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Quatrième bronchiolite pour Eva, 16 mois

Publié le 23 août 2008
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Ce que vous savez de la patiente

– Eva, 16 mois (née à terme le 23 août 2006), a déjà « fait » trois épisodes de bronchiolite, deux l’hiver précédent et un autre en septembre 2007. Leur évolution a été favorable grâce à un traitement symptomatique (kinésithérapie, lavage nasal fréquent, hydratation…). Ce quatrième épisode est révélé par une rhinorrhée, une toux sèche irritative avec tachypnée et tirage, des râles crépitants, une respiration sifflante, des difficultés à s’alimenter et une fièvre à 38°-38,5 °C. Le pédiatre prescrit, en plus de la prise en charge symptomatique, Ventoline et Flixotide en traitement de fond.

– Eva est à jour pour ses vaccins.

Elle présente un terrain atopique (père et grand-mère souffrant d’un asthme allergique).

Ce que le médecin a dit aux parents

– Les troubles doivent régresser dans les jours qui viennent. Si ce n’est pas le cas ou si la fièvre persiste plus de 48 heures, il faut recontacter le médecin.

– Le terrain atopique familial est à l’origine d’une hyperréactivité bronchique. Pour prévenir d’autres épisodes de bronchiolite, le médecin instaure un traitement de fond. Il veut revoir Eva dans un mois.

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Ce que les parents d’Eva signalent

– Eva dort mal. Elle est gênée par une respiration difficile. Elle a des difficultés à prendre ses repas.

La demande spontanée

– Sa maman s’interroge sur l’utilité d’un sirop expectorant, Broncathiol, pour aider Eva à mieux respirer.

Détection des interactions

L’ordonnance ne présente pas d’interactions médicamenteuses.

Analyse des posologies

– Ni les bêta-2-mimétiques, ni les corticoïdes inhalés n’ont d’AMM dans la prise en charge de la bronchiolite.

– L’AMM de Ventoline ne mentionne pas de schéma posologique précis. Celui proposé par le médecin prend en compte l’amélioration des signes cliniques durant les jours à venir.

– La posologie du corticoïde inhalé, Fluticasone, est conforme à celle préconisée dans l’asthme de l’enfant âgé de moins de 4 ans.

Avis pharmaceutique

La bronchiolite (généralement due au virus respiratoire syncytial : VRS) débute souvent par une rhinopharyngite. Puis l’infection progresse vers la trachée et les bronches. Les signes de détresse respiratoire apparaissent : difficultés respiratoires, signes de lutte (distension thoracique, tirage). La respiration est sifflante (« wheezing »). Les difficultés respiratoires génèrent des troubles alimentaires (reflux, risque de fausses routes et difficulté pour s’alimenter) pouvant amener à un état de déshydratation et de dénutrition.

Stratégie thérapeutique

Au-delà du troisième épisode obstructif, survenant avant l’âge de 3 ans, il est d’usage de considérer que l’enfant présente un terrain particulier d’hyperréactivité bronchique et de parler d’« asthme du nourrisson ». Cette évolution est fortement conditionnée par le terrain atopique familial.

– La prise en charge d’un premier épisode de bronchiolite repose sur des mesures symptomatiques (hygiénodiététiques et kinésithérapiques). Les bronchodilatateurs et les corticoïdes inhalés n’ont pas démontré leur intérêt lors d’un premier épisode de la maladie.

– En revanche, la bronchiolite récidivante justifie la mise en place d’une thérapeutique anti-inflammatoire comme c’est le cas dans l’asthme de l’enfant. Dans ce contexte, le pédiatre prescrit à Eva un bronchodilatateur et un traitement de fond par corticostéroïde inhalé.

– Une hospitalisation n’est pas justifiée car Eva ne présente aucun critère clinique de gravité (notamment prématurité, saturation en oxygène insuffisante, inférieure à 94 %, troubles digestifs compromettant l’hydratation, apnées, cyanose, difficultés psychosociales, maladie sous-jacente type malformation cardiaque, mucoviscidose).

Objectifs du médecin

L’objectif thérapeutique de cette prescription est double.

– Aider Eva à passer le cap de dyspnée aiguë à l’aide d’un bronchodilatateur (Ventoline). Le traitement instauré, à visée symptomatique, doit assurer un meilleur confort à l’enfant en facilitant sa respiration.

– Traiter le terrain d’hyperréactivité bronchique avec Flixotide, instauré en traitement de fond dans le but d’éviter un nouvel épisode de bronchiolite.

– Chez le jeune enfant, l’utilisation des nébuliseurs doseurs doit se faire via une chambre d’inhalation sous peine d’inefficacité. Le Babyhaler convient aux nourrissons et enfants de moins de 6 ans.

– La kinésithérapie respiratoire n’est pas systématique. Néanmoins, elle demeure largement prescrite en France. Son efficacité est évaluée par une franche amélioration clinique. La méthode pratiquée permet la désobstruction des voies aériennes supérieures et le désencombrement bronchique. La fréquence et le nombre total de séances nécessaires dépendent de l’évolution de l’état clinique de l’enfant, réévalué à chaque séance.

Intervention pharmaceutique

– La maman d’Eva souhaite lui administrer Broncathiol (carbocistéine) pour désencombrer les bronches et l’aider à respirer. Or, les mucolytiques modifient la viscosité du mucus et peuvent gêner les manoeuvres de drainage bronchique. Leur utilité dans le traitement de la bronchiolite n’est pas documentée et ils sont généralement déconseillés. Il convient donc de dissuader la maman d’utiliser un sirop mucolytique et lui expliquer que, très rapidement, les séances de kinésithérapie vont aider Eva à mieux respirer. La prise de nourriture et son sommeil seront améliorés.

