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J’ai moins envie, c’est grave ?
Parler de libido. Si le tabou s’étiole, la baisse de désir reste difficile à aborder, pour les patients et les professionnels. Si on vous accorde cette confiance, la gêne ne doit pas vous faire louper le coche.
Baisse de libido quèsaco ?
Baisse de libido quèsaco ?
Un trouble du désir
Une baisse de libido est un déficit ou une diminution de l’intérêt sexuel, ou anaphrodisie, qui se caractérise essentiellement par un manque de fantasmes et d’initiative. Il est considéré comme pathologique quand il se poursuit sur le long terme et/ou est à l’origine d’une souffrance prononcée ou de difficultés relationnelles. Il est alors classé dans le manuel des troubles mentaux sous le terme « Désir sexuel hypoactif », ou DSH.
C’est fréquent
La baisse de libido est l’une des causes les plus fréquentes de consultations en sexologie. Ce trouble concernerait de 12 à 28 % des individus de manière occasionnelle et 4 % de manière fréquente. Environ 3 % sont touchés par un DSH(1). C’est la première plainte d’ordre sexuel chez les femmes, devant les troubles d’orgasme. Environ 40 % d’entre elles en périménopause et 50 % en post-ménopause seraient affectées(2).
Il est multifactoriel
Le désir sexuel repose sur deux composantes, biologique et psycho-active, qui interagissent. Il existe des causes organiques (troubles thyroïdiens, déficit en testostérone, maladies neurologiques…), mais d’autres facteurs l’influencent négativement : âge, troubles psycho-affectifs, croyances, conflits familiaux, substances (neuroleptiques, hormones, alcool…), écrans, fatigue… La prise en charge est multiple : hygiène de vie, psychothérapie, thérapie de couple, traitements si besoin.
Il entre dans vos missions
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la santé sexuelle comme « un état de bien-être physique, émotionnel, mental et social en matière de sexualité ». Comme pour tout autre trouble sanitaire, votre mission officinale d’éducation, de conseil et d’orientation s’applique.
Coup de balai en préambule
Gare aux représentations
La libido est un sujet sensible qui touche à l’intime, à la performance, à l’image de soi et pâtit de fortes représentations socio-culturelles.
→ « Ça ne touche que les femmes ». Si elles semblent plus concernées, c’est surtout qu’elles en parlent plus aisément. L’image qu’une baisse de libido masculine est anormale et cache une maîtresse, voire une homosexualité refoulée, perd du terrain dans l’inconscient collectif. Ce motif de consultation flambe chez l’homme.
→ « Ce n’est pas normal ! » La libido n’est pas un automatisme. Une baisse passagère est fréquente et normale chez tous.
→ « C’est après 50 ans ». Les jeunes sont de plus en plus concernés, en raison notamment des diktats de « performance » de la pornographie et de la dépendance aux écrans, dont l’impact est montré(3).
Pas de transferts
« À son âge, quelle idée de s’inquiéter de sa libido ! », « Des besoins sexuels normaux, c’est quoi ? »… Les questions sexuelles peuvent résonner avec nos situations ou nos croyances. Il faut savoir mettre sa vie perso et les transferts en sourdine !
Ne pas rater le coche
La plupart des personnes qui souffrent de problèmes sexuels aimeraient mais n’osent en parler. Aborder le sujet est une marque de confiance à ne pas négliger.
Pister les occasions
→ Prescriptions de lubrifiants, de médicaments de troubles de l’érection… ou pathologies qui peuvent influer sur la libido : dépression, maladie de Parkinson, sclérose en plaques…
→ Plainte : directe,« J’ai la libido en berne », « Dans mon couple, ce n’est pas top en ce moment », ou détournée, « J’ai une baisse de forme », « Je voudrais des vitamines », « Avec l’âge, tout fout le camp »…
Adopter la bonne attitude
→ Sans intrusion. Laisser s’installer une conversation anodine pour créer un climat propice et éviter un blocage avant de proposer une aide : « Je peux me permettre de vous poser quelques questions intimes ? »
→ En confidentialité. Voilà un sujet qui ne peut se passer d’un endroit à l’abri des oreilles indiscrètes, sans l’imposer pour éviter de stigmatiser : « Je vous propose un espace plus calme pour discuter ».
→ Questionner utile. Se souvenir qu’on parle de santé sexuelle et non de sexualité. Inutile de connaître le nombre de partenaires ou les pratiques favorites.
