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Une femme de 48 ans débute un traitement pour dépression
Mme N., 48 ans, a perdu sa fille il y a 4 mois. Sous alprazolam depuis plusieurs semaines, elle se replie de plus en plus sur elle-même. Son généraliste ajoute un antidépresseur et diminue la benzodiazépine.
Ce que je dois savoir
Législation
La prescription d’une substance aux propriétés anxiolytiques, telle l’alprazolam, est limitée à 12 semaines, sevrage inclus, mais en pratique et à l’encontre des recommandations, le médecin peut prolonger cette durée, sous réserve d’évaluer régulièrement l’état du patient.
Contexte
C’est quoi ?
• Cette ordonnance prend en charge une dépression qui résulterait d’interactions complexes entre une vulnérabilité génétique, des modifications des systèmes de régulation du stress et des influences environnementales. Les événements de vie (divorce, problèmes professionnels ou financiers, deuil…) et les stress répétés (surmenage, manque de sommeil, perturbation des rythmes sociaux et biologiques), sont des facteurs précipitants.
• Un état dépressif peut être secondaire à certaines maladies ou médicaments : neuroleptiques, antiépileptiques, isotrétinoïne…
Quels signes cliniques ?
• Le diagnostic d’un épisode dépressif repose sur au moins quatre symptômes :
→ dont au moins deux parmi une baisse de l’humeur ; une perte d’intérêt ou de plaisir, un abattement ; une diminution de l’énergie ; une fatigabilité augmentée ;
→ et au moins deux autres tels que diminution de l’estime et de la confiance en soi ; concentration et attention réduites ; sentiment de culpabilité, d’inutilité ; perspectives négatives et pessimistes pour le futur ; idées et comportements suicidaires ; troubles du sommeil ; perte d’appétit.
• Ces symptômes sont présents presque tous les jours, depuis au moins deux semaines d’affilée, et induisent une souffrance psychique significative et une rupture nette dans le fonctionnement habituel. Selon leur nombre, leur intensité, et leurs répercussions, un épisode dépressif est dit léger, modéré ou sévère et, dans ce cas, les symptômes sont nombreux et perturbent nettement les activités professionnelles et sociales courantes ou les relations avec les autres.
• La complication principale est le risque suicidaire, ainsi que la désinsertion sur le plan familial, social et professionnel.
Quels traitements ?
• L’alliance thérapeutique avec le médecin et reconnaître avoir besoin d’aide sont indispensables.
• Le but est de soulager la souffrance et la tristesse, de diminuer les conséquences physiques, psychiques et relationnelles, ainsi que le risque suicidaire. Une aide psychologique suffit parfois à surmonter un épisode léger ou modéré. Les antidépresseurs, voire une hospitalisation, s’envisagent en cas de dépression sévère ou prolongée.
• Pour éviter les récidives, le traitement est poursuivi après la rémission des symptômes, au moins 6 mois à un an et parfois davantage.
Objectifs
• Remonter l’humeur de madame N., qui n’arrive plus à assumer sa vie quotidienne. La sertraline devrait restaurer le fonctionnement normal du sommeil, de l’appétit, l’aider à retrouver de l’initiative et une perception positive de la vie…
• Arrêter progressivement l’alprazolam qui, après quelques semaines, peut entraîner une accoutumance se traduisant par la nécessité d’augmenter les doses pour obtenir des effets suffisants, et une dépendance avec insomnie, anxiété, myalgies, irritabilité… à l’arrêt brutal.
Médicaments
Sertraline
Cet inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine augmente les concentrations de sérotonine intra-synaptique. Parmi les anomalies neurobiologiques associées à la dépression, il existe une baisse des neurotransmetteurs intervenant dans la régulation de l’humeur et de l’énergie : sérotonine, noradrénaline et dopamine.
Alprazolam
Cet anxiolytique de la famille des benzodiazé-pines, indiqué dans le traitement symptomatique des manifestations anxieuses, présente aussi une action sédative, myorelaxante, anticonvulsivante et hypnotique. Il agit sur des récepteurs couplés au GABA, acide gamma-aminobutyrique, neuromédiateur intervenant dans les mécanismes de l’inhibition nerveuse.
Repérer les difficultés
• L’amélioration de l’état survient souvent après 3 semaines, voire plus, et une réponse complète peut nécessiter 6 à 8 semaines. L’efficacité du traitement n’est d’ailleurs évaluée qu’au bout de 4 à 6 semaines.
• Attention au risque suicidaire élevé les premiers jours de prise de l’antidépresseur. Il résulte de la levée de l’inhibition psychomotrice alors que l’humeur n’est pas encore stabilisée. L’entourage doit soutenir le patient et, surtout, anticiper un risque de passage à l’acte suicidaire.
