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“Je voudrais un antimoustique”

Publié le 4 juin 2013
Par Nathalie Belin
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1 Je questionne

Évaluez les risques

Le principal est celui de contracter une maladie grave dans le cas d’un séjour dans une zone tropicale : « Partez-vous à l’étranger ? », « À quel endroit ? ».

Précisez la demande

« À qui est destiné le répulsif ? ». Selon le cas : « Êtes-vous enceinte/asthmatique ? », « Quel âge a l’enfant ? ».

2 J’évalue

La délivrance d’un répulsif cutané relève du conseil officinal, pour le confort ou en prévention de la transmission d’un agent pathogène.

3 Je passe en revue

Les substances actives

Quatre molécules sont recommandées par la Société de médecine des voyages dans le cadre de la prévention contre les maladies à transmission vectorielle. Elles font l’objet d’une évaluation de leur innocuité et de leur efficacité dans le cadre de la directive européenne Biocides.

→ DEET (ou diéthyltoluamide) : répulsif le plus anciennement employé (années 1940) et le mieux évalué. Effets indésirables : irritations cutanées et oculaires, parfois allergies ; les effets neurologiques graves (confusions, convulsions…) sont surtout le fait de mésusages (applications prolongées et/ou sur une grande surface). Inconvénients : odeur désagréable, consistance huileuse, détériore fibres synthétiques, cuir et plastique (montre…).

→ Picaridine ou icaridine (KBR3023) : recul d’utilisation moindre que le DEET (années 1990) mais efficacité qui semble similaire vis-à-vis des anophèles femelles. Effets indésirables : réactions cutanées et oculaires, céphalées, nausées, vomissements et vertiges. Inconvénients : par prudence, l’emploi plus d’un mois d’affilée est déconseillé ; à faible dose, effet attractif sur les moustiques ; contre-indiqué chez les moins de 2 ans.

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→ IR3535 ou éthyl-butyl-acétyl-aminopropionate (Ebaap) : utilisé depuis 1970, bonne tolérance. Effets indésirables : rares Inconvénient : moindre durée de protection que les précédentes.

→ PMDRBO, p-menthane 3,8-diol Rich Botanic Oil ou PMD, marque déposée Citriodiol : terpène, proche du menthol, analogue synthétique d’un dérivé de l’eucalyptus Corymbia citriodora. Recul d’utilisation faible. Effets indésirables : pas ou peu de données chez l’homme (toxicité aiguë faible par voies orale et cutanée chez l’animal).

→ Autres : en raison d’une durée de protection « absolue » très courte – moins de 10 à 20 minutes –, les huiles essentielles ne sont pas des outils de protection antivectorielle et ne doivent pas être employées en zone à risque. De plus, elles sont potentiellement allergisantes et photosensibilisantes. Certaines – géraniol et lavande – sont en cours de révision dans la directive Biocides européenne. D’autres – citronnelle ou Eucalyptus globulus – ne sont plus reconnues comme substances actives par cette directive et ne devraient plus être vendues en tant que « répulsifs ». Vitamine B1, ultrasons, bracelets ou patchs antimoustiques avec huiles essentielles n’ont, eux, pas d’efficacité répulsive démontrée.

4 Je choisis

En fonction du risque

→ Dans les zones à risque de transmission d’une maladie vectorielle. DEET, picaridine, IR3535 ou PMDRBO à concentration suffisante (protection d’au moins 4 heures sur les anophèles femelles et plus pour Aedes et Culex, voir tableau). Il peut être logique de se tourner vers les plus concentrés pour augmenter la durée de protection, en respectant les limites d’âge. En pratique, le DEET est privilégié.

→ Hors risque de transmission d’un agent pathogène. L’ANSM recommande de privilégier l’IR3535 chez les jeunes et les femmes enceintes. Il est aussi possible de proposer des formules renfermant les plus basses concentrations en substance active. Vérifier les limites d’âge des fabricants car certains composants sont contre-indiqués chez le jeune enfant.

Chez le nourrisson et lors de la grossesse, privilégier les mesures physiques : moustiquaires imprégnées, limitation des périodes d’exposition en fin de journée…

Selon la galénique

→ Spray : pratique. Ne pas pulvériser directement près du visage (irritations des yeux), mais sur les mains, ou préférer une crème. À éviter en cas de pathologie pulmonaire (asthme…).

→ Crème ou lait : moindre risque d’ingestion accidentelle chez l’enfant.

5 J’explique

Les répulsifs diminuent le risque de piqûre, mais ne le suppriment pas. En zone à risque de transmission d’une maladie vectorielle, les associer aux autres moyens de protection : moustiquaire imprégnée, diffuseurs d’insecticides dans la maison, fumigènes à l’extérieur…

6 Je conseille

Pour appliquer

→ Où ? Sur les zones découvertes (inutile sous les vêtements), sur une peau saine, loin des yeux et des muqueuses.

→ Quand ? En fin d’après-midi vis-à-vis des moustiques vecteurs de la dengue et du chikungunya, avant la tombée de la nuit pour Anophèles et Culex.

→ Comment ? La durée de protection dépend de la concentration et de paramètres extérieurs : température, humidité, sudation, frottement des vêtements. Si nécessaire, réitérer les applications selon recommandations du fabricant. Bien faire pénétrer et se laver les mains après. Les solaires diminuent l’efficacité des répulsifs et inversement. Appliquer le répulsif au moins 20 minutes après le solaire.

→ Quelles précautions ? Aucun répulsif n’est efficace en cas de baignade. Laisser hors de portée des enfants pour éviter une ingestion accidentelle.

Agir sur l’environnement

Éliminer les eaux stagnantes près des maisons pour se protéger du moustique-tigre dans les régions concernées : vider les soucoupes des pots de fleurs, couvrir les collecteurs d’eau de pluie… Et utiliser répulsifs et moustiquaires imprégnées.

Y penser

Les malades et les cas suspects de dengue ou de chikungunya doivent se protéger des piqûres pendant sept jours, au minimum, après le début des symptômes pour éviter de transmettre le virus à un moustique « sain ».

Le contexte

– Plusieurs maladies sont transmises par des piqûres de moustiques, principalement en zones tropicales. Le paludisme, dû à un parasite du genre Plasmodium, est transmis par l’anophèle femelle, qui pique surtout au crépuscule et la nuit ; le chikungunya, la dengue et la fièvre jaune (vaccin disponible), dus à des virus, sont transmis par des moustiques du genre Aedes qui piquent au cours de la journée ; la fièvre à virus West Nile ou du Nil occidental, due à un virus, est transmise par des moustiques du genre Culex qui piquent au crépuscule et la nuit.

– Depuis 2004, le moustique-tigre (Aedes albopictus), vecteur du chikungunya et de la dengue, est présent dans le Sud de la France (période d’activité de mai à novembre), d’où la surveillance notamment par les Ententes interdépartementales pour la démoustication (EID). Dans les départements où ce moustique est déclaré présent, les médecins et les biologistes doivent déclarer aux Agences régionales de santé (ARS) tout cas suspect. En France, les quelques cas de dengue et de chikungunya recensés (4 cas autochtones en 2010) restent isolés grâce à cette surveillance. En savoir plus : « Moustiques, tiques… pourquoi, comment, bien se protéger ? » sur www.medecine-voyages.fr

→ Renseignements/ressources ; dépliants sur Aedes albopictus sur www.sante.gouv.fr.