→ Des mots choisis. Les mots techniques – désir hypoactif, anaphrodisie… –, pratiques pour cacher sa gêne, risquent surtout d’être incompris. Adoptez un vocabulaire grand public, non vulgaire, idéalement calqué sur celui du patient. Parlez de « baisse de désir », de « manque de forme sexuelle », de « panne sexuelle »…
Gérer la gêne si besoin
→ L’accepter. Être gêné n’a rien d’anormal, pour vous et vos patients. Respectez les silences et hésitations. Ils se dissipent au fil de la conversation et peuvent être un point d’accroche : « Je respecte votre difficulté à en parler… »
→ Pas de boutades. Tentant pour briser la glace, le ton « potache » n’est pas productif et risque de montrer à tort un manque d’intérêt. « Allons, un peu de Viagra/du gingembre et ça repart ! » est à éviter…
→ User des détours. Des questions détournées facilitent l’accroche et informent sur le contexte : « Tout va bien dans votre couple ? », « Vous êtes en forme en ce moment, sur tous les plans ? », « De la fatigue dans vos activités habituelles ? »
→ Amorcer « technique ». L’abord sous un angle médical est à la fois « pro » et « anti-gêne » : « L’atteinte nerveuse dont vous souffrez peut affecter la vie sexuelle », « La testostérone diminue avec l’âge »…
Inciter à consulter
À la différence de l’anorgasmie ou de troubles de l’érection, une majorité de personnes souffrant d’une baisse de libido pense que ce n’est pas du ressort médical. Pourtant, son caractère multifactoriel nécessite une exploration. Votre rôle est d’en faire prendre conscience.
Savoir dépister
→ Les critères de gravité : souffrance marquée, persistance, signes sous-jacents de dépression, de conflit, mésusages de médicaments (psycho-actifs…)…
→ Une plainte spontanée car quelqu’un qui a osé lever le tabou est en souffrance.
→ L’alibi « iatrogénie » : les personnes tendent à incriminer leurs médicaments (antidépresseurs…) alors qu’ils sont rarement seuls en cause. Avec un risque démontré d’arrêt brutal sans avis.
Savoir en parler
→ Dédramatiser. Rappelez, chiffres à l’appui, que la baisse de libido est fréquente pour déstigmatiser le sujet : « Le désir n’est pas un automatisme pour lequel on appuie sur un bouton. Il faut accepter que, parfois, cela fonctionne moins bien. »
→ Sans banaliser. Ajoutez que la baisse de désir peut aussi cacher une cause physique ou psychologique : « Seule leur prise en charge peut améliorer la situation ».
→ Parler « sexo ». Orientez vers un sexologue, le plus compétent dans la prise en charge de ces troubles, en démystifiant son rôle : « C’est un professionnel formé et compétent. La baisse de libido est parmi les principaux motifs de consultation ». Si c’est plus facile dans un premier temps, le médecin généraliste peut être consulté.
Quand c’est non !
Si le trouble est passager ou si les patients hésitent à consulter, votre conseil peut répondre à une attente immédiate.
Du bon sens
À la base de toute prise en charge, les conseils d’hygiène ont aussi l’avantage de montrer votre intérêt : du repos, de l’activité physique, un bon sommeil, peu d’alcool, qui désinhibe à faible dose mais bloque à forte dose, moins de stress…
Un complément alimentaire
C’est une alternative intéressante car si leur efficacité n’est pas toujours démontrée, ils répondent à une demande et peuvent éviter de se tourner vers des produits plus forts, y compris sur des marchés parallèles, potentiellement dangereux.
→ Pour qui ? En particulier les jeunes à risque d’usage détourné et les personnes angoissées par la performance.
→ Comment ? Sans scepticisme, « On n’y croit pas trop mais… », « Je ne garantis pas l’effet… », l’effet attendu par le patient est important, même modéré ou psychologique. Comme une alternative complémentaire : « En plus des règles d’hygiène, ce produit peut être une aide ponctuelle intéressante ».
→ Une porte ouverte. Le patient a fait un premier pas, encouragez-le dans sa démarche : « N’hésitez pas à m’en reparler/à en discuter avec le médecin si vous en éprouvez le besoin… »
(1) Sexual problems among women and men aged 40-80 y : Prevalence and correlates identified in the Global study of sexual attitudes and behaviors, E. O. Laumann, A. Nicolosi, D. B. Glasser and al., International Journal of Impotence Research, 2005, 17 : 39-57.
(2) Troubles du désir sexuel féminin, base bibliographique Urofrance : urofrance.org
(3) Les hommes et les problèmes d’érection : le grand tabou, enquête Ifop pour Charles.co, 20 mai 2019.
Orienter vers un sexologue
Attention, les formations et diplômes des sexologues, dont le titre est non réglementé, présents sur Internet ou dans les Pages jaunes ne sont pas tous équivalents… Pour faire le tri :
• les médecins généralistes travaillent souvent avec des professionnels qu’ils peuvent recommander ;
• certains centres hospitaliers proposent des consultations dédiées dans les services d’urologie ou d’endocrinologie ;
• consulter les annuaires par région des syndicats/fédérations : Syndicat national des médecins sexologues (www.snms.org), Syndicat national des sexologues cliniciens (www. snsc.fr), Fédération française de sexologie et de santé sexuelle (www.ff3s.fr)…
Et en ligne ? Il est parfois plus facile pour certains patients de parler au téléphone ou par écran interposé. Des téléconsultations sont proposées par certaines mutuelles et nombre de sexologues, dont certains animent des plateformes spécialisées (Sexoblogue, Charles.co…).
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