Cas de comptoir : un inquiétant corticoïde
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Cas de comptoir : un inquiétant corticoïde

Publié le 25 août 2023
Par Florence Piussan
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C’est la vie de tous les jours. Celle du comptoir. Une problématique par patient et une volonté de répondre au mieux aux besoins de chacun. Rarement simple ! Et si on profitait de l’été pour réactiver les bons réflexes à avoir face à un cas d’iatrogénie ? Aujourd’hui, la maman d’Enora s’inquiète de la durée du traitement par dermocorticoïde de sa fille.

Le cas

Enora, 18 mois, souffre de dermatite atopique sur le corps. Sa mère vient à l’officine avec une ordonnance du dermatologue : Tridésonit, 1 application le soir sur les lésions jusqu’à disparition puis arrêt (maximum 1 tube/mois), Lipikar Baume AP+ à appliquer matin et soir et Lipikar huile lavante pour la toilette. La maman explique : « Ces poussées d’eczéma à répétition sont pénibles et, à chaque fois, il faut de la cortisone… n’est-ce pas toxique pour elle à la longue ? ».

L’analyse du cas

Tridésonit crème contient du désonide, dermocorticoïde d’action modérée (classe II), destiné à être appliqué sur le corps et le visage. Il est indiqué en première intention chez le nourrisson dans le traitement des poussées inflammatoires liées à la dermatite atopique. Les dermocorticoïdes ont une efficacité élevée et rapide de par leur action anti-inflammatoire, immunosuppressive et antimitotique. La corticophobie chez les patients est très fréquente (60 à 80 %), en particulier chez les parents. Elle est liée à une crainte de survenue d’effets indésirables. Cette crainte est responsable d’une sous-utilisation des traitements et d’échec thérapeutique. La résorption des dermocorticoïdes est très faible et les données récentes montrent qu’ils peuvent être utilisés avec sécurité aux posologies habituellement prescrites chez l’enfant. Les effets indésirables des dermocorticoïdes sont dose-dépendants. Ils sont liés à la puissance de la molécule, à la durée du traitement, à la surface cutanée traitée, à l’âge et à l’état de la peau. Les effets indésirables observés sont le plus souvent cutanés : atrophie cutanée (rare chez l’enfant), télangiectasie, vergetures… La peau du visage est particulièrement sensible. Des manifestations systémiques – syndrome de Cushing, insuffisance surrénalienne et retard de croissance – sont décrites mais non observées aux posologies recommandées. Un risque exceptionnel de glaucome et de cataracte existe lors d’une application prolongée sur les paupières. Un respect des posologies, des modalités d’administration et de la forme galénique (à adapter à l’âge du patient et à la zone d’application) et un contrôle du nombre de tubes utilisés par mois permettent de prévenir la survenue d’effets indésirables.

L’attitude à adopter

La pharmacienne explique que les dermocorticoïdes sont très efficaces lors des poussées de dermatite atopique et qu’en respectant les bonnes règles d’utilisation le risque de survenue d’effets indésirables est quasiment nul pour Enora. Elle lui précise d’appliquer la dose de produit que lui a indiquée le médecin, de préférence le soir après le bain, et d’arrêter le traitement quand la rougeur a totalement disparu. Elle ajoute de ne pas oublier d’appliquer l’émollient qui permet d’hydrater la peau et de bien poursuivre son application après la poussée pour prévenir une récidive.

À retenir

Une corticophobie, fréquente chez les parents, peut être à l’origine d’un échec de traitement de la dermatite atopique par sous-utilisation des dermocorticoïdes, dont les effets indésirables sont rares aux posologies thérapeutiques pédiatriques habituelles. Ce cas de comptoir est extrait du Cahier Formation Iatrogénie « Nourrissons et enfants » paru dans Le Moniteur des pharmacies n°3242 du 13 octobre 2018.