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PÉRILLEUSE TRANSITION
En 2012, les indicateurs d’activité de l’officine virent un peu plus dans le rouge. Et, en 2013, LES INQUIÉTUDES SUR L’ÉVOLUTION DE LA RÉMUNÉRATION RESTENT VIVES avec les nouvelles ponctions prévues sur le poste médicament. L’introduction d’une part d’honoraires à hauteur de 12,5 % dans la rémunération et la mise en place des entretiens pharmaceutiques permettront-elles de redresser la barre ?
Le parcours de l’année 2012 n’a pas été de tout repos. Après une longue négociation entamée en 2011 entre les syndicats de la profession, l’Assurance maladie et le gouvernement, la LFSS 2012 et la convention pharmaceutique, paraphée au printemps dernier, ont introduit la variable « honoraires » dans le mode de rémunération du pharmacien. Avec un objectif précis : 25 % d’honoraires d’ici à 5 ans. « Nous avons essayé de conduire cette réforme le mieux possible, mais nous ne sommes pas allés aussi vite que nous le souhaitions, reconnaît Philippe Besset, en charge du dossier économie à la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). 12,5 % d’honoraires, cela représente quelque 700 M€, soit près de 30 k€ sur les 430 k€ de marge moyenne par officine.
Dans le contexte actuel de crise, laisser la totalité de la rémunération du pharmacien pieds et poings liés au nombre et au prix des boîtes devient suicidaire pour la profession. « Nous attendons pour l’année prochaine 1 milliard d’euros de baisse de prix qui auront des effets négatifs, voire catastrophiques, sur le CA et la marge des officines », redoute Philippe Besset.
UNE RÉFORME à MARGE CONSTANTE
La pharmacie s’en sort à moindre mal : la dégradation des revenus est stoppée depuis deux ans, mais pas la baisse du nombre de pharmacies sur le territoire. Cette problématique pose la question des mesures d’accompagnement pour que la disparition de certaines officines, accentuée par la désertification médicale et un éventuel développement non maîtrisé des maisons de santé, ne se fasse pas au détriment des patients et des pharmaciens.
« Les simulations de la nouvelle marge doivent être opérées officine par officine pour savoir si elles seront déstabilisées, soutient Gilles Bonnefond, président de l’Union syndicale des pharmaciens d’officine (USPO). En outre, les modifications de marges doivent prendre en compte toutes les mesures sur le médicament. » Le tout à enveloppe de marge constante : 5,5 milliards d’euros. En l’absence de garanties apportées par le gouvernement, le président de l’USPO se refuse à conduire la réforme de la rémunération.
CONVENTION : UNE FEUILLE DE ROUTE RESPECTÉE
Signée, la convention pharmaceutique demande maintenant à être consolidée. Pour Philippe Gaertner, président de la FSPF, la feuille de route est respectée : relance de la politique des génériques avec l’application de l’accord « tiers payant contre génériques », nouvelle vague de TFR évitée, marge corrigée sur les grands conditionnements permettant la réinjection de 100 M€ dans le réseau, mise en place dès janvier 2013 des entretiens pharmaceutiques de suivi des patients sous anticoagulants oraux (coût de 40 M€ pour l’assurance maladie), revalorisation des astreintes et des gardes en novembre (également 40 M€)… Le bilan des syndicats serait de bonne facture s’il n’était terni par l’évolution très préoccupante de la marge du réseau. « Elle baisse de 2,3 % en valeur sur les 9 premiers mois de l’année, c’est du jamais vu dans la profession ! », observe Gilles Bonnefond, qui craint d’approcher les – 3 % en fin d’année.
INDISPENSABLE ET PRÉCIEUX GÉNÉRIQUE
L’année 2012 a été rude pour le générique qui a fait l’objet de polémiques. Il devrait néanmoins rapporter 80 à 100 M€ de prime pour le réseau. « La prime à l’objectif est calculée par rapport aux taux de substitution du second semestre 2011, sans rebasage pendant trois ans, et le pharmacien est assuré de percevoir une prime qui grimpe au fur et à mesure que son taux de substitution augmente », explique Philippe Besset.
La nouvelle politique du générique doit encore se concrétiser par la prescription médicale au sein du Répertoire, la généralisation de la prescription en DCI grâce à l’emploi de logiciels d’aide à la prescription, le renforcement de la collaboration médecin/pharmacien autour du médicament générique dans le cadre de l’accord conventionnel tripartite (médecin, pharmacien, Assurance maladie).
