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« Ça me brûle quand j’urine ! »

Publié le 1 juin 2024
Par Nathalie Belin
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1 Je questionne

Préciser la demande

« Que ressentez-vous exactement ? », « Avez-vous de la fièvre, des douleurs lombaires ? » distinguent les signes d’une cystite de ceux d’une pyélonéphrite qui impose un avis médical.

Rechercher certains critères

« Depuis quand avez-vous ces symptômes ? », « Pas de grossesse en cours ? », « Êtes-vous suivie ou traitée pour une pathologie particulière (affection rénale, immunosuppression…) ? » orientent si besoin vers une consultation médicale.

« Est-ce la première fois ? », « Buvez-vous assez ? », « Avez-vous tendance à être constipée ? » guident le choix du produit et les conseils à donner.

2 J’évalue

→ La réalisation d’un autotest urinaire par la patiente ou d’un test rapide d’orientation diagnostique (Trod) d’une cystite aiguë par le pharmacien guide la prise en charge. S’il est positif, une antibiothérapie est indiquée. Des solutions conseils peuvent aussi aider à enrayer une infection débutante ou à limiter des récidives (voir J’explique). Si le test est négatif, un autre diagnostic doit être envisagé, par exemple une mycose (des pertes vaginales orientent en ce sens).

→ Un avis médical est impératif devant des signes faisant suspecter une pyélonéphrite (fièvre, frissons, douleurs lombaires), des récidives fréquentes (≥ 3 épisodes par an) ou lorsqu’il existe des risques de complications de l’infection : immunodépression, grossesse, âge > 65 ans notamment.

Toute infection urinaire chez un homme ou un enfant impose également une consultation médicale.

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3 Je passe en revue

Autotests urinaires

Exemples : Autotest Infection urinaire Biosynex, MyTest Infection urinaire Viatris, Uritest 2…

Principe : la bandelette urinaire détecte les leucocytes, témoins de l’inflammation, et les nitrites provenant de la transformation des nitrates alimentaires par les bactéries. Une bandelette urinaire est négative si les deux paramètres sont négatifs. Elle est positive si l’un des deux est positif.

À noter : certains tests détectent aussi la présence de protéines et de sang. Leur positivité, alors que les leucocytes ou nitrites sont négatifs, fait orienter vers un avis médical.

En pratique : à réaliser sur des urines ayant séjourné au moins 4 heures dans la vessie (pour éviter des faux négatifs), après élimination du 1er jet.

Solutions « anti-adhérence »

Canneberge américaine

Encore appelée cranberry (Vaccinium macrocarpon), elle renferme des proanthocyanidines A (PAC A) qui agissent au niveau des adhésines d’E. coli, l’empêchant de se fixer aux voies urinaires et favorisant son élimination par les urines. Selon une analyse récente de la revue Cochrane, sa prise est en effet en faveur d’une diminution des cystites chez les femmes sujettes à des récidives fréquentes mais ne serait pas efficace au cours de la grossesse, chez les personnes âgées ou ayant des problèmes de vidange de la vessie(1). Pas de preuve d’efficacité en curatif.

Exemples : Cranberry Entretien Urisanol, Cranberry Confort urinaire Viatris, Cys Control sachet, Gyndelta…

En pratique : une dose journalière d’au moins 36 mg de PAC A est recommandée(2). L’effet étant dose-dépendant, des formules dosées à 72 mg sont proposées. Elles augmentent potentiellement le risque d’effets indésirables, essentiellement digestifs(3). Prudence sous antivitamines K (risque potentiel d’augmentation de leur effet).

D-mannose

Il s’agit d’un sucre non stocké dans l’organisme et éliminé au niveau urinaire, sur lequel les bactéries E. coli ont la capacité d’adhérer via des récepteurs. En concentration suffisante dans les urines, le D mannose agit comme un leurre, sature ces récepteurs et prévient l’adhérence bactérienne. Malgré un mode d’action intéressant, une méta-analyse de Cochrane a conclu en 2022 qu’il n’y avait pas de preuves solides de son efficacité(4) en préventif ou curatif. Exemples : Cystima Médical, Femannose… Il est également proposé en association à la canneberge et parfois à des plantes à visée anti-infectieuse : Cys Régul D Mannose, Cys Control Fort, Duab Fort, Gyndelta Optima…

En pratique : 2 g/jour en prévention, 4 à 6 g par jour en curatif. Pas ou peu absorbé par l’organisme, le D mannose convient aux diabétiques.

