Temps de travail et congés Réservé aux abonnés

Horaires, alimentation et médicaments

Publié le 8 janvier 2005
Mettre en favori

EN PRATIQUE : MÉDICAMENTS À PRENDRE AU COURS DU REPAS

AU COMPTOIR : « Puis-je prendre mon antibiotique avec juste une tasse de thé ? »

CINÉTIQUE SELON LE REPAS

« Mon médecin m’a prescrit de la Pyostacine à prendre matin et soir au milieu des repas parce que j’ai une plaie infectée au pied. Mais le matin, je ne prend qu’une tasse de thé et je ne mange jamais rien. Est-ce vraiment gênant ? »

Votre réponse

« La Pyostacine peut entraîner des troubles digestifs et une pesanteur de l’estomac. Pour améliorer la tolérance, il faut absolument la prendre au cours des repas. Faites l’effort de manger une tartine ou deux au petit déjeuner pendant la semaine de traitement, ou prenez la Pyostacine avec une collation vers 10 heures.

Double objectif efficacité/tolérance

Certains médicaments doivent être pris au milieu des repas. Schématiquement, il s’agit soit d’améliorer l’efficacité du produit, en augmentant la résorption, ou en modifiant le métabolisme, soit d’améliorer la tolérance. Dans certains cas, il s’agit d’être cohérent avec le mode d’action du médicament.

Améliorer la résorption

Le repas peut influencer les paramètres pharmacocinétiques des médicaments : vitesse d’absorption du principe actif, concentration maximale, étalement du pic sérique, aire sous la courbe (voir schéma ci-dessus). Les modifications de résorption dues à l’alimentation résultent de mécanismes complexes et d’importance inégale : variations du pH occasionnées par la prise d’aliments, du temps de vidange gastrique et des sécrétions digestives.

Variations du pH gastrique

Après le repas, le pH stomacal passe de 1,7-1,9 (à jeun le matin) à des valeurs voisines de 3 selon le type d’alimentation, entraînant une modification de la solubilisation pour certains principes actifs (voir « Pour approfondir » page 4).

Temps de vidange gastrique

Publicité

La phase de vidange gastrique correspond au franchissement du pylore.

– Après ingestion, un médicament se retrouve dans l’intestin très rapidement lorsque l’organisme est à jeun (10 à 30 minutes). Après un repas, la vidange gastrique débute lorsque le bol alimentaire a une consistance de soupe épaisse, soit 1 à 4 heures après le repas.

– Le repas entraîne donc un allongement du temps de séjour du principe actif dans l’estomac avec pour conséquences favorables une augmentation de l’intensité de résorption de certains médicaments (dissolution améliorée par un séjour prolongé dans l’estomac). De plus, grâce au brassage du bol alimentaire et à l’action des sucs gastriques, certaines grosses molécules (spironolactone…) sont mieux fractionnées.

– La nature même des aliments peut influencer le temps de vidange gastrique. Aliments chauds, acides, alimentation visqueuse (la viscosité est augmentée par une teneur élevée en pectine) ou épaisse, teneur élevée en sucre ou sel (augmente l’osmolarité), teneur élevée en graisses ou protides (par action sur les osmorécepteurs ou stimulation de la sécrétion d’entérogastrine qui freine la vidange) sont autant de facteurs qui augmentent le temps de vidange gastrique.

– De même, certaines émotions, le décubitus latéral gauche, l’hypothyroïdie et l’ulcère gastrique peuvent retarder la vidange gastrique.

Sécrétion biliaire

La bile est sécrétée en continu mais elle est stockée dans la vésicule biliaire. Le repas déclenche la décharge dans l’intestin toutes les 30 minutes pendant 2 à 3 heures. Le contact des graisses ou des extraits de viande sur la paroi duodénale provoque la sécrétion de cholécystokinine et la décharge des sécrétions biliaires. Le transit intestinal est prolongé et la dissolution de certaines molécules est favorisée : griséofulvine, hypotenseurs, ammoniums quaternaires, carbamazépine, phénytoïne, tocophérol, hydralazine…

Nature du repas

Si certains médicaments doivent être pris au cours des repas, la composition même de ceux-ci peut avoir une influence notable sur l’absorption du principe actif.

– Glucides

Les substances hydrosolubles (type riboflavine) sont mieux résorbées si le repas est riche en glucides. De même, la phénytoïne voit sa résorption augmenter lors d’un repas à prédominance glucidique.

– Lipides

La biodisponibilité de certains antirétroviraux est sous la dépendance de la teneur en graisses du repas. Médicaments à marge thérapeutique étroite, les modifications de biodisponibilité des antirétroviraux en fonction de la composition des repas ont été étudiées de façon très précise.

– Repas riches en lipides : l’administration du lopinavir + ritonavir (Kaletra) et du ténofovir (Viread) nécessite un repas riche en graisses (870 kcal dont la moitié de lipides). L’effet bénéfique de la nourriture est constaté jusqu’à 2 heures après le repas.

– Repas pauvre en lipides ou à teneur modérée (500-680 kcal dont 1/4 d’origine lipidique) pour l’éfavirenz (Sustiva) qui se prend avec un repas pauvre en graisses. Un repas gras augmente sa biodisponibilité de 50 % avec un risque d’augmentation des effets indésirables.

– Repas léger et pauvre en graisses (300 kcal) pour l’indinavir (Crixivan) et la stavudine (Zerit).

– Protéines : un régime riche en protéines entraîne une augmentation de l’activité du cytochrome P450. La demi-vie de la théophylline est ainsi réduite de 40%.

– Calories : nécessité d’un repas copieux (1 000 kcal avec 48 g de protéines, 60 g d’hydrates de carbone et 57 g de matières grasses) avec le saquinavir seul (Fortovase), alors qu’un repas normal suffit pour le saquinavir associé au ritonavir.

Améliorer la tolérance digestive

Certains médicaments peuvent être irritants au niveau gastro-intestinal. L’absorption simultanée avec un repas (au cours ou à la fin) permet d’améliorer la tolérance, mais le moment de prise est indifférent pour l’efficacité. Les aliments jouent alors le rôle de pansement gastrique.

