Accompagnement Réservé aux abonnés

Comment lui dire adieu ?

Publié le 29 novembre 2017
Mettre en favori

Poser sa démission. C’est arrêté, vous quittez le navire et votre titulaire ! Cette décision ne se gère pas à la légère, notamment au niveau relationnel. Nos conseils pour bien négocier ce tournant.

Je me prépare en amont

Peser les enjeux

→ Individuels : démissionner implique de tourner le dos à une sécurité matérielle, mais aussi à une aventure professionnelle et humaine. Le faire dans de bonnes conditions permet de s’assurer un rebond sans références négatives.

→ Collectifs : comme une rupture, la démission crée un vide lourd d’enjeux organisationnels, sinon affectifs. Surprise, culpabilité, colère… ne doivent pas gouverner la décision, mais les émotions au sein de l’équipe doivent être prises en compte pour mieux gérer sa sortie.

Mûrir la décision

Gare au coup de tête ! Trois questions sont à se poser sérieusement avant d’agir.

→ « Pour quelle (s) raison (s) ? » : opportunité ailleurs, absence de perspectives, mésentente… lister les motifs qui vous motivent.

→ « Est-ce l’ultime solution ? » : ai-je épuisé tous les moyens pour améliorer la situation ? Une médiation, une demande de formation réellement motivée, un entretien avec le titulaire peuvent changer la donne.

→ « Quelle balance bénéfices/risques ? » : lister tous les avantages et inconvénients du poste actuel et faire la « balance ».

Publicité

Préparer les arguments

Le titulaire ne manquera pas de vous demander : « Pourquoi cette décision ? » S’il n’est jamais obligatoire d’évoquer les motifs de la démission, des faits légitimes comme un suivi de conjoint, un déménagement ou un changement d’officine gagnent à être signalés d’emblée.

Pour le reste, choisir un ou deux arguments à mettre en avant : des horaires incompatibles, un manque de responsabilités, une mésentente… sans les multiplier. Une démission n’est pas un règlement de comptes ! Si l’argument semble irrecevable, du style « Je ne m’entends pas avec votre conjoint »…, on peut travestir la vérité en mettant en avant le désir de suivre une formation, de faire une pause…

Pour l’instant, motus !

Éviter toute allusion à l’officine, au risque de générer des bruits de couloir et de donner le sentiment au titulaire d’avoir été dupé. Il doit être le premier informé.

Je me lance « réglo »

À l’écrit et à l’oral

L’article 20 de la convention collective impose l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception ou une remise contre reçu. Doivent y figurer vos coordonnées, celles de l’employeur, celles de l’officine, la date du début de contrat, la durée du préavis comme inscrite dans le contrat de travail. Et, éventuellement, les raisons, la requête d’une dispense de préavis et d’heures journalières d’absence pour recherche d’emploi. À la clé, une sécurisation juridique et une preuve du début de la période de préavis (date de présentation de la lettre). Mieux vaut toutefois faire la première annonce entre quatre yeux pour l’aspect « humain ».

Quand ?

Éviter les périodes d’activité forte pour s’assurer une pleine disponibilité du titulaire : « J’aimerais vous parler en tête-à-tête d’un sujet personnel » ; « J’ai un point important à aborder avec vous, quand seriez-vous disponible ? »

Où ?

Selon les habitudes et les relations avec le titulaire, opter pour un rendez-vous dans son bureau ou à l’extérieur pour prendre un temps calme et éviter les interruptions.

Comment ?

L’objectif est de faire accepter sa décision en permettant à chacun de garder la tête haute. Et de se quitter en bons termes, en conservant son réseau professionnel.

À privilégier

→ Le factuel. Inutile de tourner autour du pot : « J’ai demandé cet entretien pour vous annoncer ma démission ».

→ Le positif. « Je vous remercie pour la confiance que vous m’avez accordée mais… »… y compris pour les arguments,

« Malgré le plaisir que j’ai eu à travailler ici, je n’ar rive plus à concilier mes horaires… », etc.

→ Le constructif. Formuler une critique est possible, mais de façon constructive : « Une partie de mes motivations est liée aux conditions de travail, une concertation de l’équipe serait bénéfique à l’entreprise… »

À éviter

→ Le dénigrement. « L’officine n’est plus à la hauteur de la concurrence… », « Votre approche du métier est dépassée… » L’officine vous a accueilli (e), parfois formé (e) et chacun a des responsabilités dans les dysfonctionnements.

→ Le pathos. « Machin est trop désagréable avec moi… », « Avec ce que je gagne, je n’arrive pas à vivre correctement… », etc. Tout ce qui est de l’ordre de la subjectivité entache le sérieux de la demande.

→ Le jugement. Attention au verbe être (« Vous êtes trop exigeant », « Vous n’êtes pas suffisamment à l’écoute »…), qui implique un jugement. Préférer « avoir », plus factuel : « Vous n’avez pas suivi mon désir de formation l’année dernière »…

→ L’implication collective. La décision ne doit pas engager les autres membres de l’équipe. Préférer : « Je souhaite avoir davantage d’opportunités d’évolution professionnelle », plutôt que « Si vous ne nous proposez pas des promotions, vous allez tous nous perdre ».

