Quel pharmacien et quelle pharmacie pour être en solo ?

Quel doit être le profil du pharmacien exerçant en solo ?

Je ne connais pas de pharmacien dont la vocation est d’exercer en solo dans son officine. Cette situation est plus subie que provoquée par des difficultés de recrutement de personnel ou financières. L’exercice en solo est l’apanage des jeunes qui s’installent sans apport personnel et qui cherchent à se constituer un capital pour pouvoir acquérir quatre ou cinq ans après une affaire plus importante.

Il va de soi que pour gérer ainsi une pharmacie, il faut que le titulaire en ait les capacités physiques, c’est-à-dire avoir une puissance de travail importante, mais aussi pouvoir se reposer sur un environnement familial favorable, notamment un conjoint.

Célibataire s’abstenir ! Ce sacerdoce doit être réservé à des chefs d’entreprise bien dans leur tête – car l’isolement est un facteur d’épuisement intellectuel – et bien organisés.

Il est important aussi d’avoir des relations privilégiées avec ses partenaires (grossistes-répartiteurs, expert-comptable, banque…) auprès desquels le pharmacien pourra externaliser un certain nombre de fonctions.

Quel doit être aussi le profil de la pharmacie pour un tel exercice ?

L’exercice en solo convient mieux aux officines rurales que citadines.

Généralement, la clientèle y est plus âgée et se montre plus patiente qu’en ville. A cet égard, il est important pour le pharmacien de bien connaître sa clientèle et s’il est du cru, c’est encore mieux ! Exercer seul suppose d’être à la tête d’une petite officine, disons entre 150 000 et 300 000 euros de chiffre d’affaires. Du fait de l’économie des coûts salariaux, le titulaire qui s’est peu endetté peut dégager dans cette fourchette de CA un résultat net de l’ordre de 15 à 20 %, alors que la moyenne des officines se situe à 10 % environ.

La configuration de l’officine, sur le plan technique et ergonomique, doit permettre de travailler seul avec efficacité. Enfin, dernier détail : les horaires d’ouverture doivent être bien calculés pour ne pas léser la clientèle tout en laissant un peu de temps disponible au titulaire.

Pourtant, dans vos statistiques professionnelles 2001, les pharmacies en association affichent de meilleurs ratios que les officines individuelles ?

Les ratios frais de personnel sont moins élevés en association (7,91 % du CA) qu’en exploitation individuelle (9,18 %) du fait de l’économie d’un ou plusieurs pharmaciens assistants, l’EBE s’en trouve ainsi amélioré (15,96 % du CA en association contre 12,53 % en individuel), tandis que le résultat de l’exercice ressort à 14,04 % du CA contre 10,34 % en nom propre. L’exercice en solo est l’exception qui confirme la règle, sauf pour l’évolution du CA HT. Dans notre étude, les officines individuelles (+6,08 %) ont progressé moins vite que les officines en association (+6,77 %) et l’on sait bien que les petites officines ont une croissance moins rapide que les grosses officines.

Quels sont les pièges qui guettent les pharmaciens en solo ?

Le risque en solo n’est pas financier. Le pharmacien doit davantage redouter la maladie ou l’accident, d’où la nécessité d’avoir une bonne assurance professionnelle en ce domaine. L’épuisement est le phénomène le plus à craindre, sachant que le pharmacien peut y perdre sa santé… mais aussi son conjoint lorsqu’il dépasse les bornes derrière son comptoir. Et sur le plan strictement professionnel, ne jamais lever la tête du guidon n’est pas mieux. Le pharmacien ne prend alors aucun recul par rapport à son activité, ne suit pas l’actualité de sa profession, ne prend pas le temps de se former ou de réfléchir sur ce qu’il veut faire dans l’avenir. Enfin, en cas d’absence, il reste tenu par tous les points de la réglementation édictés par le Code de la santé publique.

Ceci étant, l’exercice en solo est une école de formation irremplaçable et un facteur de réussite extraordinaire pour un jeune qui touche ainsi à toutes les facettes du métier de pharmacien d’officine.