Compte tenu de la contribution du médicament dans le PLFSS pour 2013, les pharmaciens se reposeront fortement sur le générique pour équilibrer leurs comptes. « La substitution des nouvelles molécules entrées cette année au Répertoire permet uniquement de compenser en termes de marge les baisses de prix de 2012, mais pour 2013 il faudra disposer de nouveaux outils pour absorber les baisses de 2013 », explique Philippe Gaertner. La tâche s’annonce ardue car le potentiel de CA lié aux nouvelles échéances brevetaires ne sera pas un cru aussi bon que l’année 2012 marquée par la chute dans le domaine public de Tahor.
Malgré la perfusion omniprésente des génériques, « la profession ne parvient plus à amortir le choc des mesures des LFSS qui concentrent chaque année les efforts d’économie sur le médicament, alerte Gilles Bonnefond. 200 à 300 M€ en moins à chaque fois pour le réseau, la pente est trop forte et la diminution des ressources allouées au réseau va trop vite. Si on continue sur cette pente, la profession n’aura pas les moyens de faire sa réforme, elle va droit dans le mur ». Les négociations de cette fin d’année seront décisives.
Les nouvelles missions de la loi HPST pourront améliorer la rémunération du pharmacien mais, surtout, « elles changeront fondamentalement la façon dont nous sommes perçus par les patients », assure Philippe Gaertner. De combien ? Et au prix de quel nombre d’heures, de quels investissements ? Françoise Daligault, présidente de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), ne croit pas un seul instant que les nouvelles missions parviendront à préserver l’équilibre économique des officines. « Le passage aux honoraires ne permettra pas de compenser la baisse de marge », affirme-t-elle. Les pharmaciens sont prévenus.
Lexique
• LFSS
Loi de financement de la Sécurité sociale, qui détermine les conditions requises afin que la Sécurité sociale trouve un équilibre financier et puisse organiser les objectifs de dépenses en fonction des prévisions de recettes.
AVIS D’EXPERTS
Gilles Bonnefond, président de l’USPO
« Passer, en 2013, 12,5 % de notre marge actuelle en honoraires pour mettre cette partie tout de suite à l’abri des baisses de prix et de volume, ce n’est pas anticiper les conséquences du PLFSS 2013 sur les 4,7 Md€ qui restent exposés. De manière concomitante, la marge de dispensation doit chuter de 26 % à 21 %. Les pharmaciens n’ont plus les moyens de perdre 200 à 300 M€ tous les ans, la profession doit donc se prémunir contre les conséquences du PLFSS en passant un contrat d’objectifs et de moyens avec l’Etat. »
Françoise Daligault, présidente de l’UNPF
« L’UNPF était réticente à signer la convention. C’est un contrat de dupes. Les pharmaciens ont rempli leur contrat “génériques” et fait entrer beaucoup d’argent dans les caisses de l’Etat, et, aujourd’hui, ils se voient infliger des baisses de prix. Sur les anticoagulants oraux, ce que propose la CNAM ne correspond plus aux engagements de départ. L’officinal n’aura plus un rôle moteur et initiateur du suivi mais une soumission à la prescription médicale. D’accord pour la coopération interprofessionnelle, mais pas pour un lien de subordination. Sans modélisation économique de cette nouvelle convention, il ne sert à rien de se presser sur l’adoption d’honoraires fixes difficiles à revaloriser. Le pharmacien n’en a pas besoin pour être reconnu comme professionnel de santé. »
Philippe Gaertner, président de la FSPF
« Les négociations avec l’Assurance maladie sont dans la lignée de ce qui a été prévu. Les avenants seront signés en fin d’année, une fois que les mesures du PLFFS pour 2013 seront connues, et applicables dans six mois. L’an prochain, les honoraires représenteront 12,5 % de nos revenus, qui seront isolés des baisses de prix et des aléas des marchés. J’espère qu’ils seront opérationnels pour le début du second semestre 2013 car chaque mois de retard pénalise notre rémunération. Il faudra observer finement l’évolution de la nouvelle rémunération et faire preuve d’une vigilance microéconomique sur le réseau. Car, à l’inverse des baisses de prix qui ont frappé aveuglément, l’équité des honoraires doit être respectée. Les officines les plus petites et les plus fragiles, parfois les plus indispensables, ne doivent pas être sacrifiées au profit d’une maîtrise aveugle des coûts. »
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