- Accueil ›
- Formation ›
- Cahiers Ordonnance ›
- L’herpès ›
- 1/5 – Pathologie : l’herpès en 7 questions
1/5 – Pathologie : l’herpès en 7 questions
1. De quoi s’agit-il ?
L’herpès est une infection cutanéomuqueuse due aux virus Herpes simplex de type 1 (HSV-1) ou de type 2 (HSV-2). Ces virus à ADN appartiennent à la famille des Herpesviridae. Il s’agit de virus enveloppés, donc relativement fragiles dans l’environnement (le pouvoir infectieux est estimé à 1 à 2 heures sur la plupart des supports). Leur transmission est strictement interhumaine, l’homme étant le seul réservoir. Ce sont des virus dermoneurotropes, c’est-à-dire ayant un tropisme pour les cellules épithéliales et les neurones. Ils ont la particularité de persister à l’état latent dans l’organisme après la primo-infection et de pouvoir se réactiver, donnant lieu à des récurrences cliniques symptomatiques ou à des réactivations virales asymptomatiques. Si le HSV-1 est principalement responsable d’herpès orofacial et le HSV-2 d’herpès génital, ces virus peuvent infecter d’autres régions cutanéomuqueuses. Ainsi, le HSV-1 est souvent retrouvé au niveau génital et le HSV-2 peut, bien que rarement, être responsable d’herpès labial.
Une infection par l’un des deux types de HSV n’empêche pas une infection par l’autre type. Les symptômes cliniques sont cependant moins sévères dans cette situation.
Les chiffres
- En France, 60 à 70 % de la population adulte est séropositive pour le HSV-1. 20 % des personnes présentent des récurrences d’herpès labial.
- 15 à 20 % de la population sexuellement active est séropositive pour le HSV-2. En cas de co-infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), la séroprévalence est proche de 50 %. Environ un tiers des herpès génitaux sont dus à un HSV-1. 20 à 50 % des patients atteints d’un herpès génital présentent des récurrences cliniques.
- Herpès néonatal : environ 20 cas par an.
2. Herpès : quels sont les signes cliniques ?
Primo-infection
La primo-infection est le plus souvent asymptomatique. Le virus se réplique puis gagne les ganglions sensitifs innervant le territoire cutané infecté : ganglion de Gasser après une primo-infection orale ou ganglions sacrés après une primo-infection génitale. Les ganglions de Gasser appartiennent au nerf trijumeau, ils se divisent en trois branches : ophtalmique, maxillaire et mandibulaire.
Au niveau orofacial : survenant le plus souvent dans l’enfance, la primo-infection au HSV-1 est presque toujours asymptomatique. Lorsqu’elle se manifeste, elle prend la forme d’une gingivostomatite aiguë fébrile très douloureuse touchant toute la cavité buccale avec des vésicules et des érosions rendant l’alimentation difficile. Les ganglions cervicaux sont enflés. La guérison se fait habituellement en 10 à 15 jours.
Au niveau génital : la primo-infection, symptomatique dans un tiers des cas, se manifeste par l’apparition de rougeurs, de vésicules et d’ulcérations sur les organes génitaux (gland ou pénis chez l’homme ; vulve et vagin, col de l’utérus ou périnée chez la femme). Il peut également y avoir une atteinte anale ou anorectale, en cas de pratiques sexuelles avec pénétration anale. Les symptômes ressentis, plus importants chez la femme que chez l’homme, sont des irritations, des démangeaisons, des picotements ou encore des brûlures, associés parfois à de la fièvre, des ganglions inguinaux gonflés, une miction douloureuse voire une rétention aiguë d’urine. Les lésions guérissent en 10 à 20 jours, parfois davantage.
Récurrences
Elles se manifestent souvent au même endroit, le plus souvent le bord des lèvres en cas d’herpès labial, les organes génitaux externes ou la fesse en cas d’herpès génital.
Le virus reste à l’état latent dans les ganglions sensitifs où il échappe au système immunitaire et aux antiviraux. Sous l’influence de divers facteurs, il peut se réactiver et chemine alors par voie nerveuse vers la zone cutanée ou muqueuse correspondante.
La réactivation virale peut être symptomatique : on parle de récurrence clinique, dont les symptômes sont moins bruyants que la primo-infection. Elle peut aussi être asymptomatique : on parle d’excrétion virale asymptomatique, mode majeur de transmission de l’herpès génital à HSV-2 notamment. En effet, l’excrétion virale asymptomatique est d’autant plus importante que le virus concerné est le HSV-2, que la primo-infection est récente (moins de 1 an) et qu’il y a plus de 12 récurrences par an. Cela explique aussi la survenue de cas d’herpès néonatal sans qu’aucune histoire clinique d’herpès ne soit retrouvée chez la mère ou le conjoint.
Au niveau orofacial : des signes précurseurs ou prodromes (prurit, picotements, brûlures) précèdent souvent de 24 heures environ l’apparition d’un érythème se couvrant de vésicules en bouquet qui se rompent pour donner une ulcération suintante puis une croûte qui tombe en quelques jours. Une légère fièvre et des adénopathies cervicales peuvent être présentes. Le bord externe de la lèvre (bouton de fièvre) est la localisation classique mais les poussées surviennent aussi dans la bouche, à proximité des narines ou sur le menton. La guérison a lieu en 1 semaine environ.
Au niveau génital : les prodromes (prurit, picotements, brûlures) peuvent faire penser à tort à une cystite ou à une mycose. Apparaissent ensuite les vésicules puis les ulcérations sur les muqueuses génitales externes ou parfois les fesses (localisation expliquant parfois la crainte d’une transmission via le siège des toilettes, peu probable en raison de la fragilité du virus dans l’environnement). La guérison a lieu en 8 à 10 jours environ.
