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Comment utiliser le congé de création d’entreprise

Publié le 29 novembre 2008
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Pharmacien salarié ou préparateur, vous rêvez de vous mettre à votre compte ? Le congé pour création d’entreprise vous permet de quitter votre poste quelques mois pour effectuer les démarches. Avec l’assurance de retrouver votre fauteuil si l’aventure tourne court. Mode d’emploi.

1 Une absence avec possibilité de retour

Le principe est simple : un salarié peut demander de s’absenter de son poste pour monter son projet de création d’entreprise pendant une durée maximale d’un an, renouvelable une fois. Seule condition : une ancienneté dans l’entreprise d’au moins 24 mois, consécutifs ou non, à la date de prise d’effet du congé. Mais le salarié reste lié à son obligation contractuelle de non-concurrence, de discrétion et de loyauté.

Au terme de son congé, l’apprenti chef d’entreprise peut faire machine arrière et retrouver son poste. Trois mois avant le terme du congé, il doit alors informer son employeur, par lettre recommandée avec accusé de réception, de son intention d’être réemployé ou au contraire de rompre son contrat de travail. Pour bénéficier à nouveau d’un congé pour création d’entreprise, il devra patienter trois ans.

2 Deux formes de congé

Le congé pour création d’entreprise peut prendre la forme d’une suspension totale du contrat de travail ou d’un passage à temps partiel. C’est au salarié de choisir la formule qui lui convient le mieux. Si le salarié opte pour un temps partiel, un avenant au contrat de travail doit être rédigé afin de fixer la durée hebdomadaire du travail et sa répartition dans la semaine. Dans ce cas, il continue d’acquérir normalement de l’ancienneté, des jours de congés payés ainsi qu’un salaire calculé au prorata.

Si le congé est à plein-temps, le contrat de travail est suspendu. Le salarié continue à faire partie du personnel de l’entreprise mais il ne perçoit aucune rémunération puisqu’il ne travaille pas. Cette période d’absence n’est alors pas prise en compte pour le calcul de l’ancienneté et des congés payés. En revanche, le salarié conserve le bénéfice de sa couverture sociale et des prestations en nature de l’assurance maladie et maternité.

3 Une procédure rigoureuse

Pour obtenir son congé pour création d’entreprise, le salarié doit obtenir l’accord de son employeur. Auparavant, il doit lui adresser sa demande, au moins deux mois à l’avance, par écrit via une lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge. Ce courrier doit comporter certaines mentions obligatoires : la date de départ prévue, la durée envisagée, la formule souhaitée (congé à temps plein ou passage à temps partiel) et l’activité de l’entreprise qu’il prévoit de créer ou de reprendre. Les mêmes formalités doivent être effectuées pour demander à prolonger le congé, deux mois avant son terme. A cette occasion, le salarié peut également transformer son congé à temps plein en une activité à temps partiel, et inversement.

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4 L’employeur peut refuser

Suite à la demande du salarié, l’employeur a trente jours pour répondre, toujours par lettre recommandée avec accusé de réception ou par remise en main propre contre décharge. Il est libre de donner son accord, de le refuser ou de reporter le départ en congé. Un report n’a pas à être justifié par l’employeur tant qu’il n’excède pas six mois à compter de la réception de la lettre de demande du salarié. En revanche, un refus doit être motivé par des raisons liées à la bonne marche de l’entreprise. En cas de désaccord avec le salarié, celui-ci peut contester le refus devant le bureau de jugement du conseil de prud’hommes. Pour cela, il doit engager cette démarche dans les quinze jours suivant la réception de la lettre de refus. Enfin, si l’employeur oublie de répondre à la demande du salarié dans un délai de trente jours, son accord est acquis.

Attention à la concurrence directe !

Bien que floue dans les textes, la notion de concurrence directe est liée à une forte proximité géographique. D’après l’article R. 4235-37 du Code de la santé publique, les étudiants en pharmacie et les pharmaciens remplaçants et adjoints ne peuvent être titulaires d’une officine directement concurrente de celle qui les a embauchés durant six mois consécutifs sur une période de deux ans. Qu’entend-on par concurrence directe ? Le Conseil national de l’ordre des pharmaciens, lors d’une affaire statuée en juin 2005, a donné un élément de réponse : deux pharmacies distantes d’1,6 kilomètre et séparées par plusieurs autres pharmacies ne peuvent être en concurrence directe. Quoi qu’il en soit, c’est un conseiller ordinal qui statuera au final, appréciant chaque situation au cas par cas.

Christine Berthod, titulaire de la Pharmacie de la Fruitière à Chavanod (Haute-Savoie)

« Après dix ans comme pharmacien responsable à la CERP, j’ai souhaité m’installer. Une opportunité de création s’est présentée et j’ai monté mon dossier. Mais une fois la licence obtenue, je ne pouvais pas immédiatement investir les lieux car des travaux d’envergure s’imposaient pour réhabiliter le bâtiment à l’abandon. Plutôt que de rester inactive pendant ce temps d’attente, j’ai sollicité un congé pour création d’entreprise qui a débuté deux mois avant l’ouverture de la pharmacie. C’était une sécurité au cas où les travaux n’auraient pas été achevés dans les temps ou si ma licence avait été contestée. J’ai ainsi profité d’un congé d’un an, que j’ai renouvelé. Cela m’a permis de démarrer ma propre entreprise en sachant que je disposais d’une roue de secours en cas d’embûches. J’ai utilisé le congé pour création d’entreprise comme un outil de gestion prévisionnelle des risques. »

Corinne Bernet, fondatrice et gérante de Pharm’Optima, une société spécialisée en merchandising

« Lorsque j’étais préparatrice, j’avais la conviction que je ne resterais pas derrière un comptoir. J’avais un très fort besoin d’indépendance qui m’a poussée à créer ma boîte. Le pari était osé car je suis une autodidacte et ma mise de départ était nulle. Lorsque je me suis lancée, j’avais une voiture, un ordinateur, un appareil photo, un bureau improvisé à la maison et mon savoir-faire. Pour minimiser les risques, je n’ai pas d’emblée rompu mon contrat de travail et j’ai profité d’un congé pour création d’entreprise d’un an. J’avais ainsi l’assurance de retrouver mon emploi en cas d’échec. Pendant cette année de congé, je me suis consacrée aux démarches nécessaires à la création de mon entreprise : j’ai réalisé une étude de marché, j’ai suivi des stages de gestion, je me suis rapprochée de la chambre des métiers et j’ai tissé mon réseau. Trois mois avant la fin de mon congé, mon carnet de commandes a explosé. J’ai alors pris la décision de démissionner. »