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Et l’officine dans tout ça !
Près d’un mariage sur deux se terminerait par un divorce à Paris, un mariage sur trois en province. Les pharmaciens ne sont bien sûr pas épargnés. Les conséquences des engagements pris lors du mariage ne sont pas négligeables, d’autant plus lorsque l’officine s’en mêle. Lors de la séparation, il sera trop tard !
Qu’advient-il du patrimoine ?
-> Vous êtes mariés sous le régime de la séparation de biens
La procédure est relativement simple : chacun reprend possession des biens qui lui appartiennent en propre. Si des biens ont été achetés ensemble, ce qui est le cas si le mariage a duré un certain temps, il faudra en faire la répartition. Si on ne peut prouver qu’ils appartiennent plus à l’un qu’à l’autre, ces biens sont réputés indivis et leur valeur doit être partagée par moitié !
-> Vous êtes mariés sous le régime de la communauté
La communauté est composée du patrimoine constitué en commun. Cela concerne aussi bien le patrimoine privé que le patrimoine professionnel, sauf dispositions particulières prévues au contrat de mariage. En conséquence, l’officine créée ou acquise après le mariage avec des deniers communs (et sans fonds propres) fait partie de la communauté. Celle-ci doit être dissoute et suivie d’un partage.
Le pharmacien ne peut pas être privé de son outil de travail (ni de ce qu’il contient). Il dispose d’une priorité sur tout ce qui est nécessaire à sa profession et bénéficie d’un droit à l’attribution préférentielle sur cette officine. L’ex-conjoint non exploitant ne peut pas la faire vendre, comme s’il s’agissait d’un autre bien commun. Mais le pharmacien doit le dédommager de la moitié en valeur de son patrimoine professionnel constitué pendant la durée du mariage.
En pratique
La situation n’est pas simple : il faut trouver les fonds nécessaires pour verser l’indemnité. Dans un premier temps, on évalue le patrimoine de la communauté. Si d’autres biens ont été acquis au cours du mariage (résidence principale, résidence secondaire…) et si leur valeur approche celle de l’officine, le pharmacien pourra abandonner à son conjoint sa part, quitte à emprunter pour payer la soulte (1). Si cette soulte est très importante, la banque ou l’organisme prêteur exigera un nantissement du fonds.
Le problème se pose quand l’officine représente l’essentiel du patrimoine commun. Face à une somme trop importante pour indemniser son conjoint et si la somme nécessaire est difficile à réunir, il est à craindre que le résultat final soit le même, c’est-à-dire l’obligation de vendre la pharmacie. Pour estimer sa valeur, à défaut d’entente entre les futurs ex-conjoints, le juge désignera un expert chargé de l’évaluation de l’officine (ou des parts sociales).
Sur le plan comptable
Les patrimoines étant communs, on arrête les comptes de l’officine… et ceux du ménage. Il faut ensuite dresser un état des dettes professionnelles et privées qui seront déduites de l’actif et enfin déterminer la quote-part de bénéfices de chacun jusqu’à la date d’effet du divorce.
Sur le plan fiscal
Pour mémoire, une déclaration commune est faite jusqu’au divorce, puis chacun fait la sienne. Les revenus seront ventilés entre différentes déclarations en fonction de la date où ils ont été constatés. L’administration admet qu’une répartition de ces revenus soit faite, prorata temporis, mois par mois, le mois de l’événement étant rattaché à l’imposition commune.
Les plus-values
Le conjoint non exploitant devra s’acquitter de la taxation aux plus-values professionnelles sur la part de l’officine qui lui revient, soit 26 %.
Qu’advient-il de l’apport financier du conjoint ?
Un conjoint non exploitant qui a participé financièrement à l’installation du pharmacien ou à d’autres opérations postérieures (réinstallation, agrandissements, ou tout simplement pour l’aider à payer des dettes) avec ses propres deniers détient une créance à son égard. Peu importe le régime matrimonial. On considère qu’il a participé à l’enrichissement personnel de son conjoint titulaire. Il faudra prouver la réalité et le montant de cette aide. Il faudra également prouver que les fonds apportés sont propres. En conséquence, le conjoint bénéficiaire titulaire de l’officine se retrouve avec une dette qu’il doit rembourser, comme à tout autre créancier.
