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Les piqûres d’insectes et de végétaux

Publié le 30 mai 2023
Par Nathalie Belin
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Moustiques, guêpes, orties…, des solutions simples soulagent le plus souvent leurs piqûres, mais certaines situations nécessitent en urgence des gestes et des conseils appropriés.

De quoi s’agit-il ?

• Hyménoptères. Guêpes, abeilles, frelons et bourdons piquent grâce à un dard ou aiguillon inoculant un venin toxique. L’aiguillon peu barbelé de la guêpe explique qu’elle pique plusieurs fois. Attirée par de nombreux aliments, elle est la plus agressive des hyménoptères.

Les piqûres de frelon ou de bourdon sont plus rares. Les frelons sont agressifs à proximité de leur nid, en général haut perché. Le degré d’envenimation peut être plus important.

L’aiguillon barbelé de l’abeille reste le plus souvent au point de piqûre, entraînant la mort de l’insecte par arrachement d’une partie de son abdomen. Elle pique pour se défendre ou si elle se sent menacée, souvent près de la ruche.

• Moustiques. Outre un risque de transmission vectorielle (voir Dico+), des substances immunomodulatrices contenues dans la salive sont injectées lors de la piqûre.

• Les épines ou les poils urticants de certains végétaux sont à l’origine de réactions localisées.

Quelles manifestations ?

• La réaction locorégionale est la plus fréquente.

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→ Hyménoptère. La piqûre, immédiatement douloureuse, s’accompagne de rougeur, œdème léger et démangeaisons, liés à la libération d’histamine, et régressent souvent en 24 heures. Une réaction locale étendue (supérieure à 10 cm) perdurant quelques jours se produit parfois.

→ Moustique. Rougeur, œdème léger et surtout prurit plus ou moins important sont notés, avec possibles surinfections des lésions par grattage.

→ Végétaux. Les réactions sont à type d’urticaire, avec sensations de brûlures, de picotements et parfois œdème localisé.

• La réaction allergique systémique.

→ Exceptionnelle après une piqûre de moustique, elle est possible après contact avec certains végétaux, ou une piqûre d’hyménoptère. Mettant en jeu un mécanisme immunologique, il s’agit le plus souvent d’une urticaire généralisée, avec sensation de malaise et prurit sur le corps.

→ À des stades plus sévères, d’autres signes apparaissent de façon isolée ou associée : angiœdème (ou œdème de Quincke, voir Dico+), oppression thoracique, douleurs abdominales, diarrhée, nausées et vomissements, puis dyspnée, confusion, hypotension, perte de connaissance, atteinte multiviscérale, bronchospasme pouvant conduire à un arrêt cardio-circulatoire et ventilatoire. Une réaction sévère peut conduire au décès en quelques minutes.

→ Une réaction locale étendue lors d’une précédente piqûre est un facteur de risque de survenue d’une manifestation systémique lors d’une nouvelle piqûre.

• La réaction toxique, observée lors d’un grand nombre de piqûres, associe engourdissement des membres, troubles respiratoires, voire des atteintes multiviscérales.

Quelle prise en charge ?

• La consultation médicale s’impose en urgence en cas de piqûres multiples ou au niveau des voies aériennes (dans la bouche), ou de signes immédiats de gravité tels que raucité de la voix, picotements dans la gorge, malaise…, ainsi que chez tout patient allergique avant l’auto-injection d’adrénaline (voir ci-après). Elle doit se faire rapidement en cas d’œdème s’aggravant ou d’urticaire. Appel au 15, 18 ou au 112.

• Les premiers gestes à l’officine.

→ Lors d’une piqûre d’abeille, vite retirer le dard pour limiter la quantité de venin qui continue à se libérer, avec une lame non tranchante parallèlement à la peau (carte, ongle…) plutôt qu’une pince à épiler, au risque de rompre la poche à venin. « Une pompe type Aspivenin est aussi utile pour retirer le dard, mais peu efficace pour extraire du venin », indique Luc de Haro, médecin généraliste exerçant au Centre antipoison et de toxicovigilance de Marseille (13).

→ Quelle que soit la piqûre, appliquer de la chaleur quelques secondes limite la réaction locale (douleur, œdème, prurit)(1). Un stylo dédié existe : Bite Away, dès 3 ans. « On fait suivre l’application de chaleur par celle de froid (glaçon, canette de boisson fraîche…), ce qui crée un “choc thermique” favorisant l’inactivation du venin », conseille l’expert. À noter : pour les piqûres d’hyménoptères, un patch renfermant du saccharose (Bee Patch) est disponible, mais sans études cliniques pertinentes. Il agit par effet osmotique, le venin étant transféré sur le patch juste après la piqûre.

→ Nettoyer, désinfecter à l’aide d’un antiseptique et vérifier la vaccination antitétanique, d’autant plus s’il s’agit de guêpes ou de frelons, omnivores et pouvant se nourrir de déchets. En cas de piqûre à la main, enlever les bagues, avant œdème éventuel.

