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Le lupus systémique
PATHOLOGIE
Le lupus systémique en 4 questions
Maladie rare, le lupus systémique est une maladie auto-immune présentant une expression clinique très variable. Grave en l’absence de traitement, le pronostic dépend des complications et de certaines atteintes viscérales, notamment cardiovasculaires et rénales.
1 COMMENT SE MANIFESTE LA MALADIE ?
• Le lupus systémique est une maladie auto-immune chronique, évoluant par poussées, caractérisée par la production d’anticorps antinucléaires. Il peut toucher plusieurs organes, d’où son autre appellation de lupus érythémateux disséminé.
• Il se traduit par des manifestations extrêmement hétérogènes (variables selon les individus et souvent différentes à chaque poussée), tel le vespertilio (éruption cutanée sur le visage en forme de masque de loup – lupus en latin –, à l’origine du nom de la maladie), mais aussi diverses atteintes organiques potentiellement sévères, comme l’atteinte rénale ou neurologique.
• Les principales atteintes lupiques sont :
– l’atteinte cutanéomuqueuse (80 % des cas), caractérisée par des lésions érythémateuses, souvent sur le visage mais aussi possiblement sur les autres zones découvertes (mains, décolleté), une photosensibilité, une alopécie ou une ulcération buccopharyngée ;
– les arthralgies (75 % des cas), caractérisées par une inflammation bilatérale et symétrique des petites articulations (doigts, poignets, chevilles), mais pouvant se généraliser à toutes les articulations ;
– l’atteinte hématologique (80 % des cas) : leucopénie, lymphopénie, anémie, thrombopénie ;
– l’atteinte rénale (10 à 40 % des cas) : protéinurie, hématurie, glomérulonéphrite, insuffisance rénale ;
– l’atteinte vasculaire comme le phénomène de Raynaud (10 à 30 % des cas) ou un syndrome des antiphospholipides (40 % des cas), défini par l’association de thromboses ou d’événements obstétricaux (fausses couches, mort in utero, prématurité) et d’anticorps antiphospholipides ;
– l’atteinte cardiaque avec péricardite (18 à 40 %) ;
– l’atteinte pulmonaire : toux (15 à 40 %), pleurésie (30 à 40 % des cas) ;
– l’atteinte neuropsychiatrique (10 % des cas) : crise d’épilepsie, hallucination, dépression, somnolence, troubles de l’humeur.
• Les signes cliniques apparaissent après plusieurs années de dysfonction immunitaire, ce qui explique que des anticorps antinucléaires soient présents dans le sang avant les premières manifestations de la maladie.
2 QUELS SONT LES ÉTIOLOGIES ET FACTEURS DE RISQUES ?
Le lupus systémique résulte d’un dysfonctionnement du système immunitaire sous l’influence de facteurs génétiques, hormonaux ou environnementaux.
Facteurs génétiques
• Une atteinte familiale est observée dans 10 % des cas. Par ailleurs, chez les jumeaux monozygotes, la fréquence de la coexistence de la maladie est 5 à 10 fois plus élevée que chez les jumeaux dizygotes.
• Un déficit de certaines protéines du complément semble associé au développement du lupus. Une anomalie de l’apoptose consécutive à un polymorphisme génétique, une hyperstimulation des cellules dendritiques ou une augmentation de la production d’interféron-α contribuent à la production des anticorps antinucléaires.
Facteurs hormonaux
Le lupus systémique concerne essentiellement les femmes en période d’activité génitale. La modification hormonale induite par une grossesse peut par ailleurs déclencher un lupus. La prise d’œstrogènes modifierait les mécanismes de contrôle de l’auto-immunité.
Facteurs environnementaux
L’exposition au soleil, le tabagisme, une infection virale (Epstein-Barr, cytomégalovirus) augmenteraient le risque de poussée lupique.
Facteurs iatrogènes
Certains médicaments comme l’isoniazide, les β-bloquants (acébutolol, pindolol, etc.), les diurétiques thiazidiques, les anticonvulsivants (carbamazépine, phénytoïne, éthosuximide, etc.), les statines (pravastatine, simvastatine), l’interféron-α et, à moindre degré, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (captopril, énalapril, lisinopril) peuvent induire un lupus. L’arrêt du médicament inducteur fait généralement disparaître les symptômes.
3 COMMENT EST POSÉ LE DIAGNOSTIC ?
• Le diagnostic, pluridisciplinaire, repose sur un faisceau de signes cliniques et biologiques. L’interrogatoire du patient vise à identifier des symptômes caractéristiques.
• Un bilan immunologique permet de rechercher une concentration anormale d’autoanticorps caractéristiques et de doser le complément sérique. Un bilan rénal explore une éventuelle atteinte rénale. Des atteintes hématologiques, comme une leucopénie, une anémie, une thrombopénie ou une augmentation de la vitesse de sédimentation, sont également recherchées.
• Des examens complémentaires servent à préciser les atteintes organiques : biopsies rénales ou cutanées, imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale, ponction lombaire, radiographie osseuse, échographie-doppler veineux, artériel et cardiaque, etc.
• Une liste de critères de référence proposée par l’American College of Rheumatology et récemment actualisée par le Systemic Lupus International Collaborating Clinics (Slicc) est utilisée pour le diagnostic. Elle comporte des critères cliniques (lupus cutané, ulcérations buccales, alopécie, synovite, atteinte rénale, neurologique ou hématologique, etc.) et immunologiques (anticorps antinucléaires, anti-ADN natifs, anti-Sm, antiphospholipides, diminution des protéines du complément, etc.). La présence d’au moins quatre de ces critères permet de poser le diagnostic de lupus systémique.
• En cas de lupus systémique confirmé, la pathologie pourra être reconnue comme une affection longue durée (ALD). En revanche, la prise en charge d’un lupus cutané isolé n’entre pas dans le cadre d’une ALD.