Attention ! Celui (non exploitant) qui a financé ou participé au financement d’un bien personnel professionnel (ici l’officine) avec ses deniers propres doit faire une déclaration d’emploi ou de remploi s’il l’a fait avec le produit de la vente d’un bien propre. En l’absence de déclaration, il faut apporter les preuves nécessaires et l’autre époux peut contester la réalité des apports.
Qu’advient-il du conjoint du titulaire ?
Conjoints tout statut
Donations et avantages divers
Toutes les donations consenties entre époux (à moins d’être intégrées dans le contrat de mariage) sont révocables. La révocation est automatique contre l’époux coupable ou demandeur dans le cas d’un divorce pour rupture de la vie commune.
Droits ouverts auprès de la CAVP (2)
Le conjoint divorcé n’a plus droit au capital décès ni à la rente invalidité décès dès la signification du jugement. En revanche, il conserve ses droits à la réversion de la retraite, à condition de ne pas se remarier, mais il peut devoir les partager avec un éventuel nouveau conjoint de son ex-époux titulaire si celui-ci se remarie, ceci au prorata des années de mariage (au décès de l’un des bénéficiaires, sa part accroît celle de l’autre, ou des autres…). Et même si lui-même (le non-exploitant) se remarie, il peut parfois récupérer ses droits si la deuxième union est elle-même rompue sans lui avoir apporté d’avantage réversion.
-> Conjoint non collaborateur
Un conjoint, qu’il soit celui d’un pharmacien ou de tout autre professionnel libéral ou salarié, peut prétendre à une prestation compensatoire destinée à compenser le déséquilibre financier que va engendrer le divorce (article 270 du Code civil). C’est le cas lorsque l’époux non exploitant, la femme le plus souvent, a cessé de travailler pour élever les enfants. Cet arrangement décidé par le couple a créé les conditions de disparité de ressources qui doivent être compensées par celui des deux le mieux nanti. Cette prestation compensatoire versée désormais, en principe, sous forme de capital, est calculée sur la base de critères exclusivement financiers. Attention, ce droit est refusé au cas où le divorce est prononcé à ses torts exclusifs (article 280 du Code civil) !
-> Conjoint collaborateur
Le conjoint qui a collaboré bénévolement a droit à une indemnité exceptionnelle. Il a en effet permis à son conjoint d’économiser les frais d’un employé pendant un certain nombre d’années. Cette indemnité spécifique est même reconnue par l’article 280 du Code civil qui exclut la prestation compensatoire si le divorce pour faute a été prononcé contre le demandeur, sauf dans le cas d’une collaboration bénévole.
Attention ! Cette indemnité n’est pas accordée automatiquement par les juges, il faut en faire la demande avant le jugement définitif.
-> Conjoint collaborateur bénévole
Dans ce cas, on mesure le vide devant lequel se trouve celui qui dépendait matériellement du pharmacien. Le conjoint qui a pu et qui a voulu se constituer des droits personnels à la retraite du régime de base ne peut plus cotiser à compter du divorce. Les prestations ne sont versées qu’à partir de 65 ans, ou à partir de 60 ans avec application d’un coefficient de minoration de 5 % par année manquante. Ce conjoint n’a pas les avantages du salarié en recherche d’emploi. Ces arguments devront venir renforcer la négociation autour de la prestation compensatoire.
-> Conjoint salarié de l’officine
Le conjoint salarié bénéficie de tous les avantages liés à ce statut : indemnités journalières en cas d’arrêt de travail, retraite, assurance chômage… L’intérêt du salariat est alors indiscutable (comme en cas de décès du pharmacien titulaire). La question de l’exercice dans l’officine de son ex-conjoint va se poser très rapidement. Il est plus sain pour les ex-époux de prendre de la distance et pour cela de convenir d’un départ qui procurera au salarié une sécurité grâce à l’assurance chômage et aux possibilités liées à ce régime : indemnités, formation professionnelle, stages et aides à la recherche d’un emploi.
(1) Soulte : somme d’argent qui, dans un partage ou un échange , doit être versée par une des parties pour compenser l’inégalité de valeur des lots.
(2) Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens.
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