AINS

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont les médicaments les plus incriminés dans la genèse des effets indésirables nécessitant une hospitalisation. Ils sont responsables d’hémorragies gastro-intestinales. La prise au cours des repas semble améliorer la tolérance.

Antibiotiques

De nombreux antibiotiques sont mieux tolérés lorsqu’ils sont pris au cours des repas : amoxicilline + acide clavulanique (Augmentin, Ciblor), bacampicilline (Penglobe), triméthoprime + sulfaméthoxazole (Bactrim), minocycline (Minolis), doxycycline (Spanor, Tolexine, Vibramycine), acide pipémidique (Pipram), péfloxacine (Péflacine), acide fusidique (Fucidine), nitrofurantoïne (Furadantine), pristinamycine (Pyostacine)…

Antipaludéens

Chloroquine, proguanil, (Nivaquine, Savarine…), méfloquine (Lariam), atovaquone (Malarone) se prennent au cours des repas. La mauvaise tolérance digestive peut sinon inciter le patient à suspendre son traitement et à s’exposer dès lors à un risque de paludisme.

Hypocholestérolémiants

Le fénofibrate (Lipanthyl, Sécalip…) est mieux toléré au cours des repas. Côté statines, la plupart peuvent se prendre pendant ou en dehors des repas. Seule la pravastatine (Elisor, Vasten) nécessite une prise au cours des repas, tandis que la simvastatine (Lodalès, Zocor) s’administre un quart d’heure avant.

Antiépileptiques

Pour beaucoup, la prise au cours des repas améliore la tolérance : valproate de sodium (Dépakine), valpromide (Dépamide), carbamazépine (Tégrétol), carbidopa/lévodopa (Sinemet).

Antidiabétiques

La metformine (Glucophage, Stagid…) se prend de préférence au cours des repas pour éviter les troubles digestifs très fréquents (#gt;10 % des cas). Les sulfamides hypoglycémiants comme le glibenclamide (Daonil…) se prennent au tout début des repas. Il est intéressant d’associer la prise du sulfamide à celle du repas pour minimiser le risque d’épisodes hypoglycémiques.

Estroprogestatifs

La plupart peuvent induire des nausées. Conseiller alors une prise au cours d’un repas, qui peut aussi améliorer l’observance.

Chlorure de potassium

Responsable d’ulcérations gastro-intestinales parfois graves, le chlorure de potassium se prend au cours ou à la fin d’un repas. Diffu-K et Kaleorid LP sont des formes galéniques à libération lente conçues pour diminuer le risque de perforation intestinale.

Autres

Bétahistine (Serc), colchicine (Colchicine Houdé, Colchimax), ergotamine (DHE), thioridazine (Melleril), diosmine (Daflon, Diovenor…) sont des principes actifs mieux tolérés lorsqu’ils sont pris au cours des repas.

Etre en phase avec le mécanisme d’action

Certains médicaments ont un mécanisme d’action qui justifie une prise à un moment précis du repas.

Inhibiteurs de l’alphaglucosidase

Les antidiabétiques oraux comme l’acarbose (Glucor) ou le miglitol (Diastabol) agissent au niveau de la bordure en brosse de l’intestin en diminuant la dégradation des di-, oligo- et polysaccharides en monosaccharides absorbables. Ils doivent donc être pris dès les premières bouchées du repas pour être présents dans la lumière intestinale en même temps que le repas et diminuer ainsi l’hyperglycémie postprandiale.

Orlistat

L’orlistat (Xenical), inhibiteur des lipases gastro-intestinales prescrit dans le traitement de l’obésité, empêche l’hydrolyse des triglycérides d’origine alimentaire en acides gras libres et monoglycérides absorbables. Il doit être pris immédiatement avant, pendant ou jusqu’à une heure après le repas. Si un repas est sauté ou ne contient pas de graisse, ne pas prendre le médicament.

Enzymes pancréatiques

L’enzymothérapie à base de poudre de pancréas (Créon…) s’administre au cours des repas pour remplir son rôle substitutif.

Acide alginique

Les alginates (Gaviscon, Topaal, Topalkan…) se transforment au contact du contenu acide de l’estomac en un gel mousseux, surnageant au-dessus du contenu stomacal, et protégeant l’oesophage en cas de reflux oesophagien. Ils doivent donc être pris juste à la fin du repas.

POUR APPROFONDIR : Les mécanismes de l’absorption d’un médicament

L’absorption des médicaments se fait au niveau du tube digestif au travers d’une membrane lipoïdique, essentiellement par diffusion passive et par passage actif.

La diffusion passive

Mécanisme habituel pour les médicaments présentant un caractère polaire faible ou nul, la diffusion passive est fonction de la liposolubilité de la molécule et de son degré d’ionisation.

Seule la fraction non ionisée du médicament est liposoluble et peut franchir la membrane lipoïdique.

Le degré d’ionisation d’une molécule dépend de deux facteurs : le pKa (constante d’acidité : plus l’acide est fort, plus le pKa est petit) et le pH du milieu (1-2 pour l’estomac à jeun, 3 pour l’estomac lors des repas, 4-6 pour le duodénum, 6-8 pour l’intestin grêle). Au final, les acides faibles sont résorbés en milieu acide (gastrique) tandis que les bases faibles sont résorbées en milieu basique (intestin). La diffusion passive dépend également de facteurs externes : physiologiques, pathologiques (maladie coeliaque…), iatrogènes (modification du pH digestif par certains médicaments comme la cimétidine qui augmente le pH) et alimentaires.

Le passage actif

Le passage actif concerne peu de médicaments : les acides aminés tels la L-dopa et l’alphaméthyldopa, la D-pénicillamine, les antitumoraux (5-fluoro-uracile, moutardes azotées), les glucosides cardiotoniques, le fer, la riboflavine et l’acide ascorbique.

Le passage actif se fait contre un gradient de concentration et nécessite un transporteur spécifique assurant la résorption des molécules comme les acides aminés, les ions ou certains acides et bases forts. Ce mécanisme, nécessitant une dépense énergétique, est saturable.