4 COMMENT ÉVOLUE LE LUPUS ?
• La fréquence, l’intensité et la durée des phases de poussées sont imprévisibles. Les périodes de rémission peuvent durer de quelques semaines à des années, pendant lesquelles les symptômes disparaissent (certaines anomalies biologiques persistent pendant les rémissions, tandis que d’autres peuvent se normaliser).
• Sans prise en charge, chaque poussée peut entraîner une atteinte organique et, à terme, des séquelles fonctionnelles, mais également avoir un retentissement social, professionnel, familial et psychologique. Des dommages irréversibles des différents organes touchés peuvent survenir et engager le pronostic vital.
• La prise en charge médicamenteuse ne permet pas un traitement curatif du lupus. L’objectif sera de limiter et de prévenir les phases de poussées par un traitement de fond et de traiter de façon symptomatique les organes touchés afin d’éviter leurs détériorations.
PATHOLOGIE
Physiopathologie et pharmacodynamie
L’origine du lupus n’est pas clairement identifiée à ce jour. L’accumulation de mécanismes pathogéniques semble être à l’origine de la réponse auto-immune de l’organisme. Le contrôle pharmacologique de la réponse auto-immune et de l’inflammation qui en résulte est un enjeu majeur afin de limiter les complications.
PHYSIOPATHOLOGIE DU LUPUS SYSTÉMIQUE
• Une prédisposition génétique à un dysfonctionnement de l’apoptose induit une accumulation d’autoantigènes apoptotiques, c’est-à-dire de résidus cellulaires (ADN, ARN, antigènes nucléaires), qui conduit à une production de cytokines pro-inflammatoires (notamment l’interféron-α ou IFN-α, la protéine BLyS et différentes interleukines) par les macrophages et les cellules dendritiques. La présentation des autoantigènes par les cellules dendritiques est en outre accrue. L’IFN-α stimule les lymphocytes B et T. Les lymphocytes T secrètent à leur tour des cytokines, dont le tumor necrosis factor alpha (TNF-α), contribuant à stimuler la sécrétion d’autoanticorps par les lymphocytes B et induisant une inflammation tissulaire.
αLa formation, par fixation des autoanticorps aux autoantigènes, de complexes immuns active la voie classique du complément, participant à l’inflammation tissulaire et activant les cellules dendritiques, ce qui entretient en boucle l’autostimulation immunitaire.
αCertains de ces autoanticorps interagiraient directement avec des constituants tissulaires (notamment la membrane basale des glomérules), ce qui contribuerait à expliquer les lésions tissulaires et les atteintes viscérales.
αDes facteurs hormonaux (les œstrogènes étant activateurs du système immunitaire) et environnementaux (l’exposition aux ultraviolets favorisant l’apoptose excessive des kératinocytes, certains virus et médicaments étant susceptibles de dérégler le système immunitaire) contribuent à entretenir les processus auto-immuns et inflammatoires sur un système immunitaire génétiquement prédisposé.
LES TRAITEMENTS DU LUPUS
• Le traitement fait appel à des molécules ayant des propriétés anti-inflammatoires ou immunomodulatrices. Les molécules suivantes possèdent une autorisation de mise sur le marché (AMM) :
– l’hydroxychloroquine et la chloroquine, antipaludiques de synthèse de la famille des amino-4-quinoléines, bloquent la réponse lymphocytaire T et inhibent la production d’interleukines, d’IFN-α et du TNF-α.
– les glucocorticoïdes régulent la transcription de gènes codants pour des protéines impliquées dans la réaction inflammatoire. A plus forte dose, ils sont immunosuppresseurs.
– l’azathioprine est un analogue purique qui détruit les lymphocytes T.
– le cyclophosphamide, agent alkylant appartenant à la famille des moutardes azotées, provoque des modifications importantes de l’ADN responsables d’une destruction cellulaire.
– le bélimumab est un anticorps monoclonal spécifique de la protéine BLyS, qui empêche la différentiation des lymphocytes B.
• D’autres molécules sont utilisées hors AMM :
– le méthotrexate est un antifolique qui inhibe la synthèse de l’ADN ;
– le mycophénolate, immunosuppresseur de la famille des antimétabolites destinés à inhiber la synthèse des bases puriques et pyrimidiques de l’ADN, inhibe la prolifération des lymphocytes B et T ;
– le thalidomide (disponible à l’hôpital) inhibe la production de TNF-α.
THÉRAPEUTIQUE
Comment traiter le lupus systémique ?
Une prise en charge précoce et une bonne observance au traitement sont absolument nécessaires pour permettre d’améliorer la qualité de vie et éviter des atteintes plus graves, notamment rénales.
STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE
Objectifs du traitement
• La prise de charge du lupus systémique vise à assurer un confort quotidien, à préserver les fonctions vitales et la fertilité chez la femme, mais aussi à prévenir les complications dans les formes plus graves. Sur le plus long terme, l’objectif est de limiter les séquelles dues au lupus et les effets délétères des traitements.
• La prise en charge inclut une éducation thérapeutique qui insiste notamment sur l’importance de l’observance pharmacologique afin d’éviter les rechutes pouvant entraîner des formes de lupus graves.
Choix du traitement
• Le lupus systémique est une pathologie chronique qui nécessite un traitement de fond visant à prévenir les poussées en ayant le moins d’effets indésirables possibles. Ce traitement repose sur l’hydroxychloroquine pour tous les patients, quelle que soit la sévérité de la maladie. En cas de contre-indication, la chloroquine peut être utilisée.
• Les corticoïdes oraux peuvent également être ajoutés (utilisation usuelle hors AMM) à faible dose.
• En fonction de la réponse thérapeutique obtenue, ce traitement de fond sera adapté au type d’atteinte et d’autres molécules pourront être associées à l’hydroxychloroquine (ou à la chloroquine).
Atteintes cutanées
• L’hydroxychloroquine ou la chloroquine constituent le traitement de première intention du lupus systémique cutané.