– Noter dans le dossier patient le terrain atopique familial et l’instauration au cours d’un quatrième épisode de bronchiolite d’un traitement inhalé comprenant Ventoline sur 12 jours et Flixotide en traitement de fond.

Suivi du traitement

Effets indésirables

– Certains effets indésirables sont difficilement décelables chez l’enfant. De ce fait, les parents doivent être très attentifs à toute anomalie survenant au cours du traitement.

– Sous Ventoline peuvent survenir une nervosité, une agitation, des accès de tachycardie.

Avec Flixotide, la survenue d’une candidose oropharyngée et d’une raucité de la voix est possible (potentialisée par une forte dose et un nombre de prise élevé). Une dermatite périorale (caractérisée par des petits boutons rouges) peut également apparaître suite au contact local répété d’un corticoïde. Les effets systémiques sont minimes.

Evolution

– L’évolution est le plus souvent spontanément favorable en 8 à 10 jours. Une toux résiduelle peut toutefois persister 15 à 20 jours.

u Il est impossible de préjuger de l’évolution de l’hyperréactivité bronchique.

La relation entre infection à VRS du nourrisson et l’apparition ultérieure d’un asthme de l’enfant n’est pas établie. Les enfants devenant asthmatiques sont souvent ceux qui continuent à avoir des épisodes de « sifflement » entre 3 et 6 ans et qui ont des antécédents familiaux évocateurs d’atopie.

Conseils aux parents

Concernant le traitement

– Débuter sans attendre les séances de kinésithérapie. Associées à l’inhalation de Ventoline, elles doivent apporter une nette amélioration des symptômes respiratoires. Dans le cas inverse, contacter rapidement le médecin.

– Si la fièvre est mal supportée, l’administration de paracétamol permet d’améliorer le confort de l’enfant. Si elle persiste plus de 48 heures, revoir le médecin.

– Bien expliquer le fonctionnement de la chambre d’inhalation (voir ci-dessous). Administrer d’abord Ventoline (assurant une bronchodilatation) puis Flixotide. Après l’inhalation du corticoïde, passer un gant de toilette humide sur la bouche d’Eva (prévention de la dermite périorale) et lui faire boire de l’eau (prévention de la raucité de la voix et de l’apparition d’une candidose).

– Signaler les signes d’aggravation imposant une réévaluation médicale rapide en vue d’une éventuelle hospitalisation : refus d’alimentation, troubles digestifs, changement de comportement, détérioration de l’état respiratoire.

– Nettoyer à l’eau tiède savonneuse et stériliser (comprimés pour stérilisation à froid) régulièrement les différents éléments du Babyhaler.

Conseils hygiéno- diététiques

– Faire de fréquents lavages du nez (6 à 8 fois par jour) et de manière systématique avant les repas et les couchers. Utiliser du sérum physiologique et au besoin un mouche-bébé pour aspirer les sécrétions excessives. u Aérer quotidiennement la chambre et y maintenir une température n’excédant pas 19 °C. Coucher l’enfant en surélevant son matelas au niveau de la tête pour l’aider à mieux respirer.

– Assurer un apport hydrique et alimentaire suffisant. Diminuer la quantité à chaque repas mais faire des collations. Epaissir éventuellement les biberons.

Pour limiter les récidives

Des mesures de prévention sont indispensables pour limiter le risque de survenue d’un nouvel épisode de bronchiolite (virus très contagieux).

– Se laver les mains à l’eau et au savon pendant au moins 30 secondes avant de s’occuper de l’enfant.

– Ne pas exposer l’enfant à la fumée du tabac, au risque d’aggraver la pathologie respiratoire.

– Ne pas mettre l’enfant en présence de personnes infectées. En cas de rhume, porter un masque car il y a un risque de transmission du virus à l’enfant.

– Désinfecter régulièrement les surfaces mises en contact avec l’enfant et les objets (biberons, jouets, peluches), ceux-ci retenant le virus environ sept heures.

– Ne pas échanger les tétines, biberons ou autres objets personnels d’un enfant à un autre.

Plan de prise conseillé

– Administrer d’abord Ventoline puis Flixotide selon les indications suivantes.

– Agiter l’aérosol et insérer l’embout buccal dans le Babyhaler. Le maintenir horizontalement et libérer une dose de médicament dans la chambre d’inhalation. Laisser le masque sur le nez et la bouche de l’enfant pendant environ 15 secondes (5 à 10 respirations) en vérifiant le bon fonctionnement des valves. Renouveler ces opérations pour chaque bouffée de médicament.

Les médicaments prescrits

Ventoline 100 mg/dose (salbutamol)

– Bronchodilatateur bêta-2-mimétique à action rapide et de courte durée.

– Indiqué notamment dans le traitement symptomatique de la crise d’asthme et le traitement des exacerbations au cours de la maladie asthmatique et de la bronchopneumopathie chronique obstructive.

– Posologie : à adapter en fonction des symptômes. En général, 1 à 2 bouffées suffisent pour traiter une gêne respiratoire. En cas de persistance des symptômes, cette dose peut être renouvelée quelques minutes plus tard. La dose de 15 bouffées par 24 heures ne doit généralement pas être dépassée.

Flixotide 50 mg/dose (fluticasone)

– Glucocorticoïde par voie inhalée, antiasthmatique.

– Traitement continu anti-inflammatoire de l’asthme. La présentation est adaptée aux enfants de 1 à 4 ans.

– Posologie : chez l’enfant de 1 à 4 ans, habituellement 50 à 100 mg deux fois par jour. Il convient de rechercher la dose minimale efficace et d’envisager une décroissance de la dose lorsque le patient est stabilisé.