La résorption de ces médicaments est fortement influencée par la nature du repas.

EN PRATIQUE : MÉDICAMENTS À PRENDRE EN DEHORS DES REPAS

AU COMPTOIR : « Cela passerait mieux au milieu du repas »

LA DISTANCE IDÉALE PAR RAPPORT AU REPAS

« Mon médecin a prescrit à ma fille de 13 ans quatre cuillères à café par jour de Fungizone, à prendre en dehors des repas. Elle trouve que ça a très mauvais goût et préférerait les prendre en mangeant. Cela passerait mieux et ce serait plus pratique car elle n’aurait pas à emmener le flacon au collège… »

Votre réponse

« Bien sûr, c’est un peu compliqué pour votre fille, mais la Fungizone en suspension doit être prise en dehors des repas et des boissons. C’est un médicament qui exerce son action localement tout au long du tube digestif et celui-ci doit être vide au moment de la prise. Les quatre cuillères à café pourront être prises en 2 fois à 2 heures des repas, soit 2 cuillères à 10 heures, à la récréation, et 2 au coucher, vers 21 h 30. »

Une prise en dehors des repas signifie en principe une prise une heure avant ou deux heures après les repas.

Effets « néfastes » du repas

Chélation du principe actif

La chélation est un processus physicochimique au cours duquel est formé un complexe, le chélate, non absorbé au niveau intestinal. Les principes actifs susceptibles de se chélater avec les nutriments doivent être pris à distance des repas. Ainsi, le zinc forme des complexes insolubles avec les phytates de l’alimentation. Les médicaments comme Rubozinc sont à prendre à distance de pain complet, germes de soja ou grains de maïs.

De même, la tétracycline forme des complexes avec les aliments riches en calcium. Cette interaction n’est pas retrouvée avec la doxycycline (Vibramycine, Doxygram…) et la minocycline (Mynocine).

Compétition vis-à-vis d’un même transporteur

Cette interaction concerne certains médicaments résorbés par transport actif, lorsque le transporteur est aussi celui de nutriments. C’est le cas des acides aminés alimentaires et des médicaments de structure voisine tels que lévodopa (Sinemet), méthyldopa (Aldomet) qui sont à prendre en dehors des repas comprenant des protéines.

Diminution de l’activité locale

Les médicaments à action locale au niveau du tube digestif seront éliminés prématurément par le bol alimentaire s’ils sont pris avant un repas (voir paragraphe « Agir localement »).

Améliorer la résorption

Afin d’améliorer leur résorption, certains médicaments doivent être ingérés à distance des repas.

Biphosphonates

Même pris à jeun, les biphosphonates ont une biodisponibilité très réduite : moins de 1 % pour le risédronate (Actonel ) et l’alendronate (Fosamax), 3,5 % pour l’étidronate (Didronel). La prise au cours d’un repas diminue encore cette biodisponibilité, la rendant parfois nulle. Il est donc primordial de les prendre strictement à distance des repas.

Antibiotiques

La prise de nourriture ralentit l’absorption de nombreux antibiotiques. Par exemple, la prise de fosfomycine (Monuril, Uridoz) au cours d’un repas entraîne une moindre concentration urinaire de l’antibiotique, avec un risque de diminution de l’efficacité. Celui-ci doit donc se prendre à jeun ou 2 à 3 heures avant un repas. Idem pour les macrolides (josamycine, roxithromycine, érythromycine…), la céfalexine (Céporexine, Keforal), oxacilline et dérivés (Bristopen, Orbénine, Oracilline), qui doivent être pris à distance des repas. Pour le céfaclor (Alfatil), l’absorption au cours d’un repas diminue le pic de concentration sérique (50 % à 75 % du pic sérique obtenu à jeun) et son apparition est retardée de trois quarts d’heure à une heure, mais la biodisponibilité totale n’est pas modifiée. La prise peut donc se faire pendant ou en dehors des repas.

Antituberculeux

L’isoniazide (Rimifon) et la rifampicine (Rifadine, Rimactan) sont administrés en une seule prise à distance des repas, car la prise de nourriture réduit leur absorption.

Sels de fer

Ils ont une meilleure biodisponibilité pris en dehors des repas. Toutefois, leur mauvaise tolérance digestive impose parfois une prise au cours des repas. Il faut alors conseiller le meilleur compromis possible.

Lévothyroxine

Elle présente une meilleure biodisponibilité prise 30 minutes avant le petit déjeuner.

Agir localement

Les médicaments à action locale, non résorbés par l’intestin, doivent être pris en dehors des repas pour une meilleure efficacité. Ainsi, l’amphotéricine B (Fungizone) est un antifongique à usage topique qui n’est pratiquement pas absorbé par la muqueuse digestive. Pour exercer localement son action, elle doit être prise en dehors des repas. De même, les antiseptiques intestinaux comme le nifuroxazide (Ercéfuryl, Panfurex…) ou le nifurzide (Ricridène) seront logiquement pris en dehors des repas.

Agir au moment voulu

Prokinétiques

La dompéridone (Motilium, Péridys…) accélère la motricité intestinale. Le pic plasmatique après administration orale est atteint en 30 minutes. Elle est donc administrée 15 à 30 minutes avant les repas.

Antiacides

Les pansements gastro-intestinaux à base de sels d’aluminium ou de magnésium (Maalox, Moxydar, Phosphalugel, Rennie, Rocgel, Xolaam…) doivent être administrés deux heures après les repas, lorsque l’effet tampon de l’alimentation a disparu. La prise en dehors des repas évite également l’entraînement du pansement avec le bol alimentaire.

Corticoïdes

La sécrétion endogène de corticoïdes suit un rythme circadien : maximale juste avant le réveil, elle diminue tout au long de la journée pour atteindre un minimum vers minuit. Une administration de corticoïde le soir, à contrecourant de la sécrétion physiologique, provoque deux fois plus d’inhibition de la sécrétion de cortisol que la même dose prise le matin.

La totalité de la dose (ou au minimum les 2/3) doivent être administrés le matin entre 8h et 10h, pour éviter la mise au repos des surrénales.

