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Le mélanome
C’est l’un des cancers dont l’incidence a le plus augmenté ces dix dernières années. Alors que le mélanome est de bon pronostic en cas de diagnostic précoce, sa prise en charge tardive en fait en revanche un cancer redoutable en raison de sa capacité élevée à métastaser.
La chirurgie est le traitement de référence des mélanomes. Dans les stades avancés ou métastatiques, la prise en charge repose sur l’immunothérapie ou les thérapies ciblées, ce qui a considérablement modifié le pronostic.
1 Comment se manifeste la maladie ?
Le mélanome est un cancer qui se développe aux dépens des mélanocytes. Il est moins fréquent que les carcinomes cutanés mais de pronostic plus sévère. Dans 80 % des cas, il apparaît de novo sur une peau saine sous la forme d’une tache pigmentée qui ressemble à un grain de beauté (ou nævus). Dans 20 % des cas, il se développe à partir d’un nævus préexistant.
Le diagnostic est suspecté devant un nævus dont les caractéristiques correspondent à l’acronyme ABCDE, notamment utilisé pour l’éducation des patients à l’autodépistage :
– asymétrie : une forme ni ronde ni ovale, reliefs irréguliers ;
– bords irréguliers : dentelés, mal délimités ;
– couleur non homogène : présence désordonnée de plusieurs couleurs ;
– diamètre : supérieur à 6 mm ;
– évolution : changement rapide de taille, de forme, de couleur ou d’épaisseur.
2 Quels sont les principaux types de mélanomes ?
Quatre sont identifiés.
Le mélanome superficiel extensif (70 à 80 % des cas) : tache pigmentée ou grain de beauté asymétrique aux couleurs variées, il est de croissance relativement lente, souvent localisé au niveau des jambes chez la femme, sur le tronc ou le cou chez l’homme. Sa survenue est liée à des coups de soleil importants subis durant l’enfance.
Le mélanome nodulaire (5 à 20 % des cas) : de croissance rapide avec d’emblée une phase de progression verticale (voir « Physiopathologie »), il apparaît sur n’importe quelle partie du corps sous la forme d’une lésion nodulaire foncée ou parfois incolore.
Le mélanome de Dubreuilh (10 % des cas) : diagnostiqué chez des personnes âgées, il est caractérisé par une tache foncée irrégulière apparaissant sur des zones photo-exposées (visage surtout ou mains).
Le mélanome acral lentigineux (2 à 5 % des cas) : il se développe au niveau des extrémités (paumes, plantes et ongles) principalement chez les sujets à la peau brune ou noire. Il n’est pas lié à une surexposition aux ultraviolets (UV).
3 Quels sont les facteurs de risque ?
Le risque de développer un mélanome est majoré par différents facteurs :
– nombre de nævi (plus de 40) ou nævi de grande taille (supérieure à 5-6 mm) et d’aspect irrégulier (bords, couleurs) ;
– phototype clair (type I ou II) : peau claire ne bronzant pas ou difficilement, brûlant toujours ou souvent au soleil (taches de rousseur, cheveux roux, blonds ou châtains et yeux clairs) ;
– expositions répétées ou intermittentes, mais intenses, au soleil ou aux UV artificiels, notamment dans l’enfance ;
– antécédents personnels ou familiaux de mélanome (définis par au moins 2 personnes atteintes de mélanome chez des apparentés au 1er ou 2e degré), de nævus congénital géant ou de cancer cutané ;
– immunodépression.
4 Comment est posé le diagnostic ?
Le diagnostic est suspecté à l’examen clinique. Pour les personnes à risque, il est généralement recommandé d’effectuer un autoexamen de la peau (selon la méthode ABCDE) chaque trimestre et de consulter un dermatologue 1 fois par an.
Dans la pratique, chez un patient ayant de nombreux nævi, l’évaluation clinique est fondée sur le principe du « vilain petit canard » (celui qui se démarque des autres). Une lésion suspecte conduit à un examen clinique de l’ensemble de la surface cutanée, inclus les ongles et le cuir chevelu. Un dermatoscope, outil constitué d’une lentille grossissante, permet de mieux visualiser la lésion suspecte, y compris dans son épaisseur.
En cas de doute, le dermatologue propose une surveillance régulière de la lésion suspecte ou une exérèse diagnostique. Celle-ci est généralement pratiquée au cabinet sous anesthésie locale.
L’examen anatomopathologique du prélèvement confirme le diagnostic, le type de mélanome et renseigne les facteurs pronostiques qui guident la prise en charge.
