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« Je veux monter en gamme »

Publié le 28 février 2017
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Demander de nouvelles responsabilités. Vous rêvez de voir élargi le périmètre de vos missions ? Il suffit souvent de vous manifester… Nos conseils pour bien mener sa barque.

C’est tout bénéf !

Trois ans déjà que vous avez intégré cette officine et vous vous sentez à l’étroit dans la gestion de la compression ou de la gamme Avène/Bioderma ? Pourquoi ne pas viser l’ensemble du matériel médical ou de la dermo ? Acquérir plus de responsabilités est un projet gagnant à deux niveaux.

→ Sur le plan personnel : (re) motivation, reconnaissance au travail et meilleure estime de soi, gain de connaissances et d’autonomie et, pourquoi pas, bonus salarial (voir Avis d’experte).

→ Pour l’officine : meilleure organisation, développement de gammes, d’un secteur, avec augmentation du chiffre d’affaires, décharge de travail pour le titulaire, compétitivité…

Je me prépare

Quand ?

Il n’y a pas de norme après une embauche pour être légitime à prendre des responsabilités. Si vous pensez maîtriser vos tâches, si vous estimez que vous pouvez travailler différemment en supportant davantage de missions, c’est le moment. De plus, si vous ressentez depuis de nombreuses semaines un peu de lassitude ou de monotonie avant de partir au travail, il est temps de relever de nouveaux défis.

Comment ?

→ Faites le point. Lors d’une simple introspection ou d’un bilan de compétences, prendre le temps de faire un point complet sur ses attentes, ses appétences et ses compétences, notamment celles qui sont sous-exploitées, est essentiel.

Les questions à se poser : « Qu’est-ce que j’aime dans ce que je fais ? », « Qu’est-ce que je dois commencer à faire ? », « Qu’est-ce que je dois arrêter ? », « Qu’est-ce que je dois continuer ? » L’idéal est de se définir un objectif sur un à trois ans.

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→ Anticipez les questions du titulaire. En parallèle de votre bilan personnel, réfléchissez aux points que ne manquera pas de souligner votre patron. Cela vous permettra de préparer les réponses : « Quel investissement es-tu prêt à mettre ? », « Quelle est ta valeur ajoutée ? », « As-tu pensé à ton équilibre entre vie professionnelle et vie privée ? », « Pourquoi toi et pas un autre ? »…

→ Rédigez un support. Listez par écrit les attentes et compétences utiles à votre demande, argumentées d’exemples concrets de réalisations, si possible chiffrés : « Pendant les vacances, j’ai géré le matériel du maintien à domicile, et j’ai fait grimper le chiffre de 15 % », « Dans mon poste précédent, j’avais mis en place un coin aromathérapie avec un investissement de départ de… » Pas de roman fleuve ! Le tout doit tenir sur une page maximum pour fixer ses idées et fournir au titulaire un support de réflexion.

→ Faites une simulation. Seul ou avec une personne extérieure, verbalisez à voix haute pour voir comment les mots vous viennent. Édulcorez votre discours de toutes les expressions dévalorisantes involontaires : « quand même » ou « un petit peu »…

→ Balisez le terrain. Multipliez les initiatives en montrant une mentalité positive. Rapprochez-vous si besoin des personnes influentes au sein de l’officine, pour tenter de créer un consensus autour de votre future demande. Attention, gardez au maximum vos ambitions pour vous, car si vous pouvez les partager avec certains de vos collègues, cela demeure un projet individuel.

Je me déclare

Demander des responsabilités supplémentaires est une approche transactionnelle qui doit être clairement formulée.

Il s’agit d’une négociation.

Le rendez-vous

→ Être prêt. Lancez-vous seulement une fois que vous savez exactement ce que vous avez à dire. Si votre titulaire vous propose de vous recevoir rapidement, repousser l’entrevue fait perdre d’emblée en crédibilité.

→ Choisir son moment. Toute période est possible mais certains temps forts de la vie de l’officine peuvent être ciblés : à l’occasion d’un transfert, d’un accroissement d’activité, du départ ou de la promotion d’un collaborateur, du déploiement de nouvelles sessions de formation, ou encore, lors de l’entretien annuel d’évaluation.

→ Prendre son temps. Tête-à-tête autour d’un repas, rencontre au bureau… Quelle que soit la manière, évitez l’entre deux portes, au moment où le titulaire a autre chose en tête. Précisez que vous avez besoin d’un moment de discussion en privé : « J’aimerais vous voir en privé pour vous parler d’un projet personnel ».

La négociation

→ Soigner l’entrée en matière. Pour capter positivement l’attention du titulaire, évitez les maladresses :

– les perches négatives : « Je sais, vous préférez que, mais » ;

– l’interprétation : « Vous allez me dire que… » ;

– le jugement : « Vous utilisez mal mes compétences » ;

– la « pommade » : « Je tiens d’abord à vous remercier vivement… » ;

– la survalorisation : « Je suis de loin la meilleure pour… ».

