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Rémunération : 5 conseils pour attribuer les primes

Publié le 17 décembre 2005
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Treizième mois, prime de Noël et autres gratifications de fin d’année sont autant d’outils de management pour rémunérer les performances collectives ou individuelles des salariés. Encore faut-il bien les utiliser.

1 Treizième mois, étrennes ou salaire ?

Ni la loi, ni la convention collective ne vous obligent à gratifier vos collaborateurs d’une prime de 13e mois ou de toute autre prime de fin d’année. Ce bonus constitue une liberté de l’employeur et son montant reste à votre discrétion. Mais attention, il en est autrement si la prime est mentionnée dans le contrat de travail ou si elle résulte d’un usage qui s’est instauré dans l’officine ou encore s’il s’agit d’un engagement unilatéral de l’employeur ! Dans ces trois cas, la prime constitue un élément du salaire dont l’employeur a l’obligation de s’acquitter chaque année.

2 Prime de Noël : un bonus pour tous ?

« La modulation de la rémunération et sa détermination au moyen de primes est un acte de gestion de l’entreprise extrêmement important. Pour augmenter la productivité d’une entreprise, il s’agit de structurer la rémunération », souligne Yves Buguet, avocat. Les primes permettent de rémunérer les performances individuelles. Et pour qu’elles soient en rapport avec les performances de travail d’un salarié, il est opportun qu’elles soient versées à l’issue d’un entretien d’évaluation. « Les entretiens permettent de donner une individualisation aux primes. L’employeur est alors libre dans le choix des salariés à récompenser, pourvu qu’il n’introduise pas de discriminations. Il doit également s’efforcer de mettre de côté tout critère affectif », explique Yves Buguet.

Pour que l’employeur ne s’enchaîne pas à l’obligation de verser chaque année une prime déconnectée des performances réelles, il importe que celle-ci ne devienne pas un usage. Ainsi, une mauvaise communication à l’occasion du versement de cette prime, sans référence à de bons résultats ou à des objectifs atteints, offre l’opportunité aux salariés d’exiger cette prime tous les ans.

3 Absences et versement

Quand bien même le versement de la prime serait obligatoire (avantage issu du contrat de travail, d’un usage ou d’un engagement unilatéral), l’employeur peut poser certaines conditions à son versement, pourvu qu’elles soient licites. L’assiduité peut être un critère. Ainsi, les absences du salarié peuvent entraîner une suppression ou une réduction de la prime. « Si la prime a pour objet de rémunérer une activité effective ou de récompenser les services rendus, il n’est ni illégal, ni discriminatoire d’appliquer sur son montant un abattement proportionnel au temps d’absence, et même s’il s’agit d’un congé de maternité ou d’une absence consécutive à un accident du travail », souligne Yves Buguet.

Par ailleurs, le bénéfice de la prime peut également être soumis à une condition de présence à l’officine au moment de son versement. « Un salarié absent le jour du versement de la prime annuelle de treizième mois ne peut en réclamer le bénéfice dès lors que l’usage instauré exige sa présence », rappelle encore Yves Buguet.

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4 Prime et rupture du contrat de travail

Le droit aux primes de fin d’année peut être subordonné à la condition d’appartenance à l’entreprise au moment du versement ou bien être calculé au prorata du temps de présence du salarié dans l’entreprise. « A charge pour le salarié d’établir qu’il existe un usage dans l’officine allant dans le sens d’un paiement de la prime calculée au prorata du temps de présence », explique Yves Buguet. Ainsi, un salarié qui souhaite bénéficier, par exemple après son licenciement, du versement du treizième mois au prorata de son temps de présence dans l’officine doit prouver qu’il existe un tel usage dans l’entreprise. Mais attention, la prime de treizième mois, venant s’ajouter au salaire de base, ne doit pas être confondue avec un salaire annuel fixé à treize fois le salaire mensuel ! « Dans ce dernier cas, le salarié quittant l’entreprise peut prétendre de plein droit à la treizième partie de son salaire annuel au prorata temporis. »

Enfin, l’employeur ne peut pas soumettre le paiement d’une prime de fin d’année à une condition d’appartenance à l’entreprise postérieure au versement de la prime. Tel est le cas d’un salarié démissionnaire en train d’accomplir son préavis.