POUR APPROFONDIR : L’AVIS DU SPÉCIALISTE

« La chronobiologie a des applications médicales »

On parle beaucoup de chronopharmacologie. Est-ce que la connaissance des rythmes biologiques a des applications médicales au niveau des prises médicamenteuses ?

La chronopharmacologie étudie l’influence du moment d’administration des médicaments sur la réponse de l’organisme et concerne donc l’étude, en fonction du moment d’administration, des variations de la toxicité des médicaments (chronotoxicité) et de leur activité, aussi bien qualitative que quantitative. La chronopharmacologie s’explique par la chronopharmacodynamie et la chronopharmacocinétique. Par exemple, on connaît depuis longtemps la variabilité temporelle de la survenue de symptômes en rhumatologie, endocrinologie, cardiologie ou pneumologie. Il est bien connu que le diamètre bronchique varie au cours des 24 heures en passant par un minimum nocturne, ce phénomène étant accentué chez l’asthmatique. Ainsi, plus de 70 % des crises d’asthme ont lieu vers 3 heures du matin. La réponse de l’organisme sera différente suivant l’état dans lequel il se trouve au moment où il reçoit un médicament : ceci constitue la base des phénomènes chronopharmacologiques.

L’activité d’une thérapeutique et la tolérance aux médicaments peuvent donc varier en fonction du moment d’administration, indépendamment d’une prise alimentaire…

Oui, il existe des variations d’activité des médicaments liés au moment de leur administration et des modifications temporelles de leur toxicité. L’absorption d’un médicament peut varier au cours des 24 heures indépendamment de la présence d’aliments : par exemple, une prise unique de lorazépam à 7 heures du matin est suivie d’une absorption plus rapide qu’après une prise à 19 heures. De même, la fixation protéique de la carbamazépine passe de 90 % lors d’une administration à 4 h 00, à 72 % pour une prise à 10 h 00. L’élimination des médicaments, essentiellement rénale, est elle aussi sous la dépendance de modifications rythmiques (flux sanguin rénal, pH, filtration glomérulaire…). Par exemple, l’élimination urinaire des salicylés est plus importante lors d’une ingestion le soir entre 19 h 00 et 23 h 00.

Quant à la toxicité, certains travaux ont montré que dans les cancers de l’ovaire ou de la vessie, la tolérance des sels de platine est meilleure lors d’une administration à 18 h 00.

L’application de ces données conduit à la chronothérapie qui est la possibilité de choisir le meilleur moment d’administration du médicament pour une meilleure efficacité et/ou une meilleure tolérance.

Bernard Bruguerolle, professeur des universités et praticien hospitalier, directeur du laboratoire de pharmacologie à la faculté de médecine de Marseille et au CHU de la Timone, et président de la Société francophone de chronobiologie.

EN PRATIQUE : AVEC QUELLE BOISSON ?

AU COMPTOIR : « Je bois beaucoup de café avec mon Ciflox »

TAUX DE CAFÉINE

« Mon médecin m’a prescrit du Ciflox pour une prostatite. Je dois le prendre pendant au moins 3 semaines ! Je sais qu’il ne faut pas boire d’alcool avec les médicaments. Mais je fais très attention, je ne bois que du café ! »

Votre réponse

« Il est vrai que l’alcool n’est bon ni pour la santé, ni pour prendre des médicaments. Mais ne croyez pas que votre café soit anodin si vous en consommez beaucoup. L’association du Ciflox et de la caféine risque d’entraîner une augmentation du taux de caféine dans votre sang. Gare aux palpitations et aux insomnies ! »

Le mieux est souvent de prendre ses médicaments avec de l’eau, en quantité suffisante (100 ml), car des boissons anodines à première vue peuvent interférer avec certains médicaments.

Le lait

Le lait peut entraîner la formation de complexes ne pouvant pas traverser les membranes biologiques.

-#gt; Attention aux médicaments pédiatriques, souvent donnés dans le biberon pour en faciliter l’administration ! En particulier, l’efficacité du fluor est diminuée. Eviter l’emploi simultané.

-#gt; En revanche, le lait augmente l’absorption de l’atovaquone (Malarone). Il est conseillé de prendre cet antipaludéen avec une boisson lactée.

Le thé

-#gt; Les tannates présents dans le thé forment des complexes insolubles avec les sels de fer et en diminuent la biodisponibilité.

-#gt; L’halopéridol (Haldol) et la chlorpromazine (Largactil) mélangés au thé entraînent la formation de précipités insolubles.

Le café

Le café, tout comme les boissons riches en caféine, peut également former des complexes insolubles avec certains principes actifs comme l’halopéridol. Mais il possède d’autres effets potentiels.

– Caféinémie augmentée

Certains principes actifs interfèrent au niveau des cytochromes avec la caféine, entraînant une diminution de son élimination, d’où une augmentation de la caféinémie avec toxicité accrue (palpitations, nervosité…).

-#gt; Ciprofloxacine (Ciflox, Uniflox), enoxacine (Eno-xor) ; risque moindre avec la norfloxacine (Noroxine).

-#gt; Contraception hormonale : interaction probable en présence de doses importantes de caféine, en particulier lors d’un usage prolongé.

-#gt; Disulfirame : l’augmentation de la caféinémie est importante chez les alcooliques récemment abstinents. Eviter la caféine lors des cures de sevrage.

-#gt; Fluvoxamine ; effets non rencontrés avec les autres inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine.

– Diminution de l’efficacité des médicaments associés

-#gt; Dipyridamole : effet diminué par blocage des récepteurs à l’adénosine par la caféine.

-#gt; Lithium : augmentation probable de l’élimination rénale. Surveiller la lithiémie.

– Effets cardiovasculaires majorés

-#gt; Nicotine : possible augmentation de la pression artérielle et du rythme cardiaque après deux tasses de café accompagnées d’une gomme à la nicotine.

Le jus de pamplemousse

Le jus de pamplemousse contient un inhibiteur du cytochrome P450 de type 3A4 qui ralentit le métabolisme de certains médicaments. Par précaution, le jus de pamplemousse devrait être évité dans les deux heures précédant ou suivant la prise d’un médicament.