5 Quels sont les facteurs pronostiques ?
Trois facteurs pronostiques sont déterminés lors de l’examen anatomopathologique : l’épaisseur de la tumeur (indice de Breslow), la vitesse de développement des cellules cancéreuses (mesure de la fréquence des mitoses) et la présence d’une ulcération.
Se fondant sur l’indice de Breslow, une seconde exérèse à visée thérapeutique, ou exérèse élargie, est réalisée afin de limiter le risque de récidive. Par ailleurs, des examens complémentaires peuvent être demandés : échographie ganglionnaire (pour visualiser l’atteinte des ganglions sentinelles), scanner thoraco-abdomino-pelvien et/ou imagerie par résonance magnétique (IRM) et/ou tomographie par émission de positons (TEP ou PET scan) afin de rechercher une extension locale, régionale ainsi que des métastases à distance, analyses sanguines, etc. Pour les formes métastatiques, il est en particulier recherché le taux sanguin de LHD [GLOSSAIRE] et des mutations du gène BRAF (voir « Physiopathologie »).
Au cours de la seconde exérèse, il peut être proposé la recherche et l’analyse du ganglion sentinelle si l’épaisseur du mélanome est supérieure à 1 mm, notamment lorsque les ganglions lymphatiques ne sont pas vus à l’échographie et lorsqu’un traitement adjuvant est prévisible. Le repérage du ganglion sentinelle puis le prélèvement des ganglions lymphatiques se font après injection d’un produit radioactif traceur dans la cicatrice initiale du mélanome dont la migration vers le relais ganglionnaire est repérée par scintigraphie.
L’ensemble de ces éléments permet de définir 5 stades pronostiques selon la classification TNM (T : taille, épaisseur et ulcération de la tumeur, N : atteinte ganglionnaire, M : présence ou non de métastases). Le stade 0 correspond à un mélanome in situ, les stades 1 et 2 à un mélanome localisé sans atteinte ganglionnaire, le stade 3 à un mélanome localement avancé (présence de métastases en transit [GLOSSAIRE] ou ganglionnaires), le stade 4 à la présence de métastases à distance.
6 Quelle est l’évolution ?
Le mélanome est un cancer cutané à fort potentiel métastatique. Aux stades locorégionaux, opérables, il est de bon pronostic. Aux stades avancés ou métastatiques (et notamment en cas de métastases cérébrales), le pronostic reste sombre. Toutefois les progrès thérapeutiques de ces dernières années ont augmenté la médiane de survie.
Par Pierre-Ollivier Bétolaud, pharmacien, avec la collaboration du Pr François Aubin, chef de service de dermatologie au centre hospitalier universitaire de Besançon (Bourgogne-Franche-Comté) et vice-président du conseil scientifique de la Société française de dermatologie (SFD)
Le mélanome a pour origine la transformation maligne des mélanocytes. Les progrès de biologie moléculaire ont permis de comprendre les interactions entre la tumeur et l’environnement immunitaire et d’améliorer la prise en charge de ce cancer qui repose essentiellement, outre la chirurgie, sur l’immunothérapie et les thérapies ciblées.
La physiopathologie
Le mélanome provient d’une multiplication excessive et incontrôlée des mélanocytes, cellules localisées dans l’épiderme et synthétisant la mélanine. Deux types de mélanine sont produites selon un déterminisme génétique corrélé au phototype cutané. L’eumélanine des phototypes mats et foncés assure la protection de la peau en limitant les lésions de l’ADN induites par les ultraviolets (UV). De couleur brun-noir, elle colore la peau, les yeux et les phanères. A l’inverse, la phaéomélanine produite par les phototypes clairs, de couleur orangée est peu protectrice et favorise la production de radicaux libres.
Le risque de développement d’un mélanome est lié à des facteurs environnementaux et génétiques. Près de 10 % des mélanomes relèvent de prédispositions génétiques familiales. Plusieurs gènes de susceptibilité sont identifiés conférant un risque plus ou moins important et justifiant une consultation oncogénétique (et une éducation aux mesures de prévention) dans certaines situations. D’autres mutations peuvent être induites par les UV ou selon la susceptibilité individuelle. Environ la moitié des mélanomes présente des mutations sur le gène BRAF, en particulier la mutation BRAF V600, 20 % sur le gène NRAS. Ces mutations impliquent une suractivation de la voie des MAPkinases (mitogen-activated protein kinases, qui fait intervenir successivement les kinases RAS, RAF, MEK et ERK) impliquées dans la prolifération, la différenciation et la survie cellulaire.
