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Fonds commercial : quelles notions retenir pour l’amortir ?

Publié le 7 mai 2022
Par Francois Pouzaud
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La loi de finances 2022 ouvre aux pharmacies, et pour une durée limitée, la possibilité d’amortir le fonds commercial. Mais au fait, qu’entend-on par fonds commercial ? Est-ce différent du fonds de commerce ? Précisions utiles pour les acquéreurs et les vendeurs.

L’amortissement du fonds commercial, disposition « surprise » de la loi de finances 2022, fait couler beaucoup d’encre et de salive dans le milieu des conseils de la pharmacie. L’article 23 de ce texte ouvre temporairement le droit à déduction fiscale de l’amortissement du fonds commercial ; en d’autres termes, il aligne les règles fiscales sur les règles comptables. « Les amortissements comptabilisés à raison des fonds commerciaux acquis entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025 sont déductibles du résultat imposable, que l’entreprise soit taxée à l’impôt sur le revenu (IR) ou sur les sociétés (IS), mais en dehors de cette dérogation temporaire, l’amortissement n’est pas admis en déduction du résultat imposable », explique Francis Brune, directeur de l’ingénierie financière et patrimoniale chez Interfimo.

Mais attention, fonds de commerce et fonds commercial sont deux notions à ne pas confondre. Le fonds commercial est un élément résiduel du fonds de commerce enregistré au compte 207 « Fonds commercial » et ce, avant de faire l’objet soit d’un amortissement, soit de tests de dépréciations annuels. Il comprend, en comptabilité, les éléments qui n’ont pas pu être comptabilisés dans d’autres postes de l’actif du bilan.

Le fonds commercial regroupe une multitude d’éléments incorporels dont dispose l’entreprise pour exercer son activité. Il est ainsi constitué principalement de la clientèle, de l’achalandage, de l’enseigne, du nom commercial et, plus largement, des parts de marché de l’entreprise. La diversité des éléments composant le fonds commercial rend délicate son analyse, même si dans le cas des commerces de proximité, « la valeur du fonds commercial est très proche de celle du fonds de commerce », rassure Joël Lecoeur, expert-comptable du cabinet LLA et président de CGP.

Un amortissement possible sur option

« Le fonds de commerce d’une durée d’utilisation non limitée ne peut pas faire, en principe, l’objet d’un amortissement mais d’une dépréciation », rappelle Francis Brune. La dépréciation de la valeur des éléments incorporels d’un fonds de commerce est susceptible de donner lieu à la constitution d’une provision déductible du résultat fiscal de l’exercice au cours duquel le fonds a subi cette dépréciation.

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La durée d’amortissement correspond normalement à celle d’utilisation. Par exception, une durée de dix ans peut être retenue lorsqu’elle ne peut être estimée de manière fiable. Quand le fonds commercial a une durée d’utilisation illimitée, l’entreprise doit pratiquer chaque année ou pour chaque exercice un test de dépréciation. Ainsi, s’il perd de la valeur, une dépréciation sera comptabilisée. Par exception au principe général, elle ne sera jamais reprise en comptabilité.

Afin d’éviter le test de dépréciation, « les petites entités (de chiffre d’affaires inférieur ou égal à 12 M€, de bilan inférieur ou égal à 6 M€ et d’effectif inférieur à 51) peuvent opter pour un amortissement sur dix ans sans justifier d’une durée d’utilisation limitée », indique-t-il. Et Joël Lecoeur d’ajouter : « Cette option est irrévocable et temporaire pour les acquisitions réalisées entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025. Cette décision de gestion se prend à la fin du premier exercice fiscal. Elle n’est pas sans conséquences immédiates et collatérales sur les plans fiscal et financier, sur les opérations pendant une durée de dix ans (financement de nouveaux investissements, entrée d’un associé, etc.) et à la sortie, au moment de la revente du fonds. »

Autant de raisons suffisantes pour manier l’amortissement du fonds commercial avec précaution.