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Un « quinqua » traité pour une goutte chronique
Luc M., 57 ans, suit depuis six mois un traitement pour sa goutte chronique par Zyloric, accompagné de Colchimax à 0,5 mg par jour pour prévenir les crises, fréquentes à l’instauration du traitement de fond. Le médecin poursuit Zyloric seul, mais prévoit une reprise du Colchimax à dose curative en cas d’apparition de crise.
Prescription
Dr G., médecin généraliste
M. Luc M., 57 ans, 1,76 m, 92 kg
Zyloric 300 mg
1 cp le midi pendant 6 mois.
Arrêter si crise de goutte, ne pas prendre en même temps que Colchimax.
Si crise :
Colchimax
15 jours, 1 boîte.
Doliprane 1000
3 par jour si douleurs.
Dafalgan codéine comprimés
1 boîte, à renouveler 2 fois.
Inegy 10 mg/40 mg
1 le soir pendant 6 mois.
CE QUE JE DOIS SAVOIR
Législation
Cette ordonnance respecte la législation.
Contexte
C’est quoi ?
Cette ordonnance prend en charge la goutte, arthropathie inflammatoire qui résulte d’un excès d’acide urique prolongé dans le sang (hyperuricémie) et de son accumulation au niveau des articulations sous forme de microcristaux d’urate de sodium. Elle comporte également un traitement hypolipémiant.
Symptômes de la crise de goutte
Après plusieurs années d’hyperuricémie, la crise se manifeste par une inflammation brutale très douloureuse des articulations (orteil, main, poignet, genou…), liée à la précipitation locale de l’acide urique en excès, spontanément réversible en quelques jours. La goutte est chronique quand les crises se répètent avec, à la longue, un risque de dépôts de cristaux sous-cutanés, articulaires et osseux responsables de destructions articulaires.
Objectif
Le but du traitement de fond (Zyloric) est d’abaisser l’uricémie sous 60 mg/l (360 µmol/l) pour prévenir la formation d’autres cristaux et favoriser la dissolution des cristaux d’urate accumulés. En cas de crises, le traitement (Colchimax, antalgiques) doit soulager rapidement en réduisant inflammation et douleur. Inegy corrige l’hyperlipidémie, anomalie métabolique corrélée à l’hyperuricémie comme le diabète, l’HTA ou l’obésité.
Médicaments
Zyloric (allopurinol)
C’est un hypo-uricémiant inhibiteur de l’enzyme xanthine-oxydase qui catalyse la synthèse de l’acide urique par l’organisme. Ce traitement de fond de la goutte a été prescrit six mois auparavant après résolution d’une troisième crise en un an. Initiée à 100 mg/j, la dose a été augmentée peu à peu jusqu’à 300 mg/j.
Colchimax (colchicine)
Associée à des ralentisseurs du transit (méthylsulfate de tiémonium, poudre d’opium) pour pallier la diarrhée, la colchicine est anti-inflammatoire par inhibition de production de cytokines inflammatoires et des cyclo-oxygénases. Elle est ici indiquée en cas d’accès aigu de goutte.
Inegy (ézetimibe/simvastatine)
Hypolipidémiant qui inhibe l’absorption intestinale du cholestérol (ézétimide) et la synthèse endogène du cholestérol (simvastatine, inhibiteur de l’HMG-CoA réductase) indiqué ici comme traitement adjuvant au régime dans le cadre d’une hypercholestérolémie et hypertriglycéridémie non contrôlée par une statine seule.
Doliprane et Dafalgan codéiné (paracétamol 500 mg + codéine 30 mg)
Antalgiques de niveau 1 (paracétamol seul) et 2 (associé à la codéine), indiqués respectivement dans le traitement symptomatique des douleurs d’intensité légère à modérée ou modérée à intense quand le paracétamol seul ne suffit pas.
Repérer les difficultés
Allopurinol
Le traitement de fond, maintenu à vie, ne doit pas être interrompu en cas d’apparition de crise, contrairement à ce qui est mentionné sur l’ordonnance. Appeler le prescripteur pour vérifier ce point.
Colchicine
C’est un médicament à marge thérapeutique étroite au surdosage potentiellement mortel. Il faut s’assurer que le patient connaît les précautions d’emploi et les signes de surdosage (voir encadré).
Paracétamol seul et associé
L’emploi concomitant de ces produits expose au risque de surdosage en paracétamol et à une toxicité hépatique. Il faut rappeler les doses maximales cumulatives.
Posologies
Celles qui ne sont pas mentionnées sur l’ordonnance doivent être indiquées au patient (voir « Horaires d’administration »).
CE QUE JE DIS AU PATIENT
J’ouvre le dialogue
« Je vois que vous arrêtez le Colchimax à dose préventive pour ne garder que le traitement de fond Zyloric » ; « Savez-vous comment prendre Colchimax en cas de crise ? L’ordonnance mentionne d’arrêter Zyloric en cas de crise, je vais m’en assurer auprès de votre médecin » (qui confirme par téléphone que Zyloric doit être poursuivi) ; « Certains aliments favorisent la survenue de crises, voulez-vous que l’on fasse un point ? » Monsieur D., qui vit seul, respecte difficilement les consignes alimentaires. Il doit pourtant entendre que c’est un facteur de risque à ne pas négliger.
J’explique le traitement
Mécanisme d’action
→ Le traitement de fond diminue le taux d’acide urique dans le sang et évite ainsi son accumulation dans les articulations, responsable des crises douloureuses. Il permet généralement de guérir la maladie mais doit être poursuivi à vie.
