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Le mystère de la licence libérée
A peine parue, la loi nouvelle concernant les regroupements pose déjà des problèmes d’interprétation. Sur le gel des licences notamment, le législateur est resté très imprécis sur la notion de « licence libérée », laissant de facto des questions en suspens quant au risque d’ouverture ultérieure d’une nouvelle officine après regroupement.
Cette notion de « licence libérée » prévue par la loi est quasiment passée inaperçue. Et pour cause. Le texte ne fait référence à cette notion qu’une seule fois, à l’alinéa 4 de l’article L. 5125-15 du Code le la santé : « A la suite d’un regroupement dans la même commune ou dans des communes limitrophes, les licences libérées doivent être prises en compte au sein de la commune où s’effectue le regroupement, pour une durée minimum de 5 ans. » Cette notion est pourtant essentielle car elle confère un certain degré de protection aux pharmaciens qui aimeraient se regrouper. La mise en application de cette notion pourrait conduire à des cas extrêmes.
Exemple : dans une commune de 9 500 habitants avec deux officines existantes, les quotas retenus par l’article L. 5125-11 (voir tableau p. 69) laissent la possibilité d’une ouverture d’officine par transfert. Toute la question est de savoir si, dans le cas où la distance entre ces deux officines rend possible leur regroupement selon les conditions posées par l’article L. 5125-3*, on peut considérer qu’il existe deux licences libérées, en l’occurrence celles des deux pharmacies de cette commune ayant sollicité le regroupement. Dans l’affirmative, le regroupement, si l’on considère par ailleurs les quotas qui sont retenus par l’article L. 5125-11, fera échec à un transfert ultérieur dans cette commune.
Dans cette hypothèse très protectrice, « les licences libérées sont prises en compte dans le quorum de la commune où s’effectue le regroupement pendant un délai de 5 ans, et il y a lieu d’imputer à cette commune une troisième licence, celle du lieu d’installation de l’officine regroupée », considère Serge Veillard, de la société ARTCO (Aide au regroupement, au transfert et à la création d’officines). Toujours dans cette hypothèse, pendant 5 ans, la commune comprendrait trois licences ; par conséquent, l’unique officine de cette commune pourrait, selon Serge Veillard, desservir ses 9 500 habitants. Durant cette période, l’ouverture d’une seconde officine ne serait possible que si la population venait à dépasser 13 000 habitants.
Après 5 ans, le dégel peut être décidé par le préfet s’il estime que la pharmacie regroupée ne permet pas ou plus de répondre aux besoins en médicaments de la population : l’ouverture d’une seconde officine, voire d’une troisième, serait alors possible dans cette commune qui perdrait alors le bénéfice de la prise en compte des deux licences libérées. En revanche, si le préfet estime que la desserte de la population est optimale, les demandes d’ouverture par transfert (ou création) restent bloquées. La période de cinq ans serait donc une durée minimum de gel des licences (voir 1er cas ci-contre).
D’autres failles
En cas de regroupement de deux officines de communes limitrophes, le même raisonnement s’applique ; le lieu de regroupement des officines est l’emplacement de l’une d’elles ou un lieu nouveau situé dans cette même commune d’accueil. Un premier problème se pose pour la commune limitrophe de laquelle une pharmacie est partie : le texte ne prévoit pas de geler une réouverture dans cette commune où la licence a été libérée puis affectée à la commune d’accueil du regroupement (voir 2e cas page précédente).
Un second problème survient à la suite du regroupement de deux officines de communes non limitrophes car, dans ce cas, la notion de gel ne s’applique pas. L’officine regroupée n’est donc pas à l’abri d’un risque d’ouverture par transfert. Le bénéfice du regroupement présenterait dans ce cas peu d’intérêt (voir 3 e cas).
Ces dispositions récentes n’ont donné lieu à ce jour à aucune jurisprudence ou circulaire ministérielle qui puisse éclairer notre lanterne.
« Sur ces problèmes pratiques, ce sont plus des questionnements que des solutions affirmées qui peuvent être posés, avec à l’esprit le fait que toute interprétation ne doit pas s’en tenir strictement à une lecture littérale du texte », précise Alain Fallourd, avocat, sans infirmer ni confirmer l’analyse sur les « licences libérées ». « On ne peut pas plus affirmer avec autorité qu’en cas de regroupement de deux officines situées dans des communes limitrophes, les deux licences libérées devront nécessairement profiter à la commune d’accueil, poursuit Alain Fallourd. La licence est en effet attachée à un emplacement à l’intérieur d’une commune déterminée. » C’est pourtant ce qu’affirme l’article L. 5125-15**.
* Article L. 5125-3 du CSP : « Le regroupement ne peut être accordé que s’il n’a pas pour effet de compromettre l’approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente de la commune ou du quartier d’origine. »
** Article L. 5125-15 du CSP : « Plusieurs officines peuvent, dans les conditions fixées à l’article L. 5125-3, être regroupées en un lieu unique, à la demande de leurs titulaires. Le lieu de regroupement de ces officines est l’emplacement de l’une d’elles, ou un lieu nouveau situé dans la commune d’une des pharmacies regroupées. A la suite d’un regroupement dans la même commune ou dans des communes limitrophes, les licences libérées doivent être prises en compte au sein de la commune où s’effectue le regroupement pour appliquer les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l’article L. 5125-11. Le représentant de l’Etat dans le département peut, après avis des syndicats représentatifs de la profession et du conseil compétent de l’ordre des pharmaciens, mettre fin à cette prise en compte à l’issue d’un délai de cinq ans à compter de la délivrance de l’autorisation de regroupement si les conditions prévues par le premier alinéa de l’article L. 5125-3 ne sont plus remplies. »
Les autres dispositions à connaître
– Le nouveau texte rend possibles des regroupements entre officines sans limitation de nombre et de périmètre géographique.
– Les regroupements sont prioritaires sur les transferts et créations.
– Le lieu de regroupement de ces officines est l’emplacement de l’une d’elles, ou un lieu nouveau situé dans la commune d’une des pharmacies regroupées (article L. 5125-15).
– Le représentant de l’Etat peut imposer une distance minimale entre l’emplacement prévu pour la future officine et l’officine existante la plus proche.
– Le représentant de l’Etat peut, en outre, en vue d’assurer une desserte optimale de la population résidant à proximité de l’emplacement de la future officine, déterminer le ou les secteurs de la commune dans lesquels l’officine devra être située (article L. 5125-6).
– La pharmacie dont la création, le transfert ou le regroupement a été autorisé doit être effectivement ouverte au public au plus tard à l’issue d’un délai d’un an, qui court à partir du jour de la notification de l’arrêté de licence, sauf prolongation en cas de force majeure (article L. 5125-7).
– Sauf cas de force majeure constaté par le représentant de l’Etat dans le département, une officine issue d’un regroupement ne peut pas être transférée avant l’expiration d’un même délai de 5 ans. Ce délai court à partir de la notification de l’arrêté de licence (article L. 5125-7).
– Dans le cadre d’un regroupement dans un lieu nouveau, la nouvelle officine ne pourra être effectivement ouverte au public que lorsque les officines regroupées auront été fermées (article L. 5125-15).
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