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Les sulfamides hypoglycémiants

Publié le 26 mars 2024
Par Nathalie Belin
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Les sulfamides hypoglycémiants sont le plus souvent associés à d’autres antidiabétiques. Leur dispensation doit s’accompagner de messages de prévention concernant notamment le risque d’hypoglycémie.

De quoi s’agit-il ?

• Les sulfamides hypoglycémiants, appelés aussi sulfonylurées, sont une classe de médicaments regroupant 4?molécules : le glibenclamide, le gliclazide, le glimépiride et le glipizide à libération prolongée. Administrés par voie orale, ils sont métabolisés au niveau hépatique puis éliminés dans les urines. En cas d’insuffisance rénale, il existe un risque d’accumulation.

• Le répaglinide, unique représentant de la classe des glinides, est considéré comme apparenté aux sulfamides en raison de son mécanisme d’action similaire à celui des sulfamides hypoglycémiants.

Il est essentiellement éliminé par voie biliaire. Seule une fraction réduite, moins de 8 %, est éliminée dans les urines.

Comment agissent-ils ?

• Sulfamides hypoglycémiants et répaglinide sont des insulinosécréteurs. Ils stimulent la sécrétion d’insuline par le pancréas, indépendamment de la glycémie, en se fixant sur les récepteurs des cellules bêta des îlots de Langerhans. D’où un risque d’hypoglycémie (voir effets indésirables plus bas). Ce mode d’action est complémentaire de celui de la metformine qui, elle, améliore la sensibilité des tissus à l’insuline.

• Au niveau extra-pancréatique, les sulfamides facilitent la captation du glucose par les tissus périphériques, foie, muscles, tissus adipeux, ce qui contribue à diminuer la glycémie.

• Sulfamides et répaglinide diminuent d’environ 1 % l’hémoglobine glyquée HbA1c, soit une efficacité du même ordre que la metformine(1). Ils n’ont pas de bénéfice démontré sur les complications cardiovasculaires du diabète.

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Quelles indications ?

• Les sulfamides sont indiqués dans le diabète de type 2 après échec des mesures hygiénodiététiques et en complément de l’alimentation, la réduction pondérale et l’activité physique. Ce sont des traitements de 2e intention indiqués, selon la Haute autorité de santé (HAS)(2), en monothérapie en cas de contre-indication à la metformine ou en association à celle-ci (bithérapie de référence) si la monothérapie par metformine ne permet pas d’atteindre l’objectif glycémique.

• Toutefois, des recommandations plus récentes ne les privilégient plus en bithérapie de référence. Pour la Société française de diabétologie, du fait du risque de prise de poids et d’hypoglycémie, d’autres bithérapies que metformine/sulfamide (ou glinide) peuvent être privilégiées selon le profil du patient, notamment en cas de pathologies cardiovasculaires ou rénales associées(3).

Quels effets indésirables ?

• Le risque principal est lié aux hypoglycémies qui sont dose-dépendantes. Certaines peuvent être sévères et engager le pronostic vital. Le risque est moindre avec le répaglinide du fait notamment de sa demi-vie courte. Les patients âgés, insuffisants rénaux – pour lesquels les posologies doivent, selon le cas, être adaptées – et/ou hépatiques, ou mangeant peu ou sautant des repas doivent particulièrement être mis en garde. Attention aussi aux situations à risque, comme une activité physique inhabituelle ou non compensée par une collation, ou certaines interactions médicamenteuses.

• Les sulfamides hypoglycémiants peuvent induire une prise de poids de 2 à 5 kg(1).

• Éruptions cutanées à type d’urticaire, toxidermies sévères et troubles hématologiques et hépatiques sont rares, mais une surveillance de la numération formule sanguine et des enzymes hépatiques peut être demandée par le médecin.

Quelles contre-indications ?

• Les sulfamides et apparentés sont contre-indiqués en cas de diabète de type 1, d’acidocétose et d’insuffisance hépatique sévère. Les sulfamides le sont aussi en cas d’insuffisance rénale sévère et d’hypersensibilité aux sulfamides en général (voir Info+ ci-contre).

• Le glipizide LP est contre-indiqué chez les patients de plus de 65 ans en raison d’un risque d’hypoglycémie prolongée.

• Ces molécules contre-indiquées en cas de grossesse au cours de laquelle la prise en charge du diabète repose sur les mesures hygiéno-diététiques et l’insuline. Toutefois, selon le Centre de référence sur les agents tératogènes (Crat), l’utilisation du glibenclamide est possible en particulier au cours des 2e et 3e trimestres.

Y a-t-il des interactions ?

• Deux associations contre-indiquées : sulfamides hypoglycémiants/miconazole (Daktarin, Loramyc), et répaglinide/gemfibrozil (Lipur). Le miconazole et le gemfibrozil sont des inhibiteurs enzymatiques qui augmentent les concentrations du sulfamide et du répaglinide.

• Plusieurs associations déconseillées : l’alcool en particulier avec le glibenclamide et le glipizide, en raison d’un risque d’effet antabuse et d’une augmentation du risque d’hypoglycémie. Les sulfamides sont déconseillés en association avec le danazol, diabétogène. En raison d’un risque d’augmentation de concentration plasmatique, le répaglinide est déconseillé avec la ciclosporine, le déférasirox (Exjade), le triméthoprime et le selpercatinib (Retsevmo).

• Des précautions d’emploi : l’association à d’autres inhibiteurs enzymatiques (autres azolés, érythromycine…) nécessite une surveillance glycémique renforcée. L’association aux bêtabloquants, y compris en collyre, peut masquer les signes d’hypoglycémie (tachycardie…) induites par ces hypoglycémiants. L’association à des médicaments susceptibles de perturber la glycémie tels corticoïdes, chlorpromazine, IEC, bêta-mimétiques… nécessite de renforcer la surveillance glycémique.

Quelles modalités de prise ?

• Les sulfamides se prennent en une à trois fois par jour avec des posologies d’instauration progressive. Le gliclazide à libération modifiée (LM) et le glipizide à libération prolongée (LP) s’administrent en une seule prise quotidienne.

• Du fait de sa demi-vie courte, le répaglinide s’administre en plusieurs prises. Il est préféré aux sulfamides en cas de prise alimentaire irrégulière car moins provocateur d’hypoglycémie.

• Quelle que soit la molécule, les prises doivent se faire juste avant ou pendant un repas pour éviter une hypoglycémie. Attention ! Ne pas prendre le sulfamide ou le répaglinide si un repas est sauté. En cas d’une seule prise quotidienne, elle se fait en général le matin ou à midi si le petit-déjeuner n’est pas suffisamment consistant et riche en glucides.

Quels conseils de plus ?

• Rappeler les signes traduisant une hypoglycémie : fatigue, faim, pâleur, sueurs, tremblements, tachycardie, nervosité, confusion, céphalées… Indiquer les facteurs la favorisant : alcool, effort physique, repas sauté ou insuffisant.

• Rappeler comment se « resucrer » : ingérer 15 g de glucides d’absorption rapide, soit 3 morceaux de sucre ou un verre de jus de fruit ou de soda non « light », suivis de glucides d’absorption lente pour éviter une récidive d’hypo-glycémie : pain, biscotte ou biscuits secs.

(1) Extrait de l’argumentaire scientifique de la RBP : Stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2, chapitre : État des lieux des traitements médicamenteux du contrôle glycémique. HAS 2013.

(2) Stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2. Recommandation de bonne pratique. HAS 2013.

(3) Prise de position de la Société francophone du diabète (SFD) sur les stratégies d’utilisation des traitements anti-hyperglycémiants dans le diabète de type 2 – 2021.

Info+

→ Structure chimique : les sulfamides sont des molécules chimiques organiques à base d’azote, d’oxygène et de soufre parmi lesquelles on retrouve des diurétiques tels l’hydrochlorothiazide ou le cotrimoxazole, un anti-infectieux.