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Faut-il avoir peur des boosters d’apport ?

Publié le 25 février 2023
Par Francois Pouzaud
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Les aides à l’installation sont nombreuses et variées pour les primo-accédants. A l’occasion d’une visioconférence sur le sujet, l’USPO a effectué un tour d’horizon des boosters d’apport. Histoire de démystifier certains d’entre eux.

Les boosters d’apport des groupements ne sont pas forcément bien perçus par les étudiants. « Ils viennent nous chercher dès la sortie de nos études », constate Maxime Delannoy, président de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (Anepf), lors de son intervention dans le cadre de la visioconférence « Aides à l’installation, fonds d’investissement : risque ou opportunité ? », organisée par l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) le 15 décembre 2022. S’il comprend que les groupements ont besoin de renouveler leurs adhérents, il se fait l’écho des craintes qui circulent, à tort ou à raison, dans les rangs des futurs diplômés. « Il y a une certaine pression exercée par les groupements, et s’ils investissent dans nos futures pharmacies, ce n’est pas une raison pour perdre notre identité et notre indépendance professionnelle », alerte-t-il. Il s’étonne notamment que les taux d’intérêt des boosters d’apport soient supérieurs à ceux des banques.

Joël Lecoeur, expert-comptable du cabinet LLA et président du groupement CGP, a tout de suite levé les craintes des étudiants. Sur les taux plus élevés des boosters d’apport, « les groupements prennent un risque financier car ils se portent caution de ce prêt complémentaire en cas de défaillance de l’emprunteur », explique-t-il.

Garde-fous financiers

Concernant les autres aides à l’installation, ses propos sont tout aussi apaisants : « L’installation avec l’aide d’un pharmacien investisseur prenant une part minoritaire dans le capital de la société d’exercice libéral (SEL) du jeune titulaire fonctionne depuis 30 ans. Si les règles précisées dans les pactes d’associés sont respectées, il conserve son indépendance financière et professionnelle. » Autre garde-fou cité par cet expert-comptable : « L’associé exploitant, majoritaire dans la SEL, peut mettre en compte courant d’associés trois fois le montant de son apport capital alors que, pour l’investisseur, c’est seulement une fois, ce qui limite le risque financier. »

S’agissant des fonds d’investissement rentrés avec grand fracas en 2016 sur le marché très convoité de la pharmacie, là aussi, il faut savoir raison gardée. Ils complètent l’investissement du pharmacien en prenant des obligations convertibles en actions (OCA), mais, législation pharmaceutique oblige, l’investisseur ne peut pas monter au capital de la société. « Certains groupements se sont appuyés sur des fonds financiers pour lever des capitaux, mais de nos jours les titulaires sont propriétaires à 100 % de leur capital », précise Joël Lecoeur. A leur début, les OCA ont été très décriées ; désormais on en parle moins car le financement par des fonds d’investissement a concerné un nombre très limité d’opérations. « Il existe des montages viciés avec les OCA et d’autres qui sont vertueux », ajoute-t-il. Comment les distinguer ? « Tout d’abord, le jeune diplômé doit être vigilant et se faire accompagner par l’expert-comptable de son choix », conseille-t-il. « Il ne faut pas se laisser imposer son expert-comptable par le fonds d’investissement, ni des contrats qui ne sont pas lisibles. S’il y a des clauses de confidentialité que vous ne pouvez pas transmettre à votre expert-comptable, attention ! Veut-on vous faire payer deux à trois fois plus cher le prix de votre acquisition ? », met en garde Cyril Colombani, pharmacien titulaire à Roquebrune-Cap-Martin (Alpes-Maritimes) et président du syndicat USPO 06. Lui-même a été victime il y a une dizaine d’années d’un montage d’acquisition par OCA qui a mal tourné. Pour Joël Lecoeur, il faut arrêter de diaboliser les OCA. « Pour un pharmacien investisseur, le taux de retour sur investissement est de 13 % à sept ans, un taux d’intérêt d’un emprunt obligataire de 9 % ne me choque donc pas. En revanche, ce qui est choquant, c’est quand il y a une prime de non-conversion des OCA créant un mur de dettes pour l’emprunteur », conclut-il.

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