Généralement, le cancer débute au niveau de l’épiderme et se développe plus ou moins rapidement horizontalement (en surface) puis verticalement (en profondeur). Lorsqu’il franchit la membrane basale et atteint le derme, il devient invasif. Des cellules tumorales peuvent alors se propager par voie lymphatique avec formation de métastases ganglionnaires ou cutanées (selon la localisation : cou, aisselles, etc.). Elles peuvent aussi migrer par la voie sanguine et former des métastases au niveau des poumons, du foie et du cerveau, notamment.
Le traitement du mélanome
L’immunothérapie
Elle consiste à bloquer des points de contrôle (check-points) du système immunitaire grâce à des anticorps monoclonaux ciblant des récepteurs ou des protéines présents à la surface des lymphocytes : CTLA-4 (cytotoxic T-lymphocyte-associated protein 4) et PD-1 (programmed cell death protein 1).
Physiologiquement, l’interaction entre PD-1 et son ligand et entre CTLA-4 et le récepteur B7 (présent sur les cellules présentatrices de l’antigène) entraîne un effet « inhibiteur » limitant l’intensité et la durée d’une réaction immunitaire. Or, les cellules tumorales sont capables d’exprimer le ligand PD-1 échappant ainsi au système immunitaire.
Les anticorps monoclonaux anti-CTLA-4 (ipilimumab, Yervoy) et anti-PD-1 (nivolumab, Opdivo ; pembrolizumab, Keytruda), médicaments hospitaliers, bloquent les interactions entre ces récepteurs et leurs ligands respectifs, ce qui potentialise les réponses antitumorales des lymphocytes.
Les thérapies ciblées
Elles exercent une action directe sur la prolifération des cellules cancéreuses en agissant sur la voie MAPkinases.
Les anti-BRAF (vémurafénib, dabrafénib, encorafénib) et anti-MEK (cobimétinib, tramétinib, binimétinib) inhibent deux kinases de cette voie. Ils sont utilisés en association pour permettre une activité antitumorale accrue.
Par Pierre-Ollivier Bétolaud et Stéphanie Satger, pharmaciens
![](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2023/04/MPL-melanome-228x300.jpg)
THÉRAPEUTIQUE
STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE
Objectifs
Face à une tumeur localisée et résécable, le traitement a pour but de guérir le patient et de limiter le risque de récidive.
Aux stades les plus avancés, l’objectif est de de limiter la progression, d’augmenter la survie globale et d’améliorer la qualité de vie des patients.
Traitement chirurgical
La chirurgie constitue le traitement de référence des mélanomes et repose sur une exérèse complète, à l’exception de certaines situations qui, du fait de la taille ou de la localisation de la tumeur, font discuter de l’intérêt de la réalisation d’une biopsie.
Après l’exérèse initiale, qui permet d’établir le diagnostic et de déterminer les caractéristiques pronostiques de la tumeur, une reprise chirurgicale plus large est le plus souvent réalisée avec des marges adaptées à l’épaisseur du mélanome (indice de Breslow, voir page XXX).
L’identification du ganglion sentinelle, qui a essentiellement une valeur pronostique, peut être recommandée en cas de mélanome ulcéré quel que soit le stade ou de mélanome avec un indice de Breslow supérieur à 1 mm, lorsqu’un traitement adjuvant est envisagé. Son intérêt est discuté dans les cas où l’indice de Breslow est compris entre 0,8 et 1 mm. Quand le ganglion sentinelle est atteint, le curage ganglionnaire n’est plus recommandé car cette procédure n’a pas démontré de bénéfices en matière de survie globale et est associée à une morbidité plus importante.
Traitement adjuvant
L’objectif est d’éviter ou de retarder une rechute après exérèse complète. Ce traitement repose sur l’immunothérapie ou les thérapies ciblées prescrites pour une durée de 1 an.
L’immunothérapie est fondée, dans le traitement adjuvant, sur les anti-PD-1 (pembrolizumab, Keytruda ; nivolumab, Opdivo), médicaments hospitaliers.
Les thérapies ciblées ont recours à l’association d’un inhibiteur BRAF (anti-BRAF) avec un inhibiteur MEK (anti-MEK). Seule l’association dabrafénib (anti-BRAF)/tramétinib (anti-MEK) dispose d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) en traitement adjuvant.
