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Vaccination anti-Covid-19 le dimanche : tout ce qui coince
Invité de l’émission « Les 4 vérités » sur France 2, Olivier Véran, ministre de la Santé, a annoncé avoir signé un arrêté autorisant et incitant les pharmaciens qui le peuvent et qui le souhaitent à ouvrir désormais tous les dimanches, sans limitation, sur les mois de décembre et janvier. Comptant sur le sacrifice du repos dominical des pharmaciens pour simplifier et amplifier la campagne de rappel, il a souligné qu’ils sont des « piliers essentiels ». Mais « il s’est bien gardé de dire que l’officine est la filière de vaccination qui coûte le moins cher au gouvernement », souligne Pierre-Edouard Poiré, titulaire installé en centre commercial à Saint-Ouen l’Aumône (Val-d’Oise). Même avec une indemnité majorée de 5 € le dimanche, il devrait y avoir peu de volontaires au sein des troupes officinales. « Cet arrêté ministériel est pris pour satisfaire certaines pharmacies qui veulent vacciner le dimanche », commente Xavier Mosnier-Thoumas, pharmacien installé à Saint-Médard en Jalles (Gironde) qui estime que 5 € est un bien maigre appât.
Des frais d’ouverture à peine couverts
Sur le plan économique, ce n’est absolument pas rentable. Pierre-Edouard Poiré a pris sa calculette. L’hypothèse envisagée est la suivante : la pharmacie réalise 80 vaccinations le dimanche à trois (le titulaire, un adjoint et un préparateur), au tarif majoré de 7,90 € (acte vaccinal) + 5,40 € (enregistrement sur la plateforme vaccin Covid) + 5 € d’indemnité = 18,30 € par vaccination. Le coût chargé d’un préparateur est de 3 000 € environ et celui d’un adjoint de 4 500 € environ, soit un montant cumulé de 7 500 € par mois (150 heures) et un coût horaire moyen de 50 €. Cette pharmacie envisage d’ouvrir 10 heures le dimanche. Le coût salarial est de 500 € auquel il faut rajouter la majoration de 25 % comme pour une garde du dimanche. Soit un total de 625 €. Le titulaire va devoir accorder une journée de récupération en semaine à ses deux salariés qui coûte 500 € à l’entreprise. Cet « extra » coûte au bout du compte 1 125 €. Le titulaire décide de se rémunérer 300 € pour ce dimanche de vaccination, soit un coût total de 1 425 € pour réaliser 80 vaccinations x 18,30 € = 1 464 € de marge, ce qui couvre à peine les frais supplémentaires engendrés. Le titulaire ne gagne rien, sauf de la fatigue supplémentaire.
D’autres freins que financiers
Pour Jonathan Bronner, titulaire à Strasbourg (Bas-Rhin), « ce n’est pas une histoire d’argent mais de santé mentale, les équipes sont épuisées et ont besoin de se reposer. Je ne pense pas que les médecins soient également partants, il ne fallait pas fermer les centres de vaccination… ».
« C’est un service gracieux qui peut nous coûter aussi de l’insatisfaction de la clientèle et une mauvaise image sur les réseaux sociaux, poursuit Pierre-Edouard Poiré. Car les clients à vacciner devront être filtrés à l’entrée. » En effet, si l’arrêté autorise les pharmacies à ouvrir le dimanche, ce n’est probablement pas pour délivrer des ordonnances ou faire des tests antigéniques, ce qui aurait permis de rentabiliser un tant soit peu la journée. « Gérer des tests et des vaccinations en même temps serait de toute façon impossible, à plus forte si je devais ouvrir seul », considère Xavier Mosnier-Thoumas. Ce pharmacien girondin reconnaît que l’ouverture du dimanche peut toutefois soulager l’organisation de la pharmacie et vacciner sa patientèle. « Avec la difficulté de trouver des rendez-vous, les gens viennent de toute part. J’ai eu une personne de Mont-de Marsan (150 km, NdlR) qui est venue spécialement se faire vacciner dans mon officine. Le risque est donc d’absorber des flux qui ne relèveraient pas de votre clientèle », explique-t-il.
Autres problèmes : la parution de cet arrêté va prendre de court les pharmaciens qui souhaitent ouvrir le dimanche compte tenu qu’ils n’ont pas commandé en prévision de ce jour supplémentaire de vaccination et que l’inertie liée aux délais de livraison va également être un frein à une ouverture immédiate, dès dimanche prochain. Par ailleurs, le problème du plafonnement des enregistrements n’est toujours pas réglé.
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