- Accueil ›
- Préparateurs ›
- Délivrance ›
- Une femme avec deux boîtes de Subutex en suspens
Une femme avec deux boîtes de Subutex en suspens
Nadia, 36 ans, est depuis cinq ans sous Subutex, délivré boîte par boîte après accord commun avec l’officine. Elle n’a pas pris la totalité du traitement au terme des vingt-huit jours et réclame les deux dernières boîtes restantes une semaine plus tard.
Ce que je dois savoir
Législation
Prescription
La prescription de buprénorphine > 0,2 mg par voie orale, un médicament assimilé stupéfiant, est conforme à la législation : ordonnance sécurisée établie par tout médecin, posologie en toutes lettres, mention du nom du pharmacien ou de l’officine, durée de prescription maximale de vingt-huit jours. Ce n’est ni un renouvellement, interdit, ni un chevauchement, interdit sauf mention expresse du prescripteur.
Fractionnement
Sa délivrance doit être divisée en périodes de sept jours au maximum et la durée de traitement correspondant à chaque fraction doit être mentionnée sur l’ordonnance, comme c’est le cas ici, sauf mention expresse du prescripteur « Délivrance en une seule fois ». Le choix de la patiente d’une délivrance boîte par boîte est conforme à la réglementation. Une boîte contient sept comprimés, Madame R. en prend quatre par jour, elle revient donc à l’officine plusieurs fois par semaine pour avoir l’intégralité de son traitement hebdomadaire.
Contexte
C’est quoi ?
• Cette ordonnance comporte un traitement substitutif de la pharmacodépendance aux opiacés, ici l’héroïne, qui est le versant médicamenteux de la prise en charge, qui doit être à la fois médicale, sociale et psychologique.
• L’usage d’héroïne engendre une dépendance psychique et physique. Son arrêt brutal provoque des signes de manque : tachycardie, sensation de froid, transpiration, nausées, diarrhées, angoisse, irritabilité, douleurs musculaires…
• La buprénorphine est administrée à dose suffisante pour remplacer l’action de l’héroïne. Le but est d’accompagner le sevrage en limitant les symptômes de manque et le risque de rechute vers des conduites addictives à risques vital et psychosocial. Suivie depuis cinq ans, Madame R., après deux rechutes lors des trois premières années, semble stabilisée sous Subutex.
Objectifs
La posologie du Subutex, individualisée, est ajustée jusqu’à obtenir la dose minimale efficace individuelle (= d’entretien) poursuivie durant plusieurs mois, voire des années. La diminution des doses, voire l’arrêt du traitement par paliers très progressifs, est envisagée si le patient est volontaire et sur proposition médicale. Ici, Madame R. prenait un comprimé de 8 mg de buprénorphine par jour. En accord avec son médecin, elle passe à des comprimés à 2 mg dans l’optique d’une diminution prochaine, tout en conservant pour le moment la posologie de 8 mg par jour.
Médicaments
Buprénorphine haut dosage (Subutex)
• Cet agoniste antagoniste morphinique se fixe aux récepteurs cérébraux aux opiacés. Son activité dans le traitement de substitution est due à la liaison lentement réversible aux récepteurs de type µ, ce qui minimise de façon prolongée le besoin des patients dépendants aux opiacés.
• L’action agoniste partielle des récepteurs opiacés explique son effet inférieur à celui de l’héroïne, mais aussi le moindre risque de dépression respiratoire car sa marge thérapeutique est plus élevée, notamment par rapport à un agoniste pur comme la méthadone.
• La buprénorphine n’engendre pas d’effet de « défonce » et peu de phénomène de tolérance (besoin de plus pour retrouver le même effet).
Repérer les difficultés
Délivrance
L’officinal peut délivrer les deux boîtes de Subutex en suspens même si le délai avec la première délivrance dépasse vingt-huit jours car la buprénorphine > 0,2 mg par voie orale est un médicament de liste I « assimilé stupéfiant ». Il ne suit pas l’intégralité des dispositions de la réglementation des stupéfiants. En particulier, depuis l’arrêté du 9 mars 2012, il n’est plus soumis au délai de carence, c’est-à-dire la règle des trois jours suivant la date d’établissement de l’ordonnance ou la fin de la fraction précédente. En conséquence, la totalité du traitement peut être délivrée quelle que soit la date de présentation de l’ordonnance, sous réserve qu’elle soit valide ; ici, moins de trois mois car présence d’un produit de liste I. Quant au remboursement, il est possible pendant toute la durée de sa validité, soit trois mois pour une ordonnance « non renouvelable ».
Observance
Manifestement, Madame R. a décidé d’elle-même de diminuer sa dose de Subutex, ce qui peut signifier soit une envie de réduire son traitement, soit une consommation annexe d’opiacés illicites ou pas. Dans les deux cas, en parler rapidement au médecin est nécessaire. Après cette longue période d’entretien, la décision de réduire les doses doit être très prudente et prise avec le médecin. Le risque principal est un syndrome de manque et/ou une rechute par diminution trop rapide des doses.