• En cas d’échec, le thalidomide, employé dans le cadre d’accès compassionnel, disponible en rétrocession hospitalière, peut être proposé en association. Le méthotrexate à faible dose (utilisé hors AMM) constitue une alternative. Le thalidomide est plus rapidement efficace que le méthotrexate, mais plus toxique.
• Le bélimumab (Benlysta), anticorps monoclonal dirigé contre la protéine BLyS, constitue le traitement de troisième intention, en remplacement du thalidomide ou du méthotrexate.
• Les dermocorticoïdes, voire le tacrolimus 0,1 % (hors AMM), peuvent être ajoutés au traitement dans certaines formes de lupus cutané, mais sont davantage prescrits dans le cas d’un lupus cutané isolé.
Atteintes ostéoarticulaires
• L’hydroxychloroquine constitue le traitement de fond de première intention.
• En seconde intention, le méthotrexate (utilisé hors AMM) y sera associé à faible dose. L’efficacité des autres immunosuppresseurs n’est pas démontrée.
• Le bélimumab sera proposé en troisième intention, associé à l’hydroxychloroquine.
• Les AINS ou les antalgiques sont indiqués en cas d’arthralgies. Néanmoins, il faut tenir compte de la toxicité rénale et neurologique des AINS et être prudent quant au risque photosensibilisant de certains AINS. A noter que l’ibuprofène est contre-indiqué en cas de lupus systémique (risque de méningite aseptique).
• L’utilisation des corticoïdes, plus efficaces dans la prévention des poussées, sera privilégiée par rapport aux AINS. Des infiltrations intra-articulaires de corticoïdes peuvent être proposées en cas d’arthrites chroniques des grosses articulations ne répondant pas aux autres traitements médicamenteux.
Atteintes rénales
• Le traitement d’induction est fondé sur la corticothérapie nécessairement associée à un immunosuppresseur : mycophénolate par voie orale (CellCept), qui est actuellement le traitement de référence, ou cyclophosphamide par voie injectable, réservé à l’usage hospitalier.
• Le traitement d’entretien repose sur l’utilisation du mycophénolate ou de l’azathioprine (Imurel).
• Un traitement par bloqueurs de système rénine-angiotensine-aldostérone (inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II) sera également mis en place en cas de protéinurie supérieure à 1 g/jour ou d’hypertension artérielle associée et un traitement hypolipidémiant est recommandé si nécessaire.
Profils particuliers
Chez l’enfant et l’adolescent, le traitement du lupus systémique reposera sur les mêmes molécules que chez l’adulte. L’hydroxychloroquine et la chloroquine ont une AMM spécifique chez l’enfant de plus de 6 ans.
TRAITEMENTS
Utilisés avec AMMHydroxychloroquine et chloroquine
• En prévention des rechutes, l’hydroxychloroquine est généralement prescrite à la dose de 400 mg/jour ; une dose inférieure à 6,5 mg/kg/jour est recommandée pour limiter le risque de rétinopathie. Pour la chloroquine, une dose de 4 mg/kg/jour sera conseillée.
• Ces molécules sont bien tolérées lorsque les règles de prescription et de surveillance sont respectées. Leurs effets indésirables les plus fréquents sont bénins et réversibles : troubles gastro-intestinaux, prurit, hypoglycémie, irritabilité, insomnies.
• Certaines complications très rares peuvent survenir : angiœdème, agranulocytose, convulsions. Des complications cardiaques (risque d’insuffisance cardiaque, allongement de l’intervalle QT, etc.) peuvent également survenir plus rarement avec l’hydroxychloroquine. Un électrocardiogramme (ECG) préthérapeutique est réalisé.
• Lors d’un traitement au long cours (plus de 10 ans) et à posologie élevée, une rétinopathie (vision trouble, photophobie, défaut d’accommodation) dose-dépendante peut survenir. Un bilan ophtalmologique doit être réalisé avant la mise en route du traitement, puis annuellement au-delà de 5 ans de traitement.
Corticoïdes
• Les corticoïdes oraux sont généralement utilisés à faible dose : 5 à 10 mg/jour de prednisone ou équivalent.
• Les effets indésirables de la corticothérapie au long cours (plus de 10 jours) sont nombreux et dose-dépendants. Ils sont de types métaboliques (rétention hydrosodée, hypertension, hypokaliémie, risque de diabète, lipodystrophies, etc.), endocriniens (syndrome cushingoïde, irrégularités menstruelles), digestifs, psychiques, et entraînent une augmentation du risque infectieux. Des troubles cutanés peuvent également survenir.
• L’utilisation des corticoïdes nécessite certaines précautions d’emploi : pas d’arrêt brutal du traitement qui doit être pris le matin au repas, régime alimentaire équilibré en limitant les apports sodés, supplémentation en potassium si nécessaire. Une surveillance de la pression artérielle, un bilan lipidique, une glycémie à jeun et une surveillance ophtalmologique annuelle (risque de glaucome et de cataracte) sont recommandés.
Azathioprine
• L’azathioprine administrée à la posologie moyenne de 2 mg/kg/jour doit être prise à 2 heures de distance d’une prise de lait ou produits laitiers (diminution de l’absorption).
• Elle est fréquemment responsable de nausées (atténuées par une prise en fin de repas), ainsi que de troubles hématologiques justifiant un contrôle de la numération formule sanguine (NFS) avant la mise en route du traitement et mensuellement. Informer le patient du risque infectieux qui impose de consulter rapidement en cas de signes cliniques évocateurs (fièvre, angine, etc.). De même, tout hématome ou saignement inexpliqué doit amener à consulter.
• Plus rarement, une fièvre associée à une éruption cutanée d’origine allergique et imposant l’arrêt du traitement est décrite. Hépatite et pancréatite peuvent également survenir et nécessitent une surveillance hépatique avant la mise en route du traitement, puis trimestriellement. L’apparition d’un ictère doit amener à consulter rapidement.