• Indiquer les effets indésirables fréquents à l’initiation, avant l’apparition des effets bénéfiques. Expliquer qu’ils sont le plus souvent transitoires.
• Attention aux interactions. Déconseiller le pamplemousse avec sertraline et alprazolam.
• Gérer la diminution progressive de l’alprazolam. Les benzodiazépines (BZD) sont indiquées notamment dans les manifestations anxieuses liées à un trouble de l’adaptation. Elles agissent sur les signes de réponse au stress développé après un évènement de vie difficile, ici un deuil. Les BZD sont efficaces sur une courte période en cas de retentissement important sur le fonctionnement quotidien et la qualité de vie, mais elles ne traitent pas les causes et sont responsables de nombreux effets indésirables(1) : troubles de la mémoire et du comportement, baisse de la vigilance et risque accru de chutes. En raison du risque de tolérance et de dépendance, elles perdent leur intérêt thérapeutique en cas de traitement prolongé.
Ce que je dis à la patiente
J’ouvre le dialogue
« Vous débutez ce traitement ? Que vous a dit le médecin ? », en restant neutre, laisse la patiente s’exprimer. « Vous a-t-il expliqué comment allait se dérouler le traitement ? » évalue les informations données et comprises sur le délai d’action, la durée du traitement et les effets indésirables.
J’explique le traitement
Mécanisme d’action
• La sertraline va augmenter les concentrations dans l’organisme d’un neurotransmetteur, la sérotonine, qui joue un rôle important sur l’humeur. Un neurotransmetteur est une molécule qui transmet les messages d’une cellule nerveuse à une autre.
• L’alprazolam agit via un neuromédiateur intervenant dans les mécanismes de l’inhibition nerveuse. Elle vise à calmer les angoisses et l’anxiété, mais son efficacité est de courte durée, ses effets indésirables au long cours sont gênants et elle ne traite pas les causes du mal-être. C’est pourquoi le médecin a décidé de la diminuer peu à peu, le temps que la sertraline agisse.
Mode d’administration
• Sertraline : une prise le matin ou le soir au repas pour augmenter la biodisponibilité.
• Alprazolam : un demi-comprimé le matin et un avant ou après les repas de midi et du soir.
Les effets indésirables
• Sertraline : nausées, diarrhées, sécheresse de la bouche, céphalées, agitation, insomnies… liées à la stimulation sérotoninergique au début.
• Alprazolam : céphalées, somnolence, vertiges, troubles de la mémoire, parfois irritabilité voire agressivité, confusion mentale.
J’accompagne
Observance
• La régularité des prises conditionne l’efficacité. Ne pas arrêter ou diminuer les doses soi-même.
• Prendre la sertraline en fin de repas pour limiter les nausées ; au dîner si vertiges ou somnolence, ou après le petit déjeuner si le sommeil est perturbé. Informer le médecin si ces effets sont très gênants.
Hygiène de vie
• Suggérer de poser la question de l’intérêt d’une psychothérapie à son médecin.
• Encourager, si cela est possible pour elle, un peu d’activité physique, efficace dans l’humeur.
Vente associée
Suggérez un produit « plaisir » pour renouer avec les sensations physiques, une crème pour le visage, une eau de Cologne…
(1) « Fiche mémo. Arrêt des benzodiazépines et médicaments apparentés : démarche du médecin traitant en ambulatoire », Haute autorité de santé, juin 2015.
Prescription
Dr G., médecin.
Mme Véronique N., 48 ans, 52 kg, 1,60 m.
• Sertraline 50 mg
Une gélule par jour pendant 1 mois.
• Alprazolam 0,5 mg
Réduire à 1/2 cp matin, 1 midi et 1 soir pendant 15 jours.
Prochain RDV dans une semaine.
Dico +
→ On parle de syndrome sérotoninergique en présence d’au moins 3 des signes suivants : confusion ou hypomanie, agitation, myoclonies, hyperréflexie, sudation, frissons, tremblements, diarrhée, incoordination, hyperthermie, ces trois signes coïncidant avec le début d’un traitement ou une augmentation récente des doses d’un médicament sérotoninergique et en l’absence d’autre cause expliquant ces signes.
(Source : La revue Prescrire, juin 2018.)
La patiente me demande
« Une amie m’a conseillé le griffonia pour me détendre. Qu’en pensez-vous ? »
Le griffonia, présent dans des compléments alimentaires à visée antistress, renferme du 5-hydroxytryptophane, acide aminé précurseur de la sérotonine. Je vous déconseille de l’utiliser en association à un traitement antidépresseur car vous prenez déjà de la sérotonine. Les cumuler vous expose à une sorte de surdosage appelé syndrome sérotoninergique (voir Dico+), rare mais grave.
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