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© Getty Images
Aimer à perdre en cassation
En France, au nom du respect de la vie privée des salariés, les relations amoureuses ou intimes entre collègues sont admises. Ensuite, libre à chacun de la rendre publiques ou non. Cependant, la décision de la Cour de cassation du 29 mai 2024 a jeté un froid sur le sentiment commun que ce principe était acté en toutes circonstances.
Les faits
Le 29 avril 2002, M. Z. est engagé par la société P en tant que responsable de site. Il est chargé, entre autres, de représenter la direction de la société en son absence et de négocier avec les représentants des salariés. Le 27 septembre 2014, M. Z. est renvoyé pour faute grave. La société P. lui reproche d’avoir caché à la direction une relation intime qu’il entretenait avec Mme M., titulaire de mandats syndicaux et représentatifs depuis plusieurs années. De par leurs fonctions respectives, ils étaient amenés à participer conjointement à des réunions sur des sujets sociaux pouvant être sensibles. La société P. estime que cette situation a pu conduire M. Z. à ne pas défendre les intérêts de la société, voire à révéler des informations confidentielles à Mme M. M. Z conteste le bien-fondé de son licenciement.
Le débat
Dans un premier temps, la jurisprudence déduit de l’article 9 du Code civil que « chacun a droit au respect de sa vie privée ». Par conséquent, un événement lié à cette vie ne peut pas constituer un motif de licenciement. Mais, dans la lettre de licenciement, l’employeur a estimé qu’en dissimulant sa relation amoureuse avec la représentante syndicale M. Z. a commis une faute en manquant à son obligation de loyauté. Ainsi, la société P. ne lui a pas reproché leur liaison, mais de ne pas en avoir été avertie. Pour la société P., l’obligation de loyauté, qui impose au salarié un devoir de fidélité, de confidentialité et de non-concurrence, exigeait à M. Z. de dévoiler qu’il sortait avec Mme M., représentante du personnel. Le 15 mars 2022, la cour d’appel de Nîmes (Gard) donne raison à la société P. Les magistrats énoncent que « la lettre de licenciement reproche au salarié, titulaire de fonction de direction dans l’entreprise, un conflit d’intérêts et un acte de déloyauté consistant à n’avoir pas informé son employeur de sa relation avec une salariée ». A la suite de cette décision, M. Z. forme un pourvoi en cassation car, selon lui, son employeur n’avait jamais été en capacité de démontrer qu’il avait subi un préjudice du fait de cette relation.
La décision
Cet argumentaire formulé par M. Z. est, à son tour, rejeté par la Cour de cassation, le 29 mai 2024. Après avoir rappelé la jurisprudence du 22 décembre 2023, les hauts magistrats considèrent « qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié peut justifier de son licenciement pour faute lorsque ce dernier a manqué à une obligation découlant de son contrat de travail ». Ainsi, l’employeur ne peut pas licencier en utilisant un motif lié à la vie privée d’un salarié, sauf si son attitude, y compris dans la sphère personnelle, le justifie, tel que cela vient d’être énoncé. La Cour de cassation ajoute qu’il importe peu pour l’employeur ou l’entreprise qu’un préjudice soit établi. La simple suspicion d’une violation de l’obligation de loyauté suffit donc à justifier une faute disciplinaire pouvant conduire à un licenciement. La transparence est donc de mise.
À retenir
Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier d’un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement à une obligation découlant du contrat de travail.
Le fait de garder secrète une relation intime laissant planer un doute sur un possible conflit d’intérêts est une violation de l’obligation de loyauté dont le salarié est débiteur.
L’employeur n’a pas à justifier d’un préjudice.
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