Au stade III résécable, le choix entre immunothérapie et thérapie ciblée est notamment fonction du statut mutationnel du gène BRAF : en l’absence de mutation BRAF, seule une immunothérapie par anti-PD-1 (pembrolizumab ou nivolumab) est indiquée. En présence d’une mutation BRAF, les patients peuvent bénéficier d’une immunothérapie par anti-PD-1 ou d’une thérapie ciblée. En l’absence d’étude comparant ces deux stratégies, il n’est pas possible de recommander l’un de ces traitements plutôt que l’autre.
Au stade II à haut risque de récidive, l’immunothérapie par pembrolizumab a obtenu, début 2023, une autorisation d’accès précoce [GLOSSAIRE].
Mélanomes non résécables et stade métastatique
L’objectif est de contrôler le plus longtemps possible la maladie. Le traitement est poursuivi tant qu’il y a un bénéfice clinique ou que la toxicité est tolérable pour le patient.
Une immunothérapie par anti-PD-1 seul (nivolumab ou pembrolizumab) ou associé à un anti-CTLA-4 (ipilimumab) – ce qui améliore la réponse au traitement –, est privilégiée quel que soit le statut mutationnel.
Si une mutation BRAF est présente, une thérapie ciblée est proposée en cas d’échappement à l’immunothérapie ou de tumeur agressive (voir « Point de vue »). Trois associations sont alors indiquées : vémurafénib (Zelboraf) + cobimétinib (Cotellic), dabrafénib (Tafinlar) + tramétinib (Mekinist) ou encorafénib (Braftovi) + binimétinib (Mektovi).
Autres thérapies
Une chimiothérapie est un recours possible en 3e ou 4e ligne selon l’état général du patient. Elle repose généralement sur un agent alkylant (dacarbazine ou fotémustine, médicaments hospitaliers, notamment).
Une radiothérapie peut être indiquée en traitement palliatif.
Suivi
Les mesures de photoprotection sont essentielles. Le patient est aussi éduqué à la surveillance de l’évolution d’un naevus et à l’autopalpation ganglionnaire dans le but d’intervenir rapidement si besoin (voir « Conseils associés »).
Le suivi médical post-traitement est mis en place à vie : aux stades I, il est clinique essentiellement, fondé sur l’examen médical complet du corps tous les 6 mois pendant 5 ans généralement puis annuellement à vie. Aux stades II, la surveillance est clinique, tous les 3 mois durant 5 ans, et échographique (échographie locorégionale) tous les 3 à 6 mois. Elle se poursuit ensuite au moins annuellement à vie.
Aux stades III et IV : le suivi clinique et par imagerie est pluriannuel, à vie.
TRAITEMENTS
Immunothérapie
Elle favorise la destruction de la tumeur en restaurant l’activité antitumorale des lymphocytes T.
L’anti-CTLA-4 (ipilimumab) est le premier traitement à avoir démontré un bénéfice en matière de survie globale dans les mélanomes de stades avancés. Les anti-PD-1 (pembrolizumab, nivolumab) se sont ensuite révélés plus efficaces et moins toxiques. L’association anti-PD-1/anti-CTLA-4 augmente l’efficacité mais avec une toxicité plus importante.
L’immunothérapie est administrée par voie intraveineuse en perfusion en milieu hospitalier toutes les 2, 3 ou 6 semaines.
Une évaluation des paramètres biologiques, notamment des fonctions hépatiques et thyroïdiennes, doit être réalisée avant le début du traitement ainsi qu’avant chaque administration.
Effets indésirables
La fatigue est fréquente avec les anti-PD-1.
Les effets indésirables immunomédiés résultent de la levée d’inhibition des lymphocytes T au niveau de différents organes. Ils apparaissent généralement dans les 8 à 12 premières semaines de traitement mais peuvent aussi survenir après son arrêt. Leur prise en charge repose, selon le cas, sur la suspension de l’immunothérapie et, en cas de toxicités de grade 3 ou 4, sur l’administration d’une corticothérapie ou, dans les formes les plus sévères, d’un immunosuppresseur plus puissant (anti-TNF-α, mycophénolate, par exemple).
Il s’agit principalement d’effets cutanés, gastro-intestinaux, hépatiques et endocriniens. Les effets indésirables cutanés (éruption lichénoïde, prurit, vitiligo, psoriasis) apparaissent les premiers et plus particulièrement avec les anti-CTLA-4. Ils sont rarement graves.
La toxicité digestive (plus fréquente avec l’anti-CTLA-4) peut se manifester par des diarrhées parfois sévères ou une colite immunomédiée (douleurs abdominales intenses, diarrhée plus de 6 fois par jour, fièvre et amaigrissement rapide), voire une perforation colique.