Solutions à visée anti-infectieuse et/ou diurétique

Plantes

À visée anti-infectieuse : busserole, bruyère, hibiscus, propolis… La busserole surtout et la bruyère renferment de l’arbutine transformée dans l’organisme en hydroquinone, composant aux propriétés antiseptiques éliminé dans les urines. L’Agence européenne du médicament reconnaît l’usage traditionnel de la busserole pour soulager les sensations de brûlures et les mictions fréquentes liées aux cystites chez la femme. Exemples : Busserole Arkogélules ou Naturactive… En association à la canneberge : Cys Control gélules, Duab Confort urinaire, Granions Réducys, Gyndelta Flash…

À visée diurétique et/ou anti-inflammatoire : bouleau, bruyère, solidage, piloselle, chiendent, orthosiphon… Elles sont proposées en association aux plantes à visée anti-infectieuse (Arkofluides Confort urinaire…) ou à la canneberge (Cys Régul, Ergycranberryl…).

Précautions : la busserole ne doit pas être utilisée plus de 7 jours d’affilée.

Huiles essentielles

Sarriette des montagnes, cannelle, thym à thymol, origan compact, romarin à cinéole, arbre à thé notamment font partie des huiles essentielles aux propriétés anti-infectieuses et/ou anti-inflammatoires traditionnellement utilisées pour soulager les infections urinaires. Elles sont proposées seules (Aromadoses, Olioseptil ou SOS aroma Confort urinaire…) ou associées à la canneberge : Cys Control Flash, Confort urinaire Flash Urisanol, Feminabiane CBU Flash

En pratique : pas d’utilisation en cas de grossesse ni, pour certaines huiles essentielles, en cas d’antécédents de brûlures d’estomac ou de reflux gastro-œsophagien (RGO) : vérifier les recommandations du fabricant. Prudence en cas d’antécédents d’asthme et de convulsion. Pas plus de 5 à 7 jours de prise continue.

Équilibre du microbiote

Les probiotiques sont proposés en prévention des cystites pour rééquilibrer le microbiote intestinal (voir Le contexte), sans preuve d’efficacité. Exemples : Femibion Intime, Medigyne, Physioflor… En association à la canneberge ou d’autres composants : Cys Control Fort, Feminabiane CBU, Granions Reducys, Physionorm Cranberry, Symbiosys Cytalia…

En pratique : les probiotiques sont déconseillés par prudence en cas d’immunosuppression.

4 Je choisis

Cystite débutante

En l’absence d’accès rapide à l’antibiothérapie : canneberge et/ ou plantes ou huiles essentielles en complément d’une hydratation importante.

Prévention des récidives

En 1re intention : canneberge (du fait de meilleures preuves d’efficacité).

En alternative : D mannose, associé ou non à de la canneberge.

Si dysbiose associée (prise fréquente d’antibiotiques par exemple) : probiotiques.

5 J’explique

Les cystites sont habituellement bénignes et peuvent même régresser spontanément sous réserve de boire beaucoup et d’uriner de façon fréquente et régulière, sans se retenir. En l’absence d’amélioration après 48 heures, un avis médical s’impose. Pour limiter les récidives, des mesures hygiéno-diététiques sont recommandées en complément des solutions d’automédication.

6 Je conseille

Modalités de prise

Canneberge, probiotiques, D­mannose : en continu pendant plusieurs mois en cas de cystite récidivante.

Busserole et huiles essentielles : 5 à 7 jours maximum en prise continue. Autres plantes : généralement pas plus de 10 à 20 jours par mois.

En cas de douleur : privilégier le paracétamol. Les AINS ne sont pas recommandés dans un contexte infectieux.

Mesures hygiéno-diététiques : boire suffisamment pour assurer des mictions régulières, toutes les 4 à 6 heures, qui luttent contre la colonisation urinaire des bactéries pathogènes. Prendre en charge des troubles du transit, notamment la constipation qui favorise la stagnation des selles et la prolifération microbienne. Proscrire toute hygiène intime excessive qui perturbe le microbiote vaginal (douches vaginales, usage de savons antiseptiques). Apprendre aux petites filles à s’essuyer d’avant vers l’arrière. Recommander d’uriner après les rapports sexuels en cas de cystite post-coïtale.

(1) Cranberries for preventing urinary tract infections. Cochrane 10 November 2023 [B1]

(2) « Recommandations pour la prise en charge des infections urinaires communautaires de l’adulte » SPILF Actualisation 2017.

(3) Anses – Saisine n° 2010 SA 0214.

(4) D mannose for preventing and treating urinary tract infections. Cochrane 30 August 2022.

Le contexte

Une cystite aiguë est une inflammation le plus souvent d’origine bactérienne de la vessie. Les bactéries proviennent de la région péri-anale, donc du microbiote intestinal : elles colonisent le vagin puis l’urètre.

→ En cause :E. coli dans 70 à 95 % des cas.

→ Signes cliniques : mictions fréquentes et peu abondantes (pollakiurie), mictions impérieuses (besoin urgent d’uriner) et/ou brûlures ou douleurs à la miction. La présence de sang dans les urines n’est pas un critère de gravité.

→ Facteurs favorisants : grossesse, modifications hormonales, diabète, immunodépression, anomalies du tractus urinaire, troubles du transit (notamment constipation), apports hydriques insuffisants, rapports sexuels pour les cystites post-coïtales.