Cyclophosphamide
• Le cyclophosphamide est utilisé par voie intraveineuse (ou IV) à l’hôpital selon le protocole Eurolupus (1 injection IV de 500 mg tous les 15 jours, 6 cures) pour induire une rémission. La forme orale du cyclophosphamide (Endoxan) n’est qu’exceptionnellement utilisée en raison de sa plus grande toxicité.
• Il peut induire des nausées et des vomissements potentialisés par la consommation d’alcool. Il induit une myélosuppression (surveillance de la NFS), responsable d’un risque hémorragique, d’anémie et de survenue d’infections. Une toxicité vésicale (cystite hémorragique – imposant une correcte hydratation – et tumeur de vessie), un risque de réaction allergique cutanée, de choc anaphylactique sont également rapportés.
• Un risque de stérilité est décrit, car le cyclophosphamide interfère avec l’ovogenèse et la spermatogenèse. Chez la femme, une contraception efficace est nécessaire pendant toute la durée du traitement et jusqu’à 3 mois après l’arrêt. Les hommes ne doivent pas concevoir d’enfant dans les 6 mois suivant l’arrêt du traitement.
Bélimumab
• L’initiation se fait par voie IV (réservée à l’usage hospitalier) à la posologie de 10 mg/kg à J0, J14 et J28, puis le traitement est administré en sous-cutanée (Benlysta, disponible en ville) toutes les 4 semaines.
• Les effets indésirables les plus fréquents sont : réaction au site d’injection, réaction d’hypersensibilité, risque augmenté d’infections, troubles digestifs, douleurs aux extrémités, céphalées, risque de dépression, arthralgies. Plus rarement, peuvent survenir un rash cutané, une urticaire, voire un choc anaphylactique qui justifie de réaliser les premières injections (perfusion IV et première injection sous-cutanée) sous surveillance.
• L’association avec un vaccin vivant atténué doit prendre en compte le risque de maladie vaccinale et ne doit pas être réalisée dans les 30 jours précédant l’administration de bélimumab.
• Une contraception efficace est nécessaire pendant toute la durée du traitement et jusqu’à 4 mois après l’arrêt.
Utilisés hors AMMMéthotrexate
• Le méthotrexate est utilisé par voie orale ou injectable (intramusculaire, IM, ou sous-cutanée, SC) en administration hebdomadaire à la posologie habituelle de 10 à 20 mg/semaine. Une supplémentation en acide folique 48 heures après sa prise est nécessaire pour limiter les effets indésirables.
• Ceux-ci sont dose-dépendants : agranulocytose, augmentation du risque d’infection en particulier pulmonaire, nausées, vomissements, douleurs abdominales, plus rarement alopécie. Ils justifient une surveillance rapprochée de la NFS, de la créatinine et du bilan hépatique au début du traitement, puis mensuellement. Sur le plan clinique, une surveillance pulmonaire est nécessaire et un arrêt momentané du traitement sera justifié en cas de survenue d’infection.
• En raison du risque tératogène, la prise d’une contraception orale est nécessaire pendant le traitement et jusqu’à 6 mois suivant son arrêt chez la femme et chez l’homme.
• L’association aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) devra être prudente (augmentation du risque d’hématotoxicité) et nécessite une surveillance adaptée selon la dose de méthotrexate utilisé.
Mycophénolate
• Le mycophénolate mofétil oral (CellCept) utilisé hors AMM à la posologie de 2 à 3 g/jour est actuellement le traitement de référence du lupus rénal. L’acide mycophénolique sodique (Myfortic) est également une option possible, mais les données concernant son utilisation dans la prise en charge du lupus sont très limitées. Les posologies sont spécifiques à chaque spécialité qui n’est pas bioéquivalente.
• Le mycophénolate mofétil entraîne, dans plus de 10 % des cas, des troubles hématologiques (surveillance mensuelle de la NFS), digestifs, un risque d’ulcère et de candidose et un risque d’infection pouvant justifier une interruption du traitement. Un syndrome pseudogrippal est fréquent, ainsi que des douleurs, des vertiges et une somnolence. Une perturbation du bilan hépatique est possible.
• C’est une molécule hautement tératogène qui nécessite la prise d’une contraception efficace (si possible par deux moyens) pendant toute la durée du traitement et jusqu’à 6 semaines après son arrêt. La délivrance de mycophénolate chez les femmes en âge de procréer est conditionnée par la présentation d’un formulaire d’accord de soins et de contraception conjointement signé par la patiente et le médecin et valable 1 an. Chez l’homme, l’utilisation du préservatif est recommandée pendant toute la durée du traitement et jusqu’à 90 jours après son arrêt.
Thalidomide
• Il est utilisé à la dose d’attaque de 100 à 200 mg/jour pendant 1 mois, puis 50 mg 2 à 4 fois/semaine.
• Son utilisation chez la femme en âge de procréer nécessite une contraception efficace pendant 4 semaines avant l’initiation du traitement et jusqu’à 4 semaines après son arrêt.
• Il expose au risque de somnolence (prudence avec la conduite automobile), de neuropathie (justifiant une contre-indication chez le diabétique et l’alcoolodépendant), d’aménorrhée ou d’impuissance, ainsi que de thrombose (justifiant son association à de l’aspirine aux doses antiagrégantes).
ANALYSE D’ORDONNANCE
Mme B., 32 ans, atteinte de lupus systémique depuis 3 ans
Natalia B., 32 ans, 63 kg est traitée depuis 3 ans pour un lupus systémique avec présence d’autoanticorps et manifestations cutanées et articulaires. Après l’échec d’un traitement par méthotrexate, associé à l’hydroxychloroquine, son médecin a remplacé il y a 2 mois le méthotrexate par le bélimumab. Les premières injections ont été réalisées en milieu hospitalier, puis la patiente a été formée à réaliser elle-même ses injections. Mme B. vient aujourd’hui chercher son renouvellement de traitement. Quand le pharmacien prend de ses nouvelles, Mme B. lui explique qu’elle se sent beaucoup mieux avec son nouveau traitement et lui fait part de son désir de grossesse.
