Faux pass sanitaire Covid-19 : ce que risque le pharmacien 

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Faux pass sanitaire Covid-19 : ce que risque le pharmacien 

Publié le 2 juillet 2021
Par Anne-Charlotte Navarro
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Depuis le 9 juin 2021, date d’entrée en vigueur du pass sanitaire, puis l’ouverture ce 1er juillet de sa version européenne, des annonces émergent sur les réseaux sociaux proposant aux internautes de générer de faux pass contre le versement d’une somme d’argent.

Ces annonces incitent les patients à demander à leur pharmacien des tests « bidons » ou de « jeter la dose de vaccin ».

« Face à une telle demande, le pharmacien doit se montrer ferme. Les sanctions qu’il encourt sont à ce jour mal définies mais il est clair que s’il accepte de telles pratiques il engage sa responsabilité pénale et disciplinaire, » met en garde Matthieu Blaesi, avocat spécialisé en droit pharmaceutique.

Alors que la loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire mettant en place le pass sanitaire a pris le soin de détailler les sanctions pénales encourues par les personnes qui conserveraient le pass ou exigeraient sa présentation alors que celle-ci n’est pas nécessaire, rien n’est prévu pour les professionnels de santé qui franchiraient la ligne rouge en établissant de faux pass.

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Sur le plan disciplinaire, la sanction ne fait aucun doute. L’article R4235-3 du Code de déontologie dispose que « le pharmacien doit se refuser à établir toute facture ou attestation de complaisance. » « La sévérité de la sanction sera laissée à l’appréciation de la chambre de discipline mais il est probable qu’une interdiction d’exercer temporaire ou permanente soit prononcée », envisage Matthieu Blaesi.

Le pharmacien encourt également des sanctions pénales. « Le fondement de ces sanctions pose question. Plusieurs textes peuvent être mobilisés », détaille l’avocat. L’article 441-1 du Code pénal sanctionne le faux d’une peine de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. Juridiquement le faux est « toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques. » Le pharmacien établissant un faux pour un patient encourt donc au maximum ces sanctions.

Mais Il pourrait également être poursuivi pour faux en écriture publique. Ce faux spécial prévu à l’article 441-4 du Code pénal sanctionne de « 10 ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende, le faux commis dans une écriture publique ou dans un enregistrement ordonné par l’autorité publique ». Cette infraction a été retenue contre un doyen de faculté qui avait transmis au secrétariat de l’Université des notes manuscrites mentionnant des décisions spéciales d’un jury en réalité inexistantes (Crim. 26 janvier 2011, n°10-80.655). « Le pharmacien pourrait également être poursuivi pour mise en danger de la vie d’autrui », conclut Matthieu Blaesi.