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La facturation de l’aérosolthérapie

Publié le 1 novembre 2018
Par Nathalie Belin et Christine Julien
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La prise en charge du système de nébulisation et des produits utilisés est conditionnée à des règles strictes de prescription. Certains médicaments et appareils sont réservés à des médecins spécialistes.

Définition

Les systèmes de nébulisation, encore appelés appareils d’aérosolthérapie ou appareils aérosols, sont des dispositifs médicaux de classe IIa. Ils permettent de transformer un médicament ou un dispositif médical liquide en aérosol (voir lexique) qui sera inhalé par voie buccale ou nasale. L’objectif est d’amener au niveau du site pathologique visé – alvéoles pulmonaires, bronches, sinus, trompe d’Eustache – une concentration en produit relativement importante de façon rapide et ciblée, réduisant ainsi les effets indésirables systémiques.

Description des appareils

Un système de nébulisation est un dispositif comprenant toutes les parties nécessaires à la conversion d’un liquide en aérosol pour le rendre propre à l’inhalation (voir Porphyre n° 519, février 2016), à savoir l’appareil générateur, le nébuliseur/ chambre de nébulisation et le circuit de délivrance (tubulure) avec l’interface. À savoir : les appareils soniques et manosoniques sont des variantes d’appareil pneumatique.

• L’appareil générateur est la source d’énergie.

→ Pneumatique. La préparation est nébulisée sous l’effet d’un gaz comprimé produit par un compresseur. Les indications sont bronchopulmonaires et ORL. À savoir : le gaz peut être stocké sous pression dans une bouteille ou une prise murale à l’hôpital par exemple.

→ Ultrasoniques. Un élément piézo-électrique ou quartz génère une vibration à haute fréquence qui va être transmise au liquide d’où vont se détacher les particules formant l’aérosol. Les indications sont bronchopulmonaires.

→ À membrane ou tamis. Un boîtier d’alimentation électronique est raccordé au nébuliseur composé d’une membrane, ou tamis, percée d’une grande quantité de trous microscopiques (2 µm). Le passage du liquide médicamenteux à travers la membrane transforme le liquide en gouttelettes de la taille des orifices de la membrane.

Les indications sont bronchopulmonaires, notamment dans la mucoviscidose.

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• Le nébuliseur/chambre de nébulisation est le dispositif permettant de convertir un liquide en aérosol. Il se compose :

→ d’une cuve de nébulisation où l’on verse le médicament ;

→ d’une tubulure le reliant au générateur (elle est intégrée dans l’appareil des ultra-soniques et des tamis vibrants).

On y raccorde l’interface-patient.

• Le circuit de délivrance est la partie située entre le lieu de génération de l’aérosol (nébuliseur) et le patient. Il comprend une tubulure lisse ou cannelée, l’interface-patient. Il peut comporter des orifices d’entrée d’air, des valves empêchant la sortie de l’aérosol à l’extérieur, un filtre recueillant les particules exhalées…

• L’interface-patient est la partie du circuit de délivrance de l’aérosol directement en contact avec le patient : embout buccal, embout narinaire, masque bucco-nasal, raccord trachéal. L’interface dépend :

→ de la pathologie à traiter : embout buccal pour un dépôt trachéobronchique et nasal dans le traitement des rhinites et sinusites, embout narinaire pour la fonction manosonique dans le traitement des otites ;

→ du patient : modèle enfant/adulte, masque bucco-nasal en cas de difficulté à n’inspirer que par le nez ou par la bouche.

• Les fonctions annexes sont intégrées aux générateurs ou au circuit de délivrance :

→ la fonction sonique consiste à ajouter un son de 100 hertz en sortie du nébuliseur sur l’aérosol formé. Ce son met en mouvement des particules de 1 à 5 µm au sein de l’aérosol, modifiant leur trajectoire et facilitant leur diffusion dans les sinus, ce qui est intéressant dans les sinusites ;

→ la fonction manosonique : ajout d’une surpression manuelle réglable (15 à 50 mbar) à l’aérosol sonique. Cette surpression, appliquée automatiquement dans le nez au moment précis de la déglutition, se retrouve au niveau de l’ostium de la trompe auditive qui débouche dans les fosses nasales et assure le transfert de l’aérosol à travers cette trompe auditive, d’où l’usage dans le traitement des otites.

Le système de nébulisation se définit par un couple compresseur/nébuliseur pour les pneumatiques (Atomisor ABox+/Atomisor NL9M ; Pari Boy SX/ LC Sprint…) et nébuliseur-kit de nébulisation pour les ultrasoniques et les appareils à membrane.

Les produits à nébuliser(1)

• Médicaments et dispositif médical : 13 spécialités (12 principes actifs) ont l’AMM en aérosolthérapie à l’officine, 1 spécialité est à l’hôpital et 1 dispositif médical.