QUEL EST LE CONTEXTE DE L’ORDONNANCE ?
Que savez-vous de la patiente ?
Mme B. vient depuis plusieurs années à l’officine pour la délivrance de son traitement antilupique. Elle est par ailleurs sous contraception orale progestative continue (Optimizette), que la pharmacie lui délivre régulièrement.
L’ordonnance est-elle recevable ?
Oui, le bélimumab est un médicament nécessitant une prescription initiale hospitalière annuelle réservée à certains spécialistes (dermatologues, néphrologues, rhumatologues et internistes), valable 1 an. Son renouvellement sera possible par ces mêmes spécialistes en ville.
LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?
Que comporte la prescription ?
• L’hydroxychloroquine, qui inhibe la production de cytokines pro-inflammatoires, constitue le traitement de fond de référence chez tout patient ayant un lupus systémique.
• La prednisone est un glucocorticoïde prescrit ici en traitement de fond du lupus.
• Le bélimumab est un anticorps monoclonal qui empêche la différenciation des lymphocytes B, indiqué dans la prise en charge des lupus systémiques actifs en association au traitement habituel.
Est-elle conforme à la stratégie thérapeutique ?
Oui. L’hydroxychloroquine est le traitement de fond de référence pour prévenir les poussées de lupus systémique. La prednisone n’a pas d’indication thérapeutique spécifique dans le lupus, mais les corticoïdes sont usuellement utilisés dans le traitement des maladies auto-immunes. Le bélimumab est un traitement de troisième intention qui doit être prescrit après échec d’un traitement par thalidomide ou méthotrexate, ce qui est bien le cas de Mme B.
Les posologies sont-elles cohérentes ?
• Oui. Une posologie d’hydroxychloroquine inférieure à 6,5 mg/kg/jour est recommandée en prévention des rechutes, ce qui, compte tenu du poids de Mme B., est bien respecté avec une dose de 400 mg/jour.
• En traitement de fond du lupus, la cortisone est utilisée à faible dose (5 à 10 mg/jour d’équivalent prednisone).
• Le bélimumab s’administre en sous-cutanée à raison de 200 mg/semaine.
Y a-t-il des contre-indications et des interactions médicamenteuses ?
Il n’y a aucune contre-indication et aucune interaction médicamenteuse entre les médicaments prescrits. Cependant, il convient de rappeler à Mme B. qu’elle doit proscrire toute automédication et que l’ibuprofène est contre-indiqué en cas de lupus systémique en raison du risque de méningite aseptique.
Le traitement nécessite-t-il une surveillance ?
• La prise d’hydroxychloroquine associée à la corticothérapie au long cours nécessite un suivi ophtalmologique régulier annuel (mesure de l’acuité visuelle, fond d’œil, périmétrie, OCT, etc.), au-delà de 5 ans de traitement par hydroxychloroquine, et ce pendant toute la durée du traitement. En outre, une surveillance de l’hémogramme et des fonctions musculaires est recommandée.
• La prise de corticoïdes au long cours nécessite une surveillance clinique régulière (pression artérielle, poids) et biologique annuelle (glycémie, kaliémie, bilan lipidique).
QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?
S’agissant d’un renouvellement d’ordonnance, c’est l’occasion pour le pharmacien de vérifier la bonne adhésion au traitement et la tolérance à celui-ci.
Observance
• Vérifier que Mme B. prend bien les comprimés d’hydroxychloroquine à la fin du repas. Afin d’améliorer l’observance, certains spécialistes conseillent de prendre les 2 comprimés au cours du même repas. Rappeler à Mme B. d’éviter la consommation de jus de pamplemousse, inhibiteur enzymatique, donc susceptible de majorer les effets indésirables.
• S’assurer auprès de Mme B. qu’elle continue de prendre les corticoïdes oraux le matin pour reproduire le cycle nycthéméral de la sécrétion physiologique du cortisol, de préférence au cours du petit-déjeuner pour limiter les troubles digestifs et le risque d’ulcère gastroduodénal.
• Rappeler que les stylos de bélimumab se conservent entre + 2 et + 8 °C. Le stylo peut toutefois être conservé hors du réfrigérateur et à l’abri de la lumière pendant 12 heures à une température ne dépassant pas + 25 °C. Passé ce délai, il doit être jeté s’il n’a pas été utilisé. Vérifier auprès de Mme B. qu’elle n’a pas de difficulté à pratiquer l’injection : sortir le stylo du réfrigérateur 30 minutes avant l’acte, le positionner à 90° pour injecter dans l’abdomen ou la cuisse, un premier « clic » marque le début de l’injection, un second « clic » la fin.
Tolérance
• Mme B. ne se plaint pas de troubles visuels qui pourraient faire suspecter une rétinopathie liée à l’hydroxychloroquine.
• Le pharmacien lui rappelle que pour limiter les effets indésirables dus à la corticothérapie au long cours, il est important de conserver un régime alimentaire équilibré avec 3 repas par jour sans grignotage, de limiter la consommation de sel, de sucres, et de consommer suffisamment de protéines pour pallier la fonte musculaire.
• En raison du risque d’hypersensibilité potentiellement sévère pouvant survenir le jour de l’injection de bélimumab et les jours suivants, rappeler à la patiente qu’elle doit se rendre aux urgences en cas de difficultés respiratoires, d’apparition d’œdème au niveau du visage, de la bouche, de la langue ou des lèvres ou de survenue d’une urticaire importante.
• Il convient aussi de vérifier que Mme B. connaît les signes évocateurs d’infection (fièvre, maux de gorge, toux, diarrhées, vomissements, brûlures urinaires, etc.) qui pourraient être corrélés à une immunodépression et doivent l’amener à consulter rapidement un médecin.
CONSEILS ASSOCIÉS
Accompagner le patient
Pour soutenir le patient et lui apporter des conseils adaptés, il est nécessaire de connaître l’impact de la maladie et celui des traitements sur la vie quotidienne.
