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Oh non, pas lui ! Tu le sers ?
Gérer les têtes qui ne nous reviennent pas. Analyser puis « déconstruire » ses émotions négatives permet d’adoucir sa réaction, face au patient ou à un collègue qui nous « répulse ».
Quelques dégâts
Que celui qui n’a jamais prolongé une délivrance pour ne pas servir le client suivant lève la main ! Vivre dans l’environnement professionnel ou social d’une ou plusieurs têtes qui ne nous reviennent pas expose à des situations tendues, tels des échanges désagréables dans lesquels l’agressivité n’est pas toujours du côté que l’on imagine, un mauvais accueil du patient avec une image de l’officine ternie, des situations d’évitement à risque de malentendus… Bref, plutôt que d’esquiver, mieux vaut essayer de comprendre !
Pourquoi cette répulsion ?
Un réflexe épidermique
C’est à peine si on le connaît ou si on a échangé trois mots avec lui, mais la sensation de répulsion envers un interlocuteur est parfois immédiate. Loin d’être réfléchie, elle est de l’ordre du réflexe, quasi physique : « Je ne peux pas le sentir », « Il me sort par les trous de nez »… Jusqu’à l’énervement parfois, le cœur accélérant et les muscles se raidissant La réaction est épidermique, incontrôlable. Elle évoque, d’un point de vue comportemental, la salivation des chiens de Pavlov, déclenchée par le tintement d’une clochette (voir encadré).
Des déclencheurs multiples
Quels « tintements de clochette » peuvent nous « agresser » au point de détester d’emblée une personne ? Ce sont souvent des détails. Une façon de s’exprimer, une intonation, un vocabulaire, un volume sonore, une manière de bouger, un manque de contact oculaire ou un contact agressif, un parfum, agréable ou non, cela n’entre pas en ligne de compte.
Du stimulus à l’émotion
« Ce type de réaction est le résultat d’un automatisme inconscient appelé ‘‘ancrage’’ », explique Aurélie Charles-Godart, psychothérapeute certifiée en programmation neuro-linguistique (PNL). Au cours de notre vie, notamment dans l’enfance, nous associons des stimuli à des émotions. Dans sa version positive, une sensation agréable au parfum d’un gâteau, un souvenir joyeux à une chanson… La version négative existe aussi, comme le parfum du clou de girofle qui peut rappeler les soins dentaires… « Dès que notre inconscient repère un stimulus qui l’a marqué, il fait émerger l’émotion associée ».
Analyser son émotion
« Si nous ne pouvons pas agir sur nos émotions, admet Sylvaine Pascual, coach spécialiste de la relation professionnelle chez Ithaque Coaching, nous pouvons faire l’effort de déconstruction de notre réflexe ». Comment faire ?
Cherchez le stimulus
Parfois, il est évident, facilement identifiable. Une patiente porte le parfum de notre tante détestée, un autre a la même intonation que notre pire professeur de lycée… À leur contact, notre inconscient isole l’odeur ou le son et fait remonter nos émotions négatives. D’autres fois, il n’y a pas de lien évident : « Sa façon de se tenir m’horripile, pourtant je ne connais personne qui le fait de cette manière… »
Raisonnez-vous !
→ Quand le stimulus est évident, c’est assez facile. « Le parfum ne fait pas le moine ! », « Le lycée, c’est fini depuis longtemps »… Une fois identifiée, la raison de notre répulsion est remise à sa place.
→ Lorsque le lien n’est pas établi, inutile de se creuser la cervelle, l’inconscient est parfois impénétrable ! L’essentiel est de reconnaître que notre réaction épidermique est « psychologique ». Se répéter alors comme un mantra : « Cette personne n’est pas directement responsable des émotions qui m’assaillent », « Cette personne n’est pas directement responsable des émotions qui m’assaillent »…
Déculpabilisez, mais pas trop
« Comprendre les mécanismes en cause déculpabilise. La bienveillance envers nous-même est de mise », explique Sylvaine Pascual. Mais bienveillance n’est pas complaisance ». Nous avons le droit de ressentir ces émotions négatives, mais pas – toujours – celui de les exprimer, en particulier dans le milieu professionnel.
Maîtriser sa réaction
Développez le « pro-social »
Pour rester tolérant en toute occasion, mieux vaut travailler en amont sur la façon d’interagir au quotidien. « Il faut prendre l’habitude d’avoir un comportement pro-social avec tous nos interlocuteurs. », conseille Sylvaine Pascual. Être volontairement accueillant, rassurant, souriant… Et s’entraîner au quotidien, le meilleur terrain d’exercice. Échanger quelques mots avec cette caissière revêche, sourire aux livreurs, porter le sac d’une dame… « Lorsque le pli est pris, cette façon de communiquer, en parole mais surtout dans l’attitude, ne nous coûte plus. Nous sommes armés pour nous comporter de façon adaptée en toute circonstance en passant outre nos émotions négatives ».
Prenez du recul
« Interdit de réagir en fonction de notre ressenti ! Les stimuli que je repère, c’est moi qui les vois. La personne ne sait pas qu’ils me blessent », analyse la coach. Pour ne pas se laisser envahir par les émotions, s’éloigner quelques secondes si possible et se rappeler que la répulsion immédiate n’est qu’un « intrus » dans la relation. Pas question de coller une étiquette sur l’interlocuteur. « Mon a priori ne me dit rien sur ce qu’est réellement cette personne », rappelle Sylvaine Pascual.
