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Quid de l’efficacité des vaccins anti-Covid-19 ?

Publié le 19 décembre 2020
Par Marianne Maugez
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C’est par communiqués de presse que les laboratoires pharmaceutiques ont d’abord annoncé les résultats intermédiaires des tests de leur vaccin. Depuis, des données ont été publiées dans des revues scientifiques. Mais de nombreuses interrogations persistent.

Les essais cliniques lancés fin juillet ont livré leurs premiers résultats, avec à la clé des taux d’efficacité déclarée impressionnants. Si chaque laboratoire a développé son propre vaccin avec des technologies différentes, les méthodes de calcul d’efficacité sont semblables. « Le principe est identique pour tous les vaccins même hors pandémie de coronavirus. En phase 3 de test, les laboratoires mettent en place un essai clinique randomisé en faisant appel à des volontaires sains », explique Sybil Pinchinat, directrice générale d’Axonal-Biostatem et membre de l’Association française des entreprises de la recherche clinique (Afcros). Chaque groupe étudié est séparé en deux sous-groupes, ce qui permet d’administrer soit le candidat vaccin, soit un placebo. « Il s’agit d’essais en simple ou en double aveugle pour ne pas influencer le comportement des volontaires qui pourraient être tentés, même inconsciemment, de modifier leurs habitudes de vie, ce qui constituerait un biais pour l’étude. » Car après l’injection, les volontaires reprennent leur vie, leur travail, leurs déplacements… comme s’ils n’avaient pas reçu d’injection. L’efficacité de chaque vaccin est calculée par comparaison du nombre de patients tombés malades dans le groupe vacciné avec celui du groupe qui a reçu un placebo.

Des biais qui interrogent

Bien que les données du laboratoire AstraZeneca aient été confirmées par la revue The Lancet et celles de Pfizer-BioNTech par le New England Journal of Medicine, il faut prêter attention aux critères qui ont été étudiés et à ceux qui ne l’ont pas été. « Par essence, l’essai clinique randomisé comporte des biais. Il est fort probable que des critères d’inclusion à l’essai aient été mis en place. Même si on essaie de sélectionner des volontaires représentatifs de la population, on exclut les femmes enceintes, les enfants, les personnes présentant certaines comorbidités », précise Sybil Pinchinat. Ces questions ne pourront trouver réponse que lors de la vaccination de la population générale. « Commencera alors la phase de pharmaco-épidémiologie pour voir comment le vaccin se comporte en vie réelle ». La surveillance rapprochée de la population permettra de vérifier les données sur l’efficacité dans toutes les catégories de population et sa durée. Car le manque de recul par rapport aux essais cliniques ne permet pas de déterminer si l’immunité vaccinale acquise assurera ou non une protection à long terme.

Des essais à suivre

Pour tenter de répondre à cette dernière question, plusieurs pistes sont envisagées. Le laboratoire Roche a ainsi annoncé un partenariat avec l’américain Moderna pour évaluer dans le temps la réponse immunitaire au vaccin, en quantifiant régulièrement les anticorps présents chez les patients vaccinés lors des essais cliniques. En France, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), via sa plateforme Covireivac, va lancer courant décembre trois essais cliniques vaccinaux afin de compléter les données scientifiques et de tenter de répondre aux questions portant sur la durée de l’immunité.

Toutes les données collectées vont permettre de recalculer les taux d’efficacité. En fonction des réponses, on peut supposer à terme des indications variables selon les vaccins. « Si un vaccin est plus efficace qu’un autre chez les plus de 65 ans, par exemple, on choisira celui-là lors de la vaccination des seniors », détaille Sybil Pinchinat. A contrario, si l’efficacité est équivalente pour tous les vaccins, on imagine aisément que les critères de prix et de logistique seront privilégiés…

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