LE LUPUS VU PAR LES PATIENTS
Impact psychologique
• L’acceptation et l’imprévisibilité de la maladie sont difficiles à vivre pour le patient.
• Les conséquences psychologiques et sociales sont importantes : troubles du sommeil, angoisse, troubles de l’humeur. Une dépression est souvent observée.
Impact sur le quotidien
• Même contrôlé, le lupus peut entraîner une asthénie prolongée. Cette fatigue peut avoir une forte incidence sur la vie quotidienne en altérant les relations sociales ou la réalisation de certains projets.
• Le lupus induit fréquemment une alopécie et des lésions du visage, affectant la relation au corps et les liens sociaux. Le plus souvent transitoires, elles régressent lors de la prise du traitement. La repousse des cheveux pourra être assez longue.
Impact sur la vie scolaire et professionnelle
• Pour les enfants, un protocole d’accueil individualisé (PAI) devra être mis en place.
• Les activités professionnelles avec un stress important sont à éviter et des temps de repos doivent être prévus. Si besoin, le poste de travail peut être aménagé. Certaines phases de poussées, notamment avec des douleurs articulaires trop importantes, peuvent être à l’origine d’un arrêt de travail temporaire.
À DIRE AUX PATIENTS
A propos de la maladie
• Orienter le patient vers une association de patients et, si besoin, encourager un soutien psychologique.
• S’assurer du suivi médical régulier du patient : la fréquence minimale d’examen clinique recommandée est tous les 3 à 6 mois en période de quiescence et mensuelle en cas d’atteinte viscérale grave.
• Le patient doit être capable d’identifier les signes d’une éventuelle poussée (éruption cutanée, douleurs articulaires, essoufflement, etc.). Toute modification ou aggravation de la symptomatologie doit motiver une consultation.
• Donner des conseils pour éviter les facteurs déclencheurs :
– éviter toute exposition au soleil et les lieux à forte réverbération, éviter de sortir en milieu de journée, privilégier les zones ombragées, utiliser une protection vestimentaire adaptée (vêtements longs, lunettes de soleil, chapeau, etc.), appliquer et renouveler fréquemment les produits de protection solaire, même en dehors de la période estivale ;
– recommander l’arrêt du tabac afin de diminuer le facteur de risque cardiovasculaire et le risque de majoration des poussées ;
• Rappeler aux patientes qu’une contraception est strictement indispensable avec certains traitements du fait de leurs effets tératogènes (cyclophosphamide, méthotrexate, mycophénolate, thalidomide). Par ailleurs, les grossesses de patientes lupiques doivent être planifiées avec les médecins : en effet, il est recommandé que le lupus soit en période de rémission depuis au moins 6 mois afin d’éviter tout risque de fausse couche ou de prématurité.
A propos du traitement
• Insister sur la nécessité d’une bonne observance sur le long cours en rappelant au patient que l’objectif est de prévenir les atteintes organiques graves, notamment rénales.
• Vérifier l’adaptation des modalités d’administration selon les contraintes socioprofessionnelles et les préférences des patients afin d’améliorer l’adhésion thérapeutique.
Hydroxychloroquine/chloroquine
• Les comprimés sont à prendre à la fin des repas par voie orale. Attendre si possible 2 heures avant la prise de topiques gastro-intestinaux.
• Des troubles digestifs passagers peuvent subvenir et nécessiter une réduction de posologie par le médecin. Consulter en cas de troubles perceptibles du rythme cardiaque et de troubles visuels. Insister sur l’importance du suivi ophtalmique a minima annuel en cas de traitement prolongé (plus de 5 ans).
Corticoïdes
• En cas de corticothérapie au long cours, des mesures hygiénodiététiques doivent être mises en place afin de limiter les effets indésirables : régime hyposodé et pauvre en sucres d’absorption rapide, afin de freiner la prise de poids et le risque de diabète cortico-induit, renforcer la consommation de protéines, assurer un apport suffisant en vitamine D et pratiquer une activité physique régulière (adaptée à l’état du patient).
• Insister sur l’importance de la diminution progressive des posologies à l’arrêt d’une corticothérapie pour prévenir le risque de rechutes de lupus et d’insuffisance surrénalienne.
Azathioprine
• Prise avec un aliment en cas de troubles digestifs, mais éviter l’administration au moins 1 heure avant ou 2 heures après l’ingestion de lait ou de produits laitiers.
• Apprendre au patient à reconnaître des signes infectieux (fièvre, maux de gorge, etc.) qui doivent faire craindre une immunodépression et imposent une consultation. Insister sur l’importance de la mise à jour vaccinale avant le début du traitement.
Bélimumab
• L’injection doit être faite sous la peau de l’abdomen ou de la cuisse chaque semaine, le même jour. En cas de changement du jour de traitement, une dose sera injectée le nouveau jour choisi – même si le délai entre la précédente et la nouvelle injection est de moins de 1 semaine. Le traitement continuera selon le nouveau calendrier hebdomadaire établi à partir du nouveau jour d’administration.
Mycophénolate mofétil
• Rappeler aux femmes en âge de procréer l’obligation de présenter le formulaire d’accord de soins et de contraception (valable 1 an) lors de la délivrance.
• La dose journalière est répartie en 2 prises distinctes, matin et soir.
Méthotrexate
• Insister sur le rythme d’administration hebdomadaire (et non journalier) et écrire le jour de prise sur le conditionnement.
• Les comprimés sont à avaler avec un verre d’eau à heure fixe au moment ou en dehors des repas.
LE LUPUS SYSTÉMIQUE
Délivreriez-vous ces ordonnances ?
OUI, l’ordonnance pourra être délivrée mais pas l’ibuprofène. En effet, il existe un risque de méningite aseptique qui contre-indique son utilisation en cas de lupus systémique (en revanche, l’ibuprofène n’est pas contre-indiqué en cas de lupus cutané isolé). Le pharmacien conseillera à Mme A. du paracétamol à la place de l’ibuprofène.
