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Les fibromes utérins

Publié le 20 janvier 2022
Par Florence Dijon-Leandro
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Un fibrome utérin est une tumeur gynécologique bénigne très fréquente. La stratégie thérapeutique dépend de sa taille et des symptômes. Explications claires et lutte contre les idées reçues vont de pair au comptoir.

Qu’est-ce que c’est ?

• Les fibromes utérins sont des tumeurs bénignes constituées de cellules musculaires lisses, d’où le nom de « myomes » ou « fibromyomes ». Ces nodules se forment par la prolifération anormale de cellules musculaires de la paroi de l’utérus. Une femme peut en avoir un ou plusieurs.

• Ils ont l’aspect d’une masse charnue et ferme, plutôt arrondie et blanchâtre.

• Certains mesurent quelques millimètres, d’autres plusieurs dizaines de centimètres, dont les conséquences cliniques ou la prise en charge diffèrent, même si la position et le mode d’implantation influent également.

• Il en existe trois grands types selon leur localisation (voir illustration) :

→ les fibromes intramuraux ou interstitiels, les plus fréquents, se développent à l’intérieur de la couche musculaire de la paroi utérine, ou myomètre ;

→ les fibromes sous-muqueux se développent vers l’intérieur de l’utérus et occupent la cavité utérine ;

→ les fibromes sous-séreux naissent à la surface de l’utérus et se retrouvent dans la cavité pelvienne, et non utérine.

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Les fibromes sous-séreux et sous-muqueux peuvent être pédiculés, c’est-à-dire rattachés au muscle utérin par un petit pédicule comme un champignon. Sinon, ils sont dits sessiles.

Sont-ils fréquents ?

• Les fibromes utérins, tumeurs musculaires bénignes les plus fréquentes, concernent une femme sur trois, en général entre 30 et 50 ans. Leur fréquence augmente avec l’âge jusqu’à la ménopause.

• Les facteurs de risque sont variés : obésité, nulliparité (= ne pas avoir porté d’enfant), antécédents familiaux de fibrome, origine ethnique. Les femmes d’origine africaine ou afro-américaine sont davantage susceptibles de développer des fibromes, souvent plus précoces, plus nombreux et plus volumineux.

Quels signes cliniques ?

Majoritairement, les fibromes sont asymptomatiques. Sinon, les symptômes sont très divers.

• Saignements inhabituels : règles anormalement abondantes et/ou durant plus de sept jours (ménorragies, voir Dico +), saignements entre les règles (métrorragies, voir Dico +), abondants ou légers (« spotting »), ménométrorragies (voir Dico +).

• Douleurs pelviennes chroniques ou aiguës et associées à de la fièvre en cas de complications .

• Signes de compression des organes avoisinants en cas de gros fibrome : pollakiurie (envies fréquentes d’uriner), constipation, hémorroïdes.

• Dyspareunies (voir Dico +).

• Difficultés à tomber enceinte ou à avoir une grossesse normale.

Comment diagnostiquer ?

• La découverte d’un fibrome est souvent fortuite puisque la plupart des femmes ne souffrent pas, dans le cadre d’un bilan d’anémie en raison de saignements abondants, lors d’une échographie de suivi gynécologique de routine ou d’un bilan d’infertilité.

• Le diagnostic repose sur un examen clinique et gynécologique, une échographie abdominopelvienne, voire une imagerie par résonance magnétique (IRM) pour en préciser le type et les possibilités thérapeutiques.

Quelle évolution ?

Elle est imprévisible et variable, mais en général un fibrome évolue lentement. Le mécanisme d’apparition est inconnu, mais sa croissance est liée aux hormones féminines. Son volume tend à augmenter lors de la grossesse et à stagner, régresser, voire à disparaître à la ménopause.

Quelles complications ?

• L’anémie si les saignements sont abondants.

• La nécrobiose aseptique résulte d’une insuffisance de vascularisation du fibrome en raison d’une ischémie (= arrêt de la circulation du sang) de l’artère nourricière. Plus rarement, elle résulte de la torsion ou de l’expulsion d’un fibrome pédiculé. La patiente ressent alors une douleur pelvienne brutale et intense, avec fièvre et saignements. Consulter en urgence s’impose.

• Les fibromes peuvent causer infertilité, faussescouches spontanées à répétition et accouchement prématuré, surtout si sous-muqueux.

Quelles thérapeutiques ?

• En l’absence de symptômes, une surveillance médicale suffit.

• En présence de symptômes, le traitement vise à réduire ou à supprimer les symptômes, à éviter la compression des organes autour, et à favoriser une grossesse en cas d’infertilité.

Quels médicaments ?