→ Traitements. Le paracétamol soulage la douleur si besoin. En cas d’urticaire localisée, anti-histaminique H1 per os (cétirizine…) et topique antiprurigineux en cas de réactions légères : antihistaminiques (Phenergan, Apaisyl, Sedermyl…), crotamiton, antiprurigineux (Eurax), anesthésique local si la douleur prédomine (Quotane, Onctose…). Choisir un dermocorticoïde plus efficace si la réaction est plus importante et/ou si œdème : Cortapaisyl, Dermofenac Démangeaisons, CortiSédermyl…, ou Onctose Hydrocortisone (+ anesthésique local et anti-H1). Précautions : pas avant 24 ou 30 mois selon les molécules, 6 ans pour les dermocorticoïdes. Réactions allergiques possibles avec anti-H1 et anesthésiques locaux ; risque de photosensibilisation avec les anti-H1. Traitement limité à cinq jours, trois jours pour les corticoïdes.

→ Autres. Des cosmétiques en crème ou roll-on soulagent des réactions peu intenses avec des agents anti-inflammatoires (énoxolone, bisabolol…), apaisants (calendula, camomille, D-panthénol, huiles essentielles de lavande, calamine…), à visée antiseptique (sels de zinc, huile essentielle de tea tree…) ou antalgique via l’effet froid du menthol. L’effet antiprurigineux de l’huile essentielle de menthe poivrée est traditionnellement reconnu. Exemples : Calmiderm, Cinq sur Cinq Crème apaisante, Puressentiel Roller multi-apaisant anti-pique, Pruriced SOS après-piqûres, Arnidol Pic… Pour les nourrissons : Parasidose Après-piqûres Roll-on calmant, Roller après-piqûres PranaBB… Précautions : réactions allergiques possibles. Prudence en cas de terrain atopique ou d’antécédents de convulsions avec les huiles essentielles.

Si antécédent d’anaphylaxie ?

• Quiconque se sachant allergique aux piqûres d’hyménoptères doit posséder un auto-injecteur d’adrénaline, boîte de deux seringues ou stylos préremplis à usage unique (Anapen, Epipen, Jext). Les doses recommandées vont de 5 à 10 µg/kg, soit 150 µg pour 15-30 kg, 300 µg pour 30-60 kg et 300-500 µg au-delà de 60 kg.

• En pratique : appeler le15 ; injecter aux premiers signes d’anaphylaxie en intramusculaire dans la face antéro-latérale de la cuisse, si besoin à travers le vêtement. À renouveler dans les cinq à quinze minutes en l’absence d’amélioration. Jusqu’à l’arrivée des secours, rester allongé, jambes surélevées, pour éviter un malaise et favoriser l’afflux du sang vers le cœur, sauf difficulté à respirer. Si le sujet est inconscient, le placer en position latérale de sécurité.

Quels conseils ?

• Garder les ongles courts et propres pour éviter des lésions de grattage.

• En cas de prurit, tapoter la zone avec la paume de la main, appliquer du froid : poche, bloc réfrigéré, spray d’eau thermale…

• Ne pas s’agiter en présence d’hyménoptères, éviter les vêtements de couleur vive, qui les attirent, et les odeurs fortes comme les parfums, ne pas marcher pieds nus.

• Les répulsifs cutanés protègent des piqûres de moustiques, de tiques et d’aoûtats vivant notamment dans l’herbe. Ils sont peu efficaces contre les hyménoptères.

(1) The use of concentrated heat after insect bites/stings as an alternative to reduce swelling, pain, and pruritus: an open cohort-study at German beaches and bathing-lakes, Müller et al., Clinical, Cosmetic and Investigational Dermatology, 2011.

Dico+

→ Les maladies à transmission vectorielle telles que dengue, fièvre jaune, leishmaniose ou paludisme sont des maladies humaines provoquées par des virus ou des bactéries transmis par des vecteurs.

→ Les vecteurs sont des organismes vivants capables de transmettre des maladies infectieuses d’un hôte animal ou humain à un autre. Il s’agit souvent d’insectes hématophages, qui, lors d’un repas de sang, ingèrent des micro-organismes pathogènes présents dans un hôte infecté, pour les réinjecter dans un nouvel hôte après reproduction de l’agent pathogène. Souvent, une fois le vecteur devenu infectieux, il peut transmettre l’agent pathogène pour le reste de son cycle de vie à chaque repas de sang.

Dico+

→ Œdème de Quincke : œdème atteignant le derme et les tissus sous-cutanés. Il se manifeste le plus souvent par un gonflement au niveau des lèvres, des paupières, parfois de la langue, du pharynx ou du larynx.

Et aussi…

→ Piqûres de méduse. Enlever les filaments urticants visibles avec une pince ou appliquer du sable fin, puis le gratter avec un bout cartonné (carte postale…). Rincer sans frotter à l’eau de mer et non à l’eau douce, qui fait éclater les cellules renfermant le venin ; désinfecter, puis éventuellement prendre un anti-histaminique, un corticoïde, un anesthésique local, un antalgique.

→ Piqûres d’oursin. Les épines peuvent s’enfoncer profondément. Les retirer avec une pince et désinfecter. En cas de persistance de débris, consulter.

→ Chenilles processionnaires. Ôter les poils urticants avec de l’adhésif, se doucher, puis traitement local.

Avec la collaboration du Dr Luc de Haro, médecin généraliste au Centre antipoison et de toxicovigilance de Marseille (13).