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Maria débute son sevrage tabagique

Publié le 28 septembre 2018
Par Anne-Gaëlle Harlaut
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Maria, 44 ans, a décidé d’arrêter de fumer. « Accro » depuis plus de 20 ans, elle a réduit sa consommation à une dizaine de cigarettes roulées par jour. Pour l’arrêt total, son médecin lui a prescrit des substituts nicotiniques.

Ce que je dois savoir

Législation

La prescription respecte la réglementation. Les substituts nicotiniques prescrits sont inscrits sur la liste des médicaments remboursables par l’Assurance maladie en 2018, et pris en charge à 65 %. La prescription sur une ordonnance à part et la facturation hors tiers payant, dans le cadre du forfait annuel de 150 euros par bénéficiaire, ne sont plus nécessaires. Ce forfait, voué à disparaître fin 2018, ne doit plus être appliqué pour les substituts remboursés.

Contexte

Les substituts nicotiniques sont recommandés en première intention dans la stratégie de l’aide à l’arrêt du tabac chez le fumeur qui désire réduire ou arrêter sa consommation, en complément d’un accompagnement individualisé. En 5 ans, Maria a essayé à 3 reprises d’arrêter seule, sans y parvenir plus d’un mois. Après l’hypnose et la cigarette électronique, elle essaie des substituts nicotiniques. Elle a consulté son médecin et opté pour un arrêt total. La date est fixée au début du week-end suivant, dans 3 jours.

Objectifs

• Soulager le syndrome de sevrage. Les substituts nicotiniques apportent la nicotine par voie orale ou transdermique sans la toxicité du tabac fumé. Ils peuvent aider les fumeurs à s’abstenir de fumer ou à réduire leur consommation en diminuant les symptômes de sevrage : nervosité, insomnie, difficultés de concentration, sentiment de frustration, dysphorie ou humeur dépressive… La prise de nicotine vise à désaccoutumer progressivement le fumeur.

• Agir sur des troubles anxieux. Anxiété, irritabilité, troubles du sommeil… sont fréquents, dans les 15 à 30 jours après l’arrêt du tabac. Un déficit en magnésium étant associé aux mêmes symptômes, le magnésium et la vitamine B6 visent à limiter ce risque en complément des substituts nicotiniques.

Médicaments

Nicotine (NicoretteSkin)

Cet alcaloïde principal des dérivés du tabac est un agoniste des récepteurs nicotiniques du système nerveux indiqué dans le traitement de la dépendance tabagique afin de soulager les signes du sevrage. La nicotine est délivrée lentement et régulièrement par voie transdermique à raison de 15 mg sur 16 heures, d’où l’avantage d’une nicotinémie – taux de nicotine dans le sang – relativement constante.

Nicotine (Nicotine EG)

Ici, la nicotine est liée à une résine échangeuse sous forme de gomme, libérée par mastication puis absorbée via la muqueuse buccale, d’où un délai d’action rapide de 2 à 3 minutes. La concentration plasmatique maximale est obtenue après 20 à 30 minutes d’utilisation. Le dosage à 2 mg libère environ 1,4 mg de nicotine. Ici, la gomme est utilisée en complément du patch pour affiner si besoin le dosage et lutter contre d’éventuelles envies de fumer.

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Magnésium et vitamine B6

Association d’un minéral, le magnésium, qui diminue l’excitabilité neuronale et la transmission neuromusculaire, et de pyridoxine ou vitamine B6, qui en optimise l’absorption. Indiquée pour pallier un éventuel déficit en magnésium à l’origine d’irritabilité, d’anxiété légère, de fatigue ou de troubles mineurs du sommeil.

Repérer les difficultés

• Un suivi dédié. Offrir un entretien dans une zone confidentielle. Proposer un suivi régulier, au moins chaque semaine au début.

• Modes d’administration. Insister sur les règles de prise pour optimiser l’efficacité et diminuer les effets indésirables.

• Signes de sur ou de sous-dosage. La dose prescrite peut nécessiter un ajustement dès la première semaine. L’expliquer à Maria.

• Aménager sa vie quotidienne pour mettre toutes les chances de son côté (voir plus loin).

Ce que je dis à la patiente

J’ouvre le dialogue

« Vous avez décidé d’arrêter de fumer. Je vous félicite, c’est une très bonne initiative pour votre santé » valorise et montre son soutien. « Quand avez-vous fixé la date de l’arrêt ? Vous avez déjà utilisé des substituts à la nicotine ? » adapte les conseils. « Si vous avez quelques minutes, je vous propose un entretien pour vous aider et expliquer le traitement. Que vous a dit le médecin ? » signe l’accompagnement. « Souhaitez-vous discuter de points en particulier ? » identifie d’éventuels freins qu’il faudra aider à lever.

J’explique le traitement

Mécanisme d’action

Patch et gomme apportent de la nicotine sans la toxicité du tabac. Elle permet de limiter ou supprimer certains signes ressentis à l’arrêt comme l’envie de fumer, l’anxiété, l’appétit ou les difficultés de sommeil. Le patch délivre en continu la nicotine sur la journée, et la gomme est une aide en cas d’envie persistante. Le dosage est conservé un mois au moins avant de diminuer par paliers à un rythme personnel. Le magnésium aide à lutter contre la nervosité, qui diminuera au fur et à mesure.