Que faire ?

→ S’il refuse. En théorie, l’employeur ne peut restreindre le droit à la démission.

→ S’il fait une contre-proposition. Hausse de salaire, promotion, changement de planning… un délai de réflexion est possible : « Laissez-moi une semaine pour réfléchir, je ne l’avais pas envisagé sous cet angle… » À terme, votre réponse formelle peut se faire oralement. Si vous décidez de rester, les nouvelles conditions donnent lieu à un avenant au contrat.

J’effectue mon préavis

Soigner les relations

→ Baliser son départ : après quelques jours, un second rendez-vous est le bienvenu pour organiser les modalités pratiques, durée du préavis, temps de présence…

→ Rester constructif : être démissionnaire n’empêche pas de solliciter l’employeur et de faire preuve d’un esprit constructif. Pour un bilan professionnel et/ou des références : « Il me serait précieux de faire avec vous un bilan des compétences acquises et à améliorer », mais aussi « J’ai beaucoup appris, j’ai également apporté à l’officine. Accepteriez-vous de me faire une lettre de recommandation pour mon futur poste ? »

Assurer la continuité du service

Restez motivé (e) : « Je suis bien sûr disponible pour finaliser mes missions durant mon préavis ». Et prêt (e) pour la transition : « Je peux former mon remplaçant. »

Chouchouter ses collègues

→ Un discours équilibré : l’étendue de ce qu’il convient de dire est fonction du niveau de discrétion exigé par l’employeur et des relations entretenues avec les uns et les autres. Pour éviter de créer une ambiance délétère, préférer le discours factuel – « Je m’en vais parce que j’ai fait le tour de mon poste » –, en laissant de côté les récriminations : « Tu sais, bosser avec untel, ce n’était plus possible… » ou « Avec cette ambiance nulle, difficile de travailler/s’épanouir, etc. »

→ Des attentions personnalisées. Certains se montrent envieux, fâchés, déstabilisés. Prendre le temps d’une entrevue rapide avec chacun : « Je tenais à te faire savoir qu’il a été agréable de travailler avec toi… », « Je garderai un souvenir ému de nos bavardages pendant les pauses… » Ne pas céder à la culpabilité. Certes, on laisse des collègues derrière soi, mais cette décision est personnelle et légitime.

→ Un pot de départ, où sont conviés tous les collègues, fait office de rite de passage pour tourner la page. Évoquez le plaisir pris à leur contact : « Je pars vers de nouvelles aventures mais certaines choses me manqueront assurément… »

L’annoncer aux « externes »

→ Aux labos, fournisseurs. Sitôt la date du départ calée, prévoir un mot pour les représentants et livreurs : « J’ai été ravi (e) de notre collaboration et je tiens à vous en remercier, mais dès le … je suis appelé (e) par d’autres aventures professionnelles ».

→ Aux clients. Ils ne manqueront pas d’exprimer leur déception ! Après concertation avec le titulaire, informez-les à l’oral durant les derniers jours de présence : « Je quitte l’officine, je tenais à vous en informer et à vous souhaiter bonne continuation, etc. », et à l’écrit pour ceux que l’on n’aura pas vus. Laisser un mot près du comptoir. Et rassurer : « Je serai remplacé (e) par M./Mme X, en qui vous pouvez avoir toute confiance. »

Merci à Karine Doukhan, directrice du cabinet Robert Half Management Resources (Paris), Malika Limane, psychologue du travail au cabinet conseil Synergence 2A (Écouflant), et Rosa Rossignol, cabinet Carnets d’adresse RH et auteure de Gérer efficacement un départ-Nouvel emploi, retraite, licenciement… partir dans les meilleures conditions (Dunod, 2012).

À savoir avant de refermer cette porte…

Vous devez… → Un préavis. Un mois pour les préparateurs et assimilés cadres, trois mois pour les adjoints, sauf cas particuliers : salariée enceinte, à l’issue d’un congé maternité ou dans les deux mois suivant la naissance… Une fois calé, il se respecte, sous peine de se voir demander le versement de dommages et intérêts pour abandon de poste.

→ Le respect de l’éventuelle clause de non-concurrence.

On vous doit… → Une indemnité compensatrice de préavis si sa durée légale est raccourcie par l’employeur, correspondant au salaire qui aurait dû être perçu sur la période manquante.

→ Une indemnité de non-concurrence si clause prévue.

→ Deux heures d’absence par jour pour recherche d’emploi durant le préavis, fixées un jour par le salarié, un jour par l’employeur. Ce dernier peut accepter de cumuler les deux heures de recherche d’emploi pour réduire sa durée.

→ Le solde des congés payés, s’ils n’ont pas été pris à la date de la démission.

→ Le certificat de travail, l’attestation Pôle emploi et le solde de tout compte. En CDD ? En principe, obligation de mener le contrat à terme, sauf à justifier d’un CDI, d’un commun accord, de faute grave ou de force majeure. Préavis de deux semaines maximum et pas d’indemnités de précarité de fin de contrat.

Source : Moniteur Expert.