Grippe : pourquoi l’épidémie est-elle si intense ?

© Getty Images

Grippe : pourquoi l’épidémie est-elle si intense ?

Publié le 30 janvier 2025
Par Alexandra Blanc
Mettre en favori
Le dernier bulletin sur les infections respiratoires de Santé publique France, paru ce 29 janvier, confirme l'intensification de l’épidémie de grippe dans l’Hexagone. Comment expliquer cette activité grippale particulièrement élevée cette année ? Infovac-France propose des éléments de réponse.

Face aux chiffres toujours croissants de cas de grippe en France, la campagne de vaccination, débutée le 15 octobre 2024, a été prolongée jusqu’au 28 février 2025. Si le pic épidémique a souvent tendance à se décaler dans la saison hivernale, l’intensité de l’infection est, cette année, particulièrement alarmante.

Un pic épidémique synchronisé pour 3 virus grippaux

L’activité grippale continue de s’intensifier en cette quatrième semaine de l’année 2025, d’après les données de Santé publique France. Si les indicateurs sont en hausse dans toutes les classes d’âge, l’activité atteint un niveau très élevé, particulièrement chez les enfants et adolescents de 15 ans et plus, qu’il s’agisse de la ville ou de l’hôpital.

L’intensité de la grippe pour la saison 2024-2025 s’explique notamment par un pic épidémique survenant de manière presque synchronisé pour les 3 virus circulants – A(H1N1), A(H3N2) et B(Victoria)  -, « ce qui est exceptionnel », selon la plateforme d’information sur les vaccins Infovac-France. De son côté, Santé publique France note que les profils antigéniques des virus A (H1N1) et B/Victoria circulants sont apparentés aux souches vaccinales. Rassurant ? Pas sûr…

Publicité

Un vaccin peu efficace pour la population cible

Les premières estimations de l’efficacité des vaccins contre la grippe émanant du réseau Sentinelles à partir des données de médecine de ville indiquent une efficacité modérée, d’environ 46 %, pour tous les groupes à risque ciblés. Elle est cependant plus faible chez les 65 ans et plus (31 %) que chez les moins de 65 ans (62 %).

Une bien trop faible couverture vaccinale…

Les données intermédiaires sur la couverture vaccinale contre la grippe au 31 décembre 2024 estiment une vaccination des personnes âgées de 65 ans et plus à 49,8 %, et à 22,7 % chez celles âgées de moins de 65 ans à risque de grippe sévère. « Ces couvertures vaccinales sont inférieures à celles estimées pour la saison 2023-2024 à la même date (52,7 % chez les personnes âgées de 65 ans et plus, et 24,5 % chez celles âgées de moins de 65 ans à risque de grippe sévère) », précise l’autorité de santé publique.

C’est également ce constat qui est pointé du doigt par Infovac-France qui rappelle un début de saison très frileux côté vaccination, bien que la demande ait connu un sursaut il y a quelques semaines menant même à une pénurie de vaccins en officine.

…et une cible pédiatrique délaissée

Le groupe d’experts, dénonce plus spécifiquement une couverture vaccinale chez les enfants quasi inexistante, malgré l’avis de la Commission technique des vaccinations (CTV) de la Haute Autorité de santé (HAS) qui a ouvert la vaccination contre la grippe à l’ensemble des enfants de 2 à 17 ans. Cette dernière recommandait l’usage du vaccin Fluenz dans cette population pédiatrique, vaccin qui présente l’avantage d’être administré par voie nasale. Mais la Commission de transparence (CT) n’a accordé aucune amélioration du service médical rendu (ASMR) comparé aux vaccins injectables. « Cette décision soulève des questions sur la cohérence des décisions prises par la CT. Comment peut-on affirmer qu’une forme nasale, sans injection, et prouvée au moins aussi efficace qu’un vaccin injectable, n’offre aucune ASMR pour les enfants ? », s’étonne Infovac-France. Dans ces conditions, le vaccin n’est toujours pas disponible en France, le laboratoire estimant que sa commercialisation ne serait pas rentable.

Une « vraie » campagne de promotion de la vaccination chez les enfants

Le groupe d’experts milite donc pour une mise à disposition dès la saison prochaine du vaccin nasal pour augmenter significativement les taux de couverture vaccinale, notamment chez l’enfant. Il estime que « la non-disponibilité du Fluenz constitue un frein majeur à l’atteinte des objectifs de santé publique pour la grippe ». Doit s’y associer une « vraie » recommandation et une promotion de la vaccination des enfants dont il est démontré le fort potentiel de transmission du virus de la grippe. Infovac-France en appelle ainsi à un changement de position de la Commission de transparence pour la saison 2025-2026 pour laquelle des vaccins trivalents sont prévus.