– Ciclosporine

Toxicité éventuelle de la ciclosporine (Néoral, Sandimmun) par augmentation du taux plasmatique.

– Saquinavir

Augmentation de la biodisponibilité du saquinavir (Fortovase, Invirase) jusqu’à une toxicité. L’effet peut être recherché pour augmenter les taux de l’antirétroviral, mais l’effet du jus de pamplemousse est variable d’une personne à l’autre.

– Inhibiteurs calciques

Boire régulièrement du jus de pamplemousse trois fois par jour pendant 5 jours provoque une augmentation de plus de 500 % de la concentration plasmatique en félodipine (Flodil) !

– Benzodiazépines

Augmente l’activité du triazolam et du midazolam par diminution du métabolisme.

Les autres jus de fruits

Ils ne contiennent pas d’inhibiteurs enzymatiques, mais le pH d’un jus de citron ou d’orange est d’environ 2,5 à 3,5, celui d’un jus de tomate de 3,9 à 4,4. Les jus de fruits peuvent modifier la pharmacocinétique de certains médicaments (absorption et élimination, notamment des médicaments basiques) ou altérer les principes actifs sensibles à un pH acide. Eviter une consommation abondante avec l’ampicilline (Totapen) et ses dérivés, l’érythromycine (Erythrocine…), l’oxacilline (Bristopen) et ses dérivés…

Les eaux encapsulées

Les eaux en bouteille ne sont pas toujours recommandées pour la prise de médicaments : certains eaux ont une teneur en calcium loin d’être négligeable et peuvent former des complexes avec certains médicaments : Hepar (575 mg/l), Contrex (468 mg/l)… De même pour la teneur en fluor, qui peut influencer l’absorbtion du calcium : Saint-Yorre (8,9 mg/l), Sail-les-Bains (6,5 mg/l), Vichy Celestins (6,1 mg/l)… De plus, les boissons gazeuses accélèrent la vidange gastrique par stimulation des mouvements péristaltiques, et peuvent modifier la biodisponibilité de certains principes actifs.

L’alcool

– Mécanismes d’action

Les mécanismes sont très complexes. De fortes doses d’alcool retardent l’évacuation gastrique (par spasme du pylore), diminuant la résorption et/ou la biodisponibilité de certains médicaments (diazépam, pénicilline V, vitamines). Cela nuit aux principes actifs sensibles à un pH acide (érythromycine…). A l’inverse, certains principes actifs auront une biodisponibilité accrue (trinitrine).

– Prise aiguë ou chronique

-#gt; L’alcoolisation aiguë a un effet inhibiteur par liaison avec le cytochrome P450 : réduction du métabolisme du phénobarbital, des AVK, du méprobamate, des benzodiazépines…

-#gt; La prise répétée et excessive d’alcool a un effet inducteur enzymatique et accélère le métabolisme.

POUR APPROFONDIR : L’effet antabuse impose l’abstinence alcoolique

Métabolisation de l’alcool

– Formation d’acétaldéhyde

L’éthanol est métabolisé en acétaldéhyde par deux voies : la voie principale liée à l’alcool-déshydrogénase, qui représente 80 % environ des capacités métaboliques, et le système microsomial d’oxydation qui métabolise les 20 % restants.

– Métabolisation de l’acétaldéhyde

L’acétaldéhyde ainsi produit est oxydé en acétate grâce à l’acétaldéhyde-déshydrogénase (ALDH). Puis l’acétate est dégradé en acétylcoenzyme A, métabolisée dans le cycle de Krebs en CO2 et H2O en donnant de l’énergie (7,1 calories/g d’éthanol). L’ALDH possède plusieurs isoenzymes d’efficacité différente.

Mécanisme du flush antabuse

C’est l’accumulation d’acétaldéhyde qui provoque l’effet antabuse. Elle peut avoir deux origines : la présence d’une isoenzyme de l’ALDH inactive chez certaines populations, en particulier asiatiques (syndrome appelé « oriental flush »), ou la prise de certains médicaments susceptibles d’inhiber l’action de l’acétaldéhyde-déshydrogénase.

Signes de l’effet antabuse

Flush très pénible (bouffées de chaleur), tachycardie, tachypnée, nausées, vomissements sont les manifestations de l’effet antabuse. La crainte de ces manifestations pénibles est utilisé dans les tentatives de traitement aversif vis-à-vis de l’alcool (disulfirame : Espéral).

Médicaments à effet antabuse

D’autres médicaments ont un effet antabuse qui nécessite de s’abstenir d’alcool pendant le traitement : acide nalidixique (Négram), ceftriaxone (Rocéphine), glibenclamide (Daonil, Euglucan, Hemi Daonil, Miglucan), glipizide (Glibénèse, Minidiab), griséofulvine (Griséfuline), isoniazide (Rimifon), kétoconazole (Nizoral), métronidazole (Flagyl, Rodogyl), nitrofuranes (Furadoïne, Furadantine..), nilutamide (Anandron), sulfiram même en application externe (Ascabiol).

EN PRATIQUE : LES ALIMENTS PARTICULIERS

AU COMPTOIR : « Mon médecin m’a interdit la choucroute ! »

« Depuis que je suis sous Préviscan, mon médecin m’a fortement recommandé d’éviter les aliments contenant de la vitamine K. Il m’a surtout parlé des choux. Moi qui suis d’origine alsacienne, j’en mange souvent, surtout en cette saison ! Est-ce que ça veut dire que je n’ai plus le droit de manger de choucroute ? Et à part les choux, y a-t-il d’autres aliments que je ne dois pas consommer ? »

Votre réponse

« Votre médecin a eu raison de vous mettre en garde contre les aliments contenant de la vitamine K. Cependant, tout dépend de la dose de chou consommée et de la fréquence. Vous pouvez manger un peu de choucroute à condition que votre INR soit stable en ce moment. Evitez d’en manger beaucoup malgré tout, et surtout pas en grande quantité la semaine précédent le contrôle biologique. Quant aux autres aliments contenant de la vitamine K et pour lesquels les mêmes précautions s’imposent, ce sont essentiellement les épinards, la laitue, les haricots blancs, les choux de Bruxelles et le chou vert, les brocolis, mais aussi le persil, le cresson et les huiles de colza et de soja. »

Des interactions entre médicaments et aliments peuvent survenir. Il en résulte une potentialisation ou un antagonisme de l’effet pharmacologique du médicament.