NON, l’ordonnance n’est pas délivrable, car il y a une interaction médicamenteuse contre-indiquée entre l’hydroxychloroquine et l’escitalopram en raison d’un risque majoré de survenue de torsades de pointes par allongement de l’intervalle QT. Le traitement de fond du lupus ne pouvant être interrompu, le pharmacien prend contact avec le prescripteur qui propose de revoir rapidement la patiente pour modifier sa prescription d’antidépresseur. Un allongement de l’intervalle QT est également rapporté avec d’autres familles d’antidépresseurs et leur utilisation avec l’hydroxychloroquine doit être prudente et nécessite une surveillance par ECG.
NON, l’ordonnance antibiotique ne peut être délivrée car il existe une interaction médicamenteuse contre-indiquée entre le méthotrexate et le triméthoprime. En effet, le triméthoprime peut entraver l’élimination rénale du méthotrexate et majorer sa toxicité. Le pharmacien prend donc contact avec le médecin afin de faire modifier la prescription antibiotique et suggérer une fluoroquinolone (avec arrêt temporaire de la pratique sportive), qui est par ailleurs le traitement recommandé en première intention dans l’infection urinaire masculine. Il informe également le médecin traitant qui suit habituellement M. F. de l’infection urinaire qui pourrait être révélatrice d’une leucopénie sous-jacente due au méthotrexate. Le médecin traitant prescrit à M. F. un contrôle de numération de formule sanguine à réaliser dans la journée et demande que les résultats lui soient communiqués le jour même. Il fixe à M. F. un rendez-vous le lendemain afin de déterminer la conduite à tenir vis-à-vis du traitement antilupique, conditionnée par le résultat du bilan sanguin.
EN CHIFFRES
– Entre 30 000 et 60 000 patients lupiques en France.
– Prévalence en France métropolitaine : 47/100 000, soit environ 1 personne sur 2 000.
– Prévalence plus élevée aux Antilles : 94/100 000 en Guadeloupe et 127/100 000 en Martinique.
– Sex-ratio : 9 femmes pour 1 homme.
– Taux de survie à 10 ans de l’ordre de 95 % sous surveillance et traitement.
– Pic de l’âge de survenue : entre 30 et 39 ans.
– Nombre de cas chez les jeunes de 19 ans : 2 % des cas.
L’ESSENTIEL
– Le lupus systémique est une maladie auto-immune chronique évoluant par poussées, qui se déclare principalement chez des femmes entre 30 et 39 ans.
– De nombreux organes peuvent être atteints.
– Le diagnostic repose sur la combinaison de critères cliniques et biologiques et peut n’être confirmé qu’après plusieurs mois.
TÉMOIGNAGE : DANIELLE, 62 ANS, RETRAITÉE, TRÉSORIÈRE DE L’ASSOCIATION LUPUS FRANCE
« Il y a 22 ans, je suis allée donner mon sang. Peu de temps après, j’ai reçu un appel de l’établissement français du sang qui m’a demandé de venir faire des analyses car des anticorps anormaux avaient été retrouvés dans mon prélèvement. Par la suite, mon médecin m’a diagnostiquée comme « lupique ». J’ai eu de la chance, car la maladie ne s’était pas encore déclarée ! J’ai donc pu être traitée avant les premières manifestations. J’ai tout de même connu quelques périodes difficiles. La fatigue engendrée par la maladie n’est pas évidente à gérer que ce soit au niveau professionnel ou au niveau familial. De plus, j’ai pris beaucoup de poids à la suite de la prise de corticoïdes. A présent, je bénéficie d’un traitement stable qui permet de contrôler ma maladie et de ne pas trop souffrir des effets indésirables des médicaments. »
Anticorps antinucléaires
Anticorps dirigés contre les noyaux cellulaires, notamment contre l’ADN natif.
Anticorps antiphospholipides
Anticorps dirigés contre les phospholipides (constituants des membranes plasmatiques cellulaires).
Protéines du complément
Ensemble de protéines sériques et membranaires impliquées dans le système immunitaire inné.
Anticorps anti-Sm
Anticorps dirigés contre les antigènes nucléaires solubles (Sm correspond aux deux premières lettres du nom du premier patient chez lequel ces anticorps ont été retrouvés).
Apoptose
Mort cellulaire programmée aboutissant à la fragmentation de la cellule en corps apoptotiques (formés de matériel nucléaire), éliminés par les macrophages.
BLyS
Blymphocyte stimulator, cytokine activant les lymphocytes B.
VIGILANCE !
Certaines contre-indications doivent être connues du pharmacien :
Chloroquine et hydroxychloroquine : rétinopathie et allaitement*.
Corticoïdes : hypersensibilité, état infectieux, viroses en évolution, ulcère gastroduodénal évolutif, état psychotique non contrôlé.
Thalidomide et mycophénolate : grossesse et allaitement.
Méthotrexate : insuffisance hépatique sévère, insuffisance rénale sévère, alcoolisme, anémie, thrombopénie, neutropénie et lymphopénie sévères, grossesse et allaitement.
Cyclophosphamide : insuffisance rénale sévère, insuffisance médullaire sévère, infection urinaire aiguë, cystite hémorragique préexistante, obstruction des voies urinaires, grossesse et allaitement.
* Selon le Centre de référence sur les agents tératogènes (Crat), le passage dans le lait maternel de ces molécules étant très faible, l’allaitement est cependant possible.
LE POINT DE VUE DU
« Les grossesses lupiques sont dans la plupart des cas possibles à condition de suivre une stricte observance thérapeutique »
PR ARSÈNE MEKINIAN
Service de médecine interne, hôpital Saint-Antoine (Paris), Centre de compétence des maladies auto-immunes, filière de santé des maladies auto-immunes et auto-inflammatoires rares (FAI2R).
Quelle est la contraception la mieux adaptée à une patiente lupique ?