Mettez plutôt l’accent sur l’enthousiasme, la motivation : « Je maîtrise mon poste et j’ai envie d’apporter plus à l’officine… », « M’occuper du matériel pour le maintien à domicile serait un super défi… », etc.

→ Bannir l’affect. Évitez absolument les modes contre-productifs : revendicatif (« Cela fait dix ans que je suis là et je n’ai toujours pas évolué »), arrogant (« J’ai toujours rêvé d’être chef »), agressif (« J’en ai ras le bol ») ou menaçant (« Sinon je claque la porte ! »), etc.

→ Jouer en équipe. Évitez de vous approprier les bénéfices du groupe (même si c’est à raison…), de critiquer ou de vous comparer aux autres membres de l’équipe. Il est par contre bienvenu de mettre en lumière la reconnaissance par ses pairs, notamment si la fonction visée implique du management. Par exemple : « Je sais que Valérie apprécie le binôme que nous formons… »

→ Suggérer. Venir avec des suggestions montre que vous avez mûrement réfléchi le projet : « Je peux vous proposer de travailler en binôme avec X puisque nos horaires sont décalés… », « Pour me remplacer sur cette tâche, j’ai pensé à Y… »

Attention néanmoins à rester humble, on ne prend pas la place du boss !

Si ça coince

Rebondir

Le titulaire hésite ou émet des objections ? Ne le prenez pas comme un échec mais comme une opportunité de rebondir pour continuer la discussion.

→ Le challenge. Au titulaire qui argue : « Tu es sûr (e) d’être prêt (e) ? », proposez un objectif à court terme : « Je vous/te propose de m’occuper de cette gamme à l’essai et de faire le point ensemble dans X semaines ».

→ La formation. Le titulaire dit : « Tes connaissances te semblent suffisantes ? » Répondez : « J’ai encore X heures sur mon compte personnel d’activité… » ou « Je pourrais me former en dermo/matériel médical via le plan de formation ».

→ Le délai. Si le titulaire dit : « J’ai besoin de temps pour réfléchir », répondez : « Très bien, on peut en reparler dans un mois ? » Fixer un délai à moyen terme évite que votre demande soit oubliée. Vous reviendrez à la charge plus tard !

Modérer sa déception

→ Rester calme. Contenez vos émotions et réfutez les arguments avec professionnalisme : « J’entends vos/tes hésitations mais… »

→ S’armer de patience. Pas d’urgence à sortir de l’entretien promotion en poche. Relancez l’affaire au bout de quelques semaines, puis encore quelques semaines plus tard. Dans tous les cas, le délai de réponse ne doit pas dépasser un an.

Quand c’est non

Quelle que soit la raison invoquée, inutile de se braquer (« Puisque c’est comme ça, je ne ferai pas ceci ou cela » ou « Après, on se plaint que le personnel n’est pas motivé ! ») au risque d’aller vers un conflit qui desservira tout le monde. Deux options sont à envisager.

Rester dans l’officine

Sans perdre de vue votre objectif, adaptez votre attitude en conséquence. Formez-vous, continuez à prendre des initiatives et à donner des idées. Outre des connaissances en plus, cela donne une image proactive. Et restez à l’écoute des besoins et des challenges. Même si elle n’a pas abouti cette fois, votre requête est une preuve de motivation. Le moment opportun, votre titulaire s’en souviendra.

Aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs…

Si vous changez d’employeur, jouez cartes sur table, sans critique, lors de l’entretien : « J’ai demandé davantage de responsabilités, mais dans l’état de l’organisation de l’officine, cela n’était pas possible ». Cela montrera que vous avez quitté votre poste pour des raisons positives.

Avis d’experte

Sylvaine Pascual, coach, spécialiste du plaisir au travail (www.ithaquecoaching.com)

De nouvelles responsabilités peuvent alourdir la charge de travail et légitimer une demande conjointe d’augmentation.

Faut-il soigner sa demande d’augmentation en prenant de nouvelles responsabilités ?

1. Si les nouvelles missions imposent une charge horaire supplémentaire, il ne s’agit pas d’une augmentation, mais d’une obligation légale pour l’employeur.

2. Hors augmentation du temps de travail, la hausse du salaire horaire n’est pas un dû. Si c’est un souhait, elle doit être évoquée dès le début de l’entretien pour éviter les malentendus.

3. Si elle est envisagée, ne pas se contenter d’une promesse « si tout se passe bien » mais la formuler par écrit, en précisant le montant du bonus, le délai et les éventuels objectifs à atteindre.

4. L’idéal est qu’elle soit actée dans un avenant au contrat de travail. Dans les officines au management plus informel, notamment les petites, l’assurance verbale d’une prise en compte dans la prochaine fiche de paie peut néanmoins suffire.

Tous nos remerciements à Marie Henry, directrice de Capital pharma consulting et enseignante DU Management de l’officine et EMBA Management de la pharmacie d’officine, à Franck Boissin, directeur de Serendip, cabinet de recrutement spécialisé en santé, et à Sylvaine Pascual, coach.