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3/6 – Traitements : les molécules utilisées dans l’épilepsie de l’enfant
Effets indésirables, interactions, conditions de prescription… Zoom sur les traitements de l’épilepsie de l’enfant et de l’adolescent.
Mécanisme d’action des différents antiépileptiques recommandés chez l’enfant
Les antiépileptiques sont nombreux et leurs mécanismes d’action sont variés, complexes et souvent incomplètement élucidés. Ils visent à diminuer l’excitabilité neuronale, en inhibant les transmissions excitatrices glutamatergiques, en stimulant les transmissions inhibitrices GABAergiques ou en bloquant les canaux dépendants du voltage.
L’action des antiépileptiques peut s’exercer au niveau des synapses glutamatergiques par effet :
- antagoniste direct au niveau des récepteurs AMPA (pérampanel) ou d’autres récepteurs glutamatergiques postsynaptiques appelés récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA) comme le valproate et le topiramate ;
- antagoniste indirect au niveau présynaptique par perturbation de l’exocytose du glutamate (lévétiracétam, brivaracétam) ou inhibition des canaux calciques présynaptiques (gabapentine).
Leur action peut aussi s’exercer au niveau des synapses GABAergiques par effet :
- agoniste direct potentialisant les effets du GABA et favorisant l’ouverture d’un canal chlore au niveau post-synaptique (benzodiazépines, phénobarbital, topiramate, stiripentol) ;
- agoniste indirect, en inhibant la dégradation physiologique de GABA par la GABA-transaminase (vigabatrine).
Les antiépileptiques peuvent également exercer un effet dit « stabilisateur de membrane » en inhibant les canaux sodiques dépendants du voltage (valproate, carbamazépine, oxcarbazépine, lamotrigine, lacosamide, phénytoïne). Quant à l’éthosuximide, il inhibe les canaux calciques post-synaptiques.
L’hétérogénéité des épilepsies explique pourquoi trouver le bon traitement s’avère souvent complexe. Tous les antiépileptiques ne sont pas efficaces dans toutes les formes de la maladie. Certaines molécules peuvent même aggraver certaines formes d’épilepsie.
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Pharmacologie des antiépileptiques
Effets indésirables
Les effets indésirables des antiépileptiques sont variés et parfois sévères.
- Troubles neuropsychiatriques : fatigue, troubles de la vigilance, de la mémoire ou de la concentration, céphalées, tremblements, par exemple avec l’oxcarbazépine, la lamotrigine, la gabapentine, le lacosamide, la vigabatrine, le brivacétam ; troubles de l’humeur et du comportement (brivacétam, lévétiracétam, pérampanel, topiramate, éthosuximide, cannabidiol en particulier).
- Réactions cutanées : urticaire (éthosuximide), syndrome de Stevens-Johnson ou Lyell ou syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse (DRESS) avec éosinophilie et symptômes systémiques, notamment avec la carbamazépine, l’oxcarbazépine (risque d’allergie croisée avec la carbamazépine d’environ 20 %), le felbamate, le lévétiracétam, le pérampanel, la lamotrigine (importance de sa titration progressive et d’informer la famille du patient du risque cutané afin d’interrompre rapidement le traitement en cas de signes).
- Troubles digestifs : nausées, vomissements, diarrhées, perte de poids liés à une diminution d’appétit (felbamate, topiramate, stiripentol, lévétiracétam, éthosuximide, cannabidiol) ou, à l’inverse, prise de poids liée à une stimulation d’appétit (vigabatrine, valproate, carbamazépine, gabapentine), augmentation des transaminases (valproate, cannabidiol) et atteintes hépatiques potentiellement létales (felbamate).
- Atteintes hématologiques : risque d’aplasie médullaire potentiellement létale sous felbamate, de leucopénie sous carbamazépine, brivacétam et éthosuximide, thrombopénie sous valproate et stiripentol.
- Troubles oculaires : risque d’amputation du champ visuel avec la vigabatrine, de troubles visuels (vision floue, diplopie, nystagmus) avec la carbamazépine, la gabapentine, le topiramate, le rufinamide et le lévétiracétam, de myopie avec le topiramate.
- Troubles métaboliques : acidose métabolique (susceptible de diminuer la croissance par stimulation de l’activité ostéoclastique) liée à l’inhibition de l’anhydrase carbonique sous topiramate, risque d’hyponatrémie sous carbamazépine et oxacarbazépine, troubles du métabolisme phosphocalcique.
- Effets tératogènes : notamment avec le valproate et le topiramate, mais aussi avec la carbamazépine.