Dé-focalisez
→ Haro sur la répulsion. La réaction émotionnelle réduit un interlocuteur au détail qui nous titille, c’est dommage. Il a sans doute des atouts qui nous seraient agréables et détectables. Un humour fin, une courtoisie à toute épreuve, un style, un sourire finalement charmant… à condition d’arrêter de focaliser sur sa répulsion.
→ Cherchez le truc en plus. Pour ne pas laisser son inconscient régner, essayer de trouver un ou deux « bons points » de cette personne et déplacer son attention vers eux. Les émotions retrouvent un équilibre, propice à un échange serein.
Si impossible, évitez
« J’ai beau essayer, Monsieur Y ne me revient pas ». Particulièrement intéressante quand il s’agit d’un patient régulier, une solution consiste à éviter le contact. La stratégie implique le reste de l’équipe. À charge de revanche, vos collègues peuvent s’engager à gérer votre aversion : « Monsieur Y, je vais prendre votre ordonnance, mon collègue est occupé ». Un patient insupporte rarement toute l’équipe. Sinon, c’est un « patient difficile » qui dépasse le cadre de la répulsion immédiate. Conseil : indiquez à vos collègues, avec quelques explications si besoin, pourquoi vous avez du mal à servir telle personne.
Aïe, c’est mon collègue…
Pour gérer un collègue « qui ne nous revient pas », mieux vaut une réflexion profonde pour modifier son comportement sur la durée et éviter les conflits.
Motus !
Premier réflexe, évitez de parler de sa répulsion à ses autres collègues. Puisque le problème n’est pas causé volontairement par cette personne, inutile d’en faire la publicité, au risque de passer pour médisant et de brouiller davantage encore les bases d’une relation difficile.
Pratiquer l’empathie
→ Repérer. Commencez par essayer de repérer le stimulus qui vous fait sur-réagir : une façon de s’exprimer, un excès de dynamisme, une manie de rangement…
→ Analyser. Avant d’être totalement bloqué dans la répulsion, forcez-vous à discuter de sujets neutres avec cette personne pour sonder son fonctionnement. Qu’est-ce qui la motive ? Pourquoi ce comportement ? D’où vient ce rictus continuel ? On peut vite réaliser qu’un air hautain cache une timidité, un excès de dynamisme des difficultés personnelles, un rictus un sourire mal assuré… L’empathie enraye souvent les émotions négatives. Notre conseil : ne prenez jamais une attitude contre vous.
Remise en question
Qu’est-ce que cette répulsion nous renvoie vraiment ? « Peut-être une image infantilisante, comme devant l’un de nos profs ? Un goût de la compétition que, déjà ado, nous fuyions comme la peste ? », interroge Aurélie Charles-Godart. Dans certains cas, notre agacement est causé par des détails qui dérangent nos valeurs. « Ma collègue s’habille trop court, je ne supporte pas sa façon de blaguer au comptoir… » « Mais de quoi je me mêle ?, s’amuse Sylvaine Pascual. Cela mérite une petite introspection, qu’est-ce que ça vient déranger chez moi ? » Ne serait-on pas agacé par un comportement qu’on envie sans se le permettre ? Cela appelle-t-il un conflit si ce n’est finalement avec… soi-même ?
Médiation
→ Limiter les rencontres. Quand malgré tout l’agacement prend le dessus, l’idéal est de limiter les interactions dans la mesure du possible : emplois du temps décalés, zones de travail éloignées…
→ Argumenter. Demandez une médiation du titulaire mais attention de ne pas dénigrer votre collègue. Développez des motifs d’ordre relationnel : « Serait-il possible d’échanger avec Laura les jours de présence pour ne pas travailler en même temps que Sarah car j’ai constaté que nous ne sommes pas compatibles de caractère s’il vous plaît ? » Évitez de juger ou d’évaluer le travail de l’autre (« Elle ne fait pas ça comme il faut… ») pour être entendu sans décrédibiliser votre demande. Il est probable que votre perception subjective de la personne ne soit pas partagée par le reste de l’équipe…
Merci à Aurélie Charles-Godart, psychothérapeute, et à Sylvaine Pascual, coach spécialiste de la relation professionnelle chez Ithaque Coaching.
Pavlov et la clochette
• À la fin du XIXe siècle, Ivan Pavlov, un chercheur russe, a prouvé que l’apprentissage pouvait produire des effets complètement involontaires et inconscients en réponse à un signal dans l’environnement(1). Lorsqu’on met de la poudre de viande dans la gueule d’un chien, celui-ci salive. Ce réflexe naturel, inné, vise à lubrifier les aliments et faciliter la mastication. Pendant quelque temps, juste avant de mettre la poudre dans la gueule, Pavlov agitait une clochette, toujours la même. Après un certain nombre de répétitions, le chien salivait dès qu’il entendait la clochette. La répétition avait fait apprendre au cerveau du chien que la viande allait arriver et qu’il fallait produire de la salive. Le son de la clochette était le signal.
(1) Petit manuel de la défume, Robert Molimard.
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