Du fait de l’effet tératogène de certains immunosuppresseurs, mais aussi parce qu’il s’agit d’une situation à risque de poussée grave, notamment rénale, la grossesse doit être impérativement programmée et une contraception obligatoire s’impose en cas de lupus grave non contrôlé. Les œstrogènes étant susceptibles de modifier le contrôle de l’immunité et pouvant induire des poussées lupiques, les recommandations de prescription françaises contre-indiquent les œstroprogestatifs dans toutes les formes de lupus. Les autres options contraceptives (progestatifs seuls, dispositif intra-utérin, contraception mécanique) peuvent être proposées. Les données de littérature scientifique sont cependant rassurantes quant à l’utilisation d’œstroprogestatifs dans les lupus peu actifs et dans les formes non sévères.
Quel message diffuser aux patientes lupiques vis-à-vis de la grossesse ?
Une grossesse lupique peut être autorisée en intégrant deux paramètres : les risques pour la mère et ceux pour le fœtus (retard de croissance, voire décès in utero). Les contre-indications formelles à la grossesse sont peu nombreuses : lupus sévère actif, séquelles graves (insuffisance rénale chronique, hypertension artérielle pulmonaire sévère) ou antécédent de prééclampsie sévère associée à un syndrome des antiphospholipides réfractaire en dépit d’un traitement bien conduit. Mais chez une patiente avec un lupus parfaitement contrôlé, la grossesse est possible, à condition d’être programmée et suivie dans un centre expert. Il faut faire passer aux patientes un message concordant entre médecin et pharmacien : l’observance thérapeutique est primordiale pendant toute la grossesse, elle permet de diminuer les risques encourus par la mère et le fœtus et de rejoindre les chiffres de population générale. L’hydroxychloroquine reste la pierre angulaire du traitement, éventuellement associée à la cortisone ou à un immunosuppresseur autorisé pendant la grossesse (azathioprine ou tacrolimus).
L’ESSENTIEL
– Le traitement de fond du lupus systémique repose sur l’hydroxychloroquine à la posologie moyenne de 400 mg/jour. Un suivi ophtalmologique annuel est nécessaire au-delà de 5 ans de traitement.
– En cas d’échec, d’autres molécules peuvent être utilisées avec ou sans AMM et selon les différentes atteintes : azathioprine, cyclophosphamide, mycophénolate, méthotrexate et thalidomide.
– L’ibuprofène est contre-indiqué en cas de lupus systémique.
Accès compassionnel
Nouveau cadre d’accès aux médicaments utilisés hors AMM, dans lequel ont basculé en juillet 2021 les médicaments utilisés sous recommandation temporaire d’utilisation.
Lipodystrophie
Redistribution des cellules graisseuses dans l’organisme, qui peuvent soit manquer (lipoatrophie) ou être présentes en excès (lipohypertrophie).
QU’EN PENSEZ-VOUS ?
Mme B. demande au pharmacien si elle pourrait arrêter sa contraception orale pour envisager une grossesse.
1) Oui, c’est tout à fait possible maintenant que son nouveau traitement de fond semble avoir stabilisé le lupus.
2) Non, pas sans avoir au préalable planifié la grossesse avec le médecin.
Réponse : Le site du Centre de référence sur les agents tératogènes (Crat) rappelle que l’hydroxychloroquine et la corticothérapie pourront être poursuivies pendant la grossesse. Le bélimumab ne doit être utilisé durant celle-ci que si le bénéfice justifie le risque potentiel pour le fœtus. Mme B. doit prendre un avis auprès de son médecin spécialiste pour réévaluer le traitement avant d’envisager une grossesse. Elle doit, en attendant, poursuivre sa contraception actuelle. Il fallait donc choisir la deuxième proposition.
QU’EN PENSEZ-VOUS ?
Mme B. pratique son injection de bélimumab le lundi, mais elle demande au pharmacien de lui rappeler la conduite à tenir en cas d’oubli.
1) Il faut rattraper l’injection dès l’oubli constaté.
2) Il ne faut pas rattraper la dose oubliée et attendre le lundi suivant pour faire l’injection.
Réponse : Si une dose est oubliée, elle doit être administrée dès que possible. Mme B. pourra ensuite reprendre son traitement au jour habituel ou démarrer un nouveau calendrier hebdomadaire à partir du jour d’administration de la dose oubliée, si ce nouveau jour lui convient mieux. Si l’oubli est constaté au moment de l’injection de la dose suivante, il faut alors injecter une seule dose et ne pas rattraper la dose oubliée. Il fallait donc choisir la première proposition.
OCT (tomographie en cohérence optique)
Technique d’imagerie non invasive et sans contact, utilisant la réfraction de rayons laser et permettant de visualiser des structures anatomiques en coupe, avec une précision proche de celle de l’histologie.
Périmétrie
Examen ophtalmologique permettant de cartographier le champ visuel du patient.
QUESTION DE PATIENT
« Avec mon lupus, puis-je être vacciné contre le Covid-19 ? »
« Les autorités de santé recommandent aux patients atteints de lupus et à leur entourage de se faire vacciner contre le Covid-19. Les patients sous corticothérapie prolongée à fortes doses ou sous immunosuppresseurs sont même prioritaires. La vaccination peut entraîner un très faible risque thrombotique, que ce soit par un vaccin à ARN messager ou à vecteur viral, mais le risque de poussées lupiques semble exclu. »
L’ESSENTIEL
– L’adhésion thérapeutique est primordiale pour éviter une reprise active de la maladie et limiter les complications organiques.
– De nombreux traitements du lupus sont tératogènes : s’assurer de la mise en œuvre d’une contraception efficace.
– Insister sur les risques infectieux liés aux immunosuppresseurs et sur l’importance de la mise à jour des vaccinations avant le traitement.
– Donner des conseils diététiques pour limiter les effets indésirables de la corticothérapie au long cours.
EN SAVOIR PLUS
Association Lupus France
Association de patients constituée de bénévoles répartis dans toute la France diffusant des informations accessibles au plus grand nombre, soutenant les patients et organisant des rencontres de malades lupiques.
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