→ Si une crise survient, Colchimax réduit l’inflammation et soulage rapidement. Il doit être pris le plus tôt possible ; son efficacité est maximale dans les 12 heures suivant les symptômes. Ne pas arrêter Zylorix, qui est le traitement de fond.
→ Les règles hygiéno-diététiques sont aussi importantes que le traitement pour limiter l’apparition des crises.
Horaires d’administration
→ Zyloric : 1 le midi après le repas pour limiter les diarrhées.
→ Colchimax : le plus tôt possible après l’apparition des symptômes selon la posologie usuelle dégressive ; aux repas, 1 mg 3 fois par jour le premier jour, puis 1 mg 2 fois par jour à J2 et J3, puis 1 mg par jour pendant 13 jours.
→ Dafalgan codéiné : ne pas dépasser 1 g de paracétamol par prise et 4 g/jour. Si la douleur ne cède pas avec Doliprane 1000, prendre 1 à 2 comprimés de Dafalgan codéiné par prise, au maximum 6 (voire 8) par jour en réduisant d’autant les prises de Doliprane 1000 pour ne pas dépasser les doses maximales. Espacer les prises de quatre heures au moins. Exemple : 2 Doliprane 1000 + 4 Dafalgan codéiné.
→ Inegy : 1 le soir pendant ou hors repas.
Effets indésirables
→ Zyloric : gastralgies, nausées, diarrhées, céphalées, somnolence, vertiges.
→ Colchimax : diarrhées, nausées, vomissements (colchicine), sécheresses buccale et lacrymale, tachycardie, trouble de l’accommodation, constipation.
→ Codéine : somnolence, nausées, constipation.
→ Inegy : céphalées, douleurs abdominales, nausées, vomissements, asthénie, insomnie. Risque d’atteinte musculaire (voir « Surveillance »).
J’accompagne
Surveillance
→ Une fois l’uricémie-cible atteinte, le taux est vérifié tous les six mois.
→ S’assurer que le patient maîtrise les signes de toxicité des médicaments. Une éruption cutanée peut évoquer une intolérance cutanée à l’allopurinol (jusqu’à 5 % des patients) qui expose, en cas de réintroduction, à la survenue d’un syndrome d’hypersensibilité grave. Diarrhées, nausées et vomissements peuvent être les premiers signes de surdosage en colchicine (voir encadré). Arthralgie, faiblesse ou crampes musculaires peuvent évoquer une atteinte musculaire ou une rhabdomyolyse décrite pour les deux composants d’Inegy. Orienter vers le médecin.
→ Sous colchicine : éviter l’automédication et signaler ce traitement à tout prescripteur, notamment si un antibiotique est nécessaire (voir « Pharmaco »).
Hygiène de vie
→ Adapter son alimentation. Éviter les aliments/boissons riches en purines (dégradées en acide urique) : bière (sans alcool aussi), alcools forts, bouillons de viande, sardines, crustacés, moules, anchois, abats. Privilégier les laitages pauvres en graisse, les fruits et légumes frais (sauf asperges, champignons, chou-fleur, épinards, légumes secs). Éviter les aliments riches en fructose, précurseur de purines (voir encadré) ; limiter les riches en cholestérol : jaune d’œuf, fromages, charcuteries…
→ Contrôler son poids : le surpoids, facteur de risque de la goutte, est à combattre (alimentation équilibrée, activité physique suffisante) sans toutefois recourir à des régimes hyperprotéinés, mis en cause dans l’apparition des crises de goutte.
→ Gare aux coups : chocs et traumatismes favorisent les crises. Conseiller des activités non traumatisantes pour les articulations (marche, vélo, natation…).
Vente associée
Vous pouvez conseiller un coussin réfrigérant réutilisable (Actipoche, Nexcare Coldhot, Gelpack…) à employer en cas de crise sur les articulations douloureuses. Immobiliser l’articulation et la refroidir aident en effet à soulager efficacement.
Le patient me demande…
Quels sont les aliments riches en fructose à éviter ?
Le fructose, à l’état naturel dans les fruits, est fabriqué industriellement et largement utilisé pour son pouvoir fortement sucrant, notamment dans les sodas, les entremets industriels et les jus de fruits.
Si le soda est « sans sucre », contient-il du fructose ?
C’est possible car « sans sucre » signifie généralement sans saccharose, mais pas nécessairement sans fructose, utilisé comme édulcorant dans certaines boissons « light ». Il suffit de vérifier sur l’étiquette la présence ou non de fructose et de privilégier, si vous ne pouvez vous en passer, les sodas édulcorés à l’aspartame.
Point pharmaco
La colchicine a une faible marge thérapeutique. Un surdosage peut provoquer un choc septique avec arrêt respiratoire, collapsus cardiovasculaire, potentiellement mortel dès 7 mg ingérés. En 2011, l’ANSM(1) a rappelé les règles à respecter :
– ne jamais associer aux antibiotiques macrolides, ni à la pristinamycine, qui diminuent le métabolisme de la colchicine (responsable de décès) ;
– ne pas laisser à portée des enfants ou des patients atteints de déficience mentale ;
– ne doit pas être prescrit chez l’insuffisant rénal sévère ;
– prescrire à posologie réduite en cas d’insuffisance rénale ou hépatique modérée et chez les plus de 75 ans ;
– prévenir des signes de surdosage : diarrhées, nausées et vomissements.
(1) Mise en garde pour les spécialités à base de colchicine, Point d’information, ANSM, 26/09/2011.
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