Effet choucroute

Les antivitamines K (AVK) inhibent la synthèse hépatique des facteurs II, VII, X, IX et s’opposent de façon compétitive à l’action de la vitamine K. La consommation de certains aliments riches en vitamine K peut expliquer la difficulté d’équilibrer l’INR chez certains malades malgré une bonne observance et en l’absence d’interactions médicamenteuses. Les aliments (voir tableau) interviennent si leur consommation est importante, correspondant à un apport de 0,5 à 1 mg de vitamine K1. Ce risque est potentialisé en cas de consommation répétée et accompagnée de boissons alcoolisées.

De plus, les choux augmentent le métabolisme de certains anticoagulants.

La consommation de ces aliments doit être déconseillée si le contrôle strict de l’INR est souhaité.

Cette précaution doit s’appliquer à la nutrition entérale pour laquelle on doit s’assurer de l’absence de vitamine K dans les solutés nutritifs.

Pain complet

Le pain complet contient une forte proportion d’acide phytique, qui peut former des complexes insolubles avec de nombreux cations : fer, zinc, calcium. Par exemple, 350 g de pain complet peuvent complexer 400 à 500 mg de calcium, induisant à la longue un effet déminéralisant. Il est donc préférable d’éviter le pain complet en grande quantité lors de traitement antiostéoporotique à base de calcium, d’antianémiques à base de fer ou d’antiacnéiques à base de zinc.

Effet fromage

-#gt; L’administration d’antidépresseurs inhibiteurs de la monoamine-oxydase non spécifiques (iproniazide : Marsilid) est devenue confidentielle. Il ne faut pas oublier qu’elle peut occasionner des effets indésirables sévères lors d’interaction avec certains aliments contenant de la tyramine. Cette réaction est appelée « effet fromage » ou « réaction au fromage » car les fromages fermentés contiennent une grande quantité de tyramine. D’autres aliments comme les saucisses fumées, les extraits de viande conservés par salaison, les figues, avocats, raisin, groseilles, ananas, le café, le chocolat en contiennent également des quantités importantes (certains vins aussi). La tyramine est normalement métabolisée par les monoamines-oxydases au niveau intestinal et hépatique, de sorte qu’elle ne se retrouve jamais dans le sang. Lorsque les monoamines-oxydases sont inhibées par les IMAO, la tyramine circule dans l’organisme et peut déclencher des poussées hypertensives ou de fortes céphalées.

-#gt; Cette interaction n’est pas cliniquement significative pour les IMAO sélectifs (moclobémide : Moclamine).

-#gt; Par un mécanisme similaire, l’isoniazide (Rimifon) administré avec des aliments ou boissons riches en tyramine ou histamine peut entraîner palpitations, tachypnée, sudations, urticaire, céphalées, vomissements.

Sel diététique

Les sels diététiques sont généralement des sels de potassium. Ne pas les associer aux diurétiques épargneurs de potassium (amiloride, spironolactone, triamtérène…), aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion et aux antagonistes de l’angiotensine II en raison du risque de survenue d’hyperkaliémie, surtout en cas d’insuffisance rénale.

Aliments cuits au feu de bois

La cuisson des viandes au feu de bois génère la production de benzopyrène et autres hydrocarbures polycycliques (1 kg de viande = 100 à 200 cigarettes) qui stimulent des enzymes du tractus gastro-intestinal et hépatiques. Il s’ensuit une accélération du catabolisme de certaines molécules comme la théophylline. Son temps de demi-vie est réduit de 22 % et la clairance métabolique est augmentée de 30 %.

Huiles minérales

L’huile de paraffine aromatisée ou non (Restrical, Parlax) est parfois utilisée pour assaisonner les crudités. Elle accélère le transit, diminue l’absorption des anticoagulants et des vitamines liposolubles.

Ail

L’ail agit sur le cytochrome P450 et donc interfère sur l’élimination de nombreux principes actifs comme la digoxine, la théophylline, les antivitamines K, la ciclosporine, les contraceptifs oraux et certains antirétroviraux. A consommer avec modération.

Aliments agissant sur le pH urinaire

Le pH urinaire modifie le degré d’ionisation de nombreux médicaments (quinidine, acide acétylsalicylique, lithium) et par suite leur vitesse d’élimination.

-#gt; Les végétaux et la plupart des fruits frais, riches en sels minéraux et organiques alcalinisent les urines. Par exemple, 200 grammes de fraises correspondent à la prise de 2 g de bicarbonate de sodium. Les laitages sont également alcalinisants.

-#gt; A l’inverse, les viandes, les poissons, les fromages, les pâtes, le pain, le maïs et les lentilles acidifient les urines. Certains fruits comme les myrtilles, les prunes ou les pruneaux contiennent de l’acide benzoïque et sont très acidifiants.

-#gt; Le pH urinaire peut également provoquer la précipitation de certains médicaments : la méthénamine précipite en milieu alcalin, tandis que le méthotrexate ou les sulfamides précipitent en milieu neutre ou acide, avec un risque de formation de calculs.

Fibres

Les fibres alimentaires peuvent faciliter l’action de nombreux médicaments, en particulier les hypoglycémiants oraux et les hypolipémiants.

POUR APPROFONDIR : Se méfier aussi des additifs alimentaires !

Certaines substances en marge de l’alimentation peuvent interférer avec des pathologies et/ou des médicaments.

Additifs

-#gt; L’acide nicotinique, ajouté à certaines viandes dans le but de les empêcher de noircir, peut entraîner une hyperglycémie lorsqu’il est ingéré à hautes doses durant un temps prolongé. Informer les diabétiques d’une possible diminution d’efficacité des hypoglycémiants.