Mode d’administration

• NicoretteSkin : coller un patch au lever sur une peau propre et sèche, plane, la face externe du bras, la fesse ou l’omoplate. Changer de site chaque jour pour limiter le risque d’irritation. Ôter le film protecteur et presser avec la paume 10 secondes. Retirer le patch au coucher, le plier sur lui-même et le jeter. Ne pas le laisser à portée des enfants. On peut se laver avec si le jet d’eau n’est pas directement dirigé sur le dispositif.

• Nicotine EG : mâcher la gomme jusqu’à ce que le goût soit fort ou qu’un picotement apparaisse puis arrêter en la plaçant entre la joue et la gencive jusqu’à ce que le goût s’estompe. Recommencer à mâcher lentement en alternant de la même façon avec des pauses, durant 30 minutes environ. En prendre une selon ses envies de fumer, avec un délai d’1 à 2 heures entre deux prises et 6 maximum par jour. Ne pas manger ou boire, notamment acide comme le café, les jus de fruits, dans les 15 minutes avant la prise.

• Magnésium/Vitamine B6 : 2 comprimés matin, midi et soir avec un verre d’eau aux repas.

Effets indésirables

• NicoretteSkin : nausées, vomissements, palpitations, céphalées, étourdissements, insomnies. Ils sont aussi des signes de surdosage. Érythème, rash, urticaire, fréquents, sont limités en changeant chaque jour de site. Un picotement passager une heure après la pose est normal. Si la rougeur persiste, changer de marque ou arrêter.

• Nicorette EG : idem patch, toux, irritation de la bouche, hypersalivation. Hoquet, inconfort digestif…, souvent liés à une déglutition importante de nicotine, sont limités par une mastication lente.

J’accompagne

Se préparer

• Prévenir l’entourage. Un soutien et des encouragements sont toujours bénéfiques.

• Réorganiser sa vie quotidienne. Chacun fera comme bon lui semble : jeter briquet, cendrier, limiter les activités associées au tabac – café ou soirées – mais vivre comme d’habitude permet de tester de nouveaux comportements.

• Prévenir la prise de poids car les fumeurs sont souvent en sous-poids. Augmenter l’activité physique quotidienne, prévoir des repas équilibrés.

• Trouver du soutien si besoin auprès d’un tabacologue ou de Tabac Info Service (www.tabacinfo-service.fr, téléphone 3989, application…).

Réévaluer le dosage

Surveiller des signes de sur ou de sous-dosage. Si besoin, revoir le médecin.

Résister aux envies

• S’occuper. Respirer lentement, boire un verre d’eau, s’occuper… l’envie passe en général en quelques minutes. Si besoin, prendre une gomme sans attendre une envie trop forte, mais au-delà de 6/jour, réévaluer le dosage du patch.

• Fumer. Si l’envie est trop forte, fumer une cigarette sans enlever le patch. Si la consommation redevient régulière, arrêter les substituts.

• Réfléchir à ce que signifie « fumer ». « Quand est-ce que je prends une cigarette ? À quoi me sert-elle ? Est-ce que je fume parce que je m’ennuie ? » Ces interrogations permettent de mieux se connaître et d’envisager d’autres moyens de faire face à ses besoins que de fumer.

Vente associée

Un traitement complémentaire contre l’anxiété avec aubépine, passiflore, valériane… et une aide minceur si le risque de surpoids préoccupe.

Prescription

Dr R., médecin généraliste.

Madame Maria L., 44 ans, 67 kg, 1,65 m.

• NicoretteSkin 15 mg/16 heures 1 patch par jour.

• Nicotine EG menthe 2 mg sans sucre 1 gomme si envie de fumer, jusqu’à 6 par jour.

• Magnésium/ Vitamine B6 48 mg/ 5 mg (Magné-B6). 2 comprimés matin, midi et soir.

QSP un mois jusqu’à prochaine consultation.

À savoir : pour déterminer la dose initiale du substitut, on compte 1 mg de nicotine = 1 cigarette manufacturée et environ le double pour les cigarettes roulées plus « chargées » en nicotine, d’où le patch à 15 mg pour 10 cigarettes par jour.

Info +

→ La nicotine n’est pas l’unique facteur de la dépendance au tabac, mais certains fumeurs peuvent tirer parti de ses effets pharmacologiques avec une substitution. Comme elle augmente la glycémie, certains fumeurs hypoglycémiques pourraient mieux supporter la privation de tabac et avoir moins de fringales. La nicotine a une action stimulante centrale sur le cerveau. Elle entraîne aussi une chute du tonus musculaire d’origine médullaire, d’où son action relaxante ressentie.

Cependant, par son action centrale, la nicotine entretient anxiété et stress, qui tendent à s’atténuer à l’arrêt de la cigarette.

Source : www.formindep.org ; lettre au président de la HAS adressée le 27 juin 2012 par le professeur Robert MOLIMARD.

La patiente me demande

« Il reste à mon frère des patchs en 14 mg, je peux les finir ? » Tout dépend de leur marque. Quand vous serez équilibrée avec votre traitement, il est déconseillé de changer de marque de patch car tous ne sont pas forcément « bioéquivalents », c’est-à-dire qu’ils ne diffusent pas toujours la nicotine de la même façon. Vous risqueriez d’être sous-dosée ou surdosée et de ressentir à nouveau des effets gênants. Mieux ne vaut pas prendre ce risque.