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Les traitements inhalés de la BPCO

Publié le 23 septembre 2019
Par Florence Dijon-Leandro
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De nombreuses spécialités pour inhalation sont prescrites lors de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Composition, contraintes techniques et modalités d’administration varient selon les marques qui sont difficilement interchangeables.

La BPCO, c’est quoi ?

• La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie respiratoire chronique. Elle est définie par une obstruction permanente et progressive des voies aériennes, aboutissant à une insuffisance respiratoire chronique en l’absence de traitement (voir La patho, n° 518, décembre 2015). Elle touche surtout les fumeurs.

• Toux, expectorations (glaires) et dyspnée sont les principaux symptômes. La dyspnée est la perception désagréable d’un effort nécessaire pour respirer normalement. Ces signes peuvent s’aggraver sous la forme d’une exacerbation, voire d’une décompensation (voir Info+).

• La BPCO est classée en 4 stades, du stade I (léger) au stade IV (très sévère), d’après les résultats du volume expiratoire maximal par seconde déterminé par un examen de spirométrie, et selon les symptômes cliniques.

• La prise en charge dépend du stade, mais comporte toujours des mesures hygiéno-diététiques avec l’arrêt du tabac si la personne fume, la mise à jour des vaccins grippe et pneumocoque et, idéalement, une éducation thérapeutique.

• Le traitement, essentiellement symptomatique, fait appel à :

→ un bronchodilatateur d’action brève à la demande, en cas de dyspnée occasionnelle, bêta-2-mimétique ou anticholinergique ;

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→ un bronchodilatateur d’action prolongée en continu, en cas de dyspnée quotidienne, en associant si nécessaire 2 classes différentes, bêta-2 mimétique et anticholinergique ;

→ un glucocorticoïde inhalé, associé à un ou plusieurs bronchodilatateurs, uniquement dans certains cas et lors d’exacerbation. Dans quelques rares situations, un traitement per os est proposé, avec bambutérol, terbutaline à libération prolongée, théophylline, corticoïdes en cure courte. Ne sont abordés ici que les traitements inhalés, majoritairement prescrits. Les bronchodilatateurs destinés à être nébulisés, tels que les unidoses de terbutaline, l’ipratropium et le salbutamol, ne sont pas présentés.

Les dispositifs d’inhalation

Il existe 3 types de dispositifs prêts à l’emploi, hors nébulisation(1)(2), permettant d’administrer des principes actifs par voie inhalée.

• Les aérosols-doseurs pressurisés ou sprays délivrent le médicament sous la forme d’un aérosol généré à l’aide d’un gaz propulseur sous pression et d’une valve de pulvérisation. Le ou les principes actifs sont dissous ou dispersés dans une solution ou une suspension. L’aérosol peut être activé :

→ soit manuellement, obligeant à une bonne coordination main-poumon, car pour obtenir un dépôt correct au niveau pulmonaire, le patient doit appuyer sur le dispositif en même temps qu’il inspire, ce qui peut se révéler difficile pour certains. Exemple : la plupart des sprays tels que Ventoline (voir tableau) ;

→ soit auto-déclenché avant l’inhalation, avec le système Autohaler, qui s’arme dès l’ouverture du dispositif par l’usager.

• Les inhalateurs de brumisat. Dans le système Respimat (Spiolto, Spiriva, Striverdi), l’aérosol est généré à partir d’une solution stockée dans une cartouche et grâce à un ressort qui force le passage de la solution au travers de deux fins canaux. L’aérosol est déclenché manuellement et requiert une bonne coordination mainpoumon chez le patient.

À savoir : il est possible de raccorder un spray ou un système Respimat à une chambre d’inhalation qui doit être prescrite en plus (voir Le matériel, n° 509, février 2015).

• Les inhalateurs de poudre sèche. Ici, pas de gaz propulseur, c’est l’aspiration qui permet au principe actif d’atteindre les bronches. Le contrôle de la prise est visuel : quand la poudre est inhalée, la gélule transparente est vide ; auditif : un déclic sonore assure que l’aérosol est enclenché ; gustatif : un goût sucré suit l’inhalation. Plusieurs modèles existent :

→ les inhalateurs unidoses : le médicament est enfermé dans une gélule ou une capsule que le patient doit perforer avant d’inhaler. Il s’agit des dispositifs Aerolizer (Foradil), Breezhaler (Onbrez, Seebri, Ultibro) avec perception de goût sucré et bourdonnement en lien avec la gélule qui tourne, et Handihaler (Spiriva) avec la gélule qui vibre à l’inhalation ;

→ les inhalateurs multidoses : ils disposent soit d’un réservoir de poudre dans lequel la dose à inhaler est prédéfinie, soit de loges individuelles où chaque dose est conditionnée à part.

→ Dans les modèles dits horizontaux, car en forme d’escargot ou de cube, citons les systèmes Novolizer (Asmelor, Ventilastin), avec un clic sonore indiquant une inhalation correcte et une fenêtre de contrôle passant du rouge au vert, et Diskus (Seretide, Serevent), avec un mécanisme qui tourne après chaque inhalation.