5 Suppression d’une prime

Prime inscrite au contrat de travail : si le versement de la prime est expressément stipulé dans le contrat de travail, l’employeur ne peut pas la supprimer sans l’accord du salarié. Autant dire qu’une prime prévue par le contrat est pérenne. Pour y mettre fin, il ne reste à l’employeur que le terrain de la négociation avec le salarié. Par exemple, troquer la prime contre une augmentation de salaire ou contre des avantages en nature.

Prime issue de l’usage : si la prime est issue d’un usage qui s’est instauré dans l’officine, ou d’un engagement unilatéral, l’employeur a la possibilité de la supprimer. Pour cela, il doit appliquer la procédure de dénonciation. En pratique, il informera individuellement et par écrit chaque salarié, en respectant un délai de prévenance suffisant. Ainsi, il n’est pas question de révoquer une prime de Noël quelques jours avant les fêtes.

En dehors de ces cas, l’employeur a toute latitude. Il peut décider à tout moment de supprimer une prime de fin d’année.

A retenir

– Si la prime est un élément du salaire (inscrite dans le contrat de travail, liée à un engagement unilatéral de l’employeur ou à un usage), l’employeur doit obligatoirement la verser. Sinon elle est facultative.

– c’est un usage lorsqu’elle est accordée à tous les salariés (ou à une même catégorie) depuis plusieurs années et selon les mêmes modalités de calcul.

– si elle est occasionnelle, variable dans son taux et individualisée, elle n’est pas un salaire. C’est une gratification bénévole. L’employeur peut décider de la modifier ou de la supprimer.

– Si elle constitue un usage, elle peut être supprimée en informant par écrit chaque salarié et en respectant un délai de prévenance suffisant

– pour éviter qu’elle devienne un usage, il faut la mettre en rapport avec un entretien d’évaluation et ne pas accorder chaque année le même montant.

Individuelle ou collective ?

La prime collective

C’est une prime équitable. A la place d’une gratification sonnante et trébuchante, l’employeur peut remettre des bons d’achat. Mais aucune différence ou hiérarchie des performances ne doit être introduite. Le but de cette prime est de favoriser l’esprit d’équipe, l’entraide et le partage des compétences. Au préalable, il est essentiel que le titulaire définisse clairement les objectifs collectifs à atteindre. Ceux-ci doivent être concrets. Eviter les « Il faut mieux faire ». Les objectifs doivent être assortis de moyens (formations) et suivis. Le risque du versement d’une telle prime est de créer chaque année une attente en la transformant en un bonus dont l’employeur est redevable. Pour éviter cette confusion et objectiver la prime, l’employeur sera amené à communiquer les résultats chiffrés de l’officine ou des comparatifs d’une année sur l’autre.

La prime individuelle

Elle est attribuée à l’issue d’un entretien d’évaluation. Attention à ce qu’elle ne devienne pas l’enjeu de l’entretien ! En fonction de son niveau de satisfaction, l’employeur versera par exemple 100 % du 13e mois, 60 %, etc. Libre à lui d’en moduler le montant, de l’accorder ou non. Il est alors essentiel d’expliquer les critères de son versement. En étant concret, il faut citer des faits précis de satisfaction ou d’insatisfaction afin que les salariés n’aient pas la sensation que les primes sont attribuées à la tête du client. Pour cela, il faut rigoureusement analyser le travail quantitatif (par exemple une performance de chiffre d’affaires sur un secteur donné) et qualitatif (par exemple le conseil associé aux ordonnances) du collaborateur. C’est là tout l’enjeu de l’entretien d’évaluation. –

Brigitte Defoulny (Héliotrope)