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Changer de méthode de valorisation

Publié le 8 mai 2010
Par Francois Pouzaud
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Les prix de marché restent éloignés de ceux, théoriques, issus de raisonnements purement économiques. Leur inéquation par rapport à une valorisation par l’excédent brut d’exploitation risque d’aboutir à une impasse financière en l’absence d’une croissance de l’activité. Serait-il temps de changer de méthode ?

Depuis 10 ans, la rentabilité des pharmacies ne cesse de baisser et les prix de vente grimpent. Dans ce contexte, et en considérant les perspectives économiques à venir, guère réjouissantes, certains plaident pour changer de méthode de valorisation pour déterminer le prix de cession, lié non plus au chiffre d’affaires mais à l’EBE. « Il y a urgence à valoriser la pharmacie selon l’approche économique », martèle depuis plusieurs années Olivier Desplats, expert-comptable du cabinet Flandre Comptabilité Conseil (réseau CGP).

Jusqu’à ces dernières années, les officines se sont remboursées grâce à la croissance de l’activité. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas : les faibles progressions de CA en 2009 obligent à lancer un appel à la raison. Olivier Desplats propose donc de valoriser les pharmacies en multiple de l’EBE, une fois déduite la rémunération du titulaire (30 000 € net par an).

Prenons le cas de trois pharmacies, de tailles différentes, réalisant respectivement 800 k€, 1,2  M€ et 1,8 M€ de CA HT, comme le montre le tableau ci-dessous.

La rentabilité de l’officine dépend étroitement de sa taille et, plus précisément, de son volume d’activité. La plus petite officine dégage un EBE de 84 k€, la moyenne un EBE 128 k€ et l’officine la plus importante 217 k€. Après déduction de la rémunération du pharmacien, l’EBE retraité ressort respectivement à 54 k€, (6,75 % du CA HT), 98 k€ (8,76 %) et 187 k€ (10,38 %). Le prix de cession moyen de 90 % du CA TTC est retenu pour ces trois officines, soit 749  k€ pour la première, 1,123 M€ pour la deuxième et 1,685 M€ pour la troisième. L’hypothèse retenue pour la valorisation selon une approche économique est de 7 fois l’EBE retraité, soit un prix de cession théorique décoté dans les trois cas de 378 k€ (45 % du CA HT), 686 k€ (55 %) et 1,309 M€ (70 %).

Un manque d’apport de 300 k€ au minimum

Ce tableau fait ressortir les échéances de remboursement annuelles de l’emprunt et l’écart de faisabilité (manque ou excédent de trésorerie après que le titulaire a prélevé sa rémunération pour vivre, payé ses impôts et remboursé ses emprunts). Dans cette évaluation, Olivier Desplats retient cinq hypothèses de crédit. En toute logique, l’écart de faisabilité vire au rouge d’autant plus facilement que le volume d’activité est faible et que l’endettement est important. L’équilibre financier est atteint pour des quotités de crédit – part que le crédit représente par rapport à l’investissement initial – différentes selon la taille de l’officine, allant de 60 % à 80 %. « Tout achat à un prix supérieur, notamment au prix du marché, devrait faire l’objet d’un apport complémentaire de 300 k€ pour la première officine, de 393 k€ pour la deuxième et de 333 k€ pour la troisième, souligne l’expert-comptable. Il est indispensable que les logiques économiques et financières se rejoignent car le pharmacien ne peut pas emprunter plus que ce qu’autorise l’approche économique par l’excédent brut d’exploitation. »

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Acheter au prix du marché nécessite donc soit un apport significatif pour contrebalancer l’écart de faisabilité, soit une croissance de l’activité et de la rentabilité pour absorber cet écart.