-#gt; Agent de sapidité, le glutamate de sodium utilisé dans la cuisine asiatique et les plats préparés est responsable du « syndrome du restaurant chinois » dont le mécanisme est mal élucidé. Les signes : violent flush facial et du haut du corps, oppression thoracique, céphalées, anxiété… Cet effet se manifeste d’autant plus facilement que le glutamate est consommé en début de repas et avec de l’alcool. Ce risque s’accroît avec des médicaments responsables de flush : dérivés nitrés, antagonistes calciques, chlorpropamide…

Epices

-#gt; Le curry potentialise de façon importante l’activité hypoglycémiante des sulfamides.

-#gt; La glycyrrhizine présente dans le pastis (avec ou sans alcool) mais aussi dans l’Antésite ou diverses sucreries peut causer une hypokaliémie lorsqu’elle est consommée de façon excessive. Avertir les patients sous traitement digitalique, antiarythmique, sous sotalol ou diurétiques thiazidiques et apparentés.

Antioxydants

-#gt; Les sulfites, utilisés pour leurs propriétés antioxydantes et bactéricides dans l’alimentation, sont déconseillés aux patients asthmatiques chez lesquels ils aggravent l’état et nuisent à l’efficacité du traitement. Les sulfites sont présents dans les produits au vinaigre, les chips, les fruits et légumes secs, les plats cuisinés, les condiments, le café et le thé instantanés, les conserves…Les étiquettes sont à surveiller.

COMMUNIQUEZ ! HORAIRES, ALIMENTATION ET MÉDICAMENTS

DES IDÉES DE VITRINES

Il y a les adeptes du « tout pendant le repas, ça fait moins mal à l’estomac », ceux du « tout au petit déjeuner pour ne pas oublier », ou ceux du « ça passerait mieux avec un petit verre de vin »… A vous de donner à chacun le bon conseil et surtout de soulever le problème à travers la comptine imaginée pour cette vitrine.

Réalisation

4 heures

Les fournitures

– Papier transparent

– Baguettes de bois

– Lettres adhésives

– Un cerceau

– Nappe en papier

– Gélules

– Papier Canson noir

– Coupelles contenant des gelules de différents couleurs

Les slogans

– « Avant l’heure, c’est pas l’heure, après l’heure, c’est plus l’heure »

– « Le bon moment pour prendre son médicament »

– « Alcool et médicaments ne font pas bon ménage »

Malin !

Pour donner profondeur et lisibilité à votre vitrine, fabriquez un panneau avec du papier transparent que vous tendrez grâce à deux baguettes de bois (1).

Vous pouvez écrire la comptine à la main ou avec des lettres adhésives.

L’horloge se construit avec un cerceau contre lequel vous collerez la nappe en papier découpée en suivant son contour. Collez ensuite des gélules pour indiquer les heures et les aiguilles que vous aurez dessinées et découpées dans du papier Canson noir.

DES CONSEILS POUR VOTRE RAYON : Des outils pour systématiser le conseil !

Comment systématiser le conseil des modalités de prise d’un médicament et aider vos clients à les mettre en pratique ? Voici quelques idées.

Aide à la délivrance : vive les pictogrammes !

Pour repérer rapidement les conseils principaux attachés à l’alimentation, utilisez des pictogrammes. Insérés dans le tiroir ou sur l’étagère devant le médicament concerné, ils vous permettent de visualiser tout de suite si le médicament présente une modalité de prise particulière en fonction des repas et l’heure de prise souhaitable. Choisissez vous-même les pictogrammes en imaginant éventuellement plusieurs paliers de lecture. Ainsi un médicament devant être pris au cours des repas sera signalé par un carton ou un sticker rouge sur lequel sera dessiné une casserole (ou tout autre picto d’ordinateur). Si le médicament doit être pris avant les repas, vous ajouterez en dessous du symbole « Avant » ainsi que le délai. Lorsqu’il s’agit d’attirer l’attention sur une éventuelle vigilance avec un aliment, le symbole sera précédé d’un panneau « Danger » et en dessous seront notés les aliments incriminés. Un pictogramme propre à l’alcool doit aussi être envisagé.

Conseils aux patients : faites preuve d’astuce !

Dans le même esprit, des stickers ou petit aide-mémoire maintenu sur la boîte du médicament à l’aide d’un trombone ou autocollants peuvent être remis au patient pour lui permettre de mieux respecter le protocole de prise en fonction des repas. Bien sûr, les fiches conseil personnalisées par l’officine sur des pathologies comme l’ostéoporose par exemple devront insister sur l’importance des horaires de prise de certaines classes de médicaments et expliquer pourquoi. Il est plus facile de respecter une règle quand on en connaît la raison ! Pour un message plus percutant, et si vous utilisez déjà des stickers pour les boîtes que vous remettez aux patients, reprenez les symboles dans le cadre de la fiche pour respecter la cohérence de votre communication.

Les piluliers à l’honneur

Exposez-les pliluliers ! Pourquoi ne pas leur réserver une place dans l’espace client non loin des comptoirs ? Etoffez votre offre. Il existe sur le marché différents type de piluliers à la journée, hebdomadaires, avec ou non des horaires, de voyage, etc. Ils sont un bon moyen de mettre en avant l’importance des horaires. Pourquoi ne pas créer une animation sur ce thème en concevant une vitrine, en étoffant le coin « pilulier » à l’aide de panneaux explicatifs – par exemple du type « Avant l’heure c’est pas l’heure » – et en reprenant l’argumentaire et l’importance du respect des horaires ? Le thème peut d’ailleurs traiter globalement de l’observance…

LES MOTS POUR CONVAINCRE : Connaître les impératifs de prise

Remettre un plan de prise

Heureusement, pour la majorité des médicaments, le moment de prise par rapport aux repas est indifférent, Raison de plus pour bien mémoriser les exceptions : prises impérativement à jeun ou au contraire au cours des repas, aliments à éviter ou effet antabuse possible. Il faut alors prendre les devants et systématiquement le mentionner au patient. L’idéal est d’imprimer un «plan de prise» personnalisé, qui justifie la valeur ajoutée de la pratique officinale.

