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Intéressement : Les secrets de la prime qui fait vraiment avancer

Publié le 1 février 2003
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Si vous êtes à la recherche du philtre d’amour qui gardera à jamais les bons éléments accrochés à votre officine, convoquez votre comptable. Depuis le 19 février 2001, la loi Fabius a ouvert, entre autres, l’intéressement aux très petites entreprises. Mode d’emploi.

Les primes, vous connaissez le principe et vous n’en êtes pas toujours un partisan, alors une prime d’intéressement, vous avez du mal à voir où, justement, se trouve l’intérêt. Pourtant elle présente des avantages non négligeables. Fiscalement, le versement d’une prime d’intéressement n’est pas synonyme de charges sociales qui avaient la fâcheuse habitude de faire passer la prime du simple au double (pour 100 Euro(s) donnés, 200 Euro(s) déboursés). Vous n’aurez qu’à vous acquitter de la CSG et de la CRDS (environ 10 % de la somme). De plus, si vos employés décident de bloquer la totalité de leur prime sur un plan d’épargne entreprise, ils ne seront pas soumis à l’impôt sur le revenu.

Autre avantage, la prime d’intéressement doit pouvoir être égale à zéro et le contrat n’est valable que pour trois ans et non tacitement reconductible. La prime, elle, peut très bien devenir un avantage acquis à condition d’avoir été versée deux années de suite et de ne pas avoir varié de + ou – 20 %. Résultat, non seulement vous ne pouvez pas l’annuler, mais, de plus, l’effet motivation est quasiment nul. Enfin, avec l’intéressement, il n’est plus possible de vous accuser de favoritisme, le contrat annulant toute notion de subjectivité.

Calcul : bien choisir sa formule. Décidé à développer votre activité, à fidéliser les membres performants de votre équipe et à recruter plus facilement, vous vous lancez dans la construction d’un plan d’intéressement. Avant toute chose, entourez-vous. N’hésitez pas à faire appel à votre comptable pour qu’il vous fournisse l’ensemble des éléments chiffrés nécessaires à votre réflexion, et, le cas échéant, faites appel à un consultant rodé sur la question.

Patrick Lanceau, ex-titulaire et consultant spécialiste des mises en place de politique d’intéressement à l’officine, confesse en effet qu’il a eu l’occasion de rencontrer des comptables récalcitrants pour cause de méconnaissance du système. Le seul critère strict auquel vous soyez contraint est l’existence d’un aléa. Il faut donc que la prime, calculée en fonction de la progression des résultats, puisse être égale à zéro. Sinon, le principe est considéré comme un salaire déguisé et donc taxé en conséquence. Les paramètres du calcul doivent être objectifs et mesurables. Ils doivent provenir des documents qui, produits de façon officielle, ne peuvent être remis en cause.

Attention, ne prévoyez pas de remplacer le 13e mois ou tout autre avantage acquis par la prime d’intéressement, c’est strictement interdit. Pour éviter de débloquer une somme d’argent conséquente en une fois, rien ne vous empêche de lisser le 13e mois sur l’année. Armé de ces principes, sachez que tous les indicateurs ne se valent pas pour établir une formule d’intéressement. Patrick Lanceau propose, par exemple, de se fixer sur un pourcentage de l’augmentation de marge entre deux exercices, celle-ci étant retraitée de l’augmentation des salaires et éventuellement de l’inflation ou des créanciers recouvrables (l’équipe sera plus attentive au problème). Selon lui, la prime ne doit pas dépasser 33 % de l’évolution de la marge retraitée. Il est aussi possible de fixer des montants en fonction des tranches d’EBE : prime égale à zéro pour un EBE entre 100 000 Euro(s) et 120 000 Euro(s), prime = 2 % pour un EBE entre 120 000 et 140 000, etc.). Quoi qu’il arrive, l’enveloppe d’intéressement ne peut pas dépasser 20 % des salaires bruts et le plafond individuel est fixé à la moitié du plafond annuel de la Sécurité sociale (2 432 Euro(s)/mois).

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Trouver un consensus. Une fois le contrat rédigé, vous devrez recueillir l’accord de vos salariés. Pour être valide, le plan d’intéressement doit être signé par le salarié mandaté par le syndicat, s’il y en a un, par le comité d’entreprise ou plus généralement par les deux tiers des salariés. Les salariés qui ne signent pas bénéficient tout de même de la prime, sauf s’ils y renoncent par écrit.

Vous avez alors 15 jours pour déposer le contrat à la DDTEFP (direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle) par recommandé avec accusé de réception. Sans réponse sous quatre mois, il s’agit d’un accord tacite. Vous pouvez alors donner des primes d’intéressement. Attention, cependant, il faut que l’accord des salariés soit obtenu dans les six premiers mois de l’exercice ! Dans le cas contraire, la prime peut être requalifiée comme salaire. L’idéal est de signer le plus proche possible de la mi-exercice de façon à avoir une idée précise du montant de la prime.

La durée du contrat n’étant que de trois ans non tacitement renouvelables, il faudra recommencer l’ensemble de la démarche trois ans plus tard, à moins que vous ne supprimiez le principe.

Le versement de la prime. Tous les salariés de l’officine (femme de ménage y compris) sont concernés à partir du moment où ils ont plus de trois mois d’ancienneté sur les deux dernières années d’exercice. Pour les CDD, les primes sont alors accordées au prorata du temps de présence. La répartition de l’enveloppe peut difficilement s’entendre à part égale. Pour Patrick Lanceau, le système le plus équitable est le panachage entre le temps de travail total (temps de présence, congés payés, accidents du travail, maternité, congé parental d’éducation) sur l’année (70 %) et le salaire perçu (30 %). Avant chaque versement, vous devrez réunir soit la commission de contrôle (deux salariés choisis par vos soins), soit l’ensemble du personnel pour expliquer le calcul de la prime, documents certifiés à l’appui. Vous avez jusqu’au dernier jour du 7e mois suivant la clôture de l’exercice de référence pour effectuer le versement. Les retards ouvrent droit à une pénalité de 10 % par mois.

Réaction : PATRICK LANCEAU

Conseil en stratégie d’intéressement

L’intéressement est une démarche volontaire.

C’est un accord gagnant-gagnant entre le titulaire et son équipe.

Il rétribue la performance. La règle est simple : sans amélioration, pas de prime.

A noter

Validité

Si l’URSSAF estime qu’un contrat validé par la DDTEFP n’est pas conforme, elle ne peut qualifier les sommes versées en salaire, mais vous devrez revoir votre copie.

PEE

Lors de la mise en place d’un contrat d’intéressement, vous devez proposer la création d’un plan d’épargne d’entreprise à vos salariés. S’ils souhaitent un plan d’épargne entreprise, il vous en coûtera uniquement les frais de gestion soit environ 1 % des sommes versées.

Vente

En cas de revente de l’officine, sachez que lors de toute modification dans le statut juridique de l’officine, l’accord d’intéressement cesse de plein droit. La seule obligation pour le repreneur est de négocier un nouveau contrat dans les 6 mois sans obligation de création.