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Et pourquoi pas moi ?
La nouvelle réforme des retraites, entrée en vigueur le 1er septembre, étend aux professions libérales le droit à la retraite progressive. Analyse d’un dispositif qui présente l’avantage pour les titulaires de lever le pied en douceur.
Les textes fixant les modalités de la retraite progressive pour les professions libérales ont été publiés le 11 août 2023. Ils reprennent dans les grandes lignes les mêmes dispositions que le régime déjà accessible avant la réforme aux salariés, aux artisans, aux commerçants et à certaines professions libérales non réglementées. « Pour en bénéficier, il faudra exercer comme professionnel libéral à titre exclusif, avoir cotisé au moins 150 trimestres, et avoir 62 ans en 2030, explique Ilinca Cazelles, directrice adjointe de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL). La retraite progressive appliquera en effet le principe du relèvement de l’âge légal de départ de 60 à 62 ans, à raison de trois mois par génération, à compter des assurés nés le 1er septembre 1961. » La réforme conserve aussi une autre disposition du régime précédent : la baisse de revenus devra au minimum être de 20 % et de 60 % au maximum.
Calcul savant…
La base de calcul de la pension versée au titre de la retraite progressive reste la même. « Sera prise en compte la moyenne des revenus sur les cinq années précédentes. Pour 2024, nous regarderons donc jusqu’en 2019, note Ilinca Cazelles. Mais comme nous ne connaissons pas en temps réel les revenus des professions libérales, un pharmacien titulaire qui basculera en retraite progressive au 1er janvier 2024 percevra 50 % de sa retraite de base jusqu’au 30 juin 2025. Au 1er juillet, la CAVP [Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens, NdlR] examinera sa déclaration de revenus 2024. Si la baisse de sa rémunération excède ou est inférieure au final à 50 %, un rattrapage sera versé au pharmacien dans le premier cas, un remboursement des trop-perçus au titre de la pension de retraite dans le second. » Le mode de calcul ne change pas non plus. Un titulaire qui conservera 60 % de son activité et enregistrera une baisse de 40 % de ses revenus, percevra 40 % du montant de sa retraite de base. « En revanche, il ne pourra pas bénéficier du dispositif sur sa retraite complémentaire, la CAVP n’ayant pas voté l’extension du dispositif à son régime », précise Ilinca Cazelles.
Anticiper sa demande.
« Les demandes de passage à la retraite progressive effectuées au cours d’une année entreront toujours en vigueur au 1er janvier de l’année suivante. Les titulaires d’officine qui souhaiteraient déposer une demande de retraite progressive peuvent le faire depuis le 1er septembre, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2024 », annonce la directrice adjointe de la CNAVPL. Cette dernière ayant délégué la gestion du régime de base à ses dix sections professionnelles, c’est à la CAVP qu’il faudra adresser la demande. « En sachant qu’il ne faut pas attendre le dernier moment avant de la déposer. Le montage d’un dossier de retraite progressive prend un certain temps et doit donc être anticipé au maximum », conseille Pascale Gauthier, associée du cabinet Novelvy Retraite. Pour Christophe Claudel, directeur technique retraite et épargne salariale d’Allianz France, la retraite progressive possède une première vertu. « Elle va permettre aux pharmaciens titulaires d’anticiper de deux ans leur départ à la retraite avant l’âge légal, estime-t-il. Ce dispositif peut intéresser tous ceux qui aspirent à lever le pied tout en continuant d’exercer une activité à temps partiel, mais aussi les titulaires qui s’apprêtent à céder leur officine et qui souhaitent passer la main en douceur à leur successeur. »
Les avantages d’une retraite progressive.
« L’autre avantage introduit par la réforme, c’est que pendant toute sa retraite progressive, le pharmacien va continuer de cotiser, et ainsi d’accumuler des trimestres et des droits, ajoute Pascale Gauthier. Le fait de pouvoir cumuler des revenus tirés de l’activité à temps partiel et la pension versée au titre de la retraite progressive permet aussi de compenser la baisse de revenus qui intervient lorsque l’on prend sa retraite. » Pour Ilinca Cazelles, la retraite progressive présente un dernier intérêt. « Lorsqu’un pharmacien titulaire la demandera, la CAVP informera les caisses des autres régimes auprès desquels il a cotisé, notamment lorsqu’il était au régime général en tant que salarié pendant les années où il a cotisé en tant qu’adjoint, précise-t-elle. Ces régimes devront alors verser eux aussi la fraction de pension correspondant à la baisse de revenus. Pour certains pharmaciens, cela peut représenter de nombreuses années, et donc des droits et des montants non négligeables. »
Une baisse de revenus à prévoir.
Séduisant sur le papier, le recours à la retraite progressive risque toutefois de se heurter à des limites que certains trouveront peut-être rédhibitoires. « Pour les professions libérales, le dispositif se révèle relativement complexe, prévient Ilinca Cazelles. Le décalage dans le temps de la connaissance des revenus peut générer de l’incertitude si le pharmacien n’a pas un minimum de visibilité sur sa rémunération. Le fait de devoir rembourser des sommes indûment perçues l’année suivante pourrait en effrayer plus d’un. De nombreux titulaires exercent aussi en société. Ce qui pourrait les conduire à ajuster le niveau de parts sociales dans le capital. » Dans ce cas, mieux vaut évoquer le sujet avec son expert-comptable avant de prendre toute décision… La retraite progressive se traduira également par une baisse significative des revenus, la CAVP ayant décidé de ne pas étendre le dispositif à son régime de retraite complémentaire. « Or, dans la retraite d’un pharmacien, le régime de base représente une partie limitée de la pension versée, rappelle Christophe Claudel. Il faut donc avoir conscience que plus l’activité sera réduite, plus la baisse de revenus sera importante. L’avantage financier du dispositif sera donc très limité. » Cette baisse de revenus peut toutefois être compensée par un plan d’épargne-retraite (PER). « Les pharmaciens titulaires qui en possèdent un auront la possibilité de piocher dans leur PER, ce qui leur permettra d’introduire davantage de souplesse financière pendant cette phase de transition avant leur départ à l’âge légal de la retraite. En sachant que le financement de la retraite des titulaires passe aussi souvent par la vente de l’officine qui permet de se constituer un capital retraite », explique Christophe Claudel, avant de vivement conseiller à ceux qui sont intéressés par ce dispositif de consulter un expert retraite, « afin de prendre la bonne décision en fonction de sa situation et de ses aspirations personnelles. »
LE CUMUL EMPLOI RETRAITE ÉVOLUE AUSSI
La réforme des retraites introduit une autre nouveauté qui pourrait intéresser les professions libérales concernant le dispositif de Cumul emploi retraite (CER). « Les professions libérales étaient déjà éligibles au CER, rappelle Ilinca Cazelles, la directrice adjointe de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL). Mais le fait de l’activer ne permettait plus de valider des trimestres et des points supplémentaires dans aucun régime obligatoire. Avec la réforme entrée en vigueur le 1er septembre, les revenus tirés de l’activité permettront d’acquérir de nouveaux droits, et de percevoir une petite retraite supplémentaire qui viendra s’ajouter à la retraite de base et complémentaire. » Pour bénéficier du CER, il faut avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite et réunir les conditions d’une retraite à taux plein…
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