Parmi les toxicités endocriniennes, la thyroïdite est la plus fréquente. Une atteinte pancréatique est plus rare mais possible. Ces atteintes endocriniennes sont irréversibles. De nombreuses autres toxicités sont décrites (hépatiques, cardiaques, neurologiques, pulmonaires, hématologiques, etc.).
Thérapies ciblées
Trois combinaisons anti-BRAF et anti-MEK sont utilisées : vémurafénib/cobimétinib, dabrafénib/tramétinib et encorafénib/binimétinib. Elles augmentent la réponse antitumorale par rapport à une monothérapie anti-BRAF et en améliorent le profil de tolérance vis-à-vis des effets indésirables dermatologiques, en autres. A l’inverse, d’autres effets indésirables sont augmentés, notamment cardiovasculaires et ophtalmiques.
Effets indésirables
Anti-BRAF. Ils sont associés à une toxicité dermatologique élevée : éruptions cutanées parfois sévères, réactions de photosensibilité, alopécie, hyperkératoses bénignes (dont un syndrome main-pied), mais aussi malignes avec un risque de carcinome épidermoïde cutané. Fatigue, nausées, vomissements, arthralgies, uvéites et allongement de l’intervalle QT sont également rapportés, ainsi que des cas de fièvre sous dabrafénib.
Anti-MEK. Ils sont notamment à l’origine d’effets indésirables cardiovasculaires (diminution de la fraction d’éjection ventriculaire gauche, augmentation de la pression artérielle, en particulier pour le tramétinib et le cobimétinib) et rétiniens avec un risque de décollement rétinien ou d’occlusion de la veine rétinienne. Ils exposent également à une élévation de la créatine phosphokinase (CPK), voire à une rhabdomyolyse (rarement), à une pneumopathie interstitielle, à des hémorragies et, pour le tramétinib, à de la fièvre.
Associations anti-BRAF et anti-MEK. Elles sont associées à une diminution des effets indésirables dermatologiques dont l’alopécie, le syndrome main-pied, les réactions de photosensibilité, les carcinomes épidermoïdes. D’autres sont en revanche augmentés, notamment la fièvre sous dabrafénib/tramétinib, les effets indésirables digestifs (nausées, vomissements, diarrhées) ou la fatigue.
Surveillance et gestion
Ces effets indésirables justifient notamment un examen clinique dermatologique à chaque consultation pour détecter les cas de carcinomes épidermoïdes. Toutes les toxicités décrites sont généralement d’intensité modérée et réversibles. Lorsque c’est nécessaire, l’interruption ou la réduction des doses des deux traitements est généralement requise.
Interactions
Elles sont très nombreuses contrairement à l’immunothérapie qui ne fait pas l’objet d’interactions majeures. Outre les interactions médicamenteuses mentionnées dans le tableau (page XXX), certaines associations sont à prendre en compte. Le vémurafénib, à la fois inducteur de certaines isoenzymes et inhibiteurs d’autres, peut diminuer les concentrations plasmatiques des immunosuppresseurs (ciclosporine et tacrolimus, par exemple). Son association avec de puissants inhibiteurs enzymatiques doit se faire avec prudence. Le dabrafénib, inducteur enzymatique, expose à de nombreuses interactions (se référer à sa monographie). Associé aux antiagrégants plaquettaires, aux anticoagulants ou aux anti-inflammatoires non stéroïdien (AINS), le cobimétinib peut augmenter le risque hémorragique. Celui de rhabdomyolyse est accru en association avec les statines.
PERSPECTIVES
Opdualag a obtenu en 2022 une AMM européenne dans le traitement du mélanome avancé (non résécable ou métastatique). Il associe le nivolumab (anti PD-1) au relatlimab qui cible le récepteur LAG-3 (lymphocyte-activation gene-3) exprimé à la surface des lymphocytes T. Ce blocage favorise la prolifération des lymphocytes T et la libération de cytokines.
![](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2023/04/MPL-priseenchargemelanome.jpg.jpg)
Par Stéphanie Satger, pharmacienne, en collaboration avec le Dr Mona Amini-Adle, oncodermatologue au Centre Léon-Bérard à Lyon (Rhône), et avec la relecture du Pr Gaëlle Quéreux, cheffe du service de dermatologie du centre hospitalier universitaire de Nantes (Loire-Atlantique), présidente de la Société française de dermatologie
Dispositif dérogatoire exceptionnel et temporaire permettant à des patients en impasse thérapeutique de bénéficier du remboursement d’un traitement non autorisé dans une indication thérapeutique précise.
