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Fixer les prix de vente

Publié le 1 mars 2011
Par Anne-Gaëlle Harlaut
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Fixer des prix de vente pertinents est un savant compromis entre attractivité et rentabilité commerciale. Une stratégie qui intègre produit, environnement concurrentiel et comportement consommateur.

Intégrer la nécessité

Le prix de vente d’un produit est fixé d’après son prix d’achat réel (remisé), le taux de TVA et la marge commerciale désirée (voir Porphyre n° 469 de février). Vous pourriez vous borner à ces éléments et appliquer un coefficient multiplicateur linéaire à chaque produit. Simple, cette politique a pourtant ses limites. Sur certains produits notamment, elle risque d’engendrer des prix décalés par rapport à la concurrence et un impact négatif sur le jugement des consommateurs sur l’ensemble de l’officine. Avant de vous lancer corps et âme sur l’étiqueteuse, vérifiez les règles essentielles du juste prix.

Être offensif sur les basiques

L’impact du prix sur le comportement d’achat du consommateur dépend fortement des catégories de produits.

Les produits à impact fort

Il s’agit essentiellement des produits de marques leaders comme les grandes gammes dermatologiques, des « basiques » dont le prix est bas, proche des GMS ou encore des produits d’enseigne au nom d’un groupement qui se positionnent sur le même créneau. Ils nécessitent une politique de prix pointue et offensive.

Les produits à impact modéré ou faible

Ce sont les produits pour lesquels le prix de vente n’est pas le premier levier de l’achat. Exemple : les produits du monopole pharmaceutique (le bénéfice sur la santé prime sur l’aspect économique), les gammes positionnées sur un créneau spécifique (maquillage bio, soins dermatologiques pointus…) ou haut de gamme (instituts…). Le créneau clientèle est étroit mais acquis ; la politique de prix peut être moins serrée, mais pas inexistante…

Fixer des prix bas sur les « sensibles »

À l’intérieur même des gammes, certaines références dites « sensibles ? » devront faire l’objet d’une attention particulière.

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Une référence « sensible », c’est quoi ?

C’est un produit pour lequel le consommateur a une idée précise du prix. Le moindre écart de prix peut facilement faire basculer son comportement entre « Je n’achète pas, c’est plus cher qu’ailleurs ? » ou « J’achète, ce prix est intéressant ».

Comment l’identifier ?

Ce sont généralement les produits d’usage courant à forte rotation (voir encadré). En gestion informatisée des stocks, on peut facilement les repérer en éditant les palmarès de vente en volume par gamme et par famille de produits.

Pourquoi se focaliser dessus ?

Au-delà d’une augmentation des volumes de vente, des prix bas sur ces références sensibles impactent l’image globale de la pharmacie. En effet, comme ces prix servent de repère, le consommateur va transposer l’image qu’ils véhiculent à l’ensemble des prix de l’officine. Si le prix est juste, le capital confiance se répercute sur les autres achats et sur la fidélité du client. Des références sensibles trop chères inspirent de la « méfiance », ce qui le pousse vers la concurrence, y compris parfois pour ses ordonnances.

Les limites des ventes « élastiques »

Il n’y a pas de relation directement proportionnelle entre baisse de prix et nombre d’unités vendues, encore appelée « élasticité au prix ». En d’autres termes, lorsque le prix a atteint un certain niveau, le baisser davantage n’augmente plus les ventes. Or l’impact de la baisse de prix est d’autant plus imprévisible qu’elle varie selon le type de produit, le profil de l’officine (profil et potentiel de la clientèle), la saison, la possibilité pour l’acheteur d’augmenter sa consommation du produit…

Une règle à retenir : baisser le prix n’est intéressant que si, sur une période donnée, l’augmentation du nombre d’unités vendues est suffisante pour compenser la perte de marge brute. Il faudra donc évaluer l’élasticité au prix périodiquement et rectifier le tir si besoin.

Se positionner face à la concurrence

Officines voisines, parapharmacies, parfumeries ou GMS, vos clients se font une idée du juste prix des produits d’usage courant chez vos concurrents. Pour se positionner correctement dans votre environnement concurrentiel, faites de même !

Tous concernés

Les milieux fortement concurrentiels (villes, proximité d’un discounter…) doivent bien sûr redoubler de vigilance. Quant aux autres, ils ne doivent pas se reposer, tous les clients ayant une idée des prix des produits courants, notamment en GMS. Gare à Internet, qui gagne du terrain…

La veille concurrentielle

Surveillez vos concurrents régulièrement, en confrontant les différentes sources disponibles :

• Méthodes « artisanales » : se balader, repérer, comparer… et écouter ses clients – au lieu de se braquer –, ils ne se gênent pas pour comparer !

• S’abonner : à un service de relevés de prix fournis par les grossistes répartiteurs.

• Autres : relevés de prix effectués par un groupement ou publiés dans la presse professionnelle ; les informations des labos et des représentants.

Le juste positionnement

Sur les références sensibles, collez à la moyenne nationale et/ou au concurrent direct. Une règle : même sans s’aligner sur les prix de la concurrence, essayez toujours de ne pas dépasser un prix plus élevé de 10 %, différence pouvant se justifier par une politique de conseil dynamique.

Maintenir sa marge

Baisser les prix de vente de certaines références ne nécessite pas de sacrifier sa marge de rentabilité globale (et cela n’est pas souhaitable !). L’enjeu, qui est dans l’équilibre entre attractivité et rentabilité, repose sur un traitement différent des prix à l’intérieur même des gammes ou « pondération des marges » : des marges faibles pour les produits de référence à forte rotation, moyennes pour les milieux de gamme, et élevées pour les autres. Un exercice qui demande de la rigueur et du temps de travail, mais qui assure à long terme une fidélisation de la clientèle.

Le « prix psychologique »

Le « prix psychologique » est le prix que le consommateur est prêt à payer pour un produit ou un service. Trois commandements de base pour influencer le client :

• De la constance.

Quand on fixe un prix, notamment sur une référence sensible, on s’y tient. Le yo-yo des prix est le pire ennemi de la politique de prix d’un commerce. Pour l’éviter :

– garder scrupuleusement tous les historiques de prix sur chacune des gammes ;

– ne pas appliquer les coefficients habituels en cas de dépannage auprès des grossistes si une référence vient à manquer. Une bonne explication des différents canaux de distribution ne justifie pas aux yeux du client un écart de prix sur son produit habituel !

• Le « 9 », avec modération

Très répandus dans les GMS, les prix tels 9,99 € sont censés focaliser l’attention sur le premier chiffre. Les consommateurs ne sont pas dupes, les utiliser avec la plus grande modération, de préférence sur les références très sensibles et promotions.

• Des prix ronds

Attention aux coefficients multiplicateurs qui aboutissent à des prix tels 6,02 € ou encore 6,29 €. Corrigez : arrondir à 0,5 au-dessus ou au-dessous pour proposer des prix arrondis plus favorables à l’achat.