→ anti-agrégant plaquettaire : iloprost (Ventavis à l’hôpital) dans l’hypertension pulmonaire ;

→ anti-infectieux : colistine (Colimycine 1 MUI, Tadim), iséthionate de pentamidine (Pentacarinat), tobramycine (tobramycine pour nébulisation) ; aztréonam lysine (Cayston) ;

→ anti-inflammatoires : béclométasone (Beclospin), budésonide (Pulmicort), cromoglicate de sodium (Lomudal) ;

→ bronchodilatateurs : ipratropium bromure (Atrovent), salbutamol (Ventoline), terbutaline (Bricanyl) ;

→ décongestionnant : huile essentielle de niaouli (Goménol soluble) ;

→ enzyme mucolytique : dornase alfa (Pulmozyme) ;

→ désencombrement : chlorure de sodium à 7 % (Salitol). Salitol est un dispositif médical inscrit à la LPP indiqué dans le traitement par nébulisation de l’encombrement bronchique dans la mucoviscidose.

• Diluer ou pas. Le plus souvent, les médicaments ayant l’AMM pour la nébulisation sont prêts à l’emploi et ne nécessitent pas de dilution sauf précision de l’AMM. Dans ce cas, sont utilisés du sérum physiologique ou de l’eau pour préparation injectable, seulement pour la pentamidine. Dornase alfa et tobramycine ne doivent pas être dilués.

• Mélanger ou pas. En dehors de quelques mélanges validés par des publications scientifiques avec nébuliseur pneumatique (ipratropium, terbutaline, salbutamol, budésonide ; terbutaline, ipratropium, budésonide, cromoglycate), les produits sont nébulisés séparément. Dans les pneumatiques peuvent être mélangés les bronchodilatateurs entre eux et terbutaline (Bricanyl) avec ipratropium (Atrovent) et Pulmicort (budésonide). Les mélanges sont déconseillés dans les ultrasoniques et les appareils à tamis, ainsi que dans les pathologies rhinosinusiennes(2).

Législation

Généralités

• Seuls les médecins sont autorisés à prescrire des séances d’aérosolthérapie.

• La prise en charge par l’Assurance maladie est conditionnée par l’établissement de 2 ordonnances distinctes : l’une mentionne la location, voire l’achat, l’autre les produits à nébuliser.

Prescription des produits

• La prescription comporte, pour chaque médicament, la dose et le volume à administrer à chaque séance.

• Certains médicaments à nébuliser sont à prescription et/ou délivrance particulière :

→ prescription et renouvellement réservés aux pneumologues et pédiatres : ipratropium (Atrovent), salbutamol (Ventoline), terbutaline (Bricanyl) ;

→ prescription et renouvellement hospitalier par spécialistes et/ou services spécialisés en pneumologie ou en cardiologie : Ventavis ;

→ prescription initiale hospitalière valable 6 mois et renouvellement par tout prescripteur dans cet intervalle : Colimycine, Pulmozyme, Tadim, Tobi.

→ Les médicaments prescrits hors AMM ne sont pas pris en charge. Non adaptés à la nébulisation de par leur galénique, ils peuvent aussi renfermer des excipients potentiellement dangereux sous forme inhalée (sulfites…). Leur délivrance engage la responsabilité du pharmacien.

→ Si toutes les spécialités prescrites sont hors AMM, ni ces spécialités, ni la location de l’appareil ne sont remboursées.

→ Si certaines spécialités sont hors AMM, seules celles ayant une AMM pour la nébulisation sont remboursées, ainsi que l’appareil.

• Parmi les 13 médicaments en ville, 11 sont pris en charge à 65 ou 30 % : Atrovent (ipratropium bromure), Béclospin dans le traitement de l’asthme de l’enfant entre 6 et 11 ans, Bricanyl (terbutaline), Caysten (aztréonam), Colimycine et Tadim (colistiméthate sodique), Pentacarinat (pentamidine), Pulmicort (budésonide), Pulmozyme (dornase alfa), Tobi (tobramycine), Ventoline (salbutamol).

• 3 ne sont pas remboursables par l’Assurance maladie : Béclospin chez l’adulte et l’enfant de moins de 5 ans et de plus de 12 ans, Goménol et Lomudal.

• Ventavis est pris en charge à 100 %, et Salitol à 60 % car c’est un dispositif médical.

Prescription du matériel

• La prescription d’un appareil manosonique doit émaner d’un pédiatre ou d’un spécialiste en oto-rhino-laryngologie pour donner lieu au remboursement.

