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Retraite des libéraux : ne touche pas à mes droits à pension !

Publié le 1 octobre 2022
Par Francois Pouzaud
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Au moment de l’ouverture des droits et à la liquidation de la pension de retraite de base des professionnels libéraux, l’article R.643-10 du Code de la Sécurité sociale (CSS) établit que, lorsque les cotisations arriérées n’ont pas été acquittées dans le délai de cinq ans suivant la date de leur exigibilité, les périodes correspondantes ne sont pas prises en considération pour le calcul de la pension de retraite. Cette disposition porte-t-elle atteinte au droit au respect des biens tel qu’il résulte de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ? Oui, répond la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 2 juin 2022 opposant un professionnel libéral retraité à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (Cipav). Elle casse ainsi un arrêt de la cour d’appel qui fait une stricte application de l’article R.643-10 du CSS. Cette dernière a considéré, en effet, que le délai de cinq ans, bien supérieur au délai de grâce maximal que le juge civil peut accorder à un débiteur, ne paraît pas être d’une rigueur excessive à l’encontre du cotisant et lui permet de régulariser effectivement sa dette pour préserver ses droits futurs. Si le retard de paiement de cotisations peut, de manière générale en droit de la Sécurité sociale, entraîner des majorations de retard et des pénalités, ce mécanisme n’exclut pas, pour la retraite, l’existence d’une sanction plus lourde touchant à l’étendue des droits à pension acquis. Elle en déduit que le versement de l’intégralité des cotisations est un préalable légal à l’ouverture des droits à la pension de retraite et que la réduction du montant de celle-ci au regard des cotisations versées plus de cinq ans après leur date d’exigibilité n’est pas incompatible avec la protection du droit de propriété instituée par le droit européen.

Pas pour la Cour de cassation qui estime que la perte des droits à pension pour paiement hors délai des cotisations constitue une atteinte disproportionnée au droit de propriété des assurés et qu’il s’agit d’une ingérence avec pour seul objectif d’inciter les cotisants à la célérité dans le paiement de leurs cotisations obligatoires. Selon cette haute jurisprudence, les points acquis en contrepartie du paiement des cotisations doivent être regardés comme l’étant au fur et à mesure de leur versement, même si les cotisations sont payées au-delà du délai de cinq ans suivant leur date d’exigibilité, dès lors que ce paiement intervient avant la liquidation du droit à pension.

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