10 octobre. Les objectifs étaient de mesurer l’impact émotionnel des préparateurs au comptoir pendant la crise sanitaire, de révéler leur manque de reconnaissance par les différents acteurs et d’évaluer l’impact de l’état émotionnel sur leur état de santé afin de mieux répondre à leurs besoins et les accompagner. 3 514 y ont participé, dont 97,1 % titulaires d’un BP et 2,2 % en cours de formation. Plus de la moitié avaient entre 25 et 40 ans (56,1 %), 28,1 % entre 40 et 55 ans, 12,6 % moins de 25 ans et 3,2 % plus de 55 ans.
L’association SPS
Créée en novembre 2015 et reconnue d’intérêt général, l’association Soins aux professionnels de la santé (SPS) est une association nationale d’experts qui vient en aide aux professionnels de la santé en souffrance au travail et agit en prévention pour leur mieux-être. Plus d’infos sur le site www.asso-sps.fr
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