Point de vue
cheffe du service de dermatologie du CHU de Nantes, présidente de la Société française de dermatologie
L’immunothérapie est-elle plus efficace que les thérapies ciblées ?
Tout dépend du stade du mélanome. Aux stades métastatiques, l’immunothérapie est clairement le traitement de première intention, quel que soit le statut BRAF, sauf en cas de masse tumorale importante et de cinétique très rapide de la tumeur ou de métastases cérébrales symptomatiques. Dans ce cas, les thérapies ciblées, plus rapidement efficaces, sont préférées, mais leur durée de réponse est souvent plus courte. En traitement adjuvant au stade III chez des patients présentant une mutation BRAF, le choix entre immunothérapie et thérapie ciblée dabrafénib/tramétinib se discute : l’efficacité des deux options thérapeutiques semble comparable, mais il faut tenir compte des conditions d’administration du traitement pour le patient (perfusion ou voie orale) et, bien sûr, des effets indésirables, notamment des troubles endocriniens potentiels sous immunothérapie qui peuvent être définitifs.
Dans le stade II à haut risque de récidive, l’immunothérapie par pembrolizumab a également prouvé son efficacité pour limiter l’évolution vers un stade ganglionnaire.
Où en sont les essais cliniques ?
Ceux portant sur les associations immunothérapie et thérapies ciblées se sont révélés, pour la majorité d’entre eux, décevants. En revanche, la combinaison anti-PD-1 et anti-LAG-3 (voir paragraphe « Perspective »), moins toxique que l’association anti-PD-1/anti-CTLA-4, s’annonce très prometteuse, tout comme le lenvatinib (Kisplyx), un inhibiteur de plusieurs tyrosines kinases, en association avec le pembrolizumab.
Quant aux essais cliniques portant sur l’immunothérapie en situation néoadjuvante, ils sont encourageants. Ce traitement devrait prendre à l’avenir une place importante chez des patients atteints d’un mélanome avec métastase ganglionnaire. L’objectif ici n’est pas forcément de réduire la masse tumorale avant la chirurgie, comme avec une chimiothérapie néoadjuvante, mais de créer une réponse immune antitumorale plus profonde grâce au fait que la tumeur est justement toujours en place et que les antigènes tumoraux sont présents en quantité importante.
Dispositif dérogatoire exceptionnel et temporaire permettant à des patients en impasse thérapeutique de bénéficier du remboursement d’un traitement non autorisé dans une indication thérapeutique précise.
Grossesse, allaitement et contraception
Immunothérapie et thérapies ciblées ne sont pas recommandés en cas de grossesse et d’allaitement.
Immunothérapie. Une contraception efficace est nécessaire. Elle doit être poursuivie 4 à 5 mois au moins après l’arrêt du traitement selon les molécules.
Thérapies ciblées. Une contraception efficace est recommandée chez les femmes en âge de procréer pendant toute la durée du traitement et doit être poursuivie après l’arrêt du traitement pendant 1 à 6 mois au mois selon les molécules. L’efficacité d’une contraception hormonale pouvant être diminuée par les thérapies ciblées, une contraception mécanique, en complément ou en alternative, doit être utilisée.
L’essentiel
– Le traitement du mélanome est essentiellement chirurgical et repose chaque fois que possible sur l’exérèse complète de la tumeur.
– Un traitement adjuvant est indiqué aux stades avancés résécables et, depuis début 2023, dans certains cancers localisés (stade II) à haut risque de récidive. Il repose, selon le cas, sur l’immunothérapie (à l’hôpital) ou, chez les patients ayant une mutation BRAF, sur une thérapie ciblée anti-BRAF/anti-MEK.
– Aux stades non résécables ou métastatique, l’immunothérapie est recommandée en première ligne. Une thérapie ciblée anti-BRAF/anti-MEK est préférée chez les patients présentant une mutation BRAF en cas de cancer agressif, car plus rapidement efficace que l’immunothérapie.
– L’immunothérapie peut exposer à des effets indésirables endocriniens irréversibles (thyroïdite, notamment). Les toxicités cardiovasculaires et ophtalmiques des thérapies ciblées font l’objet d’une surveillance rapprochée.
- * « European consensus-based interdisciplinary guideline for melanoma. Part 1 et 2 : Diagnostics, Treatment, update 2022 ».
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