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Un homme averti d’un avertissement, cela vaut mieux

Publié le 2 octobre 2021
Par Anne-Charlotte Navarro
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Dans l’échelle des sanctions disciplinaires, l’avertissement est la plus faible. Cette sanction est utilisée pour marquer un comportement fautif sans pour autant que l’avenir du salarié dans l’entreprise soit remis en cause. Elle n’est pas obligatoirement précédée d’un entretien préalable. Sauf si…

LES FAITS

Le 1er octobre 2013, M. V. est engagé par l’association A. en qualité de chef de service éducatif. Il est soumis à la convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées. Le 13 mai 2015, M. V. est licencié pour motif personnel. Il saisit les prud’hommes afin de contester la légalité de son licenciement.

LE DÉBAT

L’article L.1332-2 du Code du travail dispose que lorsque l’employeur envisage une sanction, il convoque le salarié en lui indiquant l’objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié. La convention collective à laquelle était soumis M. V. précisait que « sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l’égard d’un salarié si ce dernier n’a pas fait l’objet précédemment d’au moins deux des sanctions précitées prises dans le cadre de la procédure légale ». Le salarié arguait que les deux lettres d’avertissement qu’il avait reçues constituaient les premières étapes nécessaires pour le licencier. Dès lors, elles avaient une incidence sur sa présence dans l’entreprise et, toujours selon lui, il aurait dû être convoqué à un entretien préalable. Le 30 mars 2018, la cour d’appel de Lyon (Rhône) rejette la demande du salarié. Les magistrats considèrent que les deux lettres d’avertissement ne nécessitaient pas d’entretien préalable puisque ni la convention collective ni le règlement intérieur de l’entreprise n’imposaient strictement ce formalisme. M. V. forme un pourvoi en cassation.

LA DÉCISION

Le 22 septembre 2021, la Cour de cassation estime que « la convention collective précitée subordonnait le licenciement à l’existence de deux sanctions antérieures pouvant être notamment une observation, en sorte que l’employeur était tenu de convoquer le salarié à un entretien préalable avant de lui notifier les deux sanctions qui étaient de nature à avoir une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise du salarié ». Dès lors, le salarié aurait dû être convoqué à un entretien préalable avant de recevoir les lettres le sanctionnant d’un avertissement. En l’espèce, puisque les deux avertissements ne sont pas recevables juridiquement, le licenciement de M. V. est sans cause réelle et sérieuse. A l’officine, la convention collective n’impose pas de règle similaire. Un salarié peut être licencié sans qu’il ait reçu préalablement deux avertissements. Cependant, cette règle est fréquemment insérée dans bon nombre de règlements intérieurs de pharmacie, voire dans des contrats de travail. Dans ce cas, le principe est le même. L’employeur doit, avant d’infliger un avertissement à un salarié, le convoquer à un entretien préalable puisque cet avertissement pourrait avoir une incidence sur son avenir dans l’entreprise. Faute de convocation, la légalité du licenciement peut être remise en cause.

Source : Cass. 22 septembre 2021, n° 18-22.204.

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À RETENIR

A l’officine, la convention collective n’exige pas que le salarié ait reçu deux avertissements avant son licenciement.

Il est fréquent que cette exigence soit insérée dans le règlement intérieur ou le contrat de travail du salarié. Dans ce cas, l’avertissement doit être précédé d’un entretien préalable.

Faute de quoi, l’avertissement exigé pour licencier un salarié n’a pas de valeur juridique et la validité du licenciement est remise en cause.