3. Comment se transmet la maladie ?
La transmission se fait par contact direct avec les lésions cutanées, les muqueuses ou les sécrétions contaminées. Le risque d’autocontamination est possible, favorisant l’apparition d’un herpès ophtalmique (en se frottant les yeux) ou au niveau du doigt (panaris herpétique). Le risque de contamination via des objets est faible.
L’herpès génital fait partie des infections sexuellement transmissibles (IST) les plus fréquentes. La transmission se fait via des rapports génitaux avec ou sans pénétration, orogénitaux ou anogénitaux. Les lésions érosives sont également un facteur de risque de transmission et d’acquisition du virus de l’immunodéficience humaine (VIH).
Si le risque de transmission du virus est maximal en présence de lésions, elle est également possible via une excrétion virale asymptomatique.
4. Quels facteurs favorisent les récurrences ?
Une baisse de l’immunité (fatigue, stress, infection fébrile, traitement par corticoïde ou immunosuppresseurs, etc.) ou un changement hormonal (règles et grossesse par exemple), auxquels s’ajoutent l’exposition au soleil ou au froid pour l’herpès labial et les rapports sexuels pour les récurrences génitales, sont à même de favoriser les récurrences.
5. Herpès : comment le diagnostic est-il établi ?
Il est principalement clinique. Une confirmation virologique n’est justifiée qu’en cas de lésions atypiques, de forme sévère et chez l’immunodéprimé. Il est néanmoins recommandé de confirmer virologiquement un tableau clinique évoquant un premier épisode d’herpès génital, notamment chez la femme en âge de procréer, et systématiquement chez une femme enceinte afin de prévenir un herpès néonatal. Le diagnostic virologique repose le plus souvent sur la détection du génome viral par polymerase chain reaction (PCR), qui permet également de définir le type de virus en cause (HSV-1 ou HSV-2). La recherche d’autres IST, dont le VIH, est réalisée en cas de diagnostic positif.
Chez le nouveau-né, des prélèvements oculaires et pharyngés, entre autres, sont réalisés pour objectiver le diagnostic.
6. Quelles sont les personnes à risque de forme grave ?
Chez la femme enceinte, une primo-infection lors du 3e trimestre peut exceptionnellement entraîner une hépatite aiguë fébrile anictérique, mettant en jeu le pronostic vital.
Chez le nouveau-né, la transmission du virus, le plus souvent lors de l’accouchement par voie basse, entraîne un herpès néonatal. Rare mais grave, il peut se manifester par une atteinte cutanéomuqueuse (éruption vésiculeuse et nécrotique diffuse), neurologique (encéphalite) ou disséminée (défaillance multiviscérale). Souvent, la mère est asymptomatique mais il existe une excrétion virale au niveau vaginal lors de l’accouchement. Le risque de transmission est le plus élevé en cas de primo-infection maternelle dans le mois précédant l’accouchement. Dans 10 % des cas, le nourrisson est contaminé en période postnatale à partir d’une atteinte orofaciale généralement. Une contamination in utero par voie transplacentaire, liée à une primo-infection chez la mère, est plus rare.
Chez l’immunodéprimé, les symptômes peuvent être graves (lésions étendues, nécrotiques, atteintes viscérales) et les récidives plus fréquentes, prolongées et atypiques.
Témoignage
Anaïs L., 32 ans
« J’ai perdu ma fille de 15 jours des suites d’un herpès néonatal. Mon partenaire et moi n’avons jamais eu de symptômes génitaux. En revanche, nous avions de temps en temps tous deux des boutons de fièvre. Le médecin suspecte donc une contamination par moi-même ou mon partenaire via un herpès labial. J’ai cru ne jamais réussir à surmonter cette épreuve. Et puis, je suis allée de l’avant. Je suis maintenant maman d’un petit garçon. »
7. Quelles sont les complications ?
Bénignes chez les personnes immunocompétentes, les récurrences peuvent altérer fortement la qualité de vie lorsqu’elles sont fréquentes, notamment au niveau génital. Certaines formes d’herpès sont invalidantes ou à risque de complications.
Herpès oculaire : typiquement, il s’agit d’une kératoconjonctivite aiguë unilatérale pouvant conduire à une baisse de l’acuité visuelle en cas de récidive et d’absence de prise en charge adéquate.
Érythème polymorphe récurrent : la récurrence herpétique en est la première cause. Il s’agit d’une éruption maculopapuleuse en cocarde sur le visage et les extrémités (mains, pieds), pouvant s’étendre au tronc ou aux muqueuses.
Infection herpétique d’une dermatose préexistante : un herpès diffus est à craindre sur des lésions de dermatite atopique par exemple (syndrome de Kaposi-Juliusberg), pathologie grave se manifestant par des vésicules hémorragiques, des pustules et une altération de l’état général.
L’herpès peut parfois se compliquer d’autres atteintes (notamment une encéphalite, une méningite ou une hépatite).
Avec l’aimable relecture de la Pre Sonia Burrel, virologue au centre hospitalier universitaire de Bordeaux (Gironde).
Article issu du cahier Formation du n°3534, paru le 2 novembre 2024.
- Vaccination antigrippale des plus de 65 ans : Efluelda aurait-il tout changé cette année ?
- Miorel et génériques : contraception obligatoire pour tous
- Enquête de l’Anepf : la vie des étudiants en pharmacie, pas si rose
- Analogues du GLP-1 : période d’essai jusqu’au 1er mai
- Économie officinale : faut-il ressortir les gilets jaunes et les peindre en vert ?