• Les progestatifs oraux, tels la médrogestone (Colprone), l’acétate de nomégestrol (Lutényl) ou de chlormadinone (Lutéran), agissent sur les saignements mais pas sur le volume du fibrome. Ils sont en général prescrits du 15e au 25e jour du cycle. Un surrisque de méningiome, tumeur cérébrale le plus souvent non cancéreuse sous nomégestrol et chlormadinone, ayant été décrit, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a restreint leur utilisation à la prise en charge des ménorragies en pré-opératoire sur le fibrome.

• La baisse des saignements peut être obtenue avec un dispositif intra-utérin (DIU, voir Matériel p. 52) au lévonorgestrel, tels Mirena et Donasert, qui ont aussi l’AMM pour les ménorragies, et avec Jaydess et Kyleena si le fibrome n’est pas sous-muqueux, au risque d’expulsion du DIU.

• L’acide tranéxamique (Exacyl, Spotof), anti-hémorragique qui agit contre la fibrinolyse locale, est prescrit ponctuellement en cas de ménorragies, mais expose à un risque de thrombose.

• Contre les douleurs, quand le paracétamol ne suffit pas, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), tels naproxène, acide méfénamique…, ont un effet sur les saignements(1).

• Des analogues de la GNRH (Gonadotrophin Releasing Hormone), telles la triptoréline (Décapeptyl LP 3 mg, Gonapeptyl 3,75 mg) et la leuproréline (Enantone LP 3,75 mg) en injectable, sont proposés en pré-opératoire pour induire une ménopause artificielle : bouffées de chaleur, baisse de la libido, sécheresse vaginale. L’arrêt des saignements restaure une hémoglobinémie quasi normale, et la taille du fibrome diminue, ce qui peut faciliter l’acte chirurgical.

• Des sels de fer, tels Ascofer, Fero-Grad, Inofer…, sont prescrits pour corriger l’anémie.

Traitements chirurgicaux

• La chirurgie des fibromes se fait par laparotomie (en ouvrant l’abdomen), par coelioscopie, via de très petites ouvertures dans la paroi abdominale, ou par voie vaginale :

→ la myomectomie (ablation du ou des fibromes) est une technique conservatrice de l’utérus, mais à risque de récidive ;

→ l’hystérectomie (ablation de l’utérus), avec conservation du col pour limiter un prolapsus. Les fibromes constituent la première cause d’hystérectomie en France.

• Il existe des alternatives pour certains fibromes selon le type, la taille, la localisation… pour réduire leur taille et les symptômes. Ces techniques moins invasives sont à risque de récidive :

→ l’embolisation : radiologie interventionnelle sous anesthésie locale au cours de laquelle certaines artères sont obstruées par le radiologue pour « dessécher » le fibrome ;

→ la myolyse : thermodestruction par ultrasons.

Que dire aux patientes ?

• Les douleurs sont majorées en cas de station debout prolongée et améliorées allongée.

• Lutter contre l’anémie : trop de café ou de thé diminue l’absorption du fer, mais agrumes et kiwis, riches en vitamine C, l’augmentent. Privilégier les aliments riches en fer : abats et foie, viande rouge, lentilles et légumes secs. Le fer se prend à jeun et à distance (deux heures) des hormones thyroïdiennes, du zinc, du calcium…

• Vie génitale. La plupart des femmes enfantent et ont une grossesse normale. Aucun fibrome ne dégénère en cancer. L’hystérectomie ne semble pas influer sur la vie sexuelle, mais peut poser des problèmes d’image de soi. En parler avec son partenaire et un professionnel si besoin.

(1) Mises à jour en gynécologie et obstétrique, Collège national des gynécologues et des obstétriciens français, (CNGOF), décembre 2011.

Dico +

→ Ménorragies : règles anormalement longues et d’abondance excessive.

→ Métrorragies : saignements survenant en dehors des règles.

→ Ménométrorragies : règles anormalement longues et abondantes, et saignements entre les règles.

→ Dyspareunies : douleurs lors des rapports sexuels.

Info +

→ L’autorisation de mise sur le marché (AMM) de l’ulipristal, modulateur sélectif des récepteurs de la progestérone, utilisé notamment en contraception d’urgence (EllaOne…), a été suspendue dans le traitement des symptômes des fibromes utérins en raison d’un risque d’hépatotoxicité. Le dosage à 5 mg (Esmya) n’est plus commercialisé.

En savoir +

→ mon-fibrome.fr

Site proposé par l’Assistance publiqueHôpitaux de Paris et l’Agence régionale de santé d’Île-de-France aux femmes porteuses de fibrome utérin pour les aider à préparer la consultation consacrée au choix du traitement.