• Le système de nébulisation. L’ordonnance doit comporter le type d’appareil souhaité (pneumatique simple ou sonique voire manosonique, ultrasonique, à tamis), la durée de la location et le type d’interface. Dans tous les cas, vérifier sur la prescription, l’adéquation :

→ entre le type d’appareil et l’indication : sinusite, otite, affection bronchopulmonaire ;

→ entre l’appareil et les médicaments : certaines AMM précisent le type d’appareil à utiliser.

Exemple : Pari Turbo BOY N + LC Plus pour Tobi. Le pneumatique est compatible avec toutes les solutions médicamenteuses disposant d’une AMM pour la nébulisation, y compris en mélange ; l’ultrasonique est incompatible avec une suspension (budésonide), un produit huileux ou visqueux (pentamidine) ou thermolabile (dornase alfa)…

→ entre le compresseur et le nébuliseur car certains ne sont pas compatibles et chaque appareil d’aérosolthérapie se définit par un couple générateur d’aérosol/nébuliseur.

Inscription à la LPP

• Les couples générateurs-nébuliseurs sont inscrits à la liste des produits et prestations (LPP) sous nom de marque par arrêté du 6 août 2001 car ils doivent « faire l’objet d’un contrôle approfondi, notamment en ce qui concerne la compatibilité des différentes parties du dispositif entre elles et avec les produits administrés ».

• Excepté l’appareil à tamis Velox, les autres systèmes ne sont pas codés. Pour les tarifier, consulter la version PDF de la LPP sur ameli.fr, « Professionnels de santé », « Pharmacien », « Exercice professionnel », « Facturation et rémunération », « Bases de codage » (http://urlz.fr/7X04). Pour Velox, consulter la LPP classique, Titre I, chapitre 1, section 1, sous-section 1.

Prise en charge à la LPP

Les générateurs sont proposés à la location, (voir plus loin), à l’exception des consommables nécessaires à la réalisation de la nébulisation qui sont à patient unique : nébuliseur, tubulure et interface ; les tarifs sont des prix limite de vente, donc pas de dépassement.

• Se distinguent les couples d’aérosols et nébuliseurs pris en charge sans conditions particulières, et ceux réservés pour le traitement d’affections respiratoires, dans le cadre de certains forfaits ou encore dans le traitement de la mucoviscidose.

• Il existe différents forfaits de location selon le type de générateur et la durée de la location (≤ 4 semaines ou au-delà).

• Il y a aussi des tarifs à l’achat pour les appareils à tamis. Ainsi il existe un tarif LPP, par exemple, pour l’achat semestriel des nébuliseurs Velox et eFlow Rapid (Pari).

• Les consommables (nébuliseurs, tubulures, interfaces) sont délivrés à l’achat pour un patient donné.

• Le masque est renouvelable en cas de location de longue durée sur la base d’une prise en charge toutes les 4 semaines, sauf dans le cas d’un appareil manosonique pour lequel le consommable (tubulures, nébuliseur, embout narinaire) n’est pas renouvelable.

(1) Bonnes pratiques de l’aérosolthérapie par nébulisation, recommandations des experts du groupe aérosolthérapie (GAT) de la Société de pneumologie de langue française, 2007.

(2) Société Française d’oto-rhino-laryngologie et chirurgie de la face et du cou, 2014.

Lexique

→ Un aérosol est un ensemble de particules solides ou liquides dont le diamètre est suffisamment petit pour rester en suspension dans un gaz (oxygène) ou dans l’air (taille de 100 µm maximum).

→ La nébulisation est la transformation d’un liquide en aérosol.

Médicaments hors AMM en nébulisation mais…

→ La nébulisation en rhinologie a fait l’objet de recommandations par une société savante(2). Budésonide, béclométhasone, tobramycine et colimycine sont recommandés pour traiter des rhinosinusistes oedémato-purulentes et subaiguës, des exacerbations de rhinosinusites chroniques, des suppurations sinusiennes post-opératoires persistantes, à raison de deux nébulisations par jour durant 7 jours.

→ Autres médicaments reconnus efficaces mais sans AMM : épinéphrine (Adrénaline Aguettant), hydrocortisone, acétylcystéine (Mucomystendo), tobramycine (Nebcine), gentamycine (Gentamicine Panpharma), amikacine (Amiklin), lincomycine (Lincocine), ceftazidime (Fortum).

Mémento de la délivrance

→ Prescription distincte pour le matériel et les médicaments à nébuliser.

→ Vérifier l’adéquation entre matériel/interface prescrits et indication du traitement (ORL ou bronchopulmonaire)/patient (enfant/adulte, capacité à inspirer uniquement par la bouche).

→ La prescription de l’appareillage doit préciser « durée de la location », le type d’appareil, les consommables dont l’interface-patient.

→ La prescription médicamenteuse indique le nom et la dose de médicament pour chaque séance, le nombre de séances et de jours, et, si besoin, la dilution et le volume.

→ Pas de dépassement à faire payer au patient.