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Choisir les jours fériés chômés, c’est bien, les payer, c’est mieux

Publié le 24 octobre 2020
Par Anne-Charlotte Navarro
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La Cour de cassation vient de se prononcer dans une affaire opposant un pharmacien employeur et une préparatrice salariée au sujet du paiement des jours fériés. Une décision riche d’enseignements.

LES FAITS

Depuis le 26 octobre 2015, Mme U. est préparatrice dans la pharmacie C. Par une note de service, portée oralement à la connaissance des salariés le 13 juillet 2016, le titulaire a informé son équipe que, dorénavant, celle-ci « ne travaillerait pas les jours fériés non chômés. Ces jours seraient soit non payés, soit défalqués des jours de congé au choix du salarié ». La note précise que les 14 juillet et 15 août 2016 ne seront pas travaillés et seront défalqués du compteur des congés payés. Le 3 novembre 2016, Mme U., estimant avoir été lésée dans le paiement des jours fériés, saisit la juridiction prud’homale pour obtenir la condamnation de la société au paiement d’un rappel de salaire.

LE DÉBAT

Le Code du travail fixe le régime juridique des jours fériés. L’article L.3133-1 liste 11 jours fériés, dont seul le 1er mai est chômé. Les articles L.3133-2 et L.3133-3 du même code précisent que les heures de travail perdues par suite de chômage de ces jours ne donnent pas lieu à récupération et ne peuvent entraîner de perte de salaire pour les salariés bénéficiant d’une ancienneté d’au moins trois mois dans l’entreprise. Sur le fondement de ces articles, Mme U. demande aux juges le paiement des jours fériés chômés. En réponse, le titulaire de la pharmacie C. estime que le chômage des jours fériés autres que le 1er mai dépend, en vertu du même article L.3133-3-2, d’un « accord d’entreprise ou d’établissement, d’une convention ou d’un accord de branche. A défaut d’accord, l’employeur fixe les jours fériés chômés ». La convention collective de la pharmacie ne liste pas les jours fériés chômés.

La cour d’appel de Poitiers (Vienne), le 19 septembre 2018, donne cependant raison à Mme U. Les magistrats estiment que, s’il revient effectivement à l’employeur, à défaut d’accord d’entreprise ou de branche, de fixer les jours fériés chômés dans l’entreprise, il ne peut en déduire que le chômage de ces jours conduit à une perte de salaire. Estimant que la cour d’appel a mal interprété le droit, la pharmacie C. saisit la Cour de cassation.

LA DÉCISION

Le 9 septembre 2020, la chambre sociale de la Cour de cassation considère que la cour d’appel a bien interprété le droit. Mme U. doit donc obtenir le paiement des jours fériés chômés. Les juges précisent que l’article L.3133-3 du Code du travail est d’ordre public, c’est-à-dire qu’il s’impose en toute situation. La défalcation prévue dans la note de service de la pharmacie C. s’assimile à une perte de salaire.

Une officine peut décider d’ouvrir un jour férié à condition qu’elle soit inscrite au tour de garde ou que sa zone géographique ne soit pas couverte par un arrêté préfectoral. L’article 13 de la convention collective indique qu’« en cas de travail à l’officine un jour férié autre que le 1er mai le salarié bénéficie également d’un repos compensateur de même durée, dont les modalités sont définies d’un commun accord entre l’employeur et le salarié ». Dès lors, en plus de sa rémunération, le salarié a droit à un repos compensateur s’ajoutant à sa rémunération.

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Source : Cass. soc. 9 septembre 2020, n° 18-24.673.

À RETENIR

A l’officine, l’employeur peut fixer les jours fériés qu’il souhaite chômés.

Les salariés ayant au moins trois mois d’ancienneté dans l’officine ne doivent subir aucune perte de salaire du fait du chômage des jours fériés.

La défalcation d’un ou plusieurs jours de congé en échange du chômage du jour férié est assimilée à une perte de salaire.