Lors des renouvellements, si à la question : « A quel moment prenez-vous ces comprimés ? » le patient hésite et s’embrouille, c’est qu’il ne prend pas régulièrement son médicament. Une nouvelle explication s’impose !

Lorsqu’il n’y a pas d’impératifs de prise, pensez également à le préciser à votre patient. Lui va se retrouver avec parfois plusieurs comprimés ou gélules à prendre. L’heure du repas approchant, il va inévitablement se demander s’il doit les prendre avant, pendant ou après le repas, et sa décision ne sera pas forcément judicieuse.

Expliquer le pourquoi

Une règle expliquée a plus de chances d’être suivie. Par exemple, dites : « La prise d’alcool même en quantité minime peut vous donner avec ce médicament des maux de tête et des bouffées de chaleur très désagréables. Il ne faut pas en boire pendant le traitement. » Ou : « Ce médicament a beaucoup de mal à passer la barrière de l’intestin. Prenez-le une demi-heure avant le repas pour qu’il ne soit pas gêné par la présence des aliments. »

Favoriser la mémorisation

Dire, montrer, écrire améliore la compréhension et la mémorisation.

– Montrer la boîte du médicament pour lequel on donne le conseil.

– Ecrire sur la boîte et dire : « Vous voyez, je vous marque la posologie et l’heure de prise. »

Eviter les règles absolues

Il faut parfois concilier biodisponibilité optimale et tolérance. Même si la biodisponibilité est effectivement meilleure, il est inutile d’imposer la prise du fer avant les repas si votre patient ne le supporte qu’au cours de ceux-ci ! En revanche, pour certains médicaments (biphosphonates, fosfomycine, antirétroviraux…), il en va de l’efficacité même du traitement. Il faut que les explications soient convaincantes.

DOCUMENTEZ-VOUS

LIVRES

Médicaments, heure, tabac et alimentation

Jean-Louis Saulnier et Marc Talbert, éditions Frison-Roche, 2e édition

Un des rares ouvrages consacrés à la prise médicamenteuse par rapport à quatre facteurs : l’alimentation, les boissons, le tabac et l’alcool. Une première partie est consacrée à l’influence de ces quatre facteurs sur la pharmacocinétique et à la chronopharmacologie. La seconde partie, très pratique, présente sous forme de tableaux les principaux médicaments et les éventuelles interactions avec les quatre facteurs, ainsi que des conseils de prise. Un ouvrage un peu ancien (1988) qu’on aimerait voir actualisé car très utile…

DDM, 11e édition

Denis Stora, éd. Pro-Officina

Le « Dictionnaire de dispensation des médicaments » propose un condensé d’informations sur chaque médicament par ordre alphabétique. Pratique, une colonne « Alerte » fournit des indications sur les moments de prise et les aliments ou boisson à éviter. Ce qui est parfois bien long à retrouver au sein d’une monographie du « Vidal » saute ici aux yeux sous forme de pictogramme. Astucieux !

INTERNET

http://www.sf-chronobiologie.org

La Société francophone de chronobiologie est une société pluridisciplinaire réunissant des chercheurs de tous horizons : médecins, pharmaciens, physiologistes, pharmacologues… Elle s’intéresse aux moments de prise des médicaments pour optimiser leur action et limiter les effets secondaires. Le site permet de découvrir le journal « Rythmes », avec accès direct aux archives. Le dernier numéro présente les communications du 36è Congrès de la Société Fancophone de Chronobiologie. Figure également sur le site un agenda des manifestations autour de la chronobiologie.

En cas de nutrition artificielle

Quelques précautions s’imposent pour l’administration simultanée d’une nutrition entérale et de certains médicaments.

-#gt; Eviter l’emploi simultané d’antiacides et de préparation contenant de larges fractions de peptides à haut poids moléculaire : risque d’occlusion oesophagienne par précipitation des protéines par l’aluminium des antiacides.

-#gt; AVK : leur effet anticoagulant peut être diminué par augmentation des apports de vitamine K (recourir alors à des solutés pauvres en vitamine K) ou par adsorption de l’anticoagulant.

-#gt; Phénytoïne : son effet est diminué par diminution de son absorption. Respecter un intervalle de 2 heures sans alimentation entérale si possible et surveiller les taux thérapeutiques de phénytoïne.

Aspirine : concilier biodisponibilité et tolérance

– L’aspirine illustre la nécessité d’un compromis entre biodisponibilité et tolérance. Sa résorption est meilleure à jeun, mais sa mauvaise tolérance gastro-intestinale rend préférable une prise au cours des repas.

– La toxicité gastro-intestinale s’explique principalement par l’inhibition de la synthèse des prostaglandines (PGE1 et surtout PGE2). Ces prostaglandines ont un effet cytoprotecteur de la muqueuse gastrique par diminution de la sécrétion acide gastrique et augmentation de celle du mucus gastrique. Leur inhibition majore le risque d’ulcère et d’hémorragie digestive.

– La toxicité gastro-intestinale de l’aspirine est aussi liée à son caractère local irritant.

– Les effets indésirables gastriques peuvent être réduits par utilisation de formes galéniques particulières telles les formes tamponnées (effervescentes) et les formes solubles (acétylsalicylate de lysine), qui arrivent sous forme très divisée

donc moins nocive, dans l’estomac.

Eviter le risque de fausse-route

Attention au risque de fausse-route dû aux anesthésiques locaux présents dans les collutoires, pastilles… Préconiser une prise loin des repas, notamment chez les personnes âgées

et les enfants.

Tenir compte du tabagisme

Le tabac entraîne une augmentation du métabolisme de certains médicaments : propranolol (Avlocardyl), éventuellement des estrogènes, du paracétamol, des tricycliques (Anafranil, Tofranil : surveiller les taux), de la clozapine (Leponex : adaptation posologique éventuelle), de la fluvoxamine (Floxyfral) et de la théophylline (Dilatrane, Euphylline, Theostat… : surveiller les taux thérapeutiques). Le tabagisme passif peut engendrer une interaction similaire.