Eczéma : quels conseils donner au comptoir ?

Comment le pharmacien peut-il participer au soutien des patients souffrant d’eczéma ?

Le grand public et parfois certains professionnels de santé n’ont pas toujours conscience de l’impact de la maladie sur les patients. Or, l’eczéma est loin de se limiter à la présence de plaques sur la peau. En effet, le quotidien des personnes affectées est dicté par les contraintes liées au traitement et à la prévention des poussées, mais également par les démangeaisons et les troubles du sommeil… En plus d’être une oreille compréhensive et bienveillante, le pharmacien, en tant que professionnel de santé facilement accessible, doit bien sûr rappeler les modalités d’administration des traitements à ses patients. Il doit notamment les rassurer sur les effets indésirables des dermocorticoïdes, qui sont exceptionnels, et absolument proscrire certaines phrases de son vocabulaire lors de la délivrance telles que « Lavez-vous bien les mains après l’application de votre crème » ou encore « Je ne vous mets pas tous les tubes que le médecin vous a prescrits car ça fait vraiment beaucoup ! ». La corticophobie est encore trop présente dans la population et il est important que le pharmacien ait un discours rassurant à propos de l’application des corticoïdes par voie locale. La délivrance de plusieurs tubes de crème par mois ne doit inquiéter ni le patient ni le pharmacien. Ce dernier peut d’ailleurs donner des repères pratiques au patient quant à la quantité de crème à appliquer. L’unité phalangette, par exemple, qui consiste à déposer un trait continu de crème (issue d’un tube avec un orifice de 5 mm) sur toute la longueur de la dernière phalange de l’index d’un adulte, soit 0,5 g de produit, permet de traiter une surface de peau correspondant à la surface des deux mains adultes.

Quels conseils d’accompagnement et de prévention ?

Le pharmacien pourra conseiller au patient de tenir un agenda des poussées avec le nombre de tubes utilisés à chaque poussée ou chaque mois, de prendre des photos des plaques, de noter les potentiels facteurs déclenchant les crises… Ces informations peuvent aider le dermatologue, qui voit rarement en consultation le patient en pleine poussée en raison du délai de prise de rendez-vous, à mieux prendre en charge la maladie. Le pharmacien peut également orienter les patients vers des programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP), notamment après des échecs thérapeutiques qui sont parfois liés à des problèmes d’observance. Enfin, le pharmacien a un rôle important à jouer dans la prévention des poussées, laquelle passe par l’hydratation de la peau. En effet, les émollients permettent de reconstituer la barrière cutanée mais on ne peut prédire ni l’efficacité ni la tolérance de telle ou telle marque, or, ils sont souvent relativement coûteux. L’idéal pour les patients est donc de pouvoir tester les produits à partir d’échantillons fournis par le pharmacien.

L’eczéma en chiffres

• En France, entre 2 et 2,5 millions d’adultes, 850 000 enfants âgés de 6 à 11 ans, et 700 000 adolescents âgés de 12 à 17 ans sont atteints d’eczéma. Parmi les patients adultes, 65 % sont des femmes.
• Environ 90 000 à 100 000, soit 6 % des patients adultes, souffrent d’eczéma atopique sévère, la forme la plus invalidante de la maladie. La prévalence, d’environ 4 % dans la population adulte, a plus que doublé ces trente dernières années, ce qui s’expliquerait en partie par la diminution de l’exposition aux agents infectieux (excès d’hygiène), entraînant un dérèglement du système immunitaire.
• L’eczéma peut débuter dans la petite enfance et s’atténuer, voire disparaître, à l’âge adulte. Toutefois, il persiste à l’âge adulte dans environ 10 % des cas et se déclare chez près de 20 % des patients après l’âge de 20ans.
• Le risque de développer un eczéma atopique est de 50 % sil’un des parents est atteint, et de 80 % si les deux parents sont atteints. Environ 30 % des nourrissons porteurs de dermatite atopique présentent un asthme à partir de l’âge de 2 ans.

Zoom sur l’Association Française de l’Eczéma

Elle est composée de 350 membres, dont une vingtaine très actifs, et est accompagnée de nombreux experts – dermatologues, psychologues, pédiatres, allergologues, etc. L’association a pour but d’aider les personnes atteintes d’eczéma atopique et d’eczéma de contact à lutter contre l’indifférence et l’isolement. Son site, associationeczema.fr, très complet, regorge d’informations sur la maladie, d’outils (fiches explicatives, livres, témoignages), de liens vers des applications mobiles et d’accès à différents médias (Facebook, YouTube, etc.). L’association organise aussi de nombreux événements dont, en 2024, pour marquer la 10e édition de la Journée nationale de l’eczéma, en plus de conférences sur la pathologie et un état des lieux des avancées de la recherche, la création, par et avec des patients et des professionnels de santé, d’une pièce de théâtre, À fleur de peau, qui s’est jouée au Théâtre de la Tour Eiffel, à Paris, le 1er juin 2024.