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Si j’avais su, j’aurais pu…

Publié le 1 décembre 2010
Par Christine Julien
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Parmi les patients psychotiques que Mme N… hébergeait dans sa maison, Danièle était la plus dégourdie. C’est elle qui venait déposer les ordonnances à la pharmacie, la sienne ainsi que celles de Bernard et des autres « colocataires ». « T’as pas une cigarette ? Tu peux pas me donner de quoi en acheter ? » était son leitmotiv quand elle me tendait les prescriptions. Elle était parfois agitée. Ces jours-là, sa logorrhée enfantine et son discours décousu troublaient l’image que j’avais de cette quinquagénaire. Je préférais ces moments à ceux où son silence accompagnait d’un regard sombre la délivrance de ses 15 flacons d’halopéridol. Peut-être allait-elle moins bien, je n’ai jamais trop exploré les raisons. Elle me tutoyait, mais devais-je en faire autant ?

Dans le village, le tutoiement était de rigueur, alors je profitais de ces habitudes pour justifier ma familiarité, que Danièle appréciait peut-être… Et puis, il y a eu Françoise. Elle m’avait raconté que les murs de la maison d’à côté lui parlaient. Son voisin lui voulait du mal et complotait pour la faire partir… Je connaissais bien cette trentenaire, et je crus ce jour-là à une plaisanterie. Pourtant cette « blague » était bien documentée et s’éternisa longtemps après la délivrance de son ordonnance d’antalgique. Je l’avais écoutée d’une oreille, avais acquiescé, puis elle était partie. Qu’aurais-je bien pu dire ou faire ? M’inquiéter et appeler son médecin de famille ? Si j’avais eu plus de notions sur les psychoses et les structures de soins, je me serais adressée à un CMP et j’aurais demandé conseil à un infirmier psy.

Si j’avais su, j’aurais pu mieux faire. D’où le dossier que Porphyre vous propose dans votre botte de Noël (page 18). En attendant la nouvelle année en votre fidèle compagnie, portez-vous bien !

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