Ce que je dis à la patientei
J’ouvre le dialogue
« Je vois que vous n’êtes pas venue depuis plusieurs jours et que vous n’avez pas pris l’intégralité de votre traitement pour le mois précédent. Comment vous sentez-vous ? » Madame R. confirme qu’elle se sentait très bien le mois dernier. Elle a décidé de passer à trois comprimés par jour « pour voir ce que ça donne ».
J’explique le traitement
Mécanisme d’action
→ La dose quotidienne a été déterminée parce que c’est celle qui vous convient afin que vous vous sentiez mieux sans l’aide d’autres produits.
→ Il est tout à fait possible de la réduire si vous êtes motivée, mais très progressivement en adaptant votre suivi médical et psychologique.
→ Si vous diminuez trop brutalement, vous risquez de rompre l’équilibre que vous avez mis des années à trouver. Vous pouvez ajouter : « Éviter la rechute est votre priorité, baisser les doses est possible mais secondaire, vous avez le temps ».
Horaires d’administration
• Subutex : une dose quotidienne, en une fois et par voie sublinguale, seule voie efficace et bien tolérée. Maintenir le ou les comprimés sous la langue jusqu’à dissolution complète en cinq à dix minutes en général, sans boire ni manger durant ce délai. Une prise le matin est préférable en cas d’effets excitants.
Effets indésirables
• Subutex : constipation, nausées, vomissements, somnolence, céphalées, vertiges, hypotension orthostatique, sueurs, insomnies, anxiété, excitation sont les plus fréquents. Plus rares, des cas de dépression respiratoire ont été observés, en particulier en association aux benzodiazépines.
J’accompagne
Surveillance
→ Madame R. doit revoir son médecin rapidement pour réévaluer son traitement. Elle doit surveiller tout signe de manque dû à la diminution non contrôlée des dernières doses : anxiété, irritabilité, troubles du sommeil, besoin d’avancer l’heure de la prochaine prise…
→ La réduction des doses réclame une motivation qui peut être soutenue par l’entourage familial ou social, les activités, les sorties… Ne pas hésiter à s’occuper la tête et les jambes en cas d’anxiété.
→ Éviter l’alcool et autres dépresseurs respiratoires peut limiter le risque de dépression respiratoire : benzodiazépines et apparentés, anti-histaminiques H1…
Hygiène de vie
→ Contre la constipation, penser à une alimentation riche en fibres : légumes verts, céréales…
→ Boire abondamment dans la journée.
→ En cas de transpiration excessive, dormir avec une serviette-éponge pour plus de confort et glisser dans son sac des lingettes nettoyantes/ déodorantes pour la journée.
Vente associée
La réduction des doses peut générer un stress, une irritation, voire des troubles du sommeil passagers. Proposer un produit de phytothérapie ou homéopathique (Euphytose, Sédatif PC…) pour prévenir ces désagréments.
Prescription
Ordonnance sécurisée
Dr T.
Généraliste
Nadia R. 36 ans, 57 kg, 1,69 m
• Subutex deux milligrammes
Quatre comprimés par jour pendant vingt-huit jours.
Délivrance pour sept jours maximum à la pharmacie X., 3 rue du Bois-Joli, 38000 Grenoble.
La patiente me demande
« Si je pars deux mois à l’étranger, vous me donnerez tout mon traitement ? »
Non. Si la Sécurité sociale prévoit dans certains cas une procédure dérogatoire de délivrance, cela ne concerne pas le Subutex, qui ne peut jamais être prescrit pour plus de vingt-huit jours. Par ailleurs, vous devrez obtenir une autorisation de transport du médicament délivrée par l’Agence régionale de santé si le pays se situe dans l’espace Schengen ou une attestation de transport de l’Agence nationale de sécurité du médicament si le voyage dure plus de vingt-huit jours dans les autres pays.
- Formation à la vaccination : pas de DPC pour les préparateurs en 2025
- [VIDÉO] De la grossesse à la naissance : un accompagnement en officine personnalisé proposé par Amandine Greco, préparatrice
- [VIDÉO] Accompagnement post-natal en officine : les papas aussi !
- Entretiens pharmaceutiques en oncologie : tous concernés !
- Coqueluche : « Les bénéfices de la vaccination pendant la grossesse sont incontestables »
- Rémunérations forfaitaires 2024 : il reste deux semaines pour déclarer vos indicateurs
- Quétiapine en rupture de stock : comment adapter la prise en charge des patients ?
- Les médecins étrangers veulent un contrat pérenne
- Amazon inaugure sa première parapharmacie physique à Milan : une tentative en douceur de capter le monopole ?
- Ménopause : qu’attendre des traitements laser contre la sécheresse vaginale ?
![Les dispositifs de série pour abduction des hanches du nourrisson](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2025/01/3-FrejkacoussindabductionAM-SB-074Kids-680x320.jpeg)