- Toxicité cardiaque : le lévétiracétam expose à un risque d’allongement de l’espace QT à l’ECG (prudence en cas de troubles hydroélectrolytiques), le lacosamide à des troubles du rythme et de la conduction cardiaques.
Vigilance !
Certaines contre-indications aux principales molécules utilisées chez l’enfant sont à connaître en plus de l’hypersensibilité à la molécule.
Carbamazépine : antécédents d’aplasie médullaire et de porphyrie.
Valproate : grossesse, fille en âge de procréer (sauf si les conditions du programme prévention grossesse sont remplies), hépatite, antécédent personnel ou familial d’hépatite, certaines maladies métaboliques (déficit en carnitine, hyperammoniémie).
Principales interactions
Certains antiépileptiques, comme la carbamazépine notamment, sont inducteurs enzymatiques et diminuent l’efficacité des médicaments associés. Outre les interactions contre-indiquées (voir tableau), les associations avec un grand nombre d’antirétroviraux, la sertraline, le fentanyl, les vinca-alcaloïdes, le cyclophosphamide, l’aprépitant, les contraceptifs hormonaux, ainsi que l’ulisprital et le lévonorgestrel en contraception d’urgence, sont déconseillées. Dans le cas où une jeune fille traitée par carbamazépine doit recourir à une contraception d’urgence, la pose d’un dispositif intra-utérin au cuivre est privilégiée. À défaut, le doublement de la dose de lévonorgestrel est proposé. La prise d’ulipristal n’est pas recommandée avec un inducteur enzymatique. Pour cette molécule, faute de données, un doublement de la dose n’est pas envisagé. L’association à la vitamine D, aux corticoïdes, à la doxycycline ou au montélukast est classée en précautions d’emploi et peut nécessiter une augmentation de leurs doses.
Inversement, de nombreux antiépileptiques étant substrats des cytochromes P450 (CYP 450), l’utilisation du millepertuis est contre-indiquée, et la consommation de pamplemousse déconseillée.
Pour cette même raison, une bithérapie peut nécessiter des adaptations de doses de certains antiépileptiques. C’est le cas en particulier de la lamotrigine, substrat des CYP 450 et des uridine 5′-diphosphate glucuronosyltransferases (UGT), lorsqu’elle est associée au valproate (inhibiteur d’UGT) ou à la carbamazépine (inducteur d’UGT). L’association lamotrigine et valproate est déconseillée à cause d’un risque majoré de réactions cutanées, mais si l’association est nécessaire, une surveillance renforcée de l’état cutané s’impose.
La contraception œstroprogestative peut en outre perturber un traitement par lamotrigine et nécessiter une augmentation de sa posologie. Un progestatif seul peut être utilisé en alternative.
Un traitement antiépileptique est par ailleurs susceptible d’être perturbé par les médicaments abaissant le seuil épileptogène (neuroleptiques, antidépresseurs, tramadol, certains antihistaminiques, etc.).
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Conditions de prescription de valproate et topiramate chez une fille
- Prescription initiale annuelle réservée aux neurologues et pédiatres et recueil d’un accord de soins signé chaque année par le prescripteur et les parents de la patiente mineure. Renouvellement possible par tout médecin dans la limite d’un an. Une contraception efficace doit être associée si la patiente est en âge de procréer.
- Délivrance sur présentation de la prescription initiale du spécialiste (et le cas échéant de celle de renouvellement) et du formulaire d’accord de soins signé.
- Pour le valproate, une brochure d’information ainsi qu’une carte nominative doivent être remises à la patiente par le spécialiste ou le pharmacien. Elles sont disponibles auprès des laboratoires concernés et sur le site de l’ANSM. La carte est également présente avec la boîte de médicament.
Autres traitements
- La chirurgie consistant à retirer la zone du cerveau responsable des crises, sans compromettre d’autres fonctions, est envisagée dans les épilepsies focales pharmacorésistantes.
- La stimulation du nerf vague est une alternative en cas de pharmacorésistance chez les patients qui ne sont pas éligibles à la chirurgie.
- Des données probantes suggèrent que les régimes cétogènes, riches en matières grasses et faibles en glucides, seraient efficaces chez les enfants atteints d’épilepsie résistante aux médicaments.
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Avec l’aimable relecture du Dr Norbert Khayat, épileptologue à l’hôpital Médipôle de Lyon (Rhône) et vice-président d’Épilepsie France
Article issu du cahier Formation du n°3511, paru le 26 avril 2024
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