→ Dans les modèles dits verticaux, citons les systèmes Turbuhaler (Bricanyl, Symbicort), avec la dose séparée des autres et un compteur de doses, mais sans goût sucré ; Easyhaler (Gibiter), avec un compteur de doses et qui s’arme à l’aide d’un bouton ; Spiromax (Duoresp), avec un compteur de doses et qui s’arme à l’ouverture ; Nexthaler (Formodual, Innovair), avec un triple contrôle de prise (visuel, auditif, gustatif) ; Ellipta (Anoro, Elebrato, Incruse, Laventair, Relvar, Revinty, Trelegy) avec un compteur de doses en loges individuelles. À noter : pour les dispositifs de poudre Easyhaler, Nexthaler, Novolizer, Spiromax et Turbuhaler, qui se déclenchent automatiquement à l’inspiration, un débit inspiratoire suffisant est nécessaire.

Les molécules actives

• Bêta-2-mimétiques (suffixe en -ol) : ils dilatent les bronches. Leur action est brève pour le traitement à la demande, prolongée pour le traitement de fond. Effets indésirables : systémiques avec tremblements des extrémités, crampes, tachycardie, palpitations, céphalées ; locaux avec toux et bronchospasme postinhalation.

• Anticholinergiques (suffixe en -ium). En bloquant certains récepteurs de l’acétylcholine, mais de façon non spécifique (d’où leurs effets indésirables), ils s’opposent à son action bronchoconstrictrice. Il existe 2 types de molécules, d’action brève ou prolongée. Effets indésirables : systémiques avec céphalées, tachycardie, troubles du sommeil, risque de rétention urinaire, constipation ; locaux avec surtout sécheresse buccale et irritation pharyngée, parfois toux et bronchospasme postinhalation. Risque de déclenchement ou d’aggravation d’un glaucome par fermeture de l’angle si projection dans l’œil.

• Corticoïdes. Plusieurs molécules. Effets indésirables : surtout locaux avec voix rauque, enrouement, candidose oropharyngée. Ils sont prévenus par un rinçage soigneux de la bouche après l’administration. Le risque de pneumonie sous corticoïde inhalé doit être pris en compte.

En pratique

• Plusieurs spécialités sont des comarketings. Cela signifie que deux laboratoires distincts commercialisent le même médicament, mais sous deux noms différents. Attention : ce ne sont pas des génériques, la substitution ne s’envisage qu’en cas d’urgence, par exemple lors d’indisponibilité de l’une des deux. Exemple : Formodual et Innovair, Relvar et Revinty.

• Des dispositifs libèrent la dose au moment de l’ouverture du capuchon, comme Diskus et Ellipta. Une certaine coordination est donc requise car le capuchon doit être ouvert au moment où le patient est prêt à inhaler. Ne pas l’ouvrir si on doit aller aux toilettes ou passer un coup de fil ! Si l’on referme le capuchon sans inhaler, la dose est perdue, ce qui limite le risque de surdosage.

• Toujours expirer hors du dispositif. Après l’inspiration et la prise de dose, retenir sa respiration 5 secondes avant d’expirer normalement.

• Ne pas souffler dans les systèmes à poudre pour éviter de l’humidifier ou de la disperser à l’extérieur.

• Noter la date d’ouverture sur le dispositif.

• L’inhalation de la poudre passe parfois « inaperçue » lors de l’administration. Se référer à la notice de chaque médicament ; la présence de lactose donne un léger goût sucré.

• Le dispositif idéal n’existe pas ! Ne pas hésiter à contacter le prescripteur pour proposer un changement en accord avec les aptitudes du patient. Sinon, il reste possible de nébuliser le traitement bronchodilatateur grâce à un appareil aérosol pneumatique. Cela permet de s’adapter aux patients aux capacités respiratoires faibles et incompatibles avec la plupart des dispositifs.

(1) P. Devillier, H. Salvator, N. Roche : « Le choix du dispositif d’inhalation (hors nébulisation), un acte médical », Revue des maladies respiratoires, 2015;32:599-607.

(2) « Les dispositifs d’inhalation : comment les médecins généralistes éduquent-ils leurs patients asthamatiques et BPCO », thèse de médecine de Marion Duran, Marseille 2018.

Info +

→ Une exacerbation correspond à une augmentation brutale des symptômes quotidiens qui persistent plus de 48 heures et/ou justifient une modification des traitements. La toux devient incontrôlable, les expectorations, plus volumineuses et/ou purulentes, la dyspnée survient au moindre effort.

→ Lors de décompensation, des signes cardiovasculaires et/ou neurologiques s’ajoutent parfois aux symptômes respiratoires. Le pronostic vital peut être engagé, et une hospitalisation est nécessaire.

Info +

→ Où trouver des vidéos ? La Société de pneumologie de langue française (SPLF) propose un site dédié au bon usage des différents dispositifs inhalés : https://splf.fr/videoszephir/

D’autres vidéos sont disponibles sur : www.ameli.fr/bouches-du-rhone/assure/sante/themes/asthmetraitement/ utiliser-inhalateur