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Les probiotiques efficaces

Publié le 24 septembre 2020
Par Nathalie Belin
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Les probiotiques semblent avoir des effets bénéfiques dans de nombreuses pathologies, mais les preuves de leur efficacité font parfois défaut. Dans certains cas, elles sont assez solides pour les recommander.

Les probiotiques, c’est quoi ?

• Le microbiote, ou « la flore », est l’ensemble des micro-organismes, bactéries, champignons, levures… vivant dans un écosystème donné. Le microbiote est présent au niveau de toutes les structures de l’organisme en relation avec le milieu extérieur : bouche, intestin, peau, vagin, surface oculaire… Exemples : la flore cutanée, la flore intestinale, etc.

• Selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les probiotiques sont des « micro-organismes vivants qui, lorsqu’ils sont ingérés en quantité suffisante, exercent des effets positifs sur la santé, au-delà des effets nutritionnels traditionnels ». Selon La Revue Prescrire (n° 410, décembre 2017), un probiotique est « un micro-organisme vivant dont on attend les effets bénéfiques chez l’hôte qui l’a ingéré ».

• Chaque souche de probiotiques est déterminée par son genre, tel Lactobacillus, son espèce, comme rhamnosus, sa sous-espèce selon le cas, et par des caractères qui permettent de l’identifier spécifiquement. Exemple : Lactobacillus rhamnosus GG.

• Les probiotiques les plus étudiés et les plus utilisés du fait des effets bénéfiques qu’ils semblent conférer sont les genres Lactobacillus, Streptococcus et Bifidobacterium, les bactéries lactiques, et les levures Saccharomyces.

Comment agissent-ils ?

• L’efficacité d’un probiotique dépend de son implantation et de ses interactions avec le microbiote de l’hôte, différent d’une personne à l’autre, ce qui explique les variabilités individuelles d’efficacité constatées dans les études.

• Chaque souche a ses propriétés physiologiques non extrapolables à une autre souche, même de la même espèce ou sous-espèce. Par ailleurs, pour être efficace, chaque souche doit être amenée vivante au niveau de son lieu d’action et à concentration suffisante.

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Quelle est leur efficacité ?

Plusieurs sociétés savantes accordent une place aux probiotiques en les citant dans leurs recommandations. Les études les plus convaincantes sont relevées dans les domaines suivants.

• Gastro-entérologie.

→ Gastro-entérites aiguës. Saccharomyces boulardii (250 à 750 mg par jour, cinq à sept jours) et Lactobacillus rhamnosus GG (≥ 1 010 CFU par jour, cinq à sept jours, voir Info+) sont recommandés par la Société européenne de gastrœntérologie, hépatologie et nutrition pédiatrique (ESPGHAN) et par le Groupe francophone d’hépatologie-gastro-entérologie et nutrition pédiatriques (GFHGNP) pour diminuer l’intensité et la durée de la diarrhée aiguë chez l’enfant et le nourrisson.(1) Place dans la stratégie. Le GFHGNP précise que trois traitements peuvent être proposés dans ce contexte : les probiotiques, le racécadotril et la diosmectite, désormais déconseillée chez les nourrissons.

→ Diarrhée associée aux antibiotiques. S.boulardii et L. rhamnosus GG ont affiché leur efficacité en prévention de la diarrhée associée aux antibiotiques chez l’enfant et l’adulte.(2 et 3)

Place dans la stratégie. Le GFHGNP indique (3) que la dysbiose (voir Info+) secondaire à une antibiothérapie précoce les deux premières années de la vie pourrait favoriser certaines pathologies – intestin irritable, surpoids, diabète, MICI – et que la prévention par un probiotique ayant prouvé son efficacité « peut être suggérée », dont le recours à S.boulardii dans la prévention de la diarrhée à Clostridium difficile.

→ Syndrome de l’intestin irritable (SII). Les probiotiques sont cités au côté des traitements médicamenteux.(4 et 5) Des données d’efficacité sont jugées solides dans le SII pour : Bifidobacterium infantis 35624, L.plantarum 299V, l’association Bifidobacterium longum LA 101, Lactobacillus helveticus LA 102 , Lactococcus lactis LA 103, Streptococcus thermophilus LA 104 et l’association Lactobacillus plantarum CECT 7484, Lactobacillus plantarum CECT 7485 et Pediococcus acidilactici CECT 7483. Place dans la stratégie. Les probiotiques s’utilisent en complément d’autres traitements, au long cours ou en cures renouvelables. En tester une au moins un mois, avant d’en changer en l’absence d’amélioration.

→ Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI). La place des probiotiques est limitée. Seuls ont montré leur efficacité: l’association VSL#3 (voir tableau) dans la prévention et le maintien en rémission de la pochite, une inflammation du réservoir constitué après colectomie avec anastomose iléo-anale, et E.coli Nissle 1917, non disponible en France, dans la prévention de la rechute de la rectocolite hémorragique.

→ Colique du nourrisson. Plusieurs méta-analyses révèlent l’efficacité d’un probiotique issu du lait maternel, Lactobacillus reuteri Protectis. Il a un effet prophylactique et une efficacité, en particulier chez les nourrissons allaités.(6)

• Allergologie. Les probiotiques ont présenté un intérêt pour réduire le risque de dermatite atopique chez l’enfant lorsqu’ils sont administrés aux femmes enceintes durant le dernier trimestre de la grossesse ou l’allaitement, ou encore donnés aux nourrissons dès la naissance. La Société internationale d’allergologie propose leur emploi chez les femmes enceintes et allaitantes et chez les nourrissons lorsqu’ils ont un risque élevé de développer un eczéma : père, mère, frère ou sœur avec antécédents de rhinite allergique, asthme, eczéma ou allergie alimentaire. Place dans la stratégie. Des experts les recommandent en prévention chez la femme enceinte ou les nourrissons et enfants à risque, ou les proposent une fois l’eczéma diagnostiqué pour améliorer les symptômes. La grande variabilité des souches et dosages utilisés dans les études ne permet pas de recommander une souche en particulier.

• Gynécologie et urologie.

→ Vaginose bactérienne et mycose vaginale.

Aucune recommandation, mais de nombreux essais montrent que leur usage au long cours limite les récidives des vulvovaginites liées à une dysbiose intestinale et/ou vaginale. Les souches les plus étudiées sont des lactobacilles de la flore vaginale : L.crispatus, L.gasseri, L. rhamnosus, L.helveticus. Place dans la stratégie. Par voie orale en continu, ou par voie vaginale en cure de quelques jours par mois, dans les infections récidivantes (plus de quatre par an), associés au traitement antibiotique ou antifongique.

→ Cystites récidivantes. « Elles peuvent être liées à une dysbiose intestinale suspectée en cas de constipation, ballonnements ou douleurs abdominales et/ou vaginales », indique Jean-Marc Bohbot, infectiologue à l’Institut Fournier (Paris) et spécialiste des infections uro-génitales. Les probiotiques méritent d’être essayés, « d’autant plus chez les patientes se voyant prescrire fréquemment des cures d’antibiotiques ». Il prescrit ceux utilisés dans le SII par voie orale ou vaginale en cas de dysbiose intestinale.

Quelles précautions ?

S.boulardii est contre-indiquée avec un cathéter veineux central et en cas d’immunodéficience. Les probiotiques s’utilisent avec prudence en cas de système immunitaire affaibli.

(1) Recommandations de bonne pratique, ESPGHAN, 2014, et Diarrhées aiguës du nourrisson et de l’enfant, GFHGNP, 2017.

(2) Probiotiques et prébiotiques, World Gastrœnterology Organisation Global Guidelines , février 2017.

(3) Prévention de la diarrhée associée aux antibiotiques : recommandations d’experts, GFHGNP, septembre 2019.

(4) Syndrome de l’intestin irritable : une approche globale, World Gastrœnterology Organisation Global Guidelines , 2015.

(5) Prise en charge du syndrome de l’intestin irritable, SNFGE, septembre 2016.

(6) Coliques du nourrisson, GFHGNP, 2018.

La flore intestinale, ou microbiote intestinal

Le microbiote le plus connu est celui de l’intestin. Il a de nombreuses fonctions, notamment métaboliques. Il joue un rôle dans :

→ l’absorption et l’assimilation des nutriments et micronutriments, dont des vitamines, des acides gras, le calcium ou le magnésium, ainsi que la fermentation des résidus alimentaires non digestibles ;

→ le développement du système immunitaire et son fonctionnement ;

→ la protection contre des pathogènes ;

→ la restauration et la préservation de la fonction « barrière intestinale » ;

→ l’apparition de nombreuses pathologies intestinales (MICI, intestin irritable), métaboliques (diabète, obésité…), mais aussi neurologiques (autisme, maladies neurodégénératives, dépression, troubles bipolaires…), allergiques (dermatite atopique), certains cancers…

Info +

→ Un seul médicament renfermant des souches probiotiques tuées a montré une certaine efficacité comme antidiarrhéique.

Il s’agit de Lactéol, qui contient un lactosérum fermenté par la souche Lactobacillus acidophilus LB.

→ CFU (Colony forming unit) ou UFC (Unité formant colonie) : unité permettant de dénombrer les bactéries vivantes.

→ Dysbiose : déséquilibre du microbiote.