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LA GESTION INFORMATIQUE DES ENTRETIENS PHARMACEUTIQUES

Publié le 15 mars 2014
Par Virginie Saurel
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La prise en charge des patients sous anticoagulants oraux dans le cadre des entretiens pharmaceutiques a été conçue d’emblée par l’Assurance maladie dans une perspective immédiate de dématérialisation. Tour d’horizon des outils électroniques d’aide à l’accompagnement des patients.

Christelle Ratignier, responsable du département des produits de santé à la CNAMTS, retrace le parcours – entièrement dématérialisé dès sa conception –, aussi simple que très encadré, du pharmacien qui souhaite initier l’accompagnement d’un patient sous AVK dans le cadre d’un entretien pharmaceutique : « Le pharmacien se connecte à son espace professionnel sur le site ameli.fr avec sa carte de professionnel de santé via un login et un mot de passe. Il dispose d’un onglet “Liens utiles” qui lui permet d’accéder à la convention et aux formulaires en ligne. En cliquant sur “Suivi AVK”, il accède au bulletin d’adhésion en ligne du patient puis au téléchargement du questionnaire qui pourra être rempli manuellement ou sur ordinateur, en renseignant les dates d’entretien. Il recevra par la suite un accusé de réception de l’enregistrement du patient. » Une fois réalisés et complétés, les questionnaires doivent être conservés par le pharmacien, soit en version papier (scannée éventuellement et annexée à la fiche patient ou dans le dossier pharmaceutique par exemple), soit en version électronique, annexée ou non à la fiche patient. Au 5 mars 104 582 entretiens avaient été menés depuis leur mise en place. 129 101 patients ont adhéré au dispositif. 13 848 officines sont impliquées.

Même si aucun avis ni aucune recommandation particulière n’ont été émis par l’Ordre des pharmaciens, Alain Delgutte, président du conseil central A, se montre favorable à l’utilisation d’outils interactifs lors des entretiens pour peu qu’ils soient conformes aux recommandations de l’Assurance maladie. Il attire cependant l’attention de ses confrères sur la conformité avec la CNIL quant à la circulation éventuelle des données de santé. « Je pense que la tendance sera très vite à des envois de fiches conseil par mail ou via smartphone, car même des patients assez âgés sont favorables à l’information dématérialisée et surfent sur Internet », explique-t-il.

Des outils qui demandent encore à être simplifiés

Malgré le formalisme du parcours informatique de gestion administrative des entretiens, les SSII ont été réactives pour proposer de nombreux outils de facilitation. Bénédicte Karpov, présidente du réseau Winpharma, mentionne les fonctions évidentes mais pratiques de détection automatique des patients sous AVK, le remplissage automatique en un clic des informations requises sur le site ameli.fr, la gestion du calendrier de rendez-vous également renseigné de manière automatique sur le site ameli.fr et le scannage possible de l’entretien attaché à la fiche patient.

Pour les logiciels du groupe Alliadis (Alliance Premium et Opus) et pour Périphar d’ASP-Line, Sophie Roussel, responsable communication, rappelle le développement récent de l’application « Mon Suivi Patient », accessible en cloud sur un serveur agréé HADS (hébergeur agréé données de santé). Elle permet au pharmacien d’alimenter un dossier complet sur son patient et de disposer notamment d’une bibliothèque de protocoles de suivi des patients chroniques. Parmi eux, les patients sous AVK ont fait l’objet d’une attention particulière en conformité avec les recommandations de la CNAM. Un préremplissage des données SESAM-Vitale du patient et du pharmacien est également disponible. Les documents sont stockés dans le dossier patient. Linda Leprovost, chargée de la communication et du marketing de Pharmagest, compte 7 500 entretiens au compteur du logiciel LGPI, lequel propose à ses clients un module intégré : proposition au comptoir, édition d’un formulaire d’inscription, possibilité de remplir informatiquement le questionnaire officiel, de l’imprimer puis de le scanner. Pharmagest proposera très prochainement à ses clients pharmaciens une application cloud sécurisée aussi bien pour le suivi des patients accompagnés en entretien pharmaceutique que pour les malades chroniques.

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Certains titulaires, comme Michel Pommier à Lunel (Hérault), souhaiteraient cependant pouvoir disposer de questionnaires simplifiés qui laissent la part belle au dialogue et non au remplissage de cases sur des formulaires. Il suggère de s’inspirer de kits de support d’entretien papier déjà existants – à informatiser (lui utilise celui de son groupement Pharmactiv) – qui synthétisent l’intégralité de l’entretien en vingt questions au maximum. C’est dans cet esprit que Corinne Beauvais, pharmacienne et formatrice, a conçu un « vrai/faux » disponible en version informatisée et qui se veut en prise avec la vie quotidienne du patient sous AVK : « Les carottes, c’est bon pour la santé, je peux en manger tous les jours autant que je veux » (objectif : faire prendre conscience au patient qu’il peut et doit manger de tout mais en quantité raisonnable), « Je dois prendre une contraception pendant mon traitement », « J’ai de la fièvre, je peux prendre de l’aspirine ou de l’ibuprofène », « J’ai mal au dos, je prends un anti-inflammatoire que j’ai dans mon armoire à pharmacie et je mets de la pommade », etc.

Des groupements très actifs vis-à-vis de leurs adhérents

Les groupements, particulièrement investis dans les nouvelles missions du pharmacien, ont de leur côté conçu des outils interactifs pour leurs adhérents. Giropharm est l’un de ceux à avoir poussé le plus loin l’interactivité en espace de confidentialité entre le patient et son pharmacien. Comme le souligne Anne Pointcheval, directrice marketing et communication : « Nous avons mis à la disposition de nos adhérents, accessibles sur notre site depuis un ordinateur ou une tablette, des vidéos et diaporamas interactifs qui viennent en support des explications scientifiques du pharmacien lors des entretiens : le mécanisme d’action des AVK, la mesure de l’INR… Ce dispositif de conseil interactif permet une plus grande convivialité, une approche simple et ludique et une meilleure compréhension grâce à des focus successifs par rapport aux interrogations et carences d’information du patient. Un dispositif qui sera décliné sur l’asthme au cours de 2014 et qui est déjà opérationnel sur le diabète. » Le pari semble réussi puisque 93 % des adhérents Giropharm sont entrés dans la démarche des entretiens pharmaceutiques.

Chez Giphar, des développements spécifiques autour des entretiens pharmaceutiques sont attendus dans un proche avenir. Pour l’instant, les adhérents du groupement utilisent les trames d’entretien, remplis online puis imprimés, proposés par deux pharmaciens Giphar sur le site gratuit lentretien.fr. Le questionnaire AVK est ainsi émaillé d’infos-bulles (des cercles verts avec un point d’interrogation) qui donnent accès à des explications détaillées pour aider le pharmacien dans le déroulement de l’entretien. Bertrand Gosselin et Stéphane Perral, les concepteurs, annoncent 350 utilisateurs en janvier et précisent qu’ils introduiront des vidéos dans le futur questionnaire qui sera consacré aux entretiens pharmaceutiques du patient asthmatique.

Chez ParisPharma, par-delà une communication marketing soutenue, on utilise abondamment les outils informatiques proposés par les logiciels équipant les pharmacies du groupement, LGPI Pharmagest et Premium Alliadis, qui prévoient dans l’onglet patient les zones nécessaires à la saisie des données issues de l’entretien. « Des laboratoires nous ont proposé une plate-forme de saisie sous forme de cloud relative aux pathologies qui concernent chacun de leurs médicaments. Ces données étant tellement sensibles, elles ne nous semblent pas devoir quitter la pharmacie, même via un cloud sécurisé. C’est pourquoi nous avons tout simplement fourni un classeur à nos adhérents de ParisPharma pour y mettre tous leurs comptes rendus d’entretiens », précise Fabienne Saad, directrice générale de ParisPharma.

Sondage directmedica

Sondage réalisé par téléphone du 24 au 26 février 2014 sur un échantillon représentatif de 100 pharmaciens titulaires en fonction de leur répartition géographique et de leur chiffre d’affaires.

Votre éditeur de logiciel propose-t-il des outils de facilitation pour la gestion des entretiens pharmaceutiques ?

Menez-vous des entretiens pharmaceutiques de suivi de vos patients sous AVK ?

Si oui, avez-vous utilisé votre logiciel pour sélectionner les patients éventuellement éligibles ?

Une gestion partiellement automatisée

Laurent Lagrave, titulaire à Hourtin (Landes), utilise les fonctions relatives aux AVK intégrées à la version 8.2 du logiciel Winpharma. « Le module AVK nous a beaucoup facilité les choses : si un patient a un anticoagulant dans son historique, une fenêtre s’ouvre pour nous le signaler. Les lignes d’historique concernant les AVK s’affichent dans cette fenêtre qui comporte aussi d’autres onglets nous permettant une gestion totalement électronique de l’inscription sur le site de l’Assurance maladie. Cliquer sur “Signer le bulletin d’adhésion” génère une récupération instantanée de tous les documents administratifs du patient, des informations relatives au pharmacien qui fait l’entretien – tous les pharmaciens de l’officine sont préenregistrés – et un remplissage automatique des documents demandés sur ameli.fr. Dans cette même fenêtre de notre logiciel, nous pouvons aussi gérer le planning des entretiens. Une fois que l’entretien est réalisé et confirmé électroniquement, l’information est également expédiée automatiquement sur ameli.fr. » Laurent Lagrave a tout de même opté pour un archivage papier des questionnaires d’entretien AVK, imprimés à partir du site de l’Assurance maladie. Mais il ne se coupe pas de la possibilité ultérieure d’un scannage des documents annexés à la fiche client, possible sous Winpharma.

Un adepte du 100 % dématérialisé

René-Pierre Clément, titulaire à Thionville (Moselle) et président de l’UNPF de Lorraine, a déjà réalisé une cinquantaine d’entretiens entièrement informatisés : « Avec 100 patients éligibles pour les AVK et des centaines d’autres potentiels pour l’asthme ou le diabète, il était hors de question, pour des raisons économiques, écologiques et d’archivage, de conserver des dossiers papier, à raison de quatre pages par patient deux à trois fois par an. Sans compter la difficulté de retrouver rapidement une information si nécessaire. Nous recrutons essentiellement au comptoir. Dès que nous délivrons une AVK, une fenêtre s’ouvre pour rappeler à l’opérateur de vérifier le statut du patient (est-il ou non entré dans le processus d’accompagnement ?). » Le logiciel de gestion, Premium Alliadis, reprend la grille d’entretien proposée par la CNAM. Le tout est archivé sur un cloud indépendant du LGO. « Il y a des passerelles entre mon LGO et le serveur – possibilité de récupérer les données de la carte Vitale… –, mais des améliorations restent à faire, dont le transfert de l’intégralité des données patient et nous éviter d’avoirà ressaisir les informations sur ameli.fr, qui nous fait perdre trois à cinq minutes par patient. »

Sondage directmedica

Gérez-vous le calendrier des rendez-vous via votre logiciel ?

Utiliser le site Ameli vous paraît-il suffisant pour la gestion et le suivi des entretiens pharmaceutiques ?

A la suite d’un entretien, renseignez-vous le dossier informatique de votre patient ?

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