Pas d’arrêt pour le décompte des congés

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Pas d’arrêt pour le décompte des congés

Publié le 14 novembre 2024
Par Anne-Charlotte Navarro
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Le 2 octobre 2024, la Cour de cassation a affirmé que l’acquisition de jours de congés payés pendant un arrêt maladie, qu’il soit d’origine professionnelle ou non, s’applique également aux arrêts de travail antérieurs au 23 septembre 2023. 

Les faits

Depuis 2006, Mme Z. est engagée comme employée commerciale par la société M. Du 10 novembre au 30 décembre 2014, elle est placée en arrêt de travail pour maladie. Du 31 décembre 2014 au 13 novembre 2016, elle est absente cette fois après un accident du travail. Le 19 novembre 2016, elle est à nouveau en arrêt, jusqu’au 17 novembre 2019. Le 19 novembre 2019, le médecin du travail délivre un avis d’inaptitude en précisant que l’état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement. En janvier 2020, elle est licenciée pour inaptitude avec impossibilité de reclassement. Mme Z. saisit alors les prud’hommes pour obtenir des indemnités, dont le paiement des jours de congés payés pendant ses arrêts. 

Le débat

En 2006, à l’époque des faits, l’article L. 3141-5 du Code du travail disposait que le salarié en arrêt pour maladie professionnelle ou à la suite d’un accident du travail acquérait des jours de congés payés pendant une durée maximale d’un an. Une disposition contraire au droit européen, qui, lui, accordait plus d’avantages. Dans sa demande aux juges, Mme Z. revendique l’application des textes européens afin d’obtenir de son ancien employeur des indemnités au titre des jours de congés payés acquis pendant ses arrêts. Un argumentaire rejeté par la cour d’appel de Bourges (Cher), le 18 novembre 2022. Conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, les magistrats considèrent que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, comprise dans le traité de Lisbonne, qui octroie au salarié de l’Union européenne un minimum de quatre semaines de congés payés, ne s’applique pas aux salariés français faute d’un texte en droit interne. Mais, le 13 septembre 2023, la Cour de cassation a mis en conformité le droit français avec le droit européen. Si bien que les salariés malades ou accidentés ont droit à des congés payés sur leur période d’absence, même si cette absence n’est pas liée à un accident de travail ou à une maladie professionnelle. Les modalités de cette disposition ont été depuis encadrées par la loi du 22 avril 2024, applicable à compter du 24 avril 2024. Dans ce cas précis de Mme Z., la question qui était posée aux magistrats de la Cour de cassation était de savoir si les salariés pouvaient réclamer des droits correspondants aux modalités fixées par la Cour de cassation le 13 septembre 2023 pour des périodes d’arrêts maladie antérieures au 24 avril 2024. 

La décision

Le 2 octobre 2024, la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel. Les hauts magistrats rappellent que, depuis le 13 septembre 2023, les salariés en arrêt maladie acquièrent des jours de congés payés, même si l’arrêt a été prononcé avant cette date. Pour eux, il revient aux juges « d’assurer, dans le cadre de leurs compétences, la protection juridique découlant de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de garantir le plein effet de celle-ci en laissant au besoin inappliquée la réglementation nationale ». Ainsi, les juges doivent octroyer des jours de congés payés au salarié en arrêt maladie même si l’arrêt de travail précède la date du 13 septembre 2023. En suivant la logique de la Cour de cassation, les modalités de limitation du report d’année en année des jours de congé acquis pendant un arrêt maladie, prévues par la loi du 22 avril 2024, s’appliquent de la même façon aux arrêts maladies antérieurs à la date du 24 avril 2024.

Cass. soc., le 2 octobre 2024, n° 23-14.806.

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À retenir 

Un salarié en arrêt maladie acquiert des jours de congés payés au même titre qu’un salarié présent, mais le décompte de ces derniers n’est pas forcément le même. 

Un arrêt maladie postérieur à la date du 1er décembre 2009 permet l’acquisition de congés payés.

Les limites du report d’année en année des jours de congés acquis pendant les arrêts maladies, courant sur plusieurs périodes de référence, s’appliquent aux arrêts antérieurs à la date du 24 avril 2024.