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Vendre sans céder à l’affectivité

Publié le 22 mars 2014
Par Francois Pouzaud
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L’aspect psychologique est primordial pour réussir une transmission d’entreprise tant il s’agit d’une période difficile à gérer. Il convient donc de bien la préparer pour pouvoir vendre dans les meilleures conditions.

Personne n’est à l’abri d’états d’âme. Lors d’une transaction, il n’est pas rare que l’affectif s’en mêle et que le cédant, attaché à son entreprise, souhaite la laisser en de bonnes mains, à un digne successeur, sans que celui-ci ait fait forcément la meilleure offre. Il arrive aussi que le cédant refuse une offre d’achat parce qu’il a le sentiment que l’acquéreur n’a pas le profil pour reprendre sa pharmacie et qu’il ne passera pas bien auprès de la clientèle ou de l’équipe officinale (à plus forte raison s’il lui annonce qu’il va restructurer le personnel). « Une fois dans ma carrière, j’ai rencontré un pharmacien qui a refusé de vendre sa pharmacie à un jeune diplômé parce qu’il estimait que le prix de cession auquel il pouvait prétendre était trop cher et préférait attendre que les prix baissent », raconte un ancien responsable de cabinet de transactions.

Pour Philippe Becker, directeur du département pharmacie de Fiducial Expertise, les vendeurs ne font plus aujourd’hui de sentiments, compte tenu d’un nombre plus faible d’acquéreurs sur le marché. Il faut avoir également les nerfs solides quand le marché n’est pas au meilleur de sa forme. L’attentisme des acquéreurs devient parfois insupportable si le cédant est obligé de vendre rapidement. D’autres, au contraire, vont attendre en espérant que la conjoncture se redresse, mais, dans l’intervalle, la fiscalité de la cession peut changer et s’alourdir et, au final, le capital réalisé sera moindre. Le vendeur doit être psychologiquement prêt à prendre un pari sur l’avenir.

Etre d’emblée au prix du marché

La problématique de l’évaluation objective du fonds est l’un des principaux freins à la transmission. L’attachement du cédant à son fonds ne permet pas toujours d’avoir une analyse lucide et une valorisation réaliste du prix. D’où la nécessité de faire appel à un conseil. « Les vendeurs ont du mal à admettre que le juste prix de leur fonds peut être inférieur à celui auquel ils l’ont acheté, souligne Philippe Becker. Aujourd’hui, ils doivent accepter les moins-values ou ne pas vendre ». Aussi, conseille-t-il aux vendeurs de mettre d’emblée leur officine au prix du marché. « Ils doivent apprendre à gérer une déception à court terme en adaptant leur prix immédiatement, plutôt que d’avoir une affaire qui reste trop longtemps à la vente et qui, de fait, n’intéressera plus personne (acquéreurs et agences de transactions). »

Rendre son fonds cessible

Le cédant doit aussi réfléchir à sa stratégie avant cession. Souvent, quand l’âge avance, la tendance de beaucoup de titulaires est de finir en « roue libre ». « Le fait d’engager des investissements importants (par exemple l’installation d’un automate) quelques années avant la cession ne fera pas vendre plus cher, prévient Philippe Becker. En revanche, le cédant doit veiller à maintenir son outil de travail en bon état, réduire au maximum ses frais de personnel (quitte à renoncer à son propre confort) et, au besoin, se battre avec son bailleur pour que le loyer n’augmente pas trop. Il ne faut pas perdre de vue que les affaires qui se vendent le mieux sont aussi les plus rentables. » En conclusion, une cession se prépare bien en amont, entre deux et cinq ans à l’avance. Ne serait-